Catégorie : Presse

Sur les Assises de la VIe République, lettre ouverte au Front de Gauche

Blog Médiapart

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Clermont-Ferrand : 230 personnes en passe d’être relogées

Le Monde

| 10.09.2013 à 16h06 • Mis à jour le 10.09.2013 à 16h08

Des personnes sans abri dans une tente place de Jaude à Clermont-Ferrand, le 5 septembre.Après avoir obtenu gain de cause auprès du tribunal administratif le week-end dernier, 230 personnes sur les 360 qui avaient été privées d’hébergement d’urgence à Clermont-Ferrand ont été hébergées à nouveau ou ont reçu une proposition en ce sens, a annoncé, mardi 10 septembre, la préfecture du Puy-de-Dôme. « Les conditions sont réunies pour un retour rapide à une situation normale », veut rassurer le représentant de l’Etat dans un communiqué, assurant que « 102 personnes ont passé la nuit de lundi à mardi dans le gymnase Verlaguet, soit 27 de moins que la nuit précédente ».

Le 2 septembre, ces 360 personnes s’étaient retrouvées privées d’hébergement d’urgence à Clermont-Ferrand après que l’Association nationale d’entraide féminine (ANEF), qui gère le 115 dans le Puy-de-Dôme, a décidé de ne plus payer les hôteliers assurant cet hébergement, faute de financement suffisant de l’Etat. Les autorités locales ont alors proposé un relogement provisoire dans un gymnase, solution refusée dans un premier temps par une partie des familles de sans-abri et des associations qui leur viennent en aide.

La plupart des personnes concernées sont des demandeurs d’asile, congolais et kosovars en majorité, ou des déboutés du droit d’asile, des mères seules avec enfants, mais aussi des femmes victimes de violences et des SDF.

Lire l’éclairage : « Hébergement d’urgence : la situation clermontoise peut-elle se reproduire ailleurs en France ? »

FINANCEMENT INSUFFISANT

L’ANEF a indiqué lundi qu’elle reprendrait prochainement l’ensemble des activités d’urgence et d’insertion du Système intégré d’accueil et d’orientation (SIAO), « sauf la prise en charge des nuitées d’hôtel qui n’est toujours pas financée », précisant avoir reçu de l’Etat 149 396 euros depuis janvier, sur un engagement d’un total de 3,63 millions pour 2013.

En réponse à cette situation d’urgence, les pouvoirs publics ont annoncé la semaine dernière un déblocage de 400 000 euros, afin que l’ANEF puisse commencer à rembourser les dettes contractées auprès des hôteliers en juillet et août. Une avance financière indispensable mais non suffisante rétorque l’ANEF, qui revendique toujours « le remboursement urgent des sommes qu’elle a avancées par souci humanitaire, mettant sa propre trésorerie en péril ».

Arte met à nu l’absurdité et le scandale de l’évasion fiscale

MEDIAPART

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FN : Faux culs et vrais blocages

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Faire-part de naissance..

Saluons comme il se doit la naissance d’un petit nouveau : le site de la fédération de la Gironde.

http://ldh-gironde.org/

Outil de travail privilégié indispensable il bénéficie des liens nécessaires à sa croissance : Facebook, adresses multiples et variées.

Son ergonomie fait de lui un joli bébé joufflu à souhait et nous ne doutons pas de son adoption par tous les membres de Gironde et des autres départements d’Aquitaine.

Meilleurs vœux de bonheur aux parents…

Pour le Comité Régional Aquitaine.

Jean-Marie Lelièvre

DR Aquitaine

Accueil de réfugiés syriens: la France à la traîne

MEDIAPART
08 septembre 2013 |

Sur fond de divisions des pays membres du G20 réunis à Saint-Pétersbourg, le seuil des deux millions de Syriens fuyant leur pays a été franchi, selon le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Avec les 4,25 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays, selon les données du Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires, le nombre d’habitants contraints de partir de chez eux en raison de la guerre atteint une proportion dramatique : 30 % des 21,4 millions de résidents.

« Ce tragique afflux ne semble pas près de s’arrêter», indique le HCR qui prévient que davantage de personnes sont en route vers l’exil. Au jour le jour, environ 5 000 Syriens cherchent refuge à l’étranger. Cette tendance représente une « hausse spectaculaire » de près de 1,8 million de personnes en douze mois, soit une forte accélération au cours des dernières semaines, insiste le HCR, qui souligne que beaucoup des exilés traversent les frontières avec pratiquement pour seul bagage leurs vêtements du jour. L’Unicef vient d’annoncer que plus de la moitié des deux millions de réfugiés ont moins de 18 ans, évoquant la « pire crise humanitaire depuis le génocide rwandais ».

Depuis le début du conflit, les pays limitrophes sont les plus hospitaliers. À la fin du mois d’août, 720 000 personnes ont trouvé refuge au Liban, 520 000 en Jordanie, 464 000 en Turquie, 200 000 en Irak et 111 000 en Égypte. Les capacités d’accueil de ces pays ayant atteint leurs limites, une réunion de crise s’est tenue à Genève le 4 septembre avec le HCR et des représentants des gouvernements concernés. Dans un communiqué commun, ces hauts responsables dénoncent l’« escalade » liée à l’utilisation d’armes chimiques et exhortent les pays du G20 à « surmonter » leurs différends. Chargé de coordonner l’action humanitaire, le HCR se plaint de n’avoir reçu que 47 % des contributions financières indispensables pour répondre aux besoins de première urgence.

Le camp de réfugiés de Zaatari en Jordanie, le 18 juillet 2013. © ReutersLe camp de réfugiés de Zaatari en Jordanie, le 18 juillet 2013. © Reuters

Dès cet été, le haut-commissaire de l’agence, Antonio Guterres, a tiré la sonnette d’alarme, appelant l’Europe à se montrer plus accueillante. À Vilnius, en Lituanie, le 18 juillet, il a fait part de sa « préoccupation » à propos de « graves insuffisances ». Car si les pays de l’Union européenne (UE) ont demandé à la Turquie, au début de la guerre, de garder ses frontières ouvertes pour laisser passer les réfugiés, ils n’en ont pas moins maintenu fermées les leurs.

Frontex, l’agence européenne chargée des contrôles aux limites extérieures, n’a pas desserré la pression, si bien que les réfugiés arrivant par leurs propres moyens en Europe risquent d’être refoulés ou de se retrouver dans un centre de rétention en Grèce, où le taux d’acceptation des demandes d’asile est proche de zéro. Pour échapper à la surveillance, les réfugiés mettent leur vie en danger. Au milieu du mois d’août, une centaine de Syriens et d’Égyptiens ont navigué sur une embarcation de pêche de 16 mètres de long. Celle-ci s’est ensablée à 20 mètres des côtes siciliennes, entraînant le décès de six passagers, dont les corps ont échoué non loin de la ville de Catane.

Dans l’UE, deux pays sortent du lot : l’Allemagne et la Suède, qui hébergent à eux seuls près des deux tiers des 40 000 Syriens ayant déposé une demande d’asile en Europe depuis le début de la crise.

Dans le cadre d’un programme de protection temporaire, 5 000 autres sont attendus outre-Rhin. Identifiés par le HCR au Liban, un premier groupe d’une centaine d’exilés doit rallier Beyrouth à Hanovre par avion à la mi-septembre. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) intervient actuellement pour dispenser des examens médicaux et des cours de langue et d’« orientation culturelle ». Une fois arrivés à destination, ils devraient être logés dans un centre d’accueil à Friedland pendant six semaines, avant d’être répartis dans différentes régions. Ces personnes sont admises pour motifs humanitaires, jusqu’à ce qu’elles soient en mesure de rentrer chez elles ou de trouver d’autres solutions durables. La Suisse et l’Autriche viennent respectivement de donner le feu vert à 500 réfugiés. Quelques autres pays ont proposé leurs services, comme la Suède, la Norvège et les Pays-Bas.

La France quant à elle reste mutique, malgré le soutien actif de François Hollande à une intervention militaire. À quelques exceptions près, seuls les demandeurs d’asile arrivant jusqu’en France sont autorisés à déposer un dossier en se présentant eux-mêmes en préfecture. Ce qui suppose d’avoir obtenu un visa en Syrie ou d’avoir franchi sans autorisation de nombreuses frontières internationales. Ce qui suppose, autrement dit, d’avoir surmonté énormément d’obstacles.

Des Syriens expulsés de la « Beer house » à Calais

Paris a compliqué la tâche aux éventuels postulants en rétablissant un visa de transit aéroportuaire à destination des… Syriens. Supprimé en avril 2010, ce document a été réintroduit en janvier 2013 afin de « lutter contre les détournements de procédure ». Alors que plus de 100 000 décès sont à déplorer, selon l’ONU, la priorité de la France semble être de déjouer les « faux » demandeurs d’asile. Sur place, le nombre de demandes augmente, mais reste faible.

Dès son ouverture, le camp a accueilli 2 000 tentes, le 31 juillet 2012. © ReutersDès son ouverture, le camp a accueilli 2 000 tentes, le 31 juillet 2012. © Reuters

Selon l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), 700 dossiers ont été déposés au cours du premier semestre 2013, soit le même volume que tout au long de l’année 2012. Le taux d’admission est très élevé : 92 % en 2012 et 95 % en 2013. Pour autant, la participation de la France à l’effort européen est minime. Le statut de réfugié a été accordé dans 60 % des cas. En application de la Convention de Genève, il a concerné principalement des militants politiques engagés contre la dictature qui ont obtenu une carte de séjour de dix ans. Les 40 % restants ont été éligibles à la protection subsidiaire qui prévoit la délivrance d’un titre de séjour d’un an renouvelable aux personnes vivant une situation de conflit généralisé et craignant pour leur vie ou celle de leur famille.

Aucune dérogation n’est prévue pour les Syriens, reconnaît Pascal Brice, le directeur de l’Ofpra, qui ajoute néanmoins avoir donné l’instruction à ses services d’accélérer la procédure d’examen. L’objectif est de ne pas dépasser trois mois de délai quand six mois en moyenne sont nécessaires. Selon lui, le petit nombre de demandes en France s’explique principalement par le fait que les réfugiés se dirigent, outre vers les États limitrophes, vers les pays comme l’Allemagne et la Suède, où les communautés syriennes, notamment kurdes, sont les plus fournies. Et renvoie au ministère de l’intérieur concernant la restauration du visa de transit et l’éventualité de la participation de la France à un programme de réinstallation car « ces questions relèvent de l’accès au territoire et donc de la décision souveraine de l’État ».

Dans un communiqué, Pierre Henry, le directeur général de France terre d’asile, peste contre les pays européens qui « ne se distinguent en aucun cas par leur prise d’initiative » et désigne particulièrement la France. Il rappelle l’existence de la directive sur la protection temporaire, adoptée en 2001 à la suite de la crise au Kosovo, et regrette que cet outil ne soit pas utilisé. Il fustige le choix de Paris non seulement de ne pas assouplir les conditions d’attribution de visas mais aussi de privilégier les « enjeux de sécurité ».

Médecins de monde (MDM), qui a ouvert des centres de soins en Jordanie et au Liban, reproche également à la France de n’être « pas au rendez-vous ». Ses équipes dans le Nord-Pas-de-Calais observent la présence de nombreux Syriens sur le littoral, qui « faute de facilités données pour obtenir l’asile », vivent dans des conditions de vie « indignes ».

Certains d’entre eux s’étaient installés dans un squat de la rue Mouron, à Calais. Mais, ce lieu, appelé « Beer house », a été expulsé par les forces de l’ordre le 5 septembre « sans diagnostic ni concertation », selon treize associations parmi lesquelles la Cimade, la LDH, MDM, Terre d’errance et Salam.

Corridor humanitaire pour la Syrie

BLOG

Mediapart

 

« Le minimum que la communauté internationale puisse faire est de créer un corridor humanitaire pour l’acheminement de médicaments, de nourriture et de provisions élémentaires » aux populations syriennes en danger, écrit le Mouvement syrien de non violence, qui appelle à la signature de cette pétition adressée à Ban Ki-Moon, secrétaire général de l’ONU, Lakhdar Brahimi, envoyé spécial en Syrie et Valerie Amos, secrétaire générale adjointe des Nations Unies chargée de l’aide humanitaire. Fondé en 2011 en Syrie et dans la diaspora, le Mouvement syrien de non-violence a été au cœur des mobilisations pacifiques du début du soulèvement.

 



Nous sommes membres du Mouvement de non violence syrien, créé en 2011 par un groupe de Syriens qui adhèrent à la lutte non-violente et à la résistance civile comme instrument principal pour réaliser le changement social, culturel et politique en Syrie. Le Mouvement est une organisation non-gouvernementale apolitique bien établie œuvrant pour la création d’initiatives pour la paix.

Nous voulons remercier ceux qui ont récemment soutenu la Syrie et reconnu la souffrance de son peuple après la dernière attaque chimique contre les banlieues de Damas et nous apprécions votre solidarité dans la sévère crise humanitaire en Syrie.

De plus en plus, nous sommes préoccupés par le fait que la crise humanitaire qui touche le peuple syrien passe après les développements politiques. Alors que le monde entier prend enfin conscience de la question syrienne, ce qui nous réjouit, il est douloureux pour nous de voir que la Syrie n’est une question intéressante qu’à la lumière de la réponse des États-Unis à l’attaque chimique du 21 août 2013.

Nous saluons le fait que la communauté internationale et les activistes partout dans le monde se préparent pour une réponse humanitaire urgente: les habitants des régions non contrôlées par le régime meurent non seulement à cause de l’agression ininterrompue mais aussi en raison de la pénurie de nourriture, d’aide et d’assistance médicale.

Nous sommes attristés de voir que les récentes discussions sur la Syrie portent finalement plus plus sur les Etats-Unis et leur rôle dans le monde, et gardons à l’esprit les débats précédents sur la présence d’Al-Qaeda en Syrie, pendant que la crise humanitaire qui empire chaque jour reste hors discussions.

Vous ne savez peut-être pas que les organisations internationales comme la Croix-Rouge ne peuvent pas travailler dans les zones non contrôlées par le régime. Ces organisations sont obligées de coopérer avec une autorité centrale, ce qui veut dire qu’environ deux millions de personnes vivant dans les banlieues de Damas (y compris celles tuées par l’attaque chimique) sont privées de provisions, car le régime considère ces zones comme des régions rebelles, en empêchant ainsi l’accès à quiconque.

Par conséquent, le besoin est grand pour ces personnes qui lentement et systématiquement sont obligées de se réfugier dans les pays voisins comme le Liban et La Jordanie. En effet, mardi 3 septembre, le nombre de réfugiés a dépassé les deux millions de personnes ; principalement des femmes et des enfants. Nous croyons que le minimum que la communauté internationale puisse faire est de créer un corridor humanitaire pour l’acheminement de médicaments, de nourriture et de provisions élémentaires. Nous incitons les Nations Unies à agir dans le cadre de leur propre mission qui consiste au droit et à l’obligation de protéger les civils.

De même, nous demandons à toutes les ONG et organismes internationaux de nous aider à diffuser cet appel auprès des parties concernées. Nous vous appelons à employer vos réseaux pour accentuer la pression sur les politiciens et les décideurs en vue de créer ces corridors humanitaires.

Le Mouvement de non-violence syrien

Règlements de comptes à Marseille: la vérité des chiffres, loin des clichés

 

Mediapart

07 septembre 2013 |

Sa mort aurait pu être un simple chiffre : le treizième décès dans un règlement de comptes enregistré par les forces de l’ordre dans les Bouches-du-Rhône depuis janvier 2013. Mais cette fois, il s’agit du fils du directeur sportif de l’Olympique de Marseille, Adrien Anigo, 30 ans, abattu le 5 septembre 2013 par deux hommes à scooter près de la station de métro Frais-Vallon, dans les quartiers Nord de Marseille (13e arrondissement).

Début juillet, le jeune homme avait été renvoyé devant les assises avec deux autres prévenus, accusés d’avoir commis une douzaine de casses de bijouteries en 2006 et 2007. Sa mort en a éclipsé une autre, celle le matin même à La Ciotat d’un jeune salarié d’une entreprise de collecte de déchets abattu par un commando de quatre hommes cagoulés à son arrivée sur son lieu de travail.

Après s’être entretenu avec le maire (UMP) de Marseille Jean-Claude Gaudin, le ministre de l’intérieur Manuel Valls a donc appelé jeudi soir sur I-télé à « un pacte national (…) avec tous les élus » pour « redonner un espoir aux Marseillais ». Un geste plus symbolique qu’autre chose pour couper court à la surenchère politique attisée par la proximité de la primaire socialiste et des municipales.

Un policier marque les traces de balles près du corps d'un homme abattu à côté de la prison des Baumettes, le 9 mars 2013.Un policier marque les traces de balles près du corps d’un homme abattu à côté de la prison des Baumettes, le 9 mars 2013.© Reuters

« S’agissant de la bataille contre les trafiquants, contre ceux qui organisent une économie souterraine, qui en vivent, et quand ils se partagent le territoire finissent par s’entretuer, il faut encore amplifier la bataille », a affirmé de son côté vendredi Jean-Marc Ayrault en visite à Strasbourg. Les grands élus marseillais, les parlementaires, le président du département, Jean-Noël Guérini (dont la présence a provoqué quelques heurts), et celui de la région ont donc phosphoré, en urgence, samedi matin, autour du préfet de région, Michel Cadot, et du préfet de police de Marseille, Jean-Paul Bonnetain. Leur seule annonce concrète a concerné de nouveaux renforts de police -s’ajoutant à la compagnie de CRS et aux 24 enquêteurs de police judicaire déjà promis le 20 août- «d’ici la fin de l’année», sans qu’aucun chiffre ne soit annoncé.

À intervalles réguliers, la France semble redécouvrir la réalité des règlements de comptes à Marseille. Il s’agit de véritables guets-apens opérés en pleine ville dans des espaces publics (bars, locaux associatifs, rue, etc.) par des commandos lourdement armés, agissant visage dissimulé. S’ils sont particulièrement spectaculaires, il est faux de parler de multiplication de ce type d’homicide dans les Bouches-du-Rhône en 2013.

La préfecture de police en recensait 19 à la même époque en 2012, contre 13 cette année (15 selon le décompte de l’AFP). « Il y a une habitude médiatique qui a été prise depuis peu qui consiste à mettre chaque règlement de comptes à la une, donc on a le sentiment que Marseille devient de plus en plus dangereuse, observe Cyril Rizk, responsable des statistiques à l’observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Or s’il y a eu un pic très net en 2012 (avec 25 règlements de comptes, ndlr), on reste depuis des années sur un noyau dur d’une quinzaine de morts par an dans les Bouches-du-Rhône. Même ce pic de 2012 n’est pas significatif d’une tendance de fond : un différend en cascade entre deux bandes peut suffire à faire flamber le nombre de règlements de comptes. »

Données issues de “l'état 4001" (année 1995 manquante)Données issues de “l’état 4001″ (année 1995 manquante)© Mediapart

Pour en avoir le cœur net, Mediapart a recherché et comparé le nombre de morts par règlement de comptes enregistrés par les forces de l’ordre depuis 1981 en France et dans les Bouches-du-Rhône. Contrairement aux idées reçues, les années 1980 furent bien plus meurtrières que la décennie 2000. Le “code d’honneur” des voyous à l’ancienne semble une vaste galéjade. En 1985 et 1986, au plus fort de la guerre entre le clan de Gaëtan Zampa et celui de Francis Vanverberghe, dit “le Belge”, la police et la gendarmerie répertorient 44 puis 45 morts par règlements de comptes dans les Bouches-du-Rhône (la plupart commis hors Marseille). « Et encore, on peut doubler le bilan, car les disparus dont on a dissuadé les veuves de déposer plainte ne sont pas comptabilisés », estime Thierry Colombié, docteur en sciences économiques (EHESS), spécialiste du grand banditisme.

« Il n’y a plus cette lisibilité »

« On regrette le temps où le banditisme organisé jouait les juges de paix et régulait le milieu, remarquait en décembre 2012 l’ancien procureur de Marseille Jacques Dallest lors d’une conférence au titre évocateur (« Marseille, la ville la plus criminogène de France ? »). Mais je ne pense pas qu’il y ait eu un âge d’or du grand banditisme. C’est faux, il suffit de lire les horreurs dans la presse d’il y a trente ans. » « La comparaison des statistiques montre qu’il y avait beaucoup plus de violence dans les années 1970, 1980 et jusque dans les années 1990, qui ont opposé des bandes rivales, estimait aussi Frédéric Monneret, avocat marseillais qui défendit notamment Francis le Belge. En 1978, l’affaire du Bar du téléphone (dans le 14e arrondissement marseillais), c’est dix personnes. En 1973, la tuerie du Tanagra, c’est 4 morts d’un coup. »

Après 1985, le nombre de règlements de comptes relevés par les forces de l’ordre dans les Bouches-du-Rhône décline lentement, tombant même à trois en 1997. Depuis 2002, il tourne autour d’une quinzaine de personnes assassinées par an. Un chiffre énorme pour un département de 1,9 million d’habitants. Seule la Corse, avec une quinzaine de décès par règlement de comptes par an pour 305 000 habitants, fait pire. « C’est un type d’infraction très concentré sur le territoire », souligne Cyril Rizk.

Le 24 novembre 2010, dans les quartiers Nord de Marseille, au Clos-la-Rose où un jeune homme de 16 ans a été abattu.Le 24 novembre 2010, dans les quartiers Nord de Marseille, au Clos-la-Rose où un jeune homme de 16 ans a été abattu.© Reuters

En 2012, près des deux tiers des règlements de comptes mortels constatés par la police et la gendarmerie en France ont été commis dans les Bouches-du-Rhône (25) et en Corse (18). La même année, les forces de l’ordre comptabilisèrent 5 homicides de ce type pour l’ensemble de la région Île-de-France (11,9 millions d’habitants). À Marseille, les cités sont au cœur de la ville contrairement à Paris. Mais même en ajoutant aux morts parisiens ceux de ses banlieues, on reste donc très loin de la situation marseillaise.

Selon une estimation de Jacques Dallest, environ trois quarts des règlements de comptes seraient liés à la délinquance de cité et un quart au grand banditisme. La rivalité dans les cités entre des points de vente de stupéfiants plus éparpillés et moins rémunérateurs, la volonté des jeunes de “monter” de plus en plus vite, sont souvent évoquées. « L’incidence des règlements de comptes compétitifs liés aux marchés de la drogue n’est possible (…) que dans un marché concurrentiel, désorganisé et peuplé de petites entreprises relativement éphémères », écrivait en 1989 un chercheur québécois, Gilbert Cordeau, auteur d’une thèse sur les règlements de comptes au Québec (lire sous l’onglet prolonger).

Une très bonne enquête de Libération décrit une de ces guerres sans merci pour le contrôle d’un point de vente du shit aux Micocouliers, petite cité marseillaise, qui laissa sur le carreau fin 2011 trois jeunes à peine âgés de 20 ans. Des règlements de comptes facilités, dans cette ville portuaire, par l’accès à des armes de guerre, venues d’ex-Yougoslavie ou d’Afrique. « Autrefois, il y avait une guerre entre bandes rivales avec une finalité pour gagner des parts de marché, cela obéissait à une logique, expliquait Me Frédéric Monneret en décembre 2012. Les gens qui participaient à cette guerre, le faisaient en sachant pourquoi et les risques encourus. Le problème est qu’aujourd’hui, il n’y a plus cette lisibilité. »

La police judiciaire a beaucoup de mal à cerner les auteurs de ces règlements de comptes, du fait des techniques de dissimulation employées et des peurs de représailles. Le taux d’élucidation des règlements de comptes entre malfaiteurs est très faible : « 31 % », indiquait le préfet de police de Marseille Jean-Paul Bonnetain dans La Provence en mars 2013. « Un élément important est le lien préexistant qu’il y a toujours entre l’auteur et la victime », soulignait Christian Sainte, le directeur interrégional de la police judiciaire lors d’un colloque de l’ORDCS en juin 2013. Aux enquêteurs ensuite d’essayer « de comprendre qui avait été victime de qui dans le passé, qui avait déjà été condamné pour trafic de stupéfiants, qui s’est trouvé en prison avec qui, etc. », comme le détaillait le procureur de la République d’Aix-en-Provence dans Libération.

Comment lutter contre un phénomène aussi mal connu ? « Les politiques et les médias français parlent tous les jours des règlements de comptes, mais il n’existe pas une seule recherche sur le sujet, remarque Thierry Colombié. Du coup, tout le monde dit tout et n’importe quoi. C’est très facile d’affirmer qu’il s’agit de règlements de comptes entre petits caïds des cités à cause du trafic de stups. Où sont les preuves ? Quid de la nature, du mobile, des victimes, des auteurs, des suites judiciaires des 40 derniers règlements de comptes à Marseille ? Il faudrait surtout se donner les moyens d’aller sur le chemin de la connaissance pour couper court aux fantasmes. »

Depuis janvier 2013, une chercheuse de l’observatoire régional de la délinquance et des contextes sociaux (ORCDS) d’Aix-en-Provence s’est plongée dans les archives du service régional de police judiciaire de Marseille pour dresser le profil des protagonistes, victimes comme mis en cause. La juriste Anne Kletzlen a épluché 112 dossiers de règlements de comptes commis dans les Bouches-du-Rhône entre avril 2002 et octobre 2012, ayant fait 172 victimes (dont 122 morts). Ses résultats, encore provisoires, montrent que, pour les affaires résolues, dans la moitié des cas le règlement de comptes est lié à une affaire de stupéfiants (conflit de territoire, vols de produit, dette, etc.), mais qu’apparaissent aussi des affaires de machines à sous, de banditisme méditerranéen, d’immobilier et même des questions plus personnelles d’honneur ou de jalousie.

Effets incertains

Les victimes comme les auteurs des règlements de comptes sont presque tous fichés au Stic, ce qui ne veut pas dire que leur culpabilité ait été prouvée ou même qu’il y ait eu des poursuites judiciaires à leur encontre. C’est d’ailleurs l’un des trois critères sur lesquels les policiers se basent pour enregistrer un homicide comme un règlement de comptes entre malfaiteurs : l’intention de tuer, le mode opératoire, et une cible souvent « défavorablement connue des services de police », selon l’expression consacrée.

Depuis décembre 2012 et l’arrivée de 235 policiers et gendarmes supplémentaires, les autorités ont engagé une ambitieuse « reconquête des cités ». L’objectif affiché n’est pas tant d’éradiquer les trafics de stupéfiants que d’inverser la peur en harcelant les dealers. Avec des effets plus qu’incertains sur les règlements de comptes. « Celui qui tient le trafic est un chef d’entreprise : il a des charges, il paie des gens pour faire les go fast, il paie les stupéfiants à crédit, etc., nous expliquait en mars 2013 le commissaire Fabrice Gardon, conseiller du préfet de police. Donc quand nous asphyxions un point de deal, nous créons forcément des tensions au sein des réseaux. Mais être trafiquant est un métier risqué… »

Mais surtout, ces opérations laissent intacts les problèmes de fond de Marseille, écartelée entre ses quartiers Sud et Nord, très mal desservis, manquant d’équipements municipaux et concentrant la majorité des logements sociaux. La ville est la plus inégalitaire de France : en 2007, les 10 % des Marseillais le plus riches déclaraient 14,3 fois plus que les 10 % les plus pauvres. Quelque 44 % des enfants y vivaient sous le seuil de pauvreté en 2007.

Or, le volet sécurité de la fameuse « approche globale » est bien plus visible que les volets éducation, santé, emploi, habitat et social censés accompagner ce déploiement policier. « Il n’y a pas la même mobilisation, il faudrait que tout le monde se mette en branle pour combattre cette insécurité sociale qui fait le lit de la délinquance », reconnaissait  en août 2013 Garo Hovsépian, le maire socialiste des 13e et 14e arrondissements de Marseille, en marge d’une nième visite du ministre de l’intérieur.

« Si la police et la justice ont un impact sur l’évolution de la délinquance, il est relativement faible, il ne faut pas se voiler la face, rappelait en décembre 2012, André Fortin, ex-juge des enfants et ex-juge d’instruction à Marseille. Il faut plutôt agir pour rétablir le lien social, retravailler l’éducation, le suivi des familles, et je suis désolé : c’est le plus compliqué… »

La boîte noire :Le graphique a été constitué à partir des données des statistiques policières de l’état 4001, dont l’index 1 recense les victimes de règlements de compte entre malfaiteurs. On peut retrouver ces données jusqu’en 1996 sur le site data.gouv.fr, et avant 1996 dans les recueils papier annuels «Aspects de la criminalité et de la délinquance constatées en France» de la Documentation française.

Le catéchisme rebondit sur les nouveaux rythmes scolaires : l’église, un référentiel bondissant ?? ;)

Liberation

Marie PIQUEMAL 4 septembre 2013 à 17:03

Le diocèse de Paris a lancé une campagne de communication à la rentrée. Le diocèse de Paris a lancé une campagne de communication à la rentrée. (DR)

RÉCIT 

Traditionnellement, l’éducation religieuse était proposée le mercredi matin. Avec la réforme de Vincent Peillon, l’Eglise adapte «son offre».

Cette semaine, sœur Antonella court partout. Avec la rentrée des classes, elle tracte à la sortie des écoles publiques et privées de Sanary-sur-Mer (Var) pour annoncer la bonne nouvelle : le catéchisme, – ou devrait-on écrire KT comme sur la brochure – s’adapte à la réforme des rythmes scolaires.

Jusqu’ici, comme dans beaucoup de paroisses en France, le caté, c’était traditionnellement le mercredi matin. Mais avec la semaine de quatre jours et demi, les élèves de Sanary ont désormais classe à ce moment-là. Les sœurs de la paroisse de Saint-Nazaire ont alors élaboré un plan B pour garder leurs troupes et éventuellement séduire des petits nouveaux.

Le kit «goûter, caté et devoirs»

«Voilà notre idée, explique sœur Antonella, toute essoufflée : le mardi et le jeudi, on se propose de récupérer les enfants à l’école à 15h30.» Elles iront les chercher à pied ou d’un coup de minibus, c’est selon. Puis, «goûter convivial tous ensemble», poursuit la religieuse. 16h15, l’équipe «aide aux devoirs» prend la main, avant de passer le relais aux alentours de 17h15 au père Rodrigo pour l’enseignement religieux. 18h25, indique la brochure, «fin du KT», les parents viennent chercher leurs enfants. «Pour eux, c’est pratique. Les devoirs seront faits, le goûter pris.»

Les soeurs accueillent tout le monde, baptisé ou pas. Et tout est gratuit. «C’est la foi qui nous pousse à agir, dit sœur Antonella. L’amour de Jésus nous guide.» Les inscriptions sont ouvertes depuis quelques jours, trop tôt pour tirer un bilan donc mais, confie-t-elle, «ça semble bien parti».

16 000 enfants à Paris

A Paris, aussi, les paroisses ont revu leur formule. «On réfléchit depuis quelque temps déjà, à une nouvelle offre plus globale. L’archevêque nous a demandé de profiter de cette réforme de l’éducation pour élargir le temps du catéchisme. C’est ce qu’on a fait», se félicite Pauline Dawance, responsable de la catéchèse pour le diocèse de Paris. Elle a même lancé une campagne de communication avec des affiches qui annoncent : «Nouveaux rythmes scolaires, le catéchisme s’adapte.»«C’était un défi pour nous, assure-t-elle. 16 000 enfants sont catéchisés dans la capitale dont 5 000 en école publique concernée par la réforme.»

La plupart des paroisses a opté pour le mardi en sortant de l’école, avec en option souvent «ramassage des enfants». A quelques variantes près. Sur l’île Saint-Louis, les CE1-CM2, qui auraient judo ou solfège le mardi soir, peuvent se rabattre sur le dimanche matin avec le pack caté-messe de 9h45 à 12 heures. Repéré aussi : l’option «mercredi midi, avec ramassage à la sortie de l’école et pique-nique tiré du sac».

«Redonner un élan au catéchisme»

Chaque paroisse s’organise comme elle le souhaite, en fonction des moyens et des attentes des familles surtout. Beaucoup proposent des activités «dans le prolongement du catéchisme proprement dit» comme à Saint-Séverin dans le Ve arrondissement. «Une dizaine de bénévoles se sont portés volontaires, en majorité des femmes à la retraite mais pas seulement, se réjouit Fabienne Thévenaud, très impliquée dans la paroisse. Ces personnes n’osaient pas être catéchistes mais étaient partantes pour s’occuper des enfants.» Banco. Il y aura un atelier bande-dessinée, un autre de couture, de cuisine… Et même du jardinage dans le cloître du presbytère. A l’écouter, cette réforme Peillon, si compliquée à mettre en place dans les communes, tombe à pic pour l’Eglise. «On essaie de saisir l’occasion pour redonner un élan au catéchisme, c’est vrai.» Pauline Dawance y voit le retour en force du patronage, «ces lieux fondés par le clergé au XIXe siècle pour s’occuper des enfants pendant le temps de travail des parents. Certains sont toujours actifs à Paris et fonctionnent comme des centres aérés. Peut-être va-t-on en créer de nouveaux !»

Le diocèse de Nanterre (Hauts-de-Seine) a, lui, carrément publié sur son site internet un fascicule «avantages et inconvénients d’une catéchèse autre que le mercredi» pour aider les paroisses encore hésitantes. Ainsi, dans la colonne «avantages du samedi matin», on trouve «enfants reposés et détendus», «des parents qui s’engagent (papa)». Parmi les inconvénients : «absentéisme à prévoir»…

Marie PIQUEMAL

«Les anticorrida ne parviennent pas à se faire entendre»

Libération

Recueilli par Guillaume Gendron 7 septembre 2013 à 13:41

Le matador espagnol Juan José Padilla lors d'une corrida à la Féria de Nîmes, le 17 mai.Le matador espagnol Juan José Padilla lors d’une corrida à la Féria de Nîmes, le 17 mai. (Photo Pascal Guyot. AFP)

INTERVIEW

Geneviève Gaillard, députée PS des Deux-Sèvres et auteure d’une proposition de loi visant à interdire la tauromachie en 2010, revient sur les derniers incidents entre les pro et anticorrida.

Chaque année, la saison des ferias réanime l’affrontement entre aficionados et opposants à la tauromachie. L’été 2013 n’a pas fait exception, plusieurs incidents marquant même un nouveau degré de crispations entre pro et anticorrida. A Rion-des-Landes (Landes), de violentes échauffourées à la suite d’une action d’ampleur des associations antitaurines ont fait plusieurs blessés dont un grave, le 24 août, mobilisant 70 gendarmes et captant l’attention des médias.

A lire aussi notre reportage à Rion-des-Landes

Le 5 septembre, à Amélie-les-Bains (Pyrénées-Orientales), une campagne en ligne menée par les groupes opposés à la corrida a abouti, sur demande de la préfecture, à l’annulation de la dernière partie du spectacle, la fameuse «embolada». Cette pratique consiste a faire partir des feux d’artifice de l’animal, afin de simuler l’image d’un «taureau en feu». Le même jour, à Dax (Landes), deux conseillères municipales, membres d’Europe Ecologie-Les Verts, étaient violemment critiquées par le reste de l’équipe municipale pour avoir témoigné leur soutien sur Facebook aux manifestants de Rion-des-Landes. Gabriel Bellocq, le maire socialiste de Dax, a même estimé que les deux élues avaient «franchi la ligne jaune».

Une abolition de la tauromachie en France semble toutefois difficilement envisageable. En septembre 2012, le Conseil constitutionnel avait tranché une question prioritaire de consitutionnalité déposée par les anticorridas en leur défaveur. A cette occasion, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, avait apporté son soutien à la tauromachie, «une culture qu’il faut préserver». Pourtant, un an plus tard, les associations, à l’instar du Comité radicalement anticorrida (Crac), veulent croire à un «effet Rion-des-Landes».

Députée des Deux-Sèvres (1re circonscription)Geneviève Gaillard, députée (PS) des Deux-Sèvres et maire de Niort, est une figure de la lutte contre la tauromachie en France. Vétérinaire de profession, elle a déposé, sans succès, une proposition de loi anticorrida en 2010 qu’elle entend représenter prochainement à l’Assemblée. (Photo Assemblée nationale)

Au vu des derniers événements, pensez-vous qu’il y ait un changement dans les attitudes face à la corrida ? Un durcissement des positions ?

La polémique revient chaque été, au moment des corridas, c’est lié à l’actualité. Les pro et les anti s’affrontent, pas nécessairement physiquement d’ailleurs. C’est vrai que cette année, en toile de fond, il y a une montée en puissance de personnes qui sont anticorrida et qui ne parviennent pas à faire entendre leur voix. Même si l’on voit des villes qui se désengagent, on est toujours privé d’un débat national, alors que la plupart des Français sont opposés à cette pratique.

Comment jugez vous les actions musclées des anticorridas, comme à Rion-des-Landes ?

Je ne légitime pas les comportements extrêmes. En revanche, je comprends l’agacement des gens qui souhaitent un vrai débat et n’y ont pas droit. Une vraie discussion, c’est tout ce que je souhaite, et c’est pour cette raison que j’ai rédigé une proposition de loi, en 2010, pour permettre d’avancer.

Cette proposition de loi n’a pas été soumise au vote, faute de signatures. Est-ce un combat que vous poursuivez ?

Il est prévu que je remette cette proposition de loi en examen à l’Assemblée prochainement. Mais avant cela, il faudrait que je trouve plus de parlementaires dans le groupe socialiste qui partagent mon point de vue. Or, entre la dernière et la nouvelle législature, le nombre de parlementaires ouverts à ce débat a diminué. Beaucoup d’entre eux n’osent pas en parler. Ils viennent me dire en privé : «Je suis opposé à la corrida, mais vis-à-vis de ma circonscription, je ne peux pas signer».

Qu’est-ce qui les en empêchent ? Des intérêts économiques, électoraux ?

Les ferias et les corridas générent dans certaines villes beaucoup d’animation, que les élus ont peur de voir cesser si la corrida est supprimée. Je pense que les arènes peuvent accueillir autre chose que le spectacle cruel qu’est la corrida, comme les arts du cirque par exemple. Dans une société comme la nôtre, déjà très violente, a-t-on besoin d’un spectacle basé sur le sang et la mise à mort ? Cela me gêne qu’on puisse emmener des enfants assister à une telle manifestation de cruauté envers les animaux de manière légale. Et je suis aussi gênée que de l’argent public soit investi dans ce genre de chose.

Certains élus sont amenés à considérer au nom de la «tradition» que la corrida est un art dont il très difficile de se détacher. Mais en y regardant de plus près, on voit que c’est purement et simplement une mise en scène de la cruauté pour satisfaire les instincts primaires.

Peut-on parler d’un lobby pro-corrida à l’Assemblée ?

Certainement. On a d’ailleurs eu, quelque que soit l’alternance, des ministres pro-corrida. [Philippe Martin, ministre de l’Ecologie, fait partie du groupe des 55 députés qui disent soutenir activement la corrida, ndlr.]

C’est toujours un débat passionnel, qui traverse les partis. A droite comme à gauche, il y a des pro et anti, ce qui rend la mobilisation difficile du fait de la structuration de la vie parlementaire. Je ne cache pas qu’au parti socialiste, il y a un manque de convergence à ce sujet. A droite, Muriel Marland-Militello [députée des Alpes-Maritimes entre 2002 et 2012] a connu les mêmes difficultés que moi à présenter une proposition de loi à l’hémicycle.

Si l’abolition paraît difficile à obtenir, a minima, que demandez-vous ?

J’aimerais déjà qu’on dépassionne le débat en disant simplement : c’est une tradition en train de s’éteindre et qui n’est pas du meilleur apport sociétal, donc essayons de résoudre le problème. Une première victoire serait d’interdire l’accès aux arènes des enfants. Ensuite, on pourrait aller vers la corrida portugaise, qui est mieux perçue car il n’y a pas de mise à mort publique. D’ailleurs, de nombreuses villes et pays ont commencé à limiter les pratiques de la corrida, qui sont multiples.

De manière générale, la France a pris du retard pour ce qui est du droit des animaux. Selon moi, l’animal a une utilité sociétale et je n’aime pas qu’on en fasse n’importe quoi. Je suis loin d’être une «extrémiste» sur ce sujet, mais la corrida est emblématique d’une certaine cruauté. Je suis allée moi-même assister à une corrida, pour éviter de parler de ce que je ne connais pas. Et en tant que vétérinaire, je peux vous dire que c’est terrible. On dit que si les torreros sont bons les animaux ne souffrent pas, mais j’ai du mal à y croire.

Recueilli par Guillaume Gendron