« JE SUIS CHARLIE »: RASSEMBLEMENT ORGANISE A PARAY-LE-MONIAL A L’INSTIGATION DE LA LDH (10 janvier 2015)

Chers amis,
« Nous sommes réunis aujourd’hui pour rendre hommage aux 17 victimes de l’attentat qui s’est produit le 7 janvier contre Charlie Hebdo : Frédéric Boisseau, Franck Brinsolaro, Jean Cabut, Elsa Cayat, Stéphane Charbonnier, Philippe Honoré, Bernard Maris, Ahmed Merabet, Mustapha Ourrad, Michel Renaud, Bernard Verlhac, Georges Wolinski. Par cet attentat, la République a été frappée à travers deux de ses valeurs fondamentales, la liberté et la fraternité. La liberté qu’on a voulu tuer, c’est la liberté d’expression, et plus précisément celle de blasphémer, celle de rire des religions, celle qui induit l’esprit critique et l’indépendance d’esprit. Contestée par les fondamentalistes de tout bord -Charlie Hebdo a subi 14 procès en 20 ans de la part des catholiques-, cette liberté est depuis quelques années plus fortement associée par les mêmes au rejet des Lumières, de la République, de la démocratie et de l’Etat de droit, bref tout l’héritage de la Révolution Française et de plus de 200 ans de conquêtes politiques et sociales. Liés aux populismes les plus radicaux, les fondamentalistes s’attaquent aux hommes libres par des menaces, des insultes et un harcèlement qui sèment la haine au quotidien sur les réseaux sociaux et visent à tuer, par la peur, l’esprit créatif et satirique, la critique historique et politique, l’impertinence, le rire et le goût de la vie qui les anime. Dans ce climat délétère, malgré la conscience qu’ils avaient du danger, malgré leur peur, Charb, Cabu, Philippe Honoré, Tignous et Wolinski ont gardé le cap. Et c’est cet esprit de résistance investi par ces héros des temps modernes qui a suscité l’escalade finale de la violence. Quand les mots échouent à tuer Charlie Hebdo, la violence bascule alors dans celle, radicale, des armes, qui, croit-on, vont terroriser et éradiquer définitivement les contestataires rieurs des religions, des politiques et de leurs dérives.
Face à ce drame, nous exprimons d’abord notre tristesse et notre compassion à l’égard des familles et des amis des journalistes, des gendarmes, d’un agent d’entretien et d’un directeur de cabinet d’un maire. Pour rendre hommage aux victimes, pour honorer leur mémoire, nous, section de Paray-le-Monial de la Ligue des droits l’homme, voulons dire aujourd’hui, ici, avec vous, que nous avons entendu le message transmis de leur résistance pour défendre la liberté d’expression, et avec elle, un vivre ensemble inducteur de tolérance, en référence aux valeurs de la République et sous la protection de ses lois. Et parce que nous traversons une grave crise marquée par un retour du terrorisme et par la montée des populismes, elle réitère d’abord solennellement, ici, ses appels à la vigilance contre tous les propagateurs de racisme, de xénophobie, d’antisémitisme et d’islamophobie, ses appels au courage pour les dénoncer partout et ses appels à la raison pour résister à leur propagande insidieuse.
Face à ce drame, nous exprimons aussi notre fraternité à l’égard de nos amis plus particulièrement stigmatisés en ce moment. Et nous voulons les mettre en garde fraternellement de ne pas tomber dans le piège de l’amalgame : les fondamentalistes ont beaucoup plus de points communs entre eux qu’ils n’en ont avec leurs propres congénères confessionnels. Nous, citoyens français, devons nous efforcer de nous considérer d’abord en qualité de citoyens et d’arrêter de faire prévaloir des différences identitaires en particulier religieuses. C’est cela la fraternité : la citoyenneté qui fonde la République nous unit par delà tous les particularismes, elle nous donne en partage les mêmes droits, les mêmes valeurs et les mêmes devoirs à faire vivre et à faire progresser. Nous devons reconnaître par ailleurs que nous partageons maintenant le sort qui a frappé les Algériens des années 1990 et aujourd’hui les Tunisiens et que cela fonde une autre fraternité, élargie à nos amis du Maghreb. Face aux risques de nouvelles violences, c’est par la force de la raison que nous pourrons nous saisir de la mort de l’équipe de Charlie Hebdo pour nous élever, pour regagner du terrain sur la peur, pour réarmer notre citoyenneté et exprimer notre colère pour dire NON. NON, nous ne lâcherons rien ! Nous continuerons plus que jamais à défendre les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité et de laïcité qui sont au cœur de notre république. Parce qu’elles ont relevé le défi de la liberté au prix de leur vie, les victimes de l’attentat contre Charlie Hebdo nous donnent aujourd’hui le sentiment, par delà notre tristesse, d’être fiers de la France qui a pu générer des personnes de leur qualité. Ne les oublions pas…et soyons attentifs, chacun d’entre nous, à renforcer les valeurs et les principes qui les ont vivre libres. C’est ainsi que nous, dans les temps de confusion et de violence où nous sommes, nous ferons vivre la république. » Germaine Lemétayer, présidente de la section LDH de Paray-le-Monial.