« On va peut-être se faire avoir, mais on aura tout essayé »

On ressent un désarroi très profond avec cette élection présidentielle : les français, ils ne comprennent plus rien ! Ils sentent qu’il y a quelque chose de vicié, de pervers, de cynique dans cette situation, qu’ils sont lobotomisés par les médias, qu’ils n’ont pas les moyens de penser car ils sont dans un brouillard sémantique, idéologique, linguistique. Ils sont en quelque sorte tétanisés, sidérés. Et la classe politique est dans une bulle. On nous dit que le système est démocratique ?  Il n’y a pas d’ouvriers à l’Assemblée nationale, alors qu’ouvriers et employés représentent aujourd’hui encore 52% de la population active ! Un tel décalage entre réalité des classes moyennes et populaires et ce qui se passe au Parlement est problématique.

Il y a des gens se classant « à part », des « hors des lois », des « big’res to fail »,  qui estiment qu’ils ne peuvent pas être punis sur le plan pénal, en matière de fraude fiscale ou de corruption. Ils considèrent que les institutions doivent les protéger. Cette classe a une fonction : défendre les intérêts de la classe. Ils ne peuvent pas penser en termes moraux, de culpabilité, cela ne les habite pas. La culpabilité, ça, c’est pour les autres la grande masse dans la nasse des gouvernés, des moutons de Panurge ! Eux c’est complètement différent, ils font leur job de prédation, un comportement appris dès la sortie du berceau. C’est plus fort que de la corruption, que du vol : on bouffe les autres.

Prenons le tiercé, donné gagnant par les médias, en tête des sondages à la présidentielle 2017 : Marine, Macron, Fillon ! Ce sont des gens aimables, propres sur eux, qui présentent bien, mais ont souvent et régulièrement des casseroles. La sous-évaluation des biens pour les impôts ou l’évasion fiscale, cela va de soi ! Ils estiment qu’ils ont suffisamment travaillé, ils ont hérité de leur parents, ils ont fait fructifier, on ne va pas venir le leur prendre… Il y a une logique dynastique dans cette accumulation. Le fait de transmettre aux enfants, de continuer la dynastie.

Malgré les conflits entre eux, cette classe bourgeoise est solidaire sur le fond. L’analyse en terme de classe sociale, ce n’est pas une foutaise, un truc d’autrefois. Il y a une classe bourgeoise qui existe par son niveau de richesses, la propriété des moyens de production, matérielle, mais aussi par la conscience qu’elle a d’elle-même. Et par le fait de veiller au grain pour que ça dure. Ce tiercé matraqué gagnant n’est que  sous-fifres de l’oligarchie en place, dans la « droite » lignée des mandats présidentiels précédents en la 5ième république !

Avec le gommage de la conscience de classes dans la sphère publique, l’expression politique s’exprimant dans sa langue-savante, dans ses non-dits coté finances, ou dans ces blancs comme neige souillée coté magouilles, nous dérapons allègrement vers des choix non conformes aux intérêts des classes populaires, et de la réelle  démocratie.

Déjà quand Ernest-Antoine Seillière a pris les rênes du Medef en 1998, il a procédé à une « refondation sociale », c’est-à-dire une inversion de la théorie marxiste de la lutte des classes : les riches sont devenus des « créateurs de richesses ». Et les ouvriers, qui sont les créateurs de richesses et de plus-value selon la théorie marxiste, sont devenus des « charges » et des variables d’ajustement. C’est un processus de déshumanisation très fort. Les ouvriers qui votent pour le Front national sont des gens perdus, qui ne comprennent pas ce qui leur est arrivé. Ils votent d’ailleurs pour Le Pen en disant : « On va peut-être se faire avoir, mais on aura tout essayé ». Et ils ne vont pas être déçus ! Car Le Pen, c’est la dernière alternance de l’oligarchie.

Source : https://www.bastamag.net/Pincon-Charlot-Emmanuel-Macron-est-un-extraordinaire-porte-parole-de-……Ldh91-R.André