1er mai 2019 : prise de parole de la LDH Pays royannais

La LDH Pays royannais a participé à la manifestation du 1er mai à Royan. Voici le texte lu par son porte-parole :

Mesdames et messieurs, cher.e.s ami.e.s,

Pourquoi avons-nous choisi de nous rassembler aujourd’hui, à Royan, un 1er mai ?

Militantes et militants de la Ligue des Droits de l’Homme, aux cotés de citoyennes et des citoyens attaché.e.s aux valeurs de la République, nous sommes réuni.e.s ce matin à Royan, comme partout en France, d’abord en souvenir des tragiques événements du mai 1886 à Chicago :

  • Le 1er mai, les syndicats états-uniens lancent une grève générale pour obtenir la semaine de 48 heures
  • Le 3 mai, des centaines d’ouvriers sont réunis à l’usine McCormick : au moment de la dispersion de la manifestation, les policiers chargent : il y a des morts et des dizaines de blessés.
  • Le 4 mai, une nouvelle manifestation est organisée ; et de nouveau, au moment de la dispersion, alors qu’il ne reste plus que quelques centaines d’ouvriers dans Haymarket Square, 180 policiers chargent la foule encore présente. Quelqu’un jette alors une bombe. Bilan : 12 morts dont 7 policiers. La police arrête 8 militants anarchistes. Un procès, commencé le 21 juin 1886, en condamne 5 à mort ; malgré l’agitation internationale, ils sont pendus le 11 novembre.
  • En 1889, cent ans après la Révolution Française, il fut donc décider de faire de chaque 1er mai un moment de mobilisation citoyenne et de lutte à travers le monde.

Au-delà donc de la liste des revendications inscrites sur le tract d’appel à manifester pour aujourd’hui (dont la LDH souhaite préciser qu’elle ne partage pas la totalité du contenu), nous sommes avant tout et malgré cela réuni.e.s ce matin pour affirmer haut et fort notre attachement viscéral au droit à manifester.

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, dans son article 10, souligne que « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. »

Force est de constater et nécessité est surtout de déplorer que le gouvernement actuel a une conception bien singulière de la notion de « trouble à l’ordre public ».

Sous prétexte de vouloir en éliminer toute trace, le gouvernement assume et organise

  • un usage disproportionné de la violence par les forces de l’ordre
  • l’utilisation d’armes présentées comme non-létales, les sinistrement célèbres « lanceurs de balles de défense » reconnus comme « arme de guerre » par la réglementation internationale
  • l’intimidation et l’arrestation de journalistes

Les répressions violentes des dernières manifestations ont des conséquences dramatiques sur celles et ceux qu’elles touchent. Chacune et chacun est susceptible de les subir.

De surcroit, la « loi visant à renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations » (dite loi anticasseurs) adoptée par l’Assemblée nationale et promulguée par Emmanuel Macron le 10 avril dernier reste, malgré la censure partielle du Conseil constitutionnel, une atteinte grave aux libertés publiques et à l’équilibre des pouvoirs.

Or « si l’homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout » écrivait Albert Camus.

La Ligue des Droits de l’Homme, fidèle à son histoire et à la mission qu’elle s’est fixée depuis plus de 110 ans, (« défendre tous les droits, partout, pour toutes et pour tous »), appelle toutes les citoyennes et tous les citoyens à agir pour la défense des libertés publiques. Elle exige l’abrogation de la loi du 10 avril 2019 et elle somme le gouvernement de garantir à toutes et à tous la liberté de manifester.

Dans la boîte à outils de la citoyenne et du citoyen que nous sommes, se trouve effectivement le droit de manifester mais aussi le droit de vote. Un droit qui ne s’use que si l’on ne s’en sert pas.

Or les élections pour renouveler le Parlement européen approchent et la voix de chacune et de chacun peut peser sur l’avenir de l’Europe. C’est pourquoi la LDH appelle à participer au scrutin du 26 mai prochain.

Partout dans l’Union européenne, l’égalité d’accès aux droits fondamentaux recule avec la montée des précarisations ; la démocratie et les libertés publiques sont attaquées ; le droit d’asile est bafoué ; la solidarité avec celles et ceux qui sont privés des droits en arrive à être criminalisée.

Voter, c’est s’exprimer pour une Union européenne et des pays membres qui agissent en cohérence avec les valeurs proclamées d’égalité, de solidarité et de justice alors que ces valeurs, trop souvent, ne sont pas au centre des politiques publiques.

Voter, c’est dire par le vote que :

  • nous voulons « une Europe qui garantisse l’accès aux droits fondamentaux », cela pour toutes les personnes qui résident sur son territoire, sans distinction ;
  • pour chacune de ses politiques « l’Europe doit mettre les droits devant tous les autres considérants» ;
  • « l’Europe doit être un espace de libertés et de la démocratie » en s’opposant à ceux qui répondent au terrorisme, aux crises sociales, aux effets des déséquilibres internationaux, en restreignant les libertés et la démocratie.

Exprimer cela, c’est ne pas voter pour ceux qui disent que les droits ne sauraient être les mêmes pour toutes et tous et qu’ils seraient mieux assurés s’ils étaient réservés aux nationaux ! Il s’agit de refuser les expressions des extrêmes droites qui affirment que les droits ne doivent pas être universels.

Exprimer cela, c’est rappeler que les politiques publiques ne peuvent se limiter au seul objectif de « l’égalité des chances ». Menées depuis des décennies, ces politiques ultralibérales, qui oublient la solidarité, n’assurent pas l’accès effectif aux droits pour toutes et tous. Elles induisent les peurs et des précarités dans lesquelles nos sociétés s’enfoncent.

La LDH, qui partage avec nombre d’associations actives partout en Europe le combat quotidien pour l’effectivité des droits, espère trouver demain dans les institutions européennes des personnes élues qui porteront l’objectif de « tous les droits pour toutes et tous ». Nos combats auront besoin de forces politiques qui les partagent.

A chacune et à chacun de le permettre en votant le 26 mai.