La lettre de la section de St Vivien

ÉDITORIAL

La justice et l’idée que l’on s’en fait

Pour certaines sociétés, le voleur doit avoir la main coupée ; certainement parce que le législateur pense qu’il supprime ainsi l’instrument du délit. La conséquence est que l’on devrait couper la tête du voleur qui se sert de son intellect pour commettre quelques malversations.

Il n’y a pas si longtemps on ne considérait pas comme délictueux les penchants de certains pour de jeunes filles ou de jeunes garçons.

On peut ainsi remonter dans les temps et trouver des sentences qui aujourd’hui feraient dresser les cheveux sur la tête.

Cela nous amène donc à nous demander ce que veut dire l’expression

«la justice», surtout lorsqu’il s’agit d’un engagement pris au plus haut niveau.

Plusieurs exemples peuvent illustrer le foisonnement de domaines où le mot a du sens.

Le droit est dit par le législateur; celui ci réagit par rapport à l’évolution de nos sociétés, le droit est actuel mais avec toujours un temps de retard plus ou moins long.

Le législateur est un élu du peuple, sauf à dire qu’il n’est pas le mieux placé pour faire et défaire les lois, il est impossible à un agent représentant de l’autorité de l’État de refuser de se soumettre sans se démettre. Ou bien tout individu peut dire, la loi, je ne la reconnais pas, ce qui complique sérieusement la vie sociale, remet en cause l’équilibre même de nos institutions.

Mais la justice comme programme politique semble être un engagement peu mesurable: est-ce que mon salaire est juste? La hiérarchie des revenus est-elle équitable? Est-ce qu’il est juste que je n’ai pas droit à un logement social? Est-ce qu’il est juste que mes contributions sociales soient au niveau où elles sont? Est-il juste que compte-tenu des connaissances et des moyens que les sciences mettent à la disposition de nos sociétés, les soins soient liés fortement aux revenus des individus ? Est-il juste que je sois sans travail ou que ce que je souhaite faire de ma vie ne soit pas à portée? Est-ce qu’il est juste que je ne trouve pas les moyens pour me loger?….Parle-t-on de justice ou d’équité?

Je pense que le politique veut, en employant ce terme, «la justice», prendre l’engagement de diriger l’État pour que ses citoyens se sentent dans une société juste. Ce qui englobe les précédentes questions mais aussi certainement d’autres, et, que pour mesurer du respect de l’engagement pris, il nous faudra des résultats palpables que les irresponsables de la «religion de la comptabilité » devront apprécier autrement qu’en terme de bilans financiers. Tiens, aussi, quand reviendra-t-on sur les lois Perben et autres? L. Rieux

CAFE-DEBAT DU 7 JUIN

C’est devant une petite assistance que nous avons tenu ce café-débat que nous avions pourtant annoncé par mail à nos adhérents, aux maires, aux correspondants des journaux distribués sur le nord-médoc et par une tournée d’affichage conséquente.

Un seul maire s’est déplacé et nous étions 10 personnes pour participer à ce débat.

Le président de notre fédération intervenant de cette soirée nous a d’abord rappelé combien ce pays doit à l’immigration depuis plusieurs siècles et que en 1789 l’Assemblée Nationale avait accordé le droit de vote aux étrangers, ce que le premier consul s’est empressé de défaire, l’esprit nationaliste stupide va de pair avec les pouvoirs autoritaires.

Il a également rappelé que dans la balance économique(coûts et gains) le solde est en faveur de l’immigration.

Enfin il a évoqué les nouveaux problèmes posés par l’esclavage moderne des salariés détachés, gérés par des sociétés de services européennes et qui pratiquent le « dumping social ». Sur les résistances à l’adoption de cette disposition par le congrès, qui doit ratifier cette modification de la constitution (trois cinquième des élus à l’assemblée nationale ajoutés aux sénateurs sont nécessaires), elles tiennent plus de la peur des autres que de réels inconvénients.

Il y a en Aquitaine, 180 000 personnes concernées auxquelles il faut retrancher celles qui ont acquis la nationalité Française.

Enfin il y a l’aspect symbolique de cette mesure de justice : comment donner aux familles concernées le sentiment de faire partie de la nation si leurs ascendants ne sont pas reconnus au moins parce qu’ ils paient leur part de cotisations sociales et des impôts, et, au delà, le respect de leur personne.

Des questions ont été posées dans l’assistance sur l’arrivée de capitaux étrangers protecteurs d’ intégrisme religieux et qui pourraient un jour constituer une possibilité d’intrusion de communautarismes dans nos municipalités.

Nous n’ignorons pas ces menaces ; raison pour laquelle il est particulièrement important que soit défendu fermement ce qui est le socle de notre république :

Liberté – Égalité – Fraternité.

La laïcité en particulier

La lutte pour que justice soit faite va continuer même si pour 2014 les choses semblent compromises, le collectif pour que ce droit soit reconnu va mobiliser pour que cette promesse de 30 ans soit tenue .

Vous trouverez ci-dessous la lettre adressée aux maires.

COURRIER ADRESSÉ AUX MAIRES

Madame, Monsieur le Maire,

Le suffrage universel a été une longue conquête dans l’histoire de la République.

Si, en 1793, lors de la Révolution, la première République en adopta le principe, il fut réellement mis en œuvre par la IIe République, après la Révolution de 1848. Mais le suffrage resta limité aux hommes jusqu’en 1944, lorsque fut enfin instauré, à la Libération, le droit de vote pour les femmes. Trente ans plus tard, en 1974, l’âge du droit de vote fut abaissé de 21 à 18 ans.

En 1998, les étranger(e)s citoyen(ne)s des pays de l’Union européenne résidant en France ont été admis(es) au vote et à l’éligibilité pour les élections municipales et au Parlement européen.

En mai 2000, l’Assemblée nationale vote une proposition de loi accordant le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales pour les étranger(e)s extra-communautaires, qui résident légalement sur le territoire depuis cinq ans au moins. Le Sénat, à son tour, le 8 décembre 2011, adopte cette même proposition.

Il reste à mettre en œuvre la révision constitutionnelle nécessaire.

De nombreux(ses) responsables politiques de gauche, et aussi du centre et de droite, se sont exprimé(e)s en faveur de ce droit.

En 2012, lors des élections présidentielles et législatives, la nouvelle majorité a inscrit cette réforme dans son programme. Conformément à ses engagements dans sa déclaration de

politique générale, le Premier ministre, en juillet puis en septembre, a promis qu’il y aurait un projet de loi en 2013.

Près de deux millions et demi d’étranger(e)s extra-communautaires vivent et travaillent dans des communes où elles/ils participent à la vie locale et paient des impôts. Nombre d’entre elles/eux sont responsables d’associations, délégué(e)s de parents d’élèves, délégué(e)s syndicaux(cales)…

La vie locale est un lieu essentiel de la vie démocratique et il n’existe aucune raison pour que toutes celles et tous ceux qui résident sur ces territoires n’y participent pas de façon égale. Il est temps de franchir une nouvelle étape pour l’élargissement du suffrage universel, la démocratie, la cohésion sociale et pour l’égalité des droits.

Les promesses électorales faites depuis plus de trente ans, approuvées par les électeurs(trices) à au moins quatre reprises, depuis 1981, doivent maintenant être tenues.

C’est pourquoi la section de la Ligue des Droits de l’homme de saint Vivien pointe et Cœur – Médoc propose un débat citoyen sur ce thème le 7 Juin à 19 h au Café des Baïnes à Lesparre.

Ce débat sera animé par Jean Claude Guicheney de la fédération LDH Gironde.

Nous espérons que vous serez présent(e) pour débattre avec nous sur ce thème.

Pour la section, le président Louis Rieux

La pensée contre le mal, Hannah Arendt

 

Après s’être intéressée à de nombreuses femmes militantes, Margarethe von Trotta a récemment réalisé un film sur Hannah Arendt. Ce film porte sur un épisode douloureux de la vie de la philosophe: elle a souhaité être présente lors du procès d’Eichmann en 1961 pour tenter de comprendre ce qui avait fait agir monstrueusement cet homme.

A sa surprise, celui ci se révèle être non pas le mal incarné, non pas un être satanique mais un homme médiocre et banal,

    «un petit fonctionnaire»(1) qui voulait obéir sans se poser de questions. «Le langage administratif est mon seul langage» dit il car il n’est pas capable de prononcer une seule phrase qui ne soit pas un cliché. «Et son incapacité à parler était étroitement liée à son incapacité à penser»(1). En tant que reporter pour le magazine le Newyorker, Hannah Arendt rend compte de ce constat : cet homme ne pensait pas et de là vient son a-moralité, son incapacité à distinguer le bien du mal. Et elle parle donc de la « banalité du mal »(1)comme d’un fait.

Cette expression va alimenter un débat qui dure encore et qui lui fera perdre nombre de ses amis. Ce fait de la banalité du mal a alors été interprété comme la banalisation du criminel et de son crime alors qu’il était plutôt question des effets de l’inconscience.

Cependant, ce sera aussi le titre d’un livre sur le tortionnaire cambodgien Douch en 2012. Il est toujours difficile d’accepter que ces monstres soient simplement des êtres humains  sans envergure.

Pour Hannah Arendt, un des moyens d’échapper au mal est l’activité de penser.

Encore faut il savoir penser ! Est ce que les cours de morale laïque proposés par le ministre de l’Éducation seront des moments d’apprentissage d’une pensée autonome, dégagée des stéréotypes et des conventions? Ou est ce que ce sera des lieux d’endoctrinement et de normalisation? La réponse est entre les mains des éducateurs.

(1)IN Eichmann à Jérusalem p 1065 Édition Quarto Gallimard

Sylvie Petitjean

 

300 000 emplois vacants ?

 

Le gouvernement veut lutter contre le chômage, accompagner l’activité des entreprises et pense avoir trouvé une solution à ces problèmes en mettant face à face les 300 000 emplois vacants et les 3,2 millions de chômeurs. En effet, cela paraît simple et rationnel. Or depuis plus de 20 ans, ce phénomène est dénoncé mais le ratio ne diminue pas. Pourquoi? A cela, plusieurs réponses.

La première réponse est la moins évidente : ces emplois n’existent pas ! En effet, ce sont le plus souvent des prévisions d’emploi récoltées par les fédérations d’entreprises auprès de leurs adhérents. Ces emplois ne sont pas des offres d’emploi écrites, consultables , mais des envies, des espoirs à moyen terme. Le demandeur d’emploi qui souhaiterait en consulter la liste ne le pourra pas et Pôle Emploi n’en a pas trace.

Par contre, Pôle Emploi et les fédérations d’entreprises sont en capacité de dire dans quels secteurs ou dans quels métiers ils ont des difficultés à trouver des candidats.

En effet, certains métiers sont connus pour leur difficulté, ou leur pénibilité et les demandeurs d’emploi ne s’yprécipitent pas. Par exemple, dans les abattoirs, le taux de maladies musculo- squelettiques dû aux conditions de travail est tel que sur un bassin d’emploi donné, les chômeurs essaient toujours de trouver un autre moyen de subsistance.

De même, dans l’hotellerie-restauration où le turn over est important car les horaires rendent impossible la vie de famille.

Une autre cause de non rapprochement entre l’offre et la demande peut être géographique: faire tous les jours 60 ou 70 km pour aller travailler n’est pas si facile et souvent très cher et certains postes sur le Médoc par exemple ne trouvent pas preneurs pour cette raison.

Enfin, il existe aussi des métiers pour lesquels il n’y a pas assez de gens formés. C’est le cas des métiers para médicaux par exemple ( kiné, infirmières…) ou de certains métiers de l’industrie : soudeurs, ou même ingénieurs. Pour ces métiers là, oui, la formation est une bonne réponse. Pour les autres causes, il faut continuer à améliorer les conditions de travail, et de transport en commun. Et rendre les offres d’emploi accessibles à tous, ce qui n’est pas le cas puisque de nombreux employeurs n’utilisent pas Pôle Emploi.

Enfin, il faut cesser de croire et de dire que les chômeurs sont des gens qui ne souhaitent pas travailler. La réalité du marché du travail est beaucoup plus complexe qu’on ne veut nous le dire.

 

Sylvie Petitjean

PIQUE NIQUE le 1er Septembre

Ce sera au phare de Richard à partir de 12 heures. Apéro et vins offerts par la section.

ASSEMBLEE DE MILITANTS le 21 Septembre

Ce sera à 15 heures salle de réunion de Saint-Vivien : Préparation des activités jusqu’à la fin de l’année: la lutte contre les idées du FN sera sans doute le « plat ». Préparation de l’AG . Pot de l’amitié de mise !!

FISCALITE ET SOLIDARITE

Depuis que l’affaire Cahuzac fait, à juste titre, l’objet d’un grand scandale, on remet sur le « Tapie » les évasions fiscales, d’ autres détournements ou abus qui, depuis fort longtemps, empoisonnent l’atmosphère de ce pays. C’est un sport national que de chercher à échapper aux contributions que tout un chacun doit acquitter. On cherche à ne pas payer ses impôts, à transformer les contributions sociales en « charges », démontrant ainsi que l’on considère ces obligations comme injustes, sans utilité réelle, moralement sans fondements.

Pourtant s’il y a un héritage significatif de notre révolution de 1789 c’est bien que l’accès de tous à l’éducation et aux soins soit déclaré comme un droit. Les droits sont respectés parce que la force publique en assure les ressources, en garantit l’application ; il lui incombe donc de collecter les contributions nécessaires parmi les citoyens.

En effet dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen il est clairement précisé dans l’article 13 : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable, elle doit être également répartie entre les citoyens en raison de leurs facultés ».

Évidemment depuis, les domaines d’intervention de l’État se sont agrandis, les notions de solidarité se sont imposées progressivement. En 1895 la première proposition de la progressivité de l’impôt est déposée : les plus riches doivent payer plus dans une république fraternelle. Cette proposition est rejetée dans un premier temps, puis elle est acceptée en 1914 à la veille de la déclaration de guerre.

A la fin de la deuxième guerre mondiale, les grandes bourgeoisies discréditées se voient imposer la progression de l’impôt et la mise à disposition de l’État d’une part importante des richesses produites nationalement. Ce système est associé aux contributions des employeurs à la sécurité sociale (salaire différé) ; ces contributions font partie des droits des salariés. L’ensemble constitue alors un système cohérent plaçant au centre de la vie d’un État le bien des citoyens et de leur famille.

Depuis les classes possédantes n’ont eu de cesse de discréditer les droits sociaux, de chercher à délégitimer cette notion et celle d’ État social.

En diminuant le financement des services publics elles en baissent l’efficacité et favorisent le discrédit de ceux-ci vis à vis de nos concitoyens.

Ce sont bien les classes possédantes qui utilisent les niches fiscales, soutiennent « le bouclier fiscal », pratiquent l’évasion fiscale vers les paradis du même nom, souhaitent la diminution des services hospitaliers, organisent la privatisation d’une partie des services publics afin de détourner à leur profit tout ce qui relève de la solidarité nationale.

Il est urgent que l’on mobilise autour de l’idée que l’impôt progressif, que les contributions patronales ne sont pas des charges, mais sont des nécessités non seulement de solidarité mais aussi d’équilibre de nos sociétés.

La question n’est pas seulement nationale car le règlement du problème posé par les paradis fiscaux ne peut se faire que par un accord a minima européen. Il faut que les gouvernements imprégnés de libéralisme comprennent, aussi, que les intérêts de tous sont menacés par le non respect de la dignité de ceux qui voient leurs droits remis en question par la mise en danger de la solidarité nationale.

L. Rieux

Inspiré par Hommes et Libertés de Mars 2013