LDH-66 – Pyrénées Orientales

+ 25 % de pesticides en 10 ans en France, l’objectif était de – 50 % – Communiqué de France Nature Environnement

mercredi 08 janvier 2020

Communiqué de France Nature Environnement

Après un an d’attente, les chiffres 2017-2018 sur l’évolution de la consommation des pesticides de l’agriculture française viennent enfin d’être rendus publics. Ils indiquent une augmentation inédite de 25% par rapport à 2009*. L’objectif initial du plan Ecophyto était pourtant de réduire de 50% l’usage des pesticides pour 2018… Pour France Nature Environnement, ces chiffres sonnent le glas du plan Ecophyto tel qu’il existe.

Réduire de 50 % les pesticides en 10 ans ? « décision précipitée » arguait le lobby des pesticides.

Réduire drastiquement les doses de pesticides en France : tel était l’un des ambitieux objectifs issu du Grenelle de l’Environnement, en 2008. Les chiffres étaient clairs. La France se donnait 10 ans pour réduire de 50 % les pesticides et déployait pour cela le « plan Ecophyto ». Bonne nouvelle, l’indicateur retenu est le nombre de doses de pesticides, appelé NODU, et non les volumes, ce qui permet de mieux prendre en compte les nouveaux produits plus concentrés développés par les fabricants.

À l’époque, l’UIPP (Union des Industries pour la Protection des Plantes), le lobby des pesticides, s’indignait de « la précipitation dans laquelle le Grenelle pousse les exploitants agricoles ». 12 ans plus tard, force est de constater que les vendeurs de pesticides n’ont aucunement souffert de cette pseudo-précipitation, bien au contraire.

Consternant bilan : + 25 % de pesticides utilisés en 10 ans.

Les chiffres qui viennent de tomber illustrent l’ampleur de l’immobilisme des gouvernements successifs face aux pesticides : entre 2008 et 2018, les doses de pesticides utilisées en agriculture n’ont pas été réduite mais ont bel et bien augmenté de… 25 %. Insensé.

« Le gouvernement ne semble pas assumer l’échec du plan de réduction de l’usage des pesticides et continue sur la mauvaise pente », réagit Claudine Joly, en charge des questions pesticides à France Nature Environnement. Pour camoufler cet échec, l’infographie officielle du Ministère de l’Agriculture publiée le 2 janvier a tout bonnement masqué l’indicateur d’utilisation des pesticides, appelé NODU (nombre de doses utiles). « Ces faits et cette hausse alarmante de la consommation de pesticides questionnent sur le poids des lobbys dans notre pays. Plus de 600 millions d’euros d’argent public ont été investis sur 10 ans pour réduire la consommation de pesticides en France dans le cadre d’Ecophyto ! Il est plus que temps de tirer le bilan des blocages structurels dans le monde agricole et d’aller vers des solutions de soutien plus affirmées à la transition agroécologique et à l’agriculture biologique ».

Pourtant des aides à l’agriculture biologique… diminuent

Les orientations prises pas certaines agences de l’eau – suite à des ponctions du Ministère de l’économie et des finances – ne vont malheureusement pas dans le sens de la transition agricole : certaines ont diminué les aides allouées à l’agriculture biologique. Pourtant, les résultats des fermes expérimentales du plan Ecophyto, les fermes DEPHY, et les travaux récents de l’INRA sur des pratiques agricoles alternatives aux herbicides ont prouvé qu’il est possible de réduire efficacement cet usage des pesticides. Une efficacité tant technique qu’économique. Face à cette augmentation de l’utilisation des pesticides et les alertes du monde scientifique, le ras-le-bol de la société civile s’intensifie, à juste titre. Il est plus que temps de revoir en profondeur le plan Ecophyto afin que les objectifs affichés soient rapidement et concrètement atteints.

* Nodu zones agricoles : + 25% en moyenne triennale glissante 2009-2011 / 2016-2018 (moyenne sur 3 années afin de lisser les fluctuations annuelles)

Télécharger le communiqué en PDF

La carte des luttes contre les grands projets inutiles et dévastateurs

Voir sur la carte interactive du site Reporterre , la liste de tous les grands projets inutiles et dangereux qui se multiplient aujourd’hui en France et cherchez dans votre région, vous en trouverez sûrement au moins un. C’est aussi une carte des luttes contre ces projets. Venez  rejoindre le collectif local de citoyens. La LDH-66 participe aux mobilisations locales à Perpignan.

Dans les Pyrénées Orientales quatre projets concernés :

  • Agrandissement du port de PortPort-Vendres (transport)
  • Sauvegarde du train de nuit de la Ligne ferroviairePerpignan
    (transport)
  • Centrale de bitume Usine Saint-Estève  (Industrie)
  • Agrandissement du port de Port-la-Nouvelle en bordure du département de l’ Aude
    (Transport)

Publié sur Reporterre  le quotidien de l’écologie

Aéroports, fermes-usines, barrages, entrepôts, centres commerciaux… Les grands projets inutiles et dévastateurs prolifèrent en France. Face à eux, des collectifs citoyens se mobilisent pour défendre leur environnement. Reporterre publie une carte de toutes ces luttes locales, réalisée avec Le Mouvement et Partager c’est sympa. Elle servira d’outil pour celles et ceux qui veulent empêcher la destruction du monde.

La Carte des luttes a été présentée et discutée mardi 7 janvier sur l’émission La Terre au carré, animée par Mathieu Vidard, sur France inter, avec la journaliste de Reporterre Laury-Anne Cholez et la sociologue Lea Sebastien.

LA CARTE DES LUTTES, RÉVÉLATEUR DES CONTESTATIONS LOCALES

« Vous n’arriverez jamais au bout. » Julien Milanesi, maître de conférence en sciences économiques à l’université Toulouse 3 ne cherche pas à nous décourager mais à dresser un constat. Recenser toutes les luttes contre les projets inutiles en France est une gageure. La preuve en un chiffre : depuis le début du projet, on nous a signalé 444 projets inutiles et imposés via ce formulaire. Malgré quelques doublons et erreurs, cela laisse imaginer l’ampleur de la contestation sur tout le territoire.

Dans cette nouvelle version de la carte des luttes, réalisée avec l’ONG de mobilisation citoyenne Le Mouvement et l’équipe de vidéastes de Partager c’est sympa, vous trouverez 200 projets sélectionnés en fonction des critères détaillés dans notre premier article.

Un travail de tri et de vérification qui n’a pas empêché certains mécontentements. Exemple avec la rénovation urbaine d’un quartier de Vénissieux, dans la banlieue de Lyon. L’un des élus nous a écrit pour signifier son étonnement de voir sa commune sur la carte. Il estime que les adversaires du projet ne sont que « quelques opposants politiques pas du tout représentatifs de la population ». Le collectif local n’est bien évidemment pas de cet avis. « Mercredi 6 novembre, nous avons réussi à mobiliser près de 200 personnes, sans compter les enfants, pour l’assemblée générale du conseil de quartier. Ce qui n’est absolument jamais arrivé ici. Un article comme celui sur la carte des luttes est un réconfort pour les habitants. »

« Aujourd’hui, les promoteurs ne peuvent plus bétonner en paix »

Mais, notre but n’est pas d’apporter du réconfort aux gens, mais de décrire une réalité. Celle d’une France où des centaines de collectifs se mobilisent contre des projets nocifs pour le climat et la justice sociale. Celle d’une société qui remet en cause le paradigme de la croissance héritée des Trente Glorieuses. Le mythe du progrès ne fait plus recette, surtout dans ces territoires délaissés par les politiques publiques et par la start-up nation qui envahit les hypercentres urbains. « Les gens ne se font plus berner sur les conséquences de la mondialisation et de la compétitivité. Ils attendent aujourd’hui des relocalisations, des infrastructures de proximité et un développement endogène du territoire », explique Léa Sébastien maîtresse de conférences en géographie à l’université Toulouse 2 et coautrice avec Julien Milanesi du livre Résister aux grands projets inutiles et imposés (éditions Textuel).

Cette vivacité des combats met en lumière une écologie populaire, ancrée dans un territoire. « Un véritable mouvement social décentralisé encore inconscient de lui-même et qui mériterait d’avoir un réseau sur lequel s’appuyer », estime Julien Milanesi.

En France, l’histoire des luttes a commencé dans les années 1970 avec de vastes projets d’aménagement du territoire — comme dans le Larzac — ou énergétique — comme la centrale de Plogoff, en Bretagne. Plus récemment, on pense bien sûr à Notre-Dame-des-Landes. Mais, depuis une dizaine d’années, on assiste à une réelle montée en puissance des contestations à plus petite échelle. Quelques hectares de forêt menacés suffisent parfois à enflammer les esprits. « Il y a quelque chose de nouveau, clairement. Aujourd’hui, les promoteurs ne peuvent plus bétonner en paix. Ce n’était pas le cas il y a vingt ans », estime Julien Milanesi.

Internet a également changé la donne, tout le monde pouvant facilement se mettre en réseau et accéder à la connaissance. Un phénomène qui n’est pas étranger à la méfiance quasi systématique envers tous les porteurs de projets, qu’ils soient privés ou institutionnels. « Les élus sentent bien qu’il ne peuvent plus faire passer ce qu’ils veulent comme avant. Ils organisent alors des procédures de démocratie participative sans jamais interroger le bien-fondé du projet ou sa viabilité », continue le chercheur. Les associations jouent le jeu quelque temps, avant de se lasser et d’entrer pleinement dans la bataille. Parfois, ce n’est pas l’infrastructure elle-même qui est mise en cause, plutôt la façon dont elle est imposée par un acteur extérieur. C’est par exemple le cas avec les éoliennes, combattues farouchement lorsqu’elles sont construites sans concertation locale par un industriel, mais bien acceptées quand elles sont imaginées par des coopératives citoyennes.

Le choc émotionnel face à une appropriation soudaine du territoire

Pour Julien Milanesi, il s’agit aussi de remettre en question l’imaginaire de la vitesse, de la mobilité, de la performance technique comme le prouvent ces luttes contre les extensions d’aéroports ou la construction de lignes à grande vitesse : « Se déplacer de plus en plus vite est une donnée perçue comme naturelle. Alors que c’est un imaginaire social récent. Nos ancêtres vivaient dans un espace de 30 kilomètres autour de leur lieu de naissance. » Cette exigence de vitesse se double d’une fracture sociale car ceux qui profitent du TGV sont surtout les populations urbaines, cadres CSP+. Or, ces lignes à grande vitesse sont particulièrement coûteuses : 25 millions d’euros du kilomètre. « C’est de l’argent public cannibalisé qui n’ira pas vers les infrastructures du quotidien. Tous ces financements sont mis au service des urbains pressés et pas des navettes locales pour les moins fortunés », observe Julien Milanesi.

L’élément déclencheur de l’engagement reste le choc émotionnel face à une appropriation soudaine du territoire. Après analyse de la situation, les concernés mettent en commun leurs inquiétudes. Ce sont souvent des néophytes, qui n’y connaissent pas grand-chose et passent leurs soirées à potasser des documents administratifs rébarbatifs. « Je me rappelle d’un projet de décharge dans la Beauce où les gens se rendaient à des conférences et étaient devenus des experts en déchets », raconte Léa Sébastien. Ils développent ainsi des compétences techniques, juridiques, et administratives. « Souvent, ils sont choqués par ce qu’ils découvrent et par la façon arbitraire dont les décisions sont prises », poursuit Léa Sébastien. Avec le temps et la montée en expertise, les militants se politisent et inventent des propositions crédibles. Une véritable résistance éclairée. L’un des exemples les plus connus est le projet Carma, alternative au projet (abandonné en partie) d’EuropaCity.

« Nous avons plein de collectifs opposés aux centres commerciaux qui nous contactent pour nous demander de venir faire Carma chez eux, s’exclame Alice Le Roy, membre du collectif Non à EuropaCity. Beaucoup se posent les mêmes questions que nous : comment protéger les terres agricoles, conserver la souveraineté alimentaire, empêcher la perte de la biodiversité, créer des emplois pour demain… » Carma a revitalisé la lutte en séduisant des urbanistes, des architectes et des jeunes vivant à Gonesse, qui peuvent se projeter dans un autre avenir que celui vendu par les promoteurs immobiliers. Un nouvel imaginaire de la résilience, de la sobriété, de la décroissance que tous ces collectifs sont en train d’élaborer.

Après l’échec de la COP-25 : revue de presse

Publié sur courrierinternational  Publié le 16/12/2019 – 06:02

Changement climatique

Échec “préoccupant” pour la COP25

Malgré deux jours de prolongations, les près de 200 pays réunis à Madrid pour le sommet de l’ONU sur le climat n’ont fait aucune avancée notable, accouchant d’un texte final d’une “grande faiblesse”. Un échec “préoccupant”, s’alarment les associations de défense de l’environnement.

“Il est temps d’agir”, claironnait le slogan de la COP25, qui s’est achevée dimanche à Madrid. Las ! Le sommet a été un “bide”, déplore Le Soir“un échec pour le multilatéralisme et pour le climat” qui s’avère “très préoccupant pour l’avenir”.

Pour El País“les négociateurs n’ont pu se mettre d’accord que sur un appel timoré aux pays à faire des efforts plus ambitieux en matière de changement climatique”.

“Bien qu’il ait été prévisible, compte tenu d’un contexte international très compliqué, le piètre résultat, obtenu après des heures de négociations stériles, aggrave le décalage entre les gouvernements du monde et la science, quant à la crise du climat et la nécessité d’agir de façon urgente”, estime le quotidien espagnol.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, s’est d’ailleurs déclaré “déçu” par le résultat du sommet, rapporte The Hill. “La communauté internationale a raté une occasion importante de faire preuve d’une plus grande ambition en matière d’atténuation, d’adaptation et de financement de la crise du climat”, a-t-il ajouté.

La ministre chilienne de l’Environnement et présidente du sommet, Carolina Schmidt, a elle aussi estimé que les résultats obtenus à Madrid – où avait été délocalisé le sommet en raison de la crise au Chili – étaient “clairement insuffisants”, relève La Tercera.

“Le monde nous regarde et les accords conclus ne sont pas suffisants pour aborder la crise du changement climatique avec l’urgence nécessaire, a-t-elle estimé. C’est triste de ne pas être arrivés à un accord final, car nous en étions très proches.”

Même les règles du marché du carbone, toujours pas formellement établies depuis les accords de Paris, n’ont pu faire l’objet d’un accord et devront être remises sur la table des négociations lors de la COP26, en novembre prochain à Glasgow.

“Certains observateurs ont rejeté la responsabilité du mauvais résultat sur les États-Unis, le Brésil, l’Argentine, l’Arabie Saoudite et les principales compagnies de pétrole, de gaz et de charbon, qui ont sapé l’ambition climatiqueobserve El Mundo. Ils ont également montré du doigt le Canada, le Japon et l’Inde, pour ne pas avoir soutenu les pays les plus vulnérables face au changement climatique.”

Le quotidien espagnol de centre droit relaie la déception d’associations comme Greenpeace, qui considère “inadmissible que les entreprises pollueuses aient imposé leurs intérêts au sommet”, ou le WWF, qui déplore que “les pays les plus pollueurs aient séquestré la COP25.

The Guardian cite pour sa part Jamie Henn, directeur de la stratégie du site 350.org, qui qualifie de “sidérant” le “décalage entre ce que la COP promettait et ce dont elle a finalement accouché”. Le signe, selon lui, que “l’esprit même des accords de Paris vacille”.

Sur son compte Twitter, la jeune militante suédoise Greta Thunberg a promis samedi que la mobilisation de la rue ne faiblirait pas d’ici à la COP26“La science est claire, mais la science est ignorée, écrit-elle. Quoi qu’il arrive, nous n’abandonnerons pas. Cela ne fait que commencer.”

Publié sur reporterre.net   16 décembre 2019 / Hervé Kempf (Reporterre)

Climat : c’est notre mode de vie qu’il faut négocier

L’échec de la COP25 à Madrid témoigne d’un système diplomatique en crise. Aujourd’hui, face au péril climatique, l’humanité n’est pas unie. Plusieurs grands pays refusent le défi de la coopération. L’enjeu est, plus profondément, notre mode de vie dans les pays riches;

La sinistre conclusion de la COP25 à Madrid, dimanche 15 décembre en début d’après-midi, n’est pas un échec de plus de la diplomatie environnementale. Elle signe un échec plus grave encore, celui de l’idéal des Nations unies, l’idéal d’une société humaine capable d’être solidaire et de trouver ensemble la voie pour faire face à ses problèmes communs.

Les faits ? Ils sont simples, comme Reporterre vous l’a raconté depuis quelques jours et toute la matinée de dimanche. Les quelque 200 États représentés à Madrid à la 25e conférence de la Convention des Nations unies sur le changement climatique (COP25COP signifiant Conference of parties) ont échoué sur tous les dossiers discutés : élever le niveau des objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, renforcer le financement de l’aide aux pays les plus pauvres pour leur permettre de faire face au changement climatique, et avancer dans la mise au point d’un système d’échanges d’émissions (dit « marché du carbone », au demeurant très critiquable dans son principe). Cet échec intervient alors que depuis l’Accord de Paris signé en 2015 lors de la COP21, les recherches scientifiques montrant la gravité de la crise climatique se sont encore accumulées, soulignant l’accélération du phénomène, et que dans de nombreux pays, les effets du changement climatique sont maintenant sensibles (l’Australie, par exemple, subit en ce moment même une nouvelle vague de chaleur extrême).

L’idéal des Nations unies est en danger

L’échec de Madrid n’est pas un accident. Il signe l’échec de la construction diplomatique engagée depuis 1992 par les Nations unies. Année après année, le même scénario se répète, parsemé de succès (protocole de Kyoto en 1997, Accord de Paris en 2015) rapidement annulés par les blocages (dénonciation du protocole de Kyoto par les États-Unis en 2001, conférence de Copenhague de 2009, échec de Madrid en 2019). Et pendant ce temps, malgré les conférences — et malgré les multiples rapports du Giec (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) — les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont continué à croître à une allure rapide, conduisant à un réchauffement déjà effectif de 1 °C par rapport à l’ère pré-industrielle, et rendant quasiment utopique l’espoir que ce réchauffement pourrait être limité à 1,5 °C.

Ce n’est pas seulement le système des COP Climat qui apparaît fondamentalement vicié, ou « voilé », comme on dit d’une roue de vélo. La construction même des Nations unies, ce bel idéal concrétisé au sortir du terrible drame qu’avait été la Seconde Guerre mondiale, est en danger. Car la négociation sur la question climatique est devenue la seule négociation véritablement planétaire. Et c’est bien normal : la question climatique et écologique est au fond la seule question qui concerne toute la société humaine, ses huit milliards de frères et de sœurs souvent en dispute. Trouver un langage commun, trouver des modalités d’action commune, trouver un système juste de répartition des efforts pour contrer la menace commune est devenue, en fait, la principale tâche des Nations unies, et les secrétaires généraux successifs de cette organisation l’ont bien compris.

Mais la tâche est impossible quand la principale puissance mondiale, les États-Unis, refusent purement et simplement de jouer le jeu de la communauté mondiale. Quand elle s’abstrait des Nations unies, annonce qu’elle refuse l’Accord de Paris, et vient même à Madrid pour contribuer à saboter le travail. La tâche est impossible quand un des plus grands États du Sud, le Brésil, vient avec le même objectif et quand son gouvernement, déniant la réalité du changement climatique, relance la déforestation de l’Amazonie. On pourrait aussi citer d’autres États, comme l’Australie, dont le gouvernement conservateur — alors même que le pays étouffe sous des incendies de brousse qui se poursuivent depuis des semaines et une chaleur record — défend bec et ongles la production maximale de charbon.

C’est notre mode de vie qui est à négocier

Aujourd’hui, face au péril climatique, l’humanité n’est pas unie. Plusieurs grands pays refusent le défi de la coopération. Il n’est pas indifférent qu’ils soient souvent — États-Unis, Brésil, Australie, Russie — des pays immenses et disposant de vastes ressources naturelles, si bien qu’ils sont imprégnés d’une perception physique du monde différente de celle de pays plus densément peuplés, et où l’espace est compté. Mais il est clair que, même si leurs opinions sont divisées et qu’une large partie des populations y comprennent la gravité de l’enjeu, la direction générale est au déni. La signification de cet état de fait est que les sociétés de ces pays riches ne veulent pas aller vers une transformation pourtant inévitable : « Notre mode de vie n’est pas négociable » reste leur slogan, pour reprendre la phrase attribuée à George Bush en 1992.

Cette réalité doit conduire le mouvement écologiste international à plusieurs constats :

  • les COP ne sont plus un enjeu central de la bataille à court terme ;
  • il faut accepter que la bataille climatique est vraiment un conflit, et pas seulement de mots et d’idées : parvenir à réduire fortement les émissions de gaz à effet de serre suppose de poser nettement les oppositions et de désigner les ennemis. Ce qui signifie aussi, même si c’est désolant, que le chemin climatique ne sera pas consensuel, doux, serein ;
  • une leçon plus difficile est aussi à tirer des événements. Ce n’est pas seulement le vilain M. Trump, le vilain M. Bolsonaro, et les autres vilains qui bloquent la situation. Ils s’appuient sur des parts sans doute encore majoritaires de leurs populations. Et il est même probable que, dans des pays riches plus conscients du péril climatique, en Europe, pour faire simple, la très grande partie de la population n’a pas encore intégré que la réponse à la crise écologique passera par la sobriété, et par une réduction du niveau de vie moyen (même si la réduction des inégalités est un préalable à tout). Le mouvement climatique ne fera pas bouger vraiment les opinions si cette amère perspective n’entre pas dans la conscience commune. Il faut savoir dire et expliquer que c’est notre mode de vie qui est à négocier. Sans quoi les désastreux effets d’un changement climatique incontrôlé régleront nos hésitations.