Le 18 mars, le préfet de Saône-et-Loire a annoncé le projet de création d’un Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile (CADA) dans l’ancien lycée Sainte Marguerite-Marie de Vérosvres (du nom de la sainte de Paray-le-Monial, native de ce village du Charolais). Or entre le 19 et le 22 mars, le Journal de Saône-et-Loire et France 3 Bourgogne ont réagi à cette annonce en publiant des interviews et articles presque exclusivement à charge avec un étalage de xénophobie et de préjugés atteignant des sommets (voir ci-dessous). Pourtant les 58 commentaires des lecteurs du JSL attestent, dans le même temps, une certaine diversité d’opinion. La section LDH de Paray regrette aussi l’absence de prise en compte par les mêmes médias du débat organisé à la Motte-Saint-Jean le 18 mars rassemblant les acteurs de l’accueil des migrants: CADA, Amis du CADA, ancien élu, Restos du Coeur, LDH Paray, bénéficiaires du droit d’asile…plaçant le débat au niveau de l’histoire, de la géopolitique, du droit, des valeurs républicaines et humaines…La démocratie se définit aussi par le respect du pluralisme, de la diversité et par la promotion des valeurs républicaines. Nous publions ci-dessous la teneur de notre intervention au débat de la Motte-Saint-Jean.
http://france3-regions.francetvinfo.fr/…/saone-et-loire-les…
http://www.lejsl.com/…/centre-d-accueil-pour-150-migrants-l…
https://www.facebook.com/photo.php?fbid=1759469300941078&set=a.1715124528708889.1073741827.100006340748777&type=3
Les migrations, est-ce un problème ?
1-« Les migrations représentent un problème politique pour l’Europe parce qu’elles renforcent les populismes, Front National, Bloc Identitaire, Manif Pour Tous qui font des migrants les boucs-émissaires responsables de tous les maux que nous connaissons, en particulier de la crise sociale. Pour donner quelques exemples concernant la Manif Pour Tous, notre section a publié le 13 septembre 2015 un article sur son site Facebook pour dénoncer les prises de positions de quelques-uns de ses fondateurs présents à Paray en 2102 et de ses dirigeants et sympathisants actuels, CIVITAS, Bernard ANTONY, Xavier LEMOINE, Marie-Claude BOMPART, Christian VANNESTE, Bruno GOLLNISH, Dominique REY, évêque de Toulon-Fréjus, les VEILLEURS de Cognac. En voici quelques exemples. Civitas a lancé une pétition intitulée « Stop immigration. Contre la déferlante migratoire » ; Xavier Lemoine, maire de Montfermeil, affirme dans Ha’aretz, le 8 septembre « que les musulmans ont déclaré la guerre à la France et cherchent à la soumettre. Pour les Français, c’est une question de vie ou de mort » ; les Veilleurs de Cognac publient sur leur site Facebook les exhortations d’Egalité et Réconciliation » « de ne pas faire l’abbé Pierre avec les migrants », « Bruno Gollnish, affirme dans son blog, le 3 septembre « C’est en envoyant un signal de fermeté, de refus de toute immigration illégale que l’on commencera à tarir ce flux continu et les morts atroces qu’il génère. L’Australie y est parvenue en mettant en place une politique de tolérance zéro qui interdit à tout clandestin de prendre pied sur le sol australien. Cette fermeté là a été payante. Faute de quoi,… elle condamne la France, l’Europe bruxelloise à une submersion que les gigantesques écarts démographiques entre le nord et le sud rendent inéluctables ; tuant par là même ce qui reste comme îlots de prospérité en Europe même ». Enfin pour terminer, Dominique Rey dans une interview au Figaro du 7 septembre demande le rétablissement des frontières, un tri des réfugiés qui exclut « ceux qui « gommeraient notre identité » et la conversion des musulmans qui se trouvent sur le sol français. Depuis septembre, ces prises de positions se sont radicalisées, elles dépassent maintenant le cadre de l’extrême-droite et se répandent dans les rangs de la droite voire de la gauche et ont des répercussions électorales inquiétantes dans toute l’Europe.
2- Oui, les migrations sont un problème… mais surtout pour ceux qui migrent, parce que la migration, c’est l’une des expériences humaines les plus éprouvantes, les plus douloureuses qui soient. Il faut rappeler que la décision de quitter son pays est afférente à des pertes immenses, biens matériels, réseau familial et social, dont il faudra faire le deuil tout en intégrant progressivement des repères dans le nouvel environnement du pays d’accueil. On sait par les études qui ont été faites sur le sujet que ce processus de deuil et d’acquisition de repères intégrateurs est long et éprouvant et que ses résultats sont inégaux en fonction de critères précis : l’âge des migrants, leur départ isolé ou familial, leur facilité ou non à trouver du travail, le sérieux des motivations. Et enfin le genre.
A ce sujet, le 10 février 2016, le ¨Parlement européen a publié un rapport de la Commission des Droits de la Femme qui constate l’accroissement depuis janvier 2016 du nombre des demandeuses d’asile qui est passé d’ 1/3 en 2015, à 55% début 2016 et l’aggravation de leurs conditions migratoires : elles sont en effet victimes de trois types de violences : les abus sexuels, le mariage forcé ou précoce et la prostitution exercés par des prédateurs qui se trouvent parmi les migrants, les réseaux de passeurs voire les autorités d’accueil.
La commission demande donc que des mesures à la fois matérielles, médicales et juridiques soient prises pour sécuriser leur parcours : l’ouverture immédiate d’itinéraires sûrs et légaux pour les demandeurs d’asile, des regroupements familiaux systématiquement favorisés ; un logement et des installations sanitaires séparées pour les hommes et les femmes; une formation complète et obligatoire des enquêteurs et interprètes sur les violences sexuelles, les traumatismes et la mémoire; des soins médicaux et psychologiques spécifiques. Elle demande aussi que les migrantes se voient octroyer un statut juridique indépendant de celui de leur conjoint afin d’éviter leur exploitation, de réduire leur vulnérabilité et de parvenir à une plus grande égalité.
3-Par contre, les migrations ne sont pas un vrai problème pour nous, Français et Européens, parce que par delà tous les arguments, nous avons un patrimoine républicain qui fait prévaloir des valeurs, la fraternité, l’égalité, la laïcité et l’universalisme qui constituent les fondements non négociables de notre pensée et de notre action. Prévalent aussi les lois françaises européennes et internationales sur le droit d’asile qui est inscrit dans le préambule de notre constitution, dans la Convention de Genève sur les réfugiés du 28 juillet 1951 et du droit de l’Union européenne, plus particulièrement du règlement du 26 juin 2013 portant respectivement sur les procédures et les normes d’accueil. L’accueil des migrants s’impose donc à nous et ceux qui le réfutent contreviennent à la loi et il faut le dire. En plus de l’obligation légale, il faut ajouter la force des traditions d’accueil qui a fait dans le passé de la France une terre d’asile voire le simple devoir d’humanité.
Le 8 septembre 2015, la LIGUE DES DROITS DE L’HOMME a donc publié la déclaration suivante :
« NOUS, CITOYENNES ET CITOYENS D’EUROPE, sommes de la même humanité que ces femmes, ces hommes et ces enfants qui fuient la guerre et la misère pour ne pas mourir. Comme eux, nous avons des enfants, nous travaillons, nous aspirons au bonheur et nous savons les efforts nécessaires pour construire nos vies dans un monde où la loi du plus fort est toujours en vigueur. Le sort que l’Europe, celle qui a connu tant de guerres, qui a envoyé tant de réfugiés sur les routes, leur réserve nous révolte.
L’Europe ne peut proclamer que ses valeurs reposent sur les droits de l’Homme et traiter ces réfugiés comme des envahisseurs, compatir à leur sort et faire si peu, se les rejeter comme des marchandises illégales.
Le destin de ces réfugiés, de ces migrants, c’est notre destin et notre avenir. En niant leur droit à l’asile, c’est notre propre avenir que nous mettons en péril tant nous aurons, tôt ou tard, à rendre compte de notre aveuglement et de celui de nombre de nos gouvernants. »
La LDH demande au gouvernement français :
1-d’appuyer l’accueil des réfugiés dans tous les pays de l’UE.
2-de prendre sa part dans cet accueil et d’accroître considérablement les moyens mis en œuvre.
3- Elle appelle toute la société civile à se mobiliser pour appuyer cette exigence et pour apporter l’aide et l’assistance nécessaire.
Pour notre part, notre section a publié un texte pour dénoncer les positions anti-migrants de l’extrême-droite identitaire, elle a participé à trois manifestations suivies de lettres adressées au préfets, elle a participé à une réunion, en décembre, à La Clayette, avec les Amis du Cada, les services diocésains et départementaux d’accueil des migrants et elle a organisé un cercle de silence, à Paray-le-Monial, le 8 mars, en solidarité avec les femmes migrantes suivi d’une lettre-pétition adressée au préfet. Nous invitons d’ailleurs les participants à ce débat à bien vouloir la lire et la signer, s’ils l’approuvent. Enfin, la section LDH Paray prend aussi en charge certains migrants pour des aides ponctuelles demandées par l’association « Les amis du CADA ».