Maram Al Masri a dû annuler sa participation aux Rencontres. Sa voix, ses mots, nous manquerons, mais Francis Combes, un autre poète, directeur littéraire aux Temps des Cerises, a accepté de la remplacer, à sa demande(table ronde de samedi 16h30 sur l’engagement de l’écrivain). Il évoquera « L’honneur des poètes », une anthologie de poèmes signés (sous pseudonymes) Aragon, Seghers, Tardieu, Eluard, Guillevic, Desnos, Vercors, Ponge entre autres, excusez du peu ! L’ouvrage est publié en 1943, sous le manteau, par les éditions de Minuit. Aujourd’hui, les éditions Le temps des cerises rééditent ce livre essentiel dans la compréhension des troubles de ce temps de guerre. Ce livre témoigne de l’engagement des intellectuels de l’époque dans la résistance. Francis Combes nous rappellera la place de cet ouvrage de combat, saura nous dire que la poésie est une arme et que placée dans les mains de rimeurs, d’arrangeurs de mots, elle touche, ronge le coeur de la barbarie.
Également à la table-ronde, Loïc Merle et Serge Mestre (voir biographies).
« Ce cœur qui haïssait la guerre… »
Ce cœur qui haïssait la guerre voilà qu’il bat pour le combat et la bataille !
Ce cœur qui ne battait qu’au rythme des marées, à celui des saisons, à celui des heures du jour et de la nuit,
Voilà qu’il se gonfle et qu’il envoie dans les veines un sang brûlant de salpêtre et de haine.
Et qu’il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent,
Et qu’il n’est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagne,
Comme le son d’une cloche appelant à l’émeute et au combat.
Écoutez, je l’entends qui me revient renvoyé par les échos.
Mais non, c’est le bruit d’autres cœurs, de millions d’autres cœurs battant comme le mien à travers la France.
Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces cœurs,
Leur bruit est celui de la mer à l’assaut des falaises
Et tout ce sang porte dans des millions de cervelles un même mot d’ordre :
Révolte contre Hitler et mort à ses partisans !
Pourtant ce cœur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons,
Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères
Et des millions de Français se préparent dans l’ombre à la besogne que l’aube proche leur imposera.
Car ces cœurs qui haïssaient la guerre battaient pour la liberté au rythme même des saisons et des marées,du jour et de la nuit.
Robert Desnos, 1943 (paru dans L’Honneur des poètes)
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