Geneviève Legay, manifestante blessée à Nice : ce que l’on sait

Publié sur lesinrocks.com
A la suite de sa famille, l’association Attac, dont elle est porte-parole à Nice, dépose également plainte. Le point sur ce que l’on sait.

Une militante bien connue

Ce 23 mars à Nice, Geneviève Legay, 74 ans, a été gravement blessée suite à une charge des forces de l’ordre, alors qu’elle manifestait avec les “gilets jaunes”. Très connue du milieu militant de gauche niçois, elle est porte-parole d’Attac 06. Cette association altermondialiste, qui a récemment fêté ses vingt ans, revendique la non-violence. Geneviève Legay portait d’ailleurs un drapeau pour la paix lors de sa chute brutale. “Geneviève est militante depuis des dizaines d’années, déterminée, courageuse, non-violente, positive, et qui revendique son droit à être une citoyenne et à manifester en tant que telle”, explique Annick Coupé, secrétaire générale d’Attac, lors d’une conférence de presse à Paris le 26 mars. “Elle est connue pour être une militante responsable et pacifique”, insiste-t-elle, en écho aux déclarations d’Emmanuel Macron. “Geneviève était là pour dire qu’à n’importe quel âge, on peut manifester ses opinions”, estime l’avocat de la famille.

Son état de santé

Les images de sa chute, et du sang qui entourait sa tête alors qu’elle était à terre le 23 mars ont fait craindre le pire. L’avocat de la famille, maître Arie Alimi, a délivré des nouvelles rassurantes sur son état de santé. Geneviève Legay a subi plusieurs fractures du crâne, souffre d’hématomes sous-duraux, et a également eu quatre fractures des cotes liées à la poussée qu’elle a subie. Cependant, “elle va mieux”, rassure maître Alimi : “Son état est stable, les hématomes sous-duraux n’évoluent pas mal, mais ne se résorbent pas non plus”. Elle est “toujours en surveillance” à l’hôpital. Ce 27 mars, Attac a fait savoir qu’elle restait “dans un état de santé très fragile”.

Les plaintes déposées ou sur le point de l’être

Une première plainte a été déposée par les deux filles de M. Legay, pour “violences volontaires en réunion avec arme par personnes dépositaires de l’autorité publique et sur personne vulnérable”, car elle avait 73 ans au moment des faits. Cette plainte, est également motivée par un deuxième chef de mis en cause, celui de “subornation de témoin”. En effet, selon maître Alimi, qui rapporte le récit fait par Geneviève Legay, pleinement consciente, à ses filles, des fonctionnaires de police sont venus la voir à son lit d’hôpital dès le lendemain des faits : “Geneviève a déclaré à son réveil qu’elle avait été interrogée le lendemain par des fonctionnaires de police. Une policière lui a demandé à plusieurs reprises de préciser qu’un cameraman était à l’origine de sa chute, et pas les forces de l’ordre”. Il ajoute qu’“elle a été extrêmement perturbée par ces nombreuses demandes des fonctionnaires de police, et s’en est émue”. En réalité, “le journaliste a lui-même été victime [de la charge policière]”. Enfin, le préfet des Alpes-Maritimes est également visé pour “complicité de violences volontaires aggravées”.

Une deuxième plainte va être déposée ce 26 mars, vers 14 heures, par Attac, pour le seul motif de “violences volontaires en réunion avec arme par personnes dépositaires de l’autorité publique et sur personne vulnérable”. “Contrairement aux allégations des autorités, tout prouve qu’elle était debout, bien portante, et qu’elle s’exprimait tranquillement, argumente Annick Coupé, secrétaire générale d’Attac. Ensuite, un membre des forces de l’ordre l’enjambe alors qu’elle est à terre. C’était donc bien une charge policière”.

Fake news ? 

L’avocat de la famille de Mme Legay accuse Emmanuel Macron de diffuser une fausse nouvelle, lorsqu’il déclare dans une interview à Nice-Matin que “cette dame n’a pas été en contact avec les forces de l’ordre. Elle s’est mise en situation d’aller dans un endroit interdit”. En effet, M. Macron donne déjà les conclusions d’une enquête sur laquelle le procureur de Nice émet de sérieux doutes… “Il déclare cela sans avoir les éléments de l’enquête qui montrent l’application et le contact des forces de l’ordre. On peut dire qu’il s’agit de fausses nouvelles”, estime maître Alimi.

Selon lui, “après avoir comparé les différentes vidéos, on voit bien que la personne poussée délibérément par le policier ne peut être que Geneviève Legay”. Il évoque notamment des nouvelles images de la chaîne d’information CNews.

Une demande de dépaysement envisagée

Enfin, l’avocat de la famille “envisage de demander le dépaysement de cette enquête, car le procureur a pris fait et cause pour les personnes accusées”, estime-t-il. Le procureur de la République de Nice, Jean-Michel Prêtre, a ouvert, samedi, “une enquête classique en recherche des causes des blessures”. Selon lui, Mme Legay n’a eu “aucun contact avec un agent de sécurité”. “Elle a été poussée, la chute est intervenue alors que les forces de l’ordre intervenaient pour une action de dispersion”, dit-il. Maître Arié Alimi espère pour sa part qu’une enquête préliminaire sera ouverte, pour que l’IGPN (police des polices) soit saisie.

Quelques heures avant la charge policière et ses blessures, Geneviève Legay était interrogée par CNews et disait qu’elle pensait « avoir touché le cœur » des policiers. “J’ai 73 ans, qu’est-ce qui peut m’arriver ?”, concluait-elle.