La déclaration relative aux innovations numériques dans la lutte contre l’épidémie de COVID-19 a été adoptée largement par les parlementaires de l’Assemblée Nationale par 338 voix pour et 215 voix contre, et du Sénat par 186 voix contre 127. Cette déclaration comporte entre autres la possibilité pour les détenteurs de smartphone de télécharger l’application StopCovid permettant le traçage des personnes positives au Covid-19 par le « suivi de ses contacts » ou « contact tracing ».
Depuis plusieurs semaines déjà la LDH avec un certains nombres d’associations alertent sur le fait que contrairement à une augmentation significative des moyens pour la recherche scientifique et les systèmes de santé publique, ce dispositif n’apportera rien à la lutte contre l’épidémie de Covid 19 et porte au contraire de graves dangers pour notre vie privée et nos libertés.
Après une première lettre ouverte le 24 avril sur les raisons de s’opposer à la mise en œuvre de l’application de suivi de contacts StopCovid, la LDH a écrit une nouvelle lettre ouverte à l’ensemble des parlementaires le 25 mai.
Les craintes que les données personnelles soient captées par les entreprises Google et Apple sont réelles, car c’est via leur service que l’application fonctionnera, qu’on le veuille ou non.
Quant à l’efficacité de StopCovid rien n’est garanti, car il faudrait qu’au moins 60 % de la population utilise l’application et que tout le monde dispose d’un smartphone », et à ce jour aucune application atteint ce taux (60%) de téléchargement dans la population.
Donc nous allons encore céder un pan de notre liberté d’aller et venir, dévoiler qui nous rencontrons, pour un bénéfice sanitaire incertain.
La fédération des Hauts-de-Seine de la LDH , a interpelé le 29 avril 2020 par un email les 13 députés et 7 sénateurs du département, avec une lettre décrivant les raisons pour lesquelles il faut s’opposer à la mise en œuvre de l’application de suivi de contacts StopCovid.
Seuls 5 parlementaires nous ont répondu, et ce bien avant leur vote au parlement:
-Le sénateur Pierre Ouzoulias (groupe communiste républicain citoyen et écologiste)
-Les député.es : Frédérique Dumas (groupe Libertés et territoires), Laurianne Rossi, Florence Provendier et Jacques Marilossian (groupe LREM).
Les deux premiers nous ont exprimé leur scepticisme voire craindre l’inefficacité d’une telle application, ils ont tous deux voté contre ce mercredi 27 mai.
Pierre Ouzoulias estimant que « l’application de traçage semble être d’une utilité presque nulle. La nécessité de protéger les données individuelles est même incompatible avec l’identification des chaînes de contamination. Par ailleurs, la gestion du projet d’application se fait sans réflexion sur les formes de divulgation du secret médical et la gestion des données de santé. » .
Il indique également que « Dans sa négociation avec Apple et Google, le Gouvernement français est maintenant seul, car l’Allemagne s’est ralliée, par pragmatisme, à la solution décentralisée. Cette décision acte du renoncement de l’Europe pour assurer sa souveraineté numérique. »
Fréderique Dumas nous informe qu’elle a demandé la tenue d’un vote en plus du débat, elle s’était « déjà exprimée pour s’opposer à ce dispositif inefficace et liberticide » et qu’elle avait publié une tribune dans ce sens.
Les deux députées LREM ont émis des réserves et attendent d’être convaincues par un tel dispositif. Toutes deux se sont abstenues le 27 mai.
Laurianne Rossi : « je conserve toutefois de réelles réticences d’ordre éthique et sociétal et d’importantes interrogations quant à l’efficacité opérationnelle de cet outil sur l’ensemble du territoire. ». Plus loin elle réaffirme que nos » préoccupations légitimes relatives aux libertés publiques sont également les miennes. Ainsi, dans le cadre de ce vote, je ferai naturellement preuve de la plus grande vigilance à ce sujet ».
Florence Provendier nous assure de sa « volonté de prendre les décisions qui me sembleront les plus justes pour que nous puissions ensemble sortir de cette crise sans précédent. »
Enfin le député LREM Jacques Marilossian n’a pas été convaincu par nos arguments, reprenant ainsi les éléments avancés par le Gouvernement sur l’application : « l’application « StopCovid » est avant tout basée sur le volontariat des citoyens qui est un prérequis […] Les données sont toutes anonymisées dans le serveur où elles sont stockées. Seuls les crypto-identifiants sont partagés de l’application vers un serveur central. ». Il a voté pour mercredi 27 mai.
Vous trouverez dans le tableau ci-dessous la synthèse des votes de chacun des parlementaires du 92 au Sénat et à l’Assemblée Nationale.
Nous remercions les 5 parlementaires qui ont pris la peine de répondre à cette interpellation.
Chacune des crises qui ont marqué le 21e siècle ont été l’occasion d’une régression des libertés publiques. Dernier en date l’état d’urgence sécuritaire dont des mesures liberticides ont été introduites dans le droit commun en 2017.
Déjà nous alertions sur le risque de la pérennité de cet état d’urgence, et nous ne nous sommes pas trompés.
A nouveau nous alertons, malgré les gardes fous qui peuvent exister, sur la tentation de récupérer des données personnelles, sur la restriction des libertés au nom de la guerre contre la pandémie. Si ce n’est pas par ce gouvernement, ça sera par le prochain, ou par les entreprises peu scrupuleuses sur les questions d’éthiques quand il s’agit de données hautement précieuses.
Et au-delà, même si la collecte des données est minime, il n’est pas question d’abandonner le consentement, car via le Bluetooth les échanges d’un téléphone à un autres se fait automatiquement.
Et que dire l’atteinte au secret médical, à la confidentialité des données de santé ?
Comme pour l’état d’urgence sécuritaire, dont l’efficacité n’a pas été démontrée, les dangers pour nos libertés sont eux bien réels !
**Résultat scrutin à l’ Assemblée Nationale
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