Un communiqué de l’Observatoire lillois des libertés publiques et des pratiques policières (LDH Lille et SAF Lille), le 7 juillet 2025.
L’Observatoire des libertés publiques et des pratiques policières (OL3P)de Lille a documenté dans un rapport le maintien de l’ordre disproportionné et brutal survenu le 7 juillet 2024 à Lille, au soir du deuxième tour des élections législatives.
Nous tenons tout d’abord à faire part de notre profonde consternation : l’enquête de l’IGPN, pour laquelle nos observateurs avaient été entendus et qui conclut à des violences injustifiées commises par des agents de la brigade anti-criminalité (BAC) d’après les dires de la victime ayant eu 30 jours d’ITT, a été classée sans suite, faute d’identification des policiers mis en cause. Autrement dit, parce que les auteurs n’ont pas encore pu être identifiés, l’affaire est enterrée – sans même que l’avocat de la victime n’ait eu accès au rapport.
Nous rappelons pourtant que des violences volontaires ayant entraîné une ITT de plus de huit jours, lorsqu’elles sont commises par une personne dépositaire de l’autorité publique, sont passibles de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.
Ce classement sans suite, malgré notre rapport et les conclusions de l’IGPN, ne peut que nourrir un sentiment d’impunité. Il alimente une défiance accrue entre les populations et les forces de l’ordre, là où la confiance doit être activement restaurée.
Le défaut d’identification des agents en est aujourd’hui un problème central. Le RIO (numéro d’identification individuel) – lorsqu’il est porté – est imprimé en caractères de quelques millimètres sur un bandeau amovible, le rendant illisible en contexte d’intervention. Des pratiques illégales de dissimulation de ce numéro sont par ailleurs régulièrement observées.
Ne pas porter le RIO, c’est décliner toute responsabilité individuelle, refuser toute possibilité de réparation aux victimes, offrir l’impunité aux agents et encourager des usages illégitimes de la force. Le 7 juillet 2024, les observateurs de l’OL3P n’ont pas vu de RIO sur les agents de la BAC qu’ils ont croisés et filmés.
La LDH et l’ACAT-France ont saisi le Conseil d’État qui, dans sa décision du 11 octobre 2023, a enjoint le gouvernement de prendre, dans un délai de 12 mois, toutes les mesures nécessaires pour rendre le RIO visible et lisible. Cette réforme, qui aurait pu permettre à l’enquête de l’IGPN d’aboutir, n’a toujours pas été appliquée. En octobre 2024, l’ACAT-France et la LDH ont donc saisi à nouveau le Conseil d’État. Car la lisibilité du numéro d’identification n’est pas un détail : c’est une exigence démocratique.
Nous regrettons par ailleurs les déclarations publiques du Préfet du Nord, tenues après le classement sans suite, affirmant que les forces de l’ordre n’auraient rien à se reprocher et que « le maintien de l’ordre a été assuré par un usage proportionné de la force » (Le Monde, 11 mars 2025). Ces propos sont contredits à la fois par les conclusions de l’IGPN et par les observations de terrain réalisées par nos membres.
C’est ce que nous avons exposé dans un courrier adressé au Préfet le 11 avril dernier, l’appelant à prendre toutes les mesures nécessaires, y compris disciplinaires, pour que ces faits, qui déshonorent les forces de l’ordre, ne restent pas sans suite. N’ayant à ce jour reçu aucune réponse, nous rendons ce courrier public.
Dans l’attente d’une réaction officielle, l’Observatoire des libertés publiques et des pratiques policières restera pleinement mobilisé. Il continuera de documenter le maintien de l’ordre pour garantir le respect du droit fondamental à manifester.
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