Dictées, leçons de grammaire, calcul mental et même format du cahier… Le ministre de l’Education a dévoilé jeudi 26 avril des recommandations pour les enseignants du primaire visant à améliorer « la réussite des élèves ».
La ligue des droits de l’homme ne peut que se féliciter de cette volonté de rehausser le niveau des élèves, d’ailleurs nous nous reconnaissons dans ce que précise le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui dispose, dans son article 13 :
« La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’Etat ».
L’éducation dans notre pays est un domaine capital, elle prépare l’avenir de notre République, c’est aussi le plus gros budget de l’Etat. Pour ces raisons – parmi d’autres d’ailleurs – nous ne souhaitons pas qu’elle puisse devenir un enjeu de politique intérieure.
Nul ne peut se l’approprier, c’est le bien commun de tous et à ce titre, les enseignants ont une délégation, celle de relayer auprès des enfants de la République, quel que soit leur origine, leur milieu, l’endroit où ils demeurent le contenu d’un programme scolaire régulièrement établi et similaire partout.
Monsieur le Ministre de l’Education Nationale a passé toute sa carrière au sein du milieu de l’éducation. Au vu de son curriculum vitae, il a été attaché temporaire d’enseignement et de recherche à l’université Panthéon-Assas puis maître de conférences et après sa réussite à l’agrégation professeur de droit public.
Il a par ailleurs été recteur de l’académie de la Guyane mais aussi de l’académie de Creteil, avec entretemps un poste d’attaché au le cabinet du ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de l’époque Gilles de Robien. Point d’orgue avant qu’il ne devienne ministre, il a exercé le poste – prestigieux s’il en est, de directeur général de l’enseignement scolaire (DGESCO) auprès de Luc Chatel. Signalons que ce poste est hautement stratégique, puisqu’il chapeaute tous les services, à la fois dans l’élaboration des programmes, de leur application mais aussi de leur validation – via les inspections que tous les enseignants subissent.
Signalons aussi – ombre à son tableau – qu’il a été notamment l’inspirateur du projet de repérage à la maternelle des élèves présentant des risques lors des apprentissages qui a provoqué un tollé dans la communauté éducative à l’automne 2011, mais ce n’est pas l’objet de notre propos aujourd’hui.
On ne peut pas lui faire le grief de dire qu’il ne connaît pas le monde de l’enseignement, il en est un pur produit, à la fois parce qu’il a appliqué les directives qui venait du ministère (lorsqu’il était enseignant puis recteur), mais qu’il a aussi donné des ordres puisqu’il a été directeur général de l’enseignement scolaire, en étant en quelque sorte un « ministre bis » de l’Education nationale.
Aujourd’hui, par un pur hasard très probablement commandité dans une rancœur que la majorité porte à tout ce qui a trait au bien commun de tous – les services publics – il découvre que les programmes ne sont pas adaptés, que les enfants ne maîtrisent pas les fondamentaux en rentrant au collège et qu’il faut revenir aux bonnes vieilles méthodes d’antan (dictée, calcul mental, etc.) comme si elles étaient devenue par magie la panacée.
Signalons qu’à cette époque pas si lointaine (plus de 50 ans), qu’il semble parer de toutes les vertus, il existait un examen d’entrée en 6ème, les jeunes enfants des milieux ouvriers étaient orientées dès la fin des études primaires vers les collèges spécialisés dans le technique ou le professionnel, l’égalité des chances était plutôt l’égalité des malchances.
Combien d’enfants d’ouvriers arrivaient à poursuivre des études supérieures ?
En distillant par des propos maladroits (en étant optimiste à son égard) ou prémédités, il tente de discréditer mais aussi de dévaloriser les enseignants qu’il encadrait pourtant lorsqu’il était « haut fonctionnaire ». Il laisse supposer que l’administration a toujours alloué aux enseignants une totale liberté pédagogique et il semble insinuer que les enseignants n’ont qu’un seul but, s’extraire de leurs obligations en renonçant à leur mission et en dispensant un enseignement de médiocre qualité.
La ligue des droits de l’homme a confiance dans l’institution, et elle estime que ce n’est pas en réinventant les bonnes vieilles recettes du passé qu’on arrivera inculquer à nos enfants ce qu’il leur manque aujourd’hui.
Nous estimons que les valeurs de notre République doivent être inculquées à nos enfants sans aucune discrimination, entre les nationaux et les migrants (légaux ou illégaux), que l’égalité doit être totale entre les différents endroits de notre République, du 7ème arrondissement de Paris, à Mayotte en passant par Stains ou Bagnolet.
Nous voulons une réelle égalité des chances et nous doutons qu’en voulant stigmatiser les enseignants en invoquant leur pseudo-renoncements que nous arriverons à bâtir – avec eux – la société du 21ème siècle.
Un enseignant n’est pas une machine à enseigner, il doit tout en suivant scrupuleusement les programmes, adapter son enseignement à son public pour qu’à la fin d’une année scolaire, le contenu de ce qu’il aura été transmis soit rigoureusement similaire sur tout le territoire de notre République.
Les recettes « vintage » adaptée à la mode « nouvelles technologies » ne nous semblent pas adaptées, revenons-en plutôt aux fondamentaux de l’enseignement scolaire, dans leur principe et pas forcement dans leur pratiques qui ont été contestables parce que quelquefois très stigmatisantes.
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