Pour une société de solidarité, non de surveillance

Lettre ouverte à Monsieur le Préfet des Deux-Sèvres


Monsieur le Préfet,

Le 24 janvier 2014, a été signé le « plan départemental de prévention de la délinquance 2013-2017 ». Ce plan comportait en principe trois axes prioritaires :

  •     Les actions à destination des jeunes exposés à la délinquance,
  •     La prévention des violences faites aux femmes, violences intrafamiliales et l’aide aux victimes,
  •     L’amélioration de la tranquillité publique.

Ces trois orientations semblaient concourir à mieux garantir la sureté des personnes, qui est un droit fondamental, dans différents contextes. C’est pourquoi nous nous étonnons que l’Etat semble aujourd’hui vouloir apporter un concours financier important à la Ville de Niort uniquement pour son projet de vidéo-surveillance. Ne serait-il pas plus judicieux d’allouer une partie de ces sommes aux violences intrafamiliales ou aux actions de prévention, plutôt qu’à un dispositif qui, de plus, n’a pas fait la preuve de son efficacité et pose des interrogations en matière de libertés publiques ? Ce choix ne vient-il pas déséquilibrer le plan conçu en janvier 2014 ?

La Ligue des Droits de l’Homme de Niort s’inquiète de la décision prise par le conseil municipal de la ville de Niort concernant l’installation de dispositifs de vidéo-surveillance dans le centre-ville de Niort.
Face à la délinquance, nous doutons que cette posture techno-policière réponde aux faillites sociales et politiques que connais notre société. Oui, la sécurité́ est un sujet important et une source de préoccupation légitime pour nos concitoyens. Nous devons apporter des réponses avec sérieux, objectivité et transparence. Ces conditions sont très loin d’être respectées en ce qui concerne le projet de vidéo-surveillance de la ville de Niort.

La charte européenne pour une utilisation démocratique de la vidéo-surveillance prévoit, avant toute implantation, « la réalisation d’un diagnostic préalable visant à définir de manière objective les besoins locaux. Ce diagnostic doit aussi permettre d’évaluer la faisabilité d’un projet de vidéo-surveillance sur un territoire ». Qu’en est-il à Niort ? Quelles études ont-elles été menées ? Par qui ? A partir de quelles données ? Les réponses à ces diverses questions n’ont jamais été fournies aux citoyens par Monsieur le Maire de Niort. Notamment, celui-ci n’a été en mesure de fournir aucune donnée statistique sur la délinquance. Vos services pourraient-ils pallier cette carence en nous fournissant les données détaillées de la délinquance de la commune de Niort ?

Ce projet de vidéo-surveillance que vous avez autorisé surprend bon nombre de nos concitoyens, d’autant plus qu’ils sont à même de prendre connaissance des bilans et autres études, effectués en France et à l’étranger, qui montrent que:

– La vidéo-surveillance ne diminue pas la délinquance

– Elle n’accélère pas l’intervention en temps réel sur les lieux d’un délit

– Elle ne dissuade pas les actes délinquants

– Elle ne permet d’élucider des crimes et délits que dans seulement 1 à 3% des faits sur la voie publique.

La Ligue des droits de l’Homme de Niort vous demande de préciser la position de l’Etat et de répondre, si vous le pouvez, aux questions légitimes que se posent les Niortais sur ce dossier.

Certains que vous saurez réserver à notre requête un accueil favorable, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Préfet l’expression de notre considération distinguées.