Pour nous protéger, mieux que l’état d’urgence, interdire dans l’espace européen la vente libre des armes de guerre aux particuliers ?

Lettre ouverte aux Député-e-s et Sénateurs des Deux-Sèvres

Pour nous protéger, mieux que l’état d’urgence, interdire dans l’espace européen la vente libre des armes de guerre1 aux particuliers ?

Mesdames, Messieurs,

Les attaques terroristes contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher de la porte de Vincennes à Paris en janvier 2015, et le Bataclan en novembre 2015, réalisées à l’arme automatique de type Kalachnikov mettent, une fois de plus, en évidence la dissémination d’armes de guerre dans la population civile.

A la suite de ces évènements dramatiques, quelques médias se sont interrogés sur l’origine de ces armes, leurs filières de vente et d’acheminement, voire de légalisation ( cf Médiapart du mardi 22/09/20152 et La Voix du Nord du 25/09/2015 3). D’importants stocks d’armes de guerre circulent librement en Europe dont certains proviennent des anciens pays de l’Est et des Balkans. C’est ce que confirmait M. Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, dans son Plan de lutte contre les armes à feu qu’il a présenté le 13 novembre 2015, le jour même de l’attentat du Bataclan, en citant par ailleurs, à côté des « filières historiques », « les différences de législation entre les Etats membres européens, la vente d’armes illégales sur Internet en pleine expansion », « de nouvelles connexions entre le milieu des collectionneurs et la grande délinquance », ainsi que « les cambriolages d’armureries et de résidences ».
Indépendamment de ces évènements dramatiques liés au terrorisme, il est fait état, chaque année, de 5 000 armes à feu saisies par les forces de l’ordre, dont 1% ( soit 50 armes de guerre ) de la totalité des armes saisies en 2013 concernent des fusils d’assaut de type kalachnikov et 6% des armes de première catégorie.

Les différents textes et initiatives mettent en évidence un arsenal juridique important et manifestement inefficace alors que la circulation des armes de guerre, et leur utilisation, tant par des terroristes que par des malfrats divers, n’a fait qu’augmenter.

Ainsi, la loi du 6 mars 2012 relative à l’établissement d’un contrôle des armes modernes, simplifié et préventif et le décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013 (transposition en droit français de la Directive 2008/51/CE du Parlement Européen et du Conseil du 21 mai 2008) a abouti à une avancée en terme de renforcement du droit pénal, avec l’adoption d’une nomenclature unique basée sur la dangerosité. Mais cette disposition pose aujourd’hui question, d’autant que l’application n’en serait pas réellement homogène dans l’ensemble des pays européens. Ainsi il suffirait de « neutraliser » une kalachnikov, un lance-roquettes ou un pistolet pour que ces armes soient classées en catégorie D au titre de l’article L311-2 du Code de la Sécurité Intérieure et assimilée à des « armes et matériels dont l’acquisition et la détention sont libres » ?

Ce rapide constat conduit les citoyens que nous sommes à s’interroger, tant sur l’efficacité et les failles de la législation existante, que sur les moyens mis à la disposition des services en charge du contrôle.

- Quels sont les éléments d’informations dont nous disposons concernant la provenance des armes utilisées par les terroristes en janvier et novembre 2015 ?

- Existe-t-il un bilan récent des ventes d’armes neutralisées et des moyens mis en oeuvre pour leur contrôle, tant au niveau national qu’européen ? Quels sont les efforts de collaboration au niveau européen dans ce domaine ?

- Peut-on savoir quelles dispositions sont envisagées pour mieux contrôler la vente d’armes à feu sur Internet et y interdire la diffusion des plans d’armes pour imprimante 3D » ?

- Ne doit-on pas aller au niveau européen vers une interdiction pure et simple de la vente aux particuliers d’armes de guerre même neutralisées quel que soit leur type ?

- Ne doit-on pas aller au niveau européen vers la destruction de ces stocks d’armes et de leurs munitions sous contrôle « citoyen » ?

Ligue des Droits de l’Homme Niort-Deux Sèvres. Niort le 19 février 2016


1Il s’agit des armes de guerre dites neutralisées ou démilitarisées officiellement destinées à l’usage des collectionneurs2Derrière les armes de Coulibaly, le fiasco très secret des gendarmes. Publié le 22/09/2015 par KARL LASKE

3 Affaire Claude Hermant : le secret défense qui ajoute au trouble. Publié le 25/09/2015 par PATRICK SEGHI