Immigration et asile : des objets d’inquiétude ou des sujets de droit ?

Communiqué de la LDH

L’Assemblée nationale vient de voter en première lecture le texte de loi « pour une immigration maîtrisée et pour un droit d’asile efficace ». La Ligue des droits de l’Homme (LDH) tient ce texte pour le plus rigoureux de toute l’histoire de la VRépublique contre les migrantes et les migrants. Jamais, en effet, un gouvernement n’aura été aussi loin dans la maltraitance des personnes étrangères, systématiquement perçues comme indésirables et comme sources de problèmes.

Hiérarchisation entre migrants, enfermement des mineurs, prolongation de la durée de la rétention, maintien du délit de solidarité, procédures rapides rendant plus difficiles les demandes d’asile, suspicion généralisée à l’encontre des parents d’enfants français… Rien n’aura été épargné pour compléter un portrait du migrant comme danger social, rien n’aura été de trop pour satisfaire au désir d’ordre de ceux qui camouflent leur inhumanité en efficacité ordonnée, au mépris des droits fondamentaux reconnus à chacun. La LDH rappelle que les demandes d’asile sont au nombre de cent mille par an. Pourtant les débats parlementaires ont été l’occasion d’une surenchère injustifiée au regard des faits statistiques les plus robustes, telle la stabilité des flux migratoires.

La LDH salue celles et ceux qui ont eu la lucidité et le courage de dire non, prend acte de l’absence de bien d’autres lors du vote, mais regrette qu’une majorité ait approuvé le projet de loi. Face au risque de durcissement du texte au Sénat, la LDH en appelle à la conscience et à la responsabilité des parlementaires lors des futurs votes.

C’est maintenant qu’il faut intervenir dans le débat public. Dans l’opposition à cette mauvaise loi, la LDH invite chacune et chacun à prendre sa place, dans les Etats généraux sur les migrations organisés dans toute la France les 26 et 27 mai 2018, dans les mobilisations citoyennes dénonçant le « délit de solidarité » et l’enfermement des mineurs, pour l’accueil des migrants, et particulièrement à la Marche solidaire de Vintimille (30 avril) à Londres (8 juillet).

Donner des droits aux uns, ce n’est pas en retirer aux autres. La LDH rappelle, au contraire, que réduire ceux des uns fragilise d’autant ceux des autres. C’est à ce titre qu’il faut considérer et traiter les migrants pour ce qu’ils sont, des sujets de droit.

Paris, le 2 mailogo

 

 

JUSQU’OÙ IRONT LE GOUVERNEMENT, LA POLICE ET LA JUSTICE POUR DÉCOURAGER LA SOLIDARITÉ 

JUSQU’OÙ IRONT LE GOUVERNEMENT, LA POLICE ET LA JUSTICE POUR DÉCOURAGER LA SOLIDARITÉ ?

 

Communiqué du collectif Délinquants Solidaires, dont la LDH est membre
Au Col de l’Échelle, impunité pour les identitaires d’un côté, prison ou tabassage pour les soutiens pacifiques des migrants de l’autre…Alors que des citoyen-ne-s, associations et collectifs locaux se mobilisent depuis de longs mois pour organiser l’accueil de personnes exilées sur leur territoire face aux pratiques irrégulières des forces de l’ordre, les évènements de ce week-end à Briançon montrent bien que le délit de solidarité a encore de beaux jours devant lui.Dans le cadre d’une mise en scène médiatique au col de l’Échelle à la frontière franco-italienne, le groupe d’extrême-droite Génération Identitaire a bloqué la frontière entre le 21 et 22 avril, étalant des messages haineux en pleine montagne, barrant la route à des personnes épuisées par un trajet en montagne, les mettant ainsi potentiellement en danger, puis relayant les photographies de leurs faits d’armes sur les réseaux sociaux à grand renfort de commentaires xénophobes. Ainsi, à l’instar de ce qui s’est passé lors de l’action organisée en Méditerranée à l’été 2017 pour saborder les sauvetages de personnes migrantes, des militant-e-s d’extrême droite de plusieurs pays européens sont venues bloquer symboliquement la frontière sans que les forces de l’ordre interviennent ou que les autorités condamnent clairement cette action, se bornant à évoquer des « gesticulations ».

Le dimanche 22 avril, une manifestation pacifique composée de plus de 150 personnes exilées et de leurs soutiens est partie de Clavière en Italie pour rejoindre Briançon à pieds et ainsi protester contre la militarisation de la frontière et la non prise en charge des personnes mineures ou en demande d’asile par les autorités françaises. Les organisations locales et régionales alertent depuis 2015 sur les atteintes systématiques aux droits des personnes migrantes à la frontière franco-italienne, de Menton à Briançon sans qu’elles soient entendues par les responsables politiques.

A l’issue de cette manifestation spontanée, six personnes ont été interpellées par les forces de l’ordre. Trois ont finalement été relâchées mais trois autres sont toujours en détention provisoire, enfermées à Gap et à Marseille. Poursuivies pour « avoir par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée irrégulière en France de plus d’une vingtaine d’étrangers, avec cette circonstance que les faits ont été commis en bande organisée », elles risquent selon la loi française jusqu’à 10 ans de prison assortie de 750 000 euros d’amende. Le jugement ayant été renvoyé au 31 mai 2018, ces trois personnes originaires de Suisse et d’Italie resteront donc potentiellement enfermées jusqu’à cette date.

En marge de la manifestation, cinq participant-e-s attablé-e-s à la terrasse de l’Hôtel de la Gare à Briançon vont faire l’objet d’un contrôle d’identité. Les policiers demandent à l’une des personnes de les suivre, refusant d’en donner la raison. « On va pas te le répéter deux fois » lance un policier. La personne sort son téléphone pour prévenir un avocat, les policiers le lui arrachent et la projettent au sol, lui sautent dessus. Face contre terre, coups de matraque, clef de bras, coup de genoux, pouces enfoncés dans les yeux, étranglement, la personne est finalement traînée par les pieds dans les escaliers, toujours face contre terre, puis jetée sur le goudron deux mètres plus loin. Alertés par les cris, des gens arrivent, les policiers gazent tout le monde, y compris la personne gisant au sol, visage tuméfié, en sang, la mâchoire gonflée, respirant difficilement et aveuglée par les gaz lacrymogènes. Souffrant de multiples contusions, d’un énorme hématome à la mâchoire, d’une entorse aux cervicales, et de douleur au niveau de la trachée, cette victime de la violence policière est amenée aux urgences. Résultat : 10 jours d’interdiction totale de travail.

Il est inadmissible que ces personnes soient actuellement privées de liberté ou violentées alors qu’elles ont été interpellées dans le cadre d’une manifestation pacifique. En outre, ces militant-e-s de la solidarité ont participé à de nombreuses opérations de sauvetage en montagne, se rendant juste « coupables » d’assistance à personne en danger. Un cas de plus de dissuasion de la solidarité.

Le collectif Délinquants solidaires s’inquiète du peu de cas qui est fait par les pouvoirs publics de l’expression sans complexes d’une xénophobie et du blocage des frontières par des militant-e-s d’extrême-droite, qui a pour conséquences immédiates la mise en danger des personnes migrantes parmi lesquels des mineur-e-s, ainsi que le déni pur et simple du droit d’asile, qui est encore une obligation conventionnelle de la France.

Le collectif Délinquants solidaires condamne fermement la détention de soutiens des exilé-e-s et appelle à leur libération immédiate. Par ailleurs, il répète que la solidarité et l’accueil sur nos territoires manifestés par des milliers de citoyens et citoyennes doivent être encouragés au lieu d’être systématiquement dénigrés ou réprimés. Si les député-e-s ont raté l’occasion d’abroger le délit de solidarité, nous restons mobilisé-e-s et solidaires des personnes exilées pour réclamer un accès aux droits effectifs pour toutes et tous et le droit de s’organiser collectivement.
Paris, le 26 avril 2018

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Soirée débat, samedi 31 mars à Perpignan avec Alice Gautreau, organisée par l’Assemblée des Etats Généraux des Migrations 66

Soirée débat
Samedi 31 mars à 19h – Salle des Libertés
3 rue Edmond Bartissol – à Perpignan
Projection de l’Odyssée de l’espoir
(documentaire sur l’AQUARIUS)
Conférence d’Alice Gautreau et présentation de son livre
« Seuls les poissons morts suivent le courant »

 

L ’Assemblée des Etats Généraux des Migrations 66 (dont la LDH-66 fait partie) , en mémoire de ces milliers  d’enfants, de femmes et d’hommes qui ont péri en Méditerranée, dans le désert, ou en captivité, alors qu’ils avaient entrepris un voyage pour une vie meilleure, plus sûre et plus digne, comme tout être humain peut la désirer, a invité pour animer cette soirée, l’association « SOS Méditerranée » et en particulier Alice GAUTREAU sage-femme et membre de l’équipe médicale embarquée sur l’AQUARIUS, un des bateaux qui sillonne la Méditerranée pour porter secours aux migrants.
Ces actions de solidarité comme tant d’autres sont aujourd’hui criminalisées par
l’Union européenne comme le montre le récent exemple du bateau de l’OGN
Catalane Proactiva Open Arms, immobilisé en Sicile pour avoir refusé de rendre aux
autorités libyennes les migrants qu’il venait de sauver du naufrage. L’ONG est de
plus poursuivie pour « association criminelle visant à faciliter l’immigration
clandestine ».

Etats généraux des migrations

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