Lettre 3 de la section LDH de Besançon

Nous sommes très nombreux à être mobilisés contre la loi retraite. Nous l’avons exprimé massivement, calmement dans le cadre légal de notre État de droit et ce depuis de longs mois malgré le salaire perdu durant les journées de grève. Cela a été sans effet. Les organisations syndicales ont écrit au président de la République. Il n’a pas jugé bon de simplement leur répondre. Les parlementaires, singulièrement ceux de la Nupes, mais pas seulement, ont cherché à faire valoir une autre vision. Mais craignant d’être mis en minorité le gouvernement a choisi le 16 mars dernier d’utiliser l’article 49.3

Depuis, la mobilisation continue mais le président et le gouvernement ne veulent toujours pas entendre. Non content d’avoir fait adopter cette loi aussi inutile pour le financement des retraites qu’injuste pour celles et ceux qui ont les emplois les plus difficiles et précaires, Emmanuel Macron pérore et prétend chercher à pacifier le pays.

Pour cela il envoie sa police contre les manifestants. Il dit aller à la rencontre des Français mais n’accepte que ceux qui ont été triés sur le volet. C’est pourquoi nous avons dû sortir casseroles et sifflets. Et que font les préfets, représentants de l’État dans le département et la région ? Ils les interdisent en détournant, pour leurs propres besoins, l’actuelle législation anti-terroriste du Code de sécurité intérieure.

En effet, depuis quelques jours tous les déplacements du chef de l’Etat s’accompagnent d’arrêtés instaurant un périmètre de protection. Les cortèges, les défilés, les rassemblements revendicatifs ou les « dispositifs sonores » (comprenez casseroles et sifflets) sont interdits.

Et ceux qui les documentent sont placés en détention. C’est ce qui est arrivé mercredi dernier à Toufik de Planoise, journaliste bisontin qui a été placé en garde à vue une journée alors qu’il avait fait son travail de reporter lors d’une précédente manifestation. C’est aussi ce qui s’est passé le jeudi 27 avril au fort de Joux.

Heureusement, grâce à l’action conjointe de la LDH, du Syndicat des Avocats de France (SAF), du Syndicat de la Magistrature (SM) et de nombreux citoyennes et citoyens, l’arrêté de la Préfecture du Doubs a été retiré juste avant que le tribunal administratif de Besançon n’examine les requêtes déposées et se prononce dessus. C’est une victoire pour ceux dont l’obsession est de défendre l’État de droit.

Mais il n’a pas pour autant été possible d’approcher le fort de Joux. C’est ainsi que le Président du pays de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen traite ses habitants, ses citoyennes et ses citoyens.

Dans tout le pays, la LDH avec le SAF, le SM et les organisations syndicales mènent une guérilla judiciaire pour faire respecter le droit par … le gouvernement. C’est extrêmement grave. C’est bien la démocratie qui est en danger pour nous toutes et tous.

Comme souvent dans le passé, la question migratoire sert de diversion politicienne aux urgences démocratiques, sociales et écologiques. Dès le passage en force sur la réforme des retraites, les ministres de l’économie et de l’intérieur se sont empressés d’en faire la nouvelle priorité gouvernementale.

Même si la première ministre a obtenu le report du projet de loi envisagé (dénommé : projet de loi immigration), la vaste opération policière de Mayotte contre les migrants qui y ont trouvé refuge depuis des années (principalement ceux issus de l’archipel des Comores) est une façon de mettre en scène cette obsession gouvernementale à 8.000 kms de l’hexagone national.

Comme l’ont montré dès la première semaine les ratés de cette intervention suspendue par des juges locaux indépendants, elle ne peut qu’attiser les tensions au lieu de les résoudre.

Cela s’est notamment traduit par un appel au meurtre de jeunes comoriens par un élu mahorais (le vice-président du conseil départemental de Mayotte), contre lequel la LDH a déposé plainte sur le fondement de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881, incriminant la provocation non suivie d’effet à commettre des atteintes volontaires à la vie et l’incitation à la haine raciale.

Enfin, n’oublions pas que quoi qu’il se passe en France pour les citoyens français, les étrangers, quel que soit leur statut, sont plus que jamais des boucs émissaires. C’est pourquoi nous avons signé, avec des dizaines d’autres associations, l’Appel contre l’immigration jetable pour nous opposer à la politique discriminatoire du gouvernement fondée sur le soupçon et la répression en matière de migration et d’asile. Au contraire nous revendiquons une politique migratoire digne et le respect des droits de toutes et tous.

N’hésitez pas à vous manifester par retour de mail et à vous abonner à notre lettre mensuelle en nous écrivant à l’adresse suivante : besancon@ldh-france.org

Barbara Romagnan

Pour la section LDH de Besançon

Mai 2023