Le fil de l’actualité est bien souvent anxiogène : crise de l’énergie, inflation, violences urbaines, méga incendies, dérèglement climatique, crise de l’hôpital, crise politique et démocratique. Et pourtant, c’est l’essence même de la LDH que de donner des gages d’espoir, de fabriquer du commun, de contenir les thèses populistes et la haine ambiante qui se diffusent au sein de l’hémicycle parlementaire et dans les médias.
C’est aussi par notre capacité à rassembler au-delà nos partenaires habituels que nous contiendrons la régression démocratique actuelle.
Mais n’oublions pas les questions de vie quotidienne de nos concitoyens. Un collectif transpartisan de chercheurs vient de publier un rapport de 160 pages sur l’état des services publics. Ces derniers sont un rempart contre la fragmentation sociale, les inégalités économiques, le libéralisme dérégulé et les inégalités territoriales.
La marchandisation des services publics a conduit, comme nous le savons, à un effondrement de notre hôpital public. Le new public management a aggravé la dégradation des services publics et entretenu l’obésité des bureaucraties des directions générales et des directions ministérielles.
Les réalités de terrain sont niées au profit des tableurs Excel. Les conditions de travail dans les différents services publics se sont largement dégradées. Pourtant, les dépenses publiques sont de 58 % du PIB en 2022 contre moins de 50 % au début des années 80. Le nombre des agents publics est passé de 4,8 millions à 5,4 millions en 20 ans. Les besoins de nos concitoyens ne sont plus les mêmes que dans les années 60. Par exemple, dans le domaine éducatif, les enfants en situation de handicap y sont inclus depuis 2005. L’éducation nationale n’arrive pas à faire face à l’accompagnement de ces enfants handicapés et à la professionnalisation nécessaire de leurs accompagnants. Malgré des textes et circulaires, des inégalités profondes au sein des établissements de l’éducation nationale persistent du fait d’une non-mixité sociale.
Si la lutte contre les trafics de drogue ou l’immigration irrégulière bénéficie de moyens en hausse, les tribunaux sont bien à la peine concernant les litiges familiaux et malgré des nouveaux textes législatifs de lutte contre les violences familiales, le nombre de féminicides ne diminue pas.
Il faut noter que les gouvernants successifs et encore plus depuis 2017 utilisent de plus en plus les forces de police pour le maintien de l’ordre au détriment de la police du quotidien ou de la police judiciaire.
Notons aussi qu’un service public aussi essentiel que la protection de l’enfance est en crise depuis de nombreuses années. L’augmentation des suivis est certes liée à un meilleur repérage des situations mais le manque de moyen et un pilotage complexe conduisent à une embolisation des dispositifs.
La bureaucratie a sclérosé l’innovation, la réactivité et l’adaptabilité. Le langage technocratique, la profusion des textes réglementaires, la segmentation des publics visés, la production prolifique de protocoles et de règles administratives retardent le traitement des problématiques des usagers.
Dans les hôpitaux, une des réformes essentielles n’est toujours pas mise en œuvre, celle de l’inversion du pouvoir décisionnel entre le corps médical et les gestionnaires.
Nos concitoyens, dans certaines régions, sont en peine pour trouver des services publics et doivent se débrouiller seuls face aux questions de vieillissement ou de déserts médicaux. Tout cela se traduit par une augmentation du vote extrémiste et principalement du vote RN.
Pour préserver les droits fondamentaux tels que le logement pour tous, l’égalité dans l’enseignement, la lutte contre les discriminations, la LDH doit renforcer sa présence auprès des usagers esseulés et des agents des services publics.
La LDH doit pouvoir être une force de rassemblement pour mener des actions locales sur la question de la dégradation des services publics et de la réponse aux droits fondamentaux.
Sur St Nazaire, nous sommes particulièrement sensibles aux questions portant sur le logement, l’hébergement d’urgence, la justice du quotidien et la lutte contre les discriminations. Dernièrement, nous avons fait connaître notre préoccupation face au manque de moyens du tribunal judiciaire de St Nazaire.
Nous n’hésiterons pas à alerter et soutenir les initiatives face aux dégradations des services publics qui conduisent à créer des inégalités gravissimes propices à un vote populiste aux prochaines élections présidentielles.
Lutter contre l’extrême droite, c’est certes lutter contre l’idéologie raciste et xénophobe, mais c’est aussi mener un combat pour améliorer le quotidien de nos concitoyens et principalement de ceux qui ont encore plus besoin que les autres de services publics de qualité.
Jean-Luc Boero, président de la section,
Le 16 septembre 2023