Israël: le gouvernement protège une manifestation anti-palestinienne de l’extrême-droite

Une provocation de plus de la part du gouvernement israélien. Résultat: plus de 100 blessés. Netanyahu se permet ensuite d’appeler au calme…

Publié par lemonde.fr le 23/04/2021

Plus de 120 personnes ont été blessées, dans la nuit du jeudi 22 au vendredi 23 avril, lors de heurts impliquant des Juifs d’extrême droite, des Palestiniens et des forces policières à Jérusalem.

Le Croissant-Rouge palestinien a fait état d’au moins 105 blessés, dont une vingtaine ont été transférés à l’hôpital, tandis que la police israélienne a ajouté en avoir recensé vingt dans ses rangs lors de ces affrontements, les plus violents de ces dernières années dans la Ville sainte.

Les violences ont commencé, jeudi soir, en marge d’une manifestation du mouvement d’extrême droite Lahava, ouvertement hostile aux Palestiniens, à l’entrée de la vieille ville. Des centaines de policiers ainsi que la cavalerie avaient été déployés afin de protéger « la liberté d’expression » et le « droit de manifester » de ce groupe, et éviter tout débordement.

Gaz lacrymogènes et grenades assourdissantes

Des Palestiniens qui considéraient ce rassemblement comme une provocation ont tenu leur propre manifestation. Celle-ci s’est télescopée avec la sortie des fidèles de l’esplanade des Mosquées après la prière nocturne du ramadan, mois de jeûne musulman.

Des manifestants d’extrême droite ont crié : « Mort aux Arabes ! » et lancé des pierres sur les forces de l’ordre israéliennes, aussi la cible de projectiles de manifestants palestiniens. Les policiers ont tenté de disperser les manifestants en utilisant des gaz lacrymogènes, des grenades assourdissantes ainsi qu’un canon à eau.

Après 22 heures, la police et le Croissant-Rouge palestinien avaient fait état de quelques arrestations et blessés, mais les heurts se sont poursuivis dans la nuit entre policiers et Palestiniens.

Un journaliste de l’Agence France-Presse a vu des rues s’embraser aux abords de la vieille ville, tandis que des témoins ont partagé des images d’affrontements musclés sur les réseaux sociaux, notamment celle d’un Juif battu par des Palestiniens qui l’entouraient.

Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui siège en Cisjordanie occupée, a dénoncé les « incitations à la haine » de groupes d’extrême droite israéliens et exhorté la communauté internationale à « protéger » les Palestiniens de Jérusalem-Est.

Roquettes vers Israël, puis représailles sur la bande de Gaza

La Jordanie, qui a contrôlé pendant près de vingt ans Jérusalem-Est avant sa prise et son annexion par Israël en 1967, a condamné les « provocations menées par les groupes juifs extrémistes », appelant Israël à faire « cesser (…) le harcèlement » des habitants de la vieille ville et à lever les restrictions d’accès à la mosquée d’Al-Aqsa.

« Profondément préoccupés », les Etats-Unis ont demandé de « rejeter fermement » les « discours de manifestants extrémistes scandant des slogans de haine violents »« Nous appelons au calme et à l’unité, et exhortons les autorités à assurer la sécurité et les droits de tous à Jérusalem », a tweeté le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price.

Plus tard dans la nuit, au moins sept roquettes ont été lancées depuis la bande de Gaza, enclave palestinienne séparée géographiquement de la Cisjordanie occupée et de Jérusalem, vers Israël, selon l’armée israélienne. Certaines roquettes ont été interceptées par le bouclier antimissile Dôme de Fer et d’autres sont tombées dans des terrains vagues.

En représailles, des chars de l’armée israélienne ont frappé la bande de Gaza, selon des sources sur place, les militaires israéliens affirmant avoir ciblé des positions du Hamas, mouvement islamiste armé qui contrôle la bande de Gaza depuis 2007, et avait acquiescé ces dernières années à une trêve avec l’Etat hébreu après trois guerres entre les deux camps (2008, 2012, 2014).

Elections législatives palestiniennes

Dans un discours, jeudi, au Conseil de sécurité des Nations unies, l’envoyé spécial pour le Proche-Orient, Tor Wennesland, avait dénoncé des affrontements depuis quelques jours impliquant la police, des civils israéliens et des Palestiniens, et appelé à une « désescalade ».

Des incidents avaient déjà éclaté mercredi à Jérusalem. Des vidéos relayées sur les réseaux sociaux et par les médias locaux montraient des employés arabes travaillant dans des commerces du centre-ville de Jérusalem et des journalistes être agressés par des jeunes Juifs qui criaient : « Mort aux Arabes ! »

Dans un entretien à la chaîne israélienne Kan, le maire de Jérusalem, Moshe Lion, a dit, lui, être en discussions avec des leaders palestiniens de Jérusalem-Est dans l’espoir de mettre un terme « à ces violences inutiles » qui interviennent à un mois des législatives palestiniennes.

Les Palestiniens organisent le 22 mai leurs premières élections en quinze ans. Mahmoud Abbas et des pays européens ont demandé à Israël de permettre la tenue du scrutin et des activités de campagne des candidats à Jérusalem-Est, où vivent plus de 300 000 Palestiniens.

Le Monde avec AFP