Communiqué : « Chasseurs sentinelles, une collaboration inquiétante avec les forces de l’ordre »

,

Communiqué du 13 octobre 2024

Dans la nuit du samedi 14 au dimanche 15 septembre, des chasseurs postés dans leur abri à Tardinghen, sur la Côte d’Opale (Pas-de-Calais), se sont retrouvés confrontés à une cinquantaine de migrants.

Le groupe se serait attaqué au matériel des chasseurs, sans atteintes aux personnes qui s’étaient barricadées dans leur hutte. Les chasseurs se sont alors servis de leurs armes afin d’effrayer le groupe. L’arrivée des forces de l’ordre au petit matin a mis en fuite les migrants.

L’agression semble être directement liée à une tentative de traversée avortée vers l’Angleterre. Les-dits chasseurs auraient prévenu les forces de l’ordre qui auraient fait échouer le départ de ces migrants désespérés qui avaient comme souvent misé leurs dernières économies et toute leur énergie sur ce projet.

La gendarmerie a indiqué qu’une enquête a été ouverte et que la brigade de Marquise (Pas-de-Calais) est chargée des investigations. S’il appartient aux forces de l’ordre de protéger les biens et personnes, des chasseurs comme de tous les autres habitants du territoire, pour garantir leur liberté, c’est bien le contexte qui a conduit à cette situation extrême qui nous paraît très préoccupant.

La préfecture s’est mobilisée immédiatement pour mettre en œuvre un dispositif spécifique de protection des chasseurs. Le rôle d’un préfet et des forces de l’ordre est bien entendu de protéger la population en général, mais pourquoi une protection spécifique pour les chasseurs ?

Alors même que, d’après un sondage IFOP l’an dernier1, plus des deux tiers des Français ne se sentent pas en sécurité quand ils se promènent à la campagne ou en forêt en période de chasse, et que plus des trois quarts se déclarent favorables à ce que le dimanche devienne un jour non chassé, y compris en zone rurale, cette annonce engendre perplexité.

Cette annonce s’inscrit de fait dans un choix délétère, dangereux, et qui sort du cadre qui devrait être celui d’un état républicain détenteur exclusif du pouvoir de maintien de l’ordre.

Le président de la fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen affirme en effet : « Nous sommes en étroite collaboration avec les forces de l’ordre … Nous sommes leurs yeux et leurs oreilles ».

Dans une déclaration ultérieure aux faits, le préfet du Pas-de-Calais a en effet insisté sur la place que jouent les chasseurs dans la lutte contre l’immigration en France – s’agit-il d’ailleurs bien de cela puisque les personnes ne souhaitent pas immigrer en France ? Le préfet justifie ces mesures spécifiques de protection de chasseurs afin de faciliter leur coopération dans la lutte contre l’immigration. La préfecture explique s’être adressée aux forces de l’ordre pour mobiliser un référent chasse, qui constituera un interlocuteur privilégié.

Au-delà du fait qu’une telle annonce de la part du représentant de l’État dans le département nous semble très prématurée et inopportune trois jours après les faits, et alors que l’enquête est toujours en cours, ces déclarations nous apparaissent extrêmement inquiétantes sur le fond.

  1. IFOP. « Sondage : Les Français et la chasse. » Étude, 2 janvier 2023. ↩︎