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On n’est pas des clochards, on vit juste dans la rue ! par Librinfo74

lundi 20 juillet 2015

Par ccharlet

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Samedi 4 Juillet 2015,

Une belle étape sur les chemins de l’histoire de l’Herminette, un bar social ouvert tous les matins aux gens de la rue mais aussi à chacun d’entre-nous.

En ce jour, les personnes de la rue s’étaient données rendez-vous avec Robert Géant ; cet éducateur les avait accompagné durant 18 ans et s’apprêtait à vivre d’autres aventures.


Les membres de l’Herminette avaient à cœur de nous conduire sur ce lieu d’accueil, de création et de coopération ; non pas pour sombrer dans la nostalgie mais pour dire aux passants : nus sommes des personnes à la vie singulière, mais nous avons  été capables de construire des projets hors du commun que nous avions rêvés, puis décidés de réaliser ensemble.

P7040005L’exposition d’affichettes rendaient compte des activités multiformes et des enjeux éducatifs et sociaux de ce lieu (conseils/décisions-débats-projets d’intérêt public-voyages-expositions-films etc…). Ces affiches attestent qu’ici la démocratie n’est pas un vain mot, que l’on cherche avant tout à développer une conscience critique, populaire et sociale, une forme de résistance culturelle.

 

 

 

A la rencontre des passants touristesHerminette touristes

Voyant ces dizaines de mains en carton décorées, levées et fleurissant le pavé de cette côte, sur ce vieux quartier d’Annecy, beaucoup de passants/touristes se demandaient s’il n’y avait pas quelque événement culturel ou bien encore quelque inuaguration de restaurant au vu de l’enseigne de l’Herminette.

Des discussions s’engagèrent portant sur le sens de cette installation symbolique où ceux et celles qui sont « passées » par l’Herminette nous signifiaient comment ces mains tendues vers l’espoir d’une autre vie possible avaient trouvé ici en ce lieu force, dignité, solidarité, refuge,écoute ; leur permettant de décider et penser par eux-mêmes, d’imaginer un avenir professionnel…

Même les chiens sont de la partie…

Aux côtés de leurs maîtres, ces compagnons participaient à construire des utopies, car, comme le dit le poète John Berger, eux aussi ont besoin : « d’être rassurés de notre rire inconcevable quand connaissant le pire, le sous-bois les a choisis. »…Bien sûr ,ces animaux de « bonne » compagnie ont créé des problèmes avec les gens du voisinage !

Des films qui dévoilent ces fabuleuses aventures

Comme dans les contes et légendes, ces gens de la rue en sont les héros et héroïnes. Ainsi, à tout jamais, voix et regards portés sur l’écran nous interrogent aussi. Il n’y a pas que ceux et celles qui occupent l’espace public, font dériver l’attention politique pour mieux dominer ceux et celles qui souffrent de cette exclusion sociale et économique qui ont le droit de laisser trace.

« Nous sommes tous et toutes des personnes historiques. » (Marie-Claude Charpentier).

Grâce à ces films, vous ne pourrez disparaître aux oubliettes de l’histoire. Oui, dans vos vies, il y eut des moments qui ont éveillé vos consciences. Cela s’est fait poussé par cette force collective du groupe, ou des éducatrices, éducateurs comme Robert et Lise  surent provoquer les conditions de la mise en œuvre des projets décidés par vous seul(e)s.

Et l’on est en droit de se poser des questions ?

Pourquoi ces personnes de la rue, parfois jeunes en sont arrivées là ? Pourquoi toutes ces blessures les marquent profondément, durablement ? Que font ceux et celles qui nous gouvernent ici dans notre pays et ailleurs ? Faut-il obéir aux diktats d’austérité et de misère des instances nationales voire institutions internationales, qui nous clament que face à certaines questions sociales et économiques : « There is no alternative ! », tout en violant nos droits fondamentaux, nous interdisant de décider ce qui est juste pour les peuples ? Qui a intérêt à ce qu’il en soit ainsi ?

Mais, ici on apprend à rompre avec les certitudes révélées, les fatalités.

Ils et elles ne savaient pas que c’était possible et pourtant avec l’adversité, on fait rupture et on se dit : « Alors on va le faire ! » Dur chemin, quand l’enfance et l’adolescence vous furent volées pour reprendre le titre d’un livre de l’un de ceux qui inspira Robert Géant : le Dr Stanislas Tomkiewicz.

Faire jaillir l’aube des blessures et ténèbres de la misère

Combien faudra t-il de lois sociales pour garantir vos droits fondamentaux, à vivre dans la dignité et le respect de chaque personne ? Certains, certaines vous craignent, se sentent en danger par votre présence dans certains quartiers, on voudrait vous relèguer encore plus loin. Qui a intérêt à créer un climat d’insécurité ? Nous sommes pourtant dans le pays de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Avons-nous réfléchi à votre place de citoyen à part entière, autrement que sur le bord d’un trottoir ou dans un parking souterrain de la ville d’Annecy, dans un squat ?…

Le « style Herminette » peut-il être un modèle à transmettre et en quoi ?
Cette question apposée en ce 4 Juillet pour nous donner parole convoque notre conscience. Et il y eut des réponses déposées avec émotion qui nous firent découvrir qu’ici, on ne se penche pas sur le sort malheureux des personnes de la rue. Point de charity business, il nous faut dépasser les pieuses incantations des politiques socio libérales : « S’autoriser ce que l’on osait imaginer, donner en retour ce que l’on nous avait apporté – apprendre le respect et surtout rester soi-même – Votre film est merveilleux, je n’oublierai jamais l’aide que vous avez si généreusement apportée à ma fille. Vous êtes de belles personnes, je vous aime et je suis heureuse d’être venue vous rencontrer aujourd’hui… »

Humour, passion, humanisme, gestion non-violente des conflits, sens de l’observation, engagement, pratiques de création marquent ces films, ces échanges qui égrènèrent cette matinée, suscitèrent notre réflexion.

Ce ne sont pas des recettes. On dirait que la pensée de ce grand pionnier de l’éducation nouvelle et médecin qu’était le Dr Janusz Korczak est venue jusque dans ces lieux.

 N’oublions pas leurs voix singulières comme celle-ci déposée au bord d’une table de l’Herminette le 2 Octobre 2014 :
Si on sème dans nos cœurs
Un vent d’indifférence, une musique déloyale
Une liberté amère et cannibale
C’est pas pareil, c’est pas pareil
Si on sème dans nos vies un regard bienveillant
Une parole amicale, une liberté sucrée et collégiale
C’est sûr, ça fait pas tout mais c’est déjà beaucoup
Et on aura fait notre part sur le chemin du bonheur