La situation politique en France à la suite des élections législatives et de la constitution d’un gouvernement dirigé par un Premier Ministre venant d’une formation politique minoritaire au parlement fait surgir les vieilles rengaines d’une offensive dangereuse confondant l’Etat des lois et l’Etat des droits, et ce en raison de la porosité idéologique entre certains membres du gouvernement et l’Extrême-Droite.
La LDH comme d’autres organisations a fait savoir sa totale réprobation aux déclarations de Bruno Retailleau qui a été très mollement recadré par le Premier Ministre.
Un autre projet emblématique porté par cette droite xénophobe et marquée par l’exploitation politicienne d’un faits divers criminels va être présenté toujours par Bruno Retailleau : celui du rallongement des délais en centres de rétention administrative (CRA) pour les criminels de droit commun, comme s’il était facile d’obtenir des laisser- passer consulaires pour expulser des étrangers sous OQTF !
La sureté qui est un droit de l’Homme essentiel ne peut se confondre avec un affichage politique et une communication politicienne qui n’aura que très peu d’effets sur la réalité de la sécurité pour tous car, comme l’a bien dit la Cour des comptes, les services des étrangers manquent cruellement de moyens et si un laisser-passer consulaire n’est pas donné aux autorités françaises même pour un criminel ayant commis un acte particulièrement grave, le rallongement des délais de rétention ne changera rien à une remise en liberté de celui-ci sauf à mettre en œuvre à terme une rupture totale de l’Etat des lois qui consisterait à bannir à tout jamais de la vie sociale tout ex-criminel.
Faire croire qu’en rallongeant les délais en CRA favorisera la prévention du crime, c’est vraiment prendre nos concitoyens pour des imbéciles.
Les prisons françaises regorgent de détenus, les CRA sont saturés, les peines prononcées par les tribunaux sont de plus en plus lourdes et pourtant, bon nombre de nos concitoyens vivent dans des quartiers où le sentiment d’insécurité lié aux trafics de drogue ou d’êtres humains prédomine en raison d’une relégation sociale, d’un manque de moyens éducatifs, d’une absence de police de proximité et d’un engorgement des tribunaux qui empêchent malheureusement un traitement des délits et crimes parfois dans des délais raisonnables.
Œuvrer pour un monde plus sûr, c’est aussi s’attaquer aux causes profondes de la misère, des guerres et des ravages du sous-développement dans le monde et celui du réchauffement climatique qui va renforcer les migrations.
Il ne peut y avoir en France et en Europe de politique migratoire juste sans prendre en compte les effets de notre développement et de nos rapports avec les pays sub-sahariens ou nos ex-colonies. Créer des voies sûres de migrations, promouvoir un accueil digne et une intégration de qualité sont des principes que la LDH et bien d’autres prônent depuis fort longtemps. Le business des passeurs et de celles et ceux qui exploitent la misère humaine cessera beaucoup plus fortement qu’un renforcement des fermetures des frontières ou une inflation des OQTF.
Une nouvelle loi sur l’immigration ne changera en rien la sécurité de nos concitoyens mais mènera encore à plus d’arbitraire administratif, de désespoir, de situations de souffrances humaines et nourrira encore plus l’exploitation éhontée des sans-papiers.
Une autre politique est possible, nous le savons et notre section, avec bien d’autres organisations dont le collectif UCIJ, continuera inlassablement sa lutte pour le respect des droits des étrangers car cela conditionne l’effectivité des droits pour tous.
Jean-Luc Boero, président de la section, le 14 octobre 2024
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