Israël – Palestine : le point de non-retour

Par Denis Sieffert4 avril 2013

Où en est-on dans le conflit israélo-palestinien ? Contrairement à ce qui est dit ici ou là, ce n’est évidemment pas le statu quo. Une colonisation galopante rend de plus en plus improbable la création d’un État palestinien en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et à Gaza. Quelque 520 000 colons juifs sont d’ores et déjà installés au-delà de la « ligne verte » qui, selon un droit international sans cesse bafoué, sépare Israël des Territoires palestiniens. Mais la guerre démographique menée par le gouvernement israélien ne rend qu’imparfaitement compte de la situation. Il y a aussi les empiétements territoriaux provoqués par la construction du « mur de séparation », soit 9,4 % supplémentaires arrachés aux Palestiniens. Et les programmes de construction qui justifient la préemption de nouvelles terres. Une extension, prévue dans la zone dite E1, à l’est de Jérusalem, devrait couper en deux le Territoire palestinien. Cette situation conduit des intellectuels et acteurs politiques israéliens et palestiniens à repenser profondément les termes du conflit.

Nous avons été à la rencontre d’un certain nombre d’entre eux, à Tel-Aviv, à Jérusalem, à Ramallah, à Naplouse et à Hébron. D’autres, dont nous rapportons aussi les propos, continuent de croire dans la stratégie des deux États. Pour les premiers, le problème doit à présent être envisagé globalement, sur tout le territoire qui va de la Méditerranée au Jourdain. Ce qui implique de s’interroger sur le statut des un million six cent mille Palestiniens de nationalité israélienne et sur l’administration des Territoires par l’Autorité palestinienne. Ce qui suppose aussi une réflexion sur l’identité même d’Israël comme « État juif ». Leurs préconisations sont évidemment très minoritaires, surtout dans l’opinion israélienne. Mais la question n’est pas de savoir si la solution d’un « État binational » l’emportera ou non idéologiquement ; elle est de savoir si l’aveuglement de la politique coloniale israélienne ne va pas finir par remettre cette hypothèse à l’ordre du jour, fût-ce de façon chaotique et douloureuse.