Communiqué de presse : Retraites : non à une nouvelle régression des droits sociaux

Alors qu’inégalités et précarisation s’aggravent sans cesse, la LDH (Ligue des droits de l’Homme) ne peut que s’inquiéter de voir le gouvernement s’entêter à faire passer en force une réforme des retraites que l’ensemble des organisations syndicales et l’immense majorité des Françaises et Français rejettent.

Après les réformes du Code du travail, de l’assurance chômage, dans un contexte de détérioration continue des services publics, cette réforme du système général des retraites constitue une nouvelle étape vers la remise en cause de l’Etat social, avec l’obsession de réduire à la portion congrue le système de répartition afin que les compléments soient assurés par les mécanismes privés de capitalisation pour celles et ceux qui le peuvent. N’oublions pas que d’ici quelques années, le taux de remplacement va dégringoler à environ 37 % selon le COR contre une moyenne actuelle de 52 % de l’ancien salaire.

Cette réforme, dont la nécessité économique est loin d’être avérée, aggravera les injustices sociales au détriment de celles et ceux ayant des carrières longues, pénibles et précaires, et notamment des femmes qui constituent l’immense majorité des précaires. Elle réduira également la possibilité d’arriver à la retraite et de la vivre en bonne santé. Ici, sur le bassin nazairien, la notion de pénibilité n’est pas un vain mot. Les salariés du bassin nazairien seront les victimes du rallongement de l’âge de départ à la retraite. Le gouvernement fonde sa réforme entre autre sur l’allongement de la durée de vie. Mais ce propos est à nuancer car sur le bassin nazairien, la surmortalité est de 28% de plus que la moyenne nationale chez les moins de 65 ans. Devra-t-on passer de l’emploi au cercueil ?

Inacceptable dans son contenu, cette réforme interroge également en termes de méthode, la procédure annoncée constituant un véritable déni de démocratie si le gouvernement va jusqu’au bout de ce qu’il a annoncé.

En effet, après une réforme du Code du travail par ordonnances, celle des retraites esquive tout débat public en utilisant une procédure législative accélérée (article 47-1 de la Constitution1) et en s’appuyant non sur un projet de loi ordinaire mais sur un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif.

Ce choix n’a rien d’anodin car il permet au gouvernement de s’affranchir d’un véritable débat et de passer outre les droits du Parlement. Moins connu que l’article 49-3, dont le gouvernement a fait un usage abusif à l’automne, l’article 47-1 alinéa 2 de la Constitution permet de dessaisir l’Assemblée nationale au bout de 20 jours à compter du dépôt du projet de loi. Ensuite, le Sénat doit statuer dans un délai de quinze jours. Et, à défaut d’un vote dans un délai de cinquante jours, le projet peut être mis en œuvre par ordonnance.

Conjuguer de telles méthodes avec des mesures d’injustice sociale ne peut qu’accentuer la crise de confiance actuelle, qui met en péril notre démocratie et favorise les dérives vers l’extrême-droite.

C’est pourquoi la section LDH appelle de nouveau les citoyennes et citoyens à se mobiliser et à manifester le 31 janvier à 10H, Place de l’Amérique latine à St Nazaire aux côtés des organisations syndicales.

Saint-Nazaire, le 26 Janvier 2023

1« Si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans le délai de vingt jours après le dépôt d’un projet, le gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de quinze jours. Il est ensuite procédé dans les conditions prévues à l’article 45. Si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de cinquante jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance. »

Soutien de la section LDH aux manifestations du 19 janvier

Notre pays est à la veille d’un mouvement revendicatif puissant qui voit l’ensemble des organisations syndicales unies et déterminées pour refuser un projet de réforme des retraites qui n’a pas l ‘assentiment d’une majorité de la population.

La LDH n’est ni une organisation syndicale, ni un parti politique et ne se positionnera pas sur le bienfondé d’une réforme des retraites

 Pour autant, la LDH s’inquiète de la remise en cause, depuis plusieurs années, de pans entiers des droits sociaux sans qu’un réel débat démocratique puisse avoir lieu.

Que ce soit, hier, des ordonnances pour réformer le Code du travail au détriment des salarié.e.s ou, aujourd’hui, une réforme des retraites qui esquive un véritable débat public en utilisant une procédure législative accélérée (Article 47-1 de la constitution) par la voie d’un Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale rectificatif (PLFSS).

Il est aussi anormal que soit déjà annoncée la date d’application de la réforme, sans que les objections à ce projet ne soient sérieusement prises en compte.

De telles méthodes ne font que renforcer un sentiment d’injustice et accentuer une crise de confiance qui met en péril notre démocratie.

Cette réforme qui concerne chacun de nous doit donner lieu à un large débat national et nous ne pouvons accepter cette précipitation et cette tentative de passage en force.

La LDH tient à dire  que les retraités ne sont pas qu’un enjeu d’équilibre financier. Les retraités sont aussi producteurs de richesses et de cohésion sociale. Sans eux, le tissu associatif serait bien en difficulté et notre solidarité serait aussi en difficulté au quotidien. Cette valorisation du bénévolat ne doit pas uniquement apparaître dans nos bilans comptables associatifs mais aussi dans celui de notre richesse nationale. 

Le droit au respect des  âges de la vie basé sur une solidarité nationale qui ne vise pas uniquement à contenir les coûts de la protection sociale mais qui  doit repenser son financement en élargissant ses recettes serait un chemin bien plus juste que d’essorer encore plus les travailleurs.

Face à l’urgence sociale et à l’urgence démocratique, la Ligue des droits de l’Homme rappelle que toute évolution des droits sociaux doit amener plus de justice sociale et être conduite en respectant réellement le dialogue social.

La LDH réaffirme que face aux périls qui la menacent, la démocratie a tout à gagner à une mise en débats exigeante des voies et moyens de la justice et de l’égalité.

C’est pourquoi la LDH Saint-Nazaire, Estuaire, Presqu’île soutient l’intersyndicale et appelle à une très marge mobilisation le jeudi 19 janvier à 10h place de l’Amérique Latine.

Saint-Nazaire, le 13 janvier 2023