Le 9 décembre est l’anniversaire de la loi de 1905 sur la laïcité. La Ligue des droits de l’homme a, depuis sa création, défendu une laïcité d’inclusion contre l’instrumentalisation politique.
Principes de la laïcité
La loi de 1905 instaure notamment par les articles 1 et 2 que :
- la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées dans l’intérêt de l’ordre public
- la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte
La loi sur la laïcité établit une séparation stricte entre l’État, les collectivités et services publics et par ailleurs, les religions. La laïcité garantit donc la liberté de conscience et la liberté d’expression. Mais la loi de 1905 imposait aussi une neutralité de l’État, neutralité qui a été remise en cause par des lois successives et notamment le financement public des écoles privées confessionnelles. 1
La laïcité c’est l’indispensable garantie sans discrimination de l’égalité des citoyens quelque soit leurs origines ou leurs religions (Congrès LDH de Reims 2011). Ainsi, elle permet à chacun de pratiquer sa foi ou de n’en pratiquer aucune dans l’espace public ou privé et assure la neutralité de l’État et des collectivités territoriales.
Menaces sur les principes de la laïcité
Daniel Boitier, membre du groupe de travail sur la laïcité de la Ligue des droits de l’homme, le rappelle dans un entretien publié sur le site de la LDH : les principes de la laïcité ont été dévoyés par différentes lois jusqu’à la loi séparatisme de 2021. 2
Le rapport Baroin en 2003 vise d’abord les musulmans 3. Ainsi, une confusion est établie entre les pratiques vestimentaires et l’intégration aux lois républicaines. Et un amalgame s’installe entre islam, radicalisme et terrorisme. L’islam est un alibi pour rejeter une population dont on ne veut pas en France. Il y a une focalisation sur l’islam et sur le contrôle.
En revenant aux principes de la loi de 1905, la Ligue des droits de l’homme se situe à contre-courant d’un discours qui affirme que l’islam est inassimilable. Elle critique le détournement de la laïcité par l’extrême-droite (et maintenant par une droit élargie) en défendant une laïcité d’inclusion. Celle-ci est fondée sur le droit de croire ou ne pas croire et le refus d’établir une hiérarchie entre les cultes.
La neutralité de l’Etat est confondue avec la neutralité de la société
La loi séparatisme est un glissement quant à l’ordre public et quant à l’idée de neutralité.
Au sujet de l’ordre public, l’interprétation actuelle de la laïcité porte un conflit entre liberté publique (de conscience et de culte) et ordre public. On assiste à une transformation de la définition de l’ordre public qui étaient jusque dans les années 1990 caractérisé par des éléments matériels et qui est maintenant défini par des éléments nouveaux appelés les valeurs.
Même si le conseil d’Etat invite à ne pas confondre principe et valeur. 4
Il en est de même avec la neutralité. La laïcité repose sur 3 concepts : la séparation de l’état et des cultes, la garantie du libre exercice du culte, la neutralité de l’Etat. Mais on assiste à une focalisation de la laïcité sur le principe de neutralité de la société.
Dans son communiqué de 2022 pour une laïcité de liberté et d’émancipation, la Ligue des droits de l’homme dénonce les dangers de la loi séparatisme du 24 août 2021 : « la « loi séparatisme » vient encore renforcer les contraintes, imposées au nom d’un ordre public, à l’exercice des libertés fondamentales réduites à de simples proclamations. Elle ne modifie pas moins de 17 codes et un certain nombre de lois essentielles. Nombre de libertés publiques s’en trouve affectées : liberté de conscience et de culte, liberté d’expression, liberté d’association, droit à l’instruction, libre administration des collectivités territoriales. » 4
Il faut ajouter que l’état finance de plus en plus les cultes afin de mieux les contrôler.
Rappel d’un principe de la déclaration universelle des droits de l’homme
Il est donc nécessaire de revenir à l’esprit et la lettre de la loi de 1905 sur la laïcité conçue comme une liberté. Elle n’est pas séparable d’une défense générale des droits de l’homme. Ainsi l’affirme un article du pacte international de l’ONU qui complète la DUDH : « alinéa 1 / Toute personne a droit à la liberté de penser, de conscience et de religion, ce droit implique la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuelle ou en commun tant en public qu’en privé par le culte et l’accomplissement de pratiques et d’enseignements. Nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d’adopter une religion ou conviction de son choix. »
1https://www.ufal.org/laicite/le-9-decembre-celebrons-la-laicite-un-principe-intangible-pour-batir-notre-avenir/?utm_source=mailup&utm_medium=courriel&utm_campaign=flash
2 https://www.ldh-france.org/la-ldh-et-la-laicite/
3Voir à ce sujet : https://www.vie-publique.fr/discours/140587-tribune-de-m-francois-baroin-porte-parole-de-lump-dans-le-figaro-d citation : « Aujourd’hui, nombreux sont les musulmans à considérer que cette pratique vestimentaire qui a resurgi après la Révolution iranienne constitue d’abord un acte militant à caractère plus politique que religieux. Ce qui est en jeu, ce n’est donc pas la stigmatisation d’une religion en particulier, c’est d’abord la liberté de conscience des jeunes de confession ou de culture musulmane. »
4 https://www.cncdh.fr/laicite « Consacrée depuis plus d’un siècle, la laïcité constitue un principe fondateur de la République française, conciliant la liberté de conscience, le pluralisme religieux et la neutralité de l’État. »
5 https://www.ldh-france.org/pour-une-laicite-de-liberte-et-demancipation/