Section De Marseille Ligue Des Droit De L’homme – Marseille – 03/03/2019 17h00 – Registre numérique
Mesdames, Messieurs les commisaires enquêteurs,
Nous avons l’honneur de vous présenter la contribution de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH), section de Marseille, à l’enquête publique sur le PLUi au projet de Plan Local d’Urbanisme intercommunal (PLUi) du Territoire Marseille Provence .
La LDH, après lecture du PLUi, est inquiète des conséquences du PLUi sur la cohésion sociale et la qualité de vie des Marseillais, elle attire votre attention sur 2 thématiques qui nous paraissent essentielles :
1. Logement et cohésion sociale
La première fonction d’un PLU devrait être de permettre l’exercice d’un droit humain fondamental, le droit à un logement digne pour tous, et de garantir la cohésion sociale de notre ville. En effet, le logement social n’est pas qu’une question quantitative : sa localisation est la question primordiale à traiter si l’on recherche une mixité sociale réelle sur notre territoire. Or sur ce point, le PLUi ne prend pas la mesure des enjeux. Bien au contraire, fidèle à la ségrégation sociale qui est la matrice électorale de Marseille, le PLUi maintient et consolide le « chacun chez soi », à l’échelle de la ville et de la métropole.
Par exemple, en posant un seuil de 100 logements pour l’obligation de logements sociaux, il empêche de fait de construire des logements sociaux dans les quartiers les plus aisés, où le promoteur pourra maximiser systématiquement l’accession libre à la propriété. Avec le préfet et tous les acteurs sincèrement inquiets de la ségrégation sociale en vigueur à Marseille, nous demandons l’abaissement de ce seuil.
Plus largement, nous considérons que la coexistence de populations différentes est la fonction même de la ville, et doit donc être possible dans chaque quartier. C’est pourquoi nous demandons que le PLUi s’engage sur des objectifs précis de construction de logements sociaux à une autre échelle que la commune. En effet, les opérations de logement social dans les quartiers aisés sont souhaitables et possibles, malgré les réticences des riverains, souvent par le biais de petites opérations dans le tissu urbain. Nous demandons donc :
− l’élargissement du Droit de préemption urbaine (DPU) à l’objectif de création de logements sociaux, dans tous les tissus urbains.
− l’objectif à 10 ans d’atteindre le seuil de la loi SRU de 25 % de logements sociaux, pour tous les 111 quartiers administratifs de Marseille. Chaque quartier comptant en moyenne 7 à 8000 habitants, cette échelle est la seule pertinente pour permettre enfin une mixité sociale réelle.
Par ailleurs le PLU ne prévoit pas d’espace réservé à l’habitat mobile des familles concernées (obligation prévue par la loi Besson de juillet 2000) à Marseille. Et la seule aire d’accueil des gens du voyage va fermer le 31 mars 2019.
Enfin, la question de la résorption des bidonvilles n’est pas considérée, alors que l’instruction gouvernementale du 28 janvier 2018 prévoit leur résorption dans les 5 ans.
Ces deux éléments montrent à quel point la politique urbaine de Marseille consiste à « choisir » ses habitants, et à considérer avec mépris, et même à refuser à certaines catégories de personnes le droit à un logement.
2. Espaces verts et qualité de vie
Depuis le POS de 2000, la Ville de Marseille a ouvert à l’urbanisation ses derniers espaces de campagne, et la hausse des prix immobiliers a entraîné les promoteurs immobiliers à rechercher et construire sur tous les espaces « vides » de la ville constituée. Or ces espaces n’étaient pas vides, mais pleins de végétation et d’espaces ouverts qui permettaient des usages récréatifs pour les Marseillais. Souvent, c’est la ville de Marseille elle-même qui possédaient ces biens, et les a aliénés au secteur privé au lieu d’en faire des parcs et des jardins. Ainsi en centre ville, la maternité de la Belle de Mai, le square Michel Lévy, la Villa Valmer, l’îlot Chanterelle, etc. sont les symboles de la bétonisation de la ville et de la transformation d’espaces verts en ensembles immobiliers et privatifs.
Cette situation n’est plus tenable. Elle empêche les Marseillais de jouir d’un droit fondamental à un cadre de vie de qualité minimum. Elle pèse sur la santé des personnes, sur le bien être des enfants, et amène les Marseillais à quitter leur ville. Comment vouloir attirer des populations si on leur propose un environnement dégradé qui les pousse à s’enfuir ?
Le PADD affirme une volonté de préserver un « écrin vert et bleu », et de lutter contre les îlots de chaleur. Mais dans la réalité du PLU, les emplacements réservés pour de nouveaux espaces verts sont presque inexistants. A part deux parcs de taille importante (le parc des Aygalades sur Euromed2 et le parc du belvédère de Séon), projets déjà anciens et qui sont le fruit d’inconstructibilité liée à des risques naturels, le PLUi ne propose pas de développement des espaces verts dans le tissu urbain.
Il reste pourtant des opportunités de création d’espaces verts sur des friches agricoles, des grandes unités foncières bastidaires privées ou publiques, et sur les nombreuses friches d’activités. De même dans la cas où des îlots entiers se révèlent insalubres, ou à reconstruire, des espaces verts sont possibles. C’est pourquoi nous demandons :
• La création de parcs et espaces verts, intégrant des jeux pour enfant, dans toutes les opérations immobilières intervenant sur une surface supérieure à 1000 m².
• La suppression de toute possibilité de réaliser un équipement de type parking sur les parcelles du Parc Longchamp.
• L’inscription d’emplacements réservés pour des espaces verts publics sur les zones d’activités ou d’habitat, à raison d’au moins un emplacement réservé par quartier (soit au moins 110 emplacements).
• La compensation systématique de tout arbre supprimé dans les espaces publics ou privés, par la replantation de 3 arbres au minimum, en application du principe ERC du Code de l’environnement.
• La compensation systématique de toute artificialisation des sols dans les espaces publics ou privés, par la réouverture et la perméabilisation des sols d’une surface au moins double.
Enfin, c’est à une mise à niveau environnemental globale que le PLU devrait servir et notamment à atteindre les exigences de l’accord de Paris et de la lutte contre le réchauffement.
C’est pourquoi nous demandons :
• Que toute nouvelle opération immobilière soit obligatoirement couverte de toiture photovoltaïque. De même, le PLUi devrait fixer des objectifs chiffrés de couverture photovoltaïque sur les bâtiments publics existants.
• Que les espaces publics soient systématiquement plantés, afin de diminuer efficacement la température de la ville dans les périodes estivales.
• De renforcer les dispositions favorisant l’implantation de voies réservées à la circulation douce/mobilité active et l’intermodalité.