Catégorie : Europe

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Communiqué de l’AEDH sur la position de l’UE dans le conflit israélo-palestinien.

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The European Association for the Defence of Human Rights (Association Européenne pour la défense des Droits de l’Homme – AEDH) consists of associations and leagues defending human rights in the countries of the European Union. For more information, visit http://www.aedh.eu/.

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Bruxelles, le 3 Septembre 2014

L’Association européenne pour la  défense des droits de l’Homme (AEDH) regrette vivement que l’Union européenne se soit contentée lors de la réunion du Conseil du 30 août 2014 d’une déclaration attentiste sans effet  alors que l’on compte plus de 2000 morts et 10 000 blessés palestiniens et qu’une issue durable et négociée directement reste toujours aussi incertaine. Il convient que les organisations internationales qui pensent représenter la « communauté internationale » – dont l’UE se targue de faire partie – prennent enfin la mesure du danger que fait planer la poursuite de la politique israélienne. Si la sécurité de l’Etat d’Israël est au prix d’offensives aussi meurtrières, dont témoigne le déséquilibre des morts, c’est parce que les droits de tous les peuples de la région ne sont pas considérés comme de même valeur. Si une tentative de résolution peut un jour déboucher sur une paix réelle, ce ne peut être que dans le respect du droit international, des résolutions de l’ONU, un accord mutuel de reconnaissance entre deux Etats souverains, la fin du blocus de Gaza, l’arrêt de de la colonisation et le retrait de toutes les colonies israéliennes qui rendent illusoire la viabilité d’un état palestinien.

Le 22 juillet 2014, le Conseil des affaires étrangères de l’Union européenne s’était contenté de choisir une position d’évitement avec comme axe central : « Tous les groupes terroristes dans la bande de Gaza doivent désarmer » tout en accordant que « l’opération de l’armée israélienne doit être proportionnée et conforme au droit international humanitaire ». Le Conseil du 30 août évolue mais avec beaucoup de prudence et appelle « les deux parties » à « aboutir à une amélioration fondamentale des conditions de vie des Palestiniens dans la bande de Gaza par la levée du bouclage et demande qu’il soit mis un terme à la menace que le Hamas et les autres groupes radicaux actifs à Gaza constituent pour Israël ». Il demande au « gouvernement palestinien de consensus » d’exercer « l’ensemble de ses responsabilités à la fois en Cisjordanie et dans la bande de Gaza », il demande un « accès humanitaire immédiat et sans entrave ». Il est aussi rappelé que l’UE est prête à contribuer à une solution globale et durable renforçant la sécurité, le bien-être et la prospérité des Palestiniens comme des Israéliens » et le conseil se prononce pour « un accord définitif reposant sur une solution fondée sur la coexistence de deux Etats pour instaurer « une paix et une stabilité durables ». Le Conseil rappelle que « la bande de Gaza fera partie d’un futur Etat de Palestine ».

L’AEDH considère que cette analyse même si elle manifeste une certaine évolution positive, ne représente pas la réalité, mais justifie une prudence  de l’Union européenne. S’il est justifié de condamner la violence du Hamas, cela n’a de sens que si dans le même temps le  recours à une invasion militaire destructrice est dénoncé comme tel. Sinon, il s’agit d’un texte qui a pour fonction de ne pas risquer de mettre en contradiction les principes de démocratie, de primauté du droit, d’universalité et d’indivisibilité des droits qui ont présidé à la construction de l’UE, et la poursuite de l’accord d’association signé en 1995 avec l’Etat d’Israël et dont l’article 2 précise que les relations entre les deux parties doivent être fondées sur le respect des droits de l’Homme et sur les principes démocratiques qui régissent leurs politiques intérieures et internationales. L’AEDH considère que l’accord d’association qui lie l’UE et l’Etat d’Israël aurait dû être immédiatement suspendu, comme le permet son article 2 dès le début de l’offensive militaire sur Gaza.

En 2002, le Parlement européen avait adopté une résolution demandant avec raison la suspension de cet accord et prévoyait même l’envoi d’une « force internationale d’interposition et d’observation » au Proche-Orient sous l’égide des Nations-Unies. Douze ans plus tard, les droits de l’Homme sont encore moins respectés par le gouvernement israélien. Douze ans plus tard, le respect des droits pour tous reste à imposer.

L’AEDH considère que le Conseil européen du 30 août aurait dû être le moment pour l’UE de sortir de son équilibrisme qui revient à privilégier un compromis provisoire au détriment de  la recherche de la justice. L’AEDH attend de l’UE qu’elle fasse usage de tous les moyens de pression dont elle dispose pour obliger le gouvernement israélien à adopter une politique de respect du droit international qui sorte de l’oppression, de la colonisation, de l’occupation militaire et de la guerre et du blocus de Gaza qui interdit à la population palestinienne tout moyen de vivre.

Contact:

Dominique Guibert, Président

AEDH, Association Européenne pour la défense des Droits de l’Homme

33, rue de la Caserne. B-1000 Bruxelles

Tél : +32(0)25112100 Fax : +32(0)25113200 Email : info@aedh.eu

 

L’Association Européenne pour la Défense des Droits de l’Homme (AEDH) regroupe des ligues et associations de défense des droits de l’Homme des pays de l’Union Européenne.  Pour en savoir plus, consultez le site www.aedh.eu.

Entre affaires et Sarkozy, l’UMP est KO debout

Mediapart.fr

22 mai 2014 | Par Ellen Salvi

 

À trois jours du scrutin européen, l’opposition peine à faire parler d’elle pour autre chose que les affaires. La question du maintien de Copé à la tête du parti est posée. L’UMP tente de minimiser la casse prévisible du vote de dimanche, tandis que Sarkozy profite de la brèche ouverte.

« Grâce à Sarkozy, on parle vraiment de l’Europe. » En une phrase, Brice Hortefeux a résumé sur iTélé la problématique rencontrée par l’UMP depuis une semaine. À trois jours des élections européennes, la tribune de l’ancien chef d’État publiée dans Le Point n’était pas de trop pour espérer reprendre la main sur le débat public. Car dans une campagne déjà très resserrée, et lancée en ordre dispersé, le parti d’opposition fait une nouvelle fois l’actualité sur un sujet que ses principaux responsables ont coutume de mettre sous le tapis : les affaires.

Entre les nouvelles révélations de Libération sur l’affaire Bygmalion, la garde à vue d’Isabelle Balkany dans le cadre de l’enquête pour blanchiment de fraude fiscale qui les vise, elle et son mari, et l’information judiciaire ouverte sur des soupçons de détournement des dotations versées au groupe UMP au Sénat, difficile pour les ténors de la droite et les candidats aux européennes d’éviter de se prononcer sur l’avenir de leur parti. Fin mars, à quelques jours du premier tour des municipales, Nicolas Sarkozy s’était déjà exprimé dans Le Figaro pour répondre aux informations de Mediapart concernant les sept écoutes judiciaires effectuées sur la ligne téléphonique ouverte par ses soins sous une fausse identité.

Dans sa nouvelle tribune, l’ancien président de la République ne fait nulle mention aux affaires, mais se concentre sur l’Europe, répondant ainsi à la demande de plusieurs ténors de l’UMP qui l’appelaient depuis quelques semaines à prendre la parole pour fixer la ligne du parti et faire taire les voix discordantes.

L’ancien président de la République y prône notamment la suspension immédiate des accords de « Schengen I » – qui régissent les flux migratoires dans l’Union européenne – et leur remplacement « par un Schengen II auquel les pays membres ne pourraient adhérer qu’après avoir préalablement adopté une même politique d’immigration ». Sur ce point, le Sarkozy de 2014 ressemble au Sarkozy de 2012 qui avait menacé, en pleine campagne présidentielle, de suspendre la participation de la France aux accords de Schengen. « Les accords de Schengen ne permettent plus de répondre à la gravité de la situation, ils doivent être révisés, avait-il déclaré à Villepinte le 11 mars 2012Si je devais constater que dans les douze mois qui viennent il n’y avait aucun progrès sérieux dans cette direction, alors la France suspendrait sa participation aux accords de Schengen jusqu’à ce que les négociations aient abouti. »

Nicolas Sarkozy à Villepinte, le 11 mars 2012.
Nicolas Sarkozy à Villepinte, le 11 mars 2012. © Reuters

Deux ans plus tard, l’UMP avait retranscrit mot pour mot cette proposition dans la première mouture de son projet pour les européennes, avant de se rappeler qu’elle était désormais dans l’opposition et qu’elle ne pouvait, de fait, suspendre la participation de la France aux accords de Schengen, mais seulement « demander » cette suspension. La phrase a été rectifiée avant que le programme ne soit diffusé.

« Les propositions de Sarkozy pour l’Europe se trouvaient déjà dans notre programme, reconnaît le sénateur des Hauts-de-Seine et vice-président de l’UMP Roger Karoutchi. Nous n’avons pas de personnalité assez forte pour les porter. En ce sens, cette tribune est un vrai coup de pouce pour le parti. » Une façon de souligner l’un des principaux problèmes rencontrés par l’opposition depuis la défaite du 6 mai 2012 : l’absence de leader, les divisions qui l’accompagnent et qui profitent à l’ancien président de la République. De son côté, François Fillon a profité de l’occasion pour se démarquer une nouvelle fois de Nicolas Sarkozy, arguant qu’une « réforme » de l’espace Schengen serait préférable à sa suspension.

Convaincus que la première tribune de l’ex-chef d’État avait déjà joué sur le succès des municipales, les sarkozystes se réjouissent de cette nouvelle prise de parole qui aura, ils l’espèrent, un impact positif sur le scrutin de dimanche. Face à la menace de se voir reléguée à la deuxième place derrière le Front national, l’UMP a multiplié les appels à la mobilisation lors de son meeting national pour les élections européennes, organisé mercredi soir à Paris. Mobiliser les électeurs tentés par le vote frontiste, ceux qui comptent s’abstenir ou encore ceux qui envisagent de plébisciter les listes de l’alternative UDI-MoDem…

Le parti d’opposition se voit contraint de brasser bien plus large qu’aux élections de 2009, où la majorité s’était présentée sur des listes uniques. Le tout dans un contexte qui sent « le moisi », pour reprendre les mots de Bernard Debré. Comme plusieurs autres personnalités de l’opposition – dont bon nombre de soutiens de François Fillon lors de la guerre pour la présidence de l’UMP en novembre 2012 –, le député de Paris a demandé des comptes à Jean-François Copé sur les soupçons de fraudes dont le parti fait l’objet depuis les premières révélations du Point dans l’affaire Bygmalion. Une demande à laquelle se sont joints le président UMP de la commission des finances de l’Assemblée, Gilles Carrez, mais aussi Alain Juppé.

Selon le Canard enchaîné, le maire de Bordeaux serait même allé plus loin la semaine dernière en déclarant devant des syndicalistes UMP : « Jean-François Copé ne sera plus président de l’UMP en septembre. C’est clair pour tous, et sans doute pour lui aussi. Pour le moment, sa chance, c’est que personne ne veut sa place. »

 

« Mise sous tutelle » de Copé

 

 

Le député de Haute-Savoie Lionel Tardy, qui s’était attiré les foudres de Copé en montant au créneau dès le mois de février, a adressé une lettre ouverte au patron de l’opposition pour dénoncer « le silence assourdissant des dirigeants » du parti face à la multiplication des affaires. « Nous ne sommes pas sur un problème de ligne politique, mais de transparence », écrit-il avant de prévenir : « Il est enfin temps pour vous, dès le début juin, d’éclairer les Français, militants et élus UMP, faute de quoi l’UMP, notre parti, notre bien commun, n’y survivra pas. »

Interrogé jeudi matin sur iTélé, François Fillon s’est à son tour exprimé sur le sujet en rappelant qu’il avait « demandé en son temps qu’il y ait un petit comité pluraliste qui contrôle la gestion du parti, comme ça se fait dans n’importe quelle entreprise privée ». « Ça m’a toujours été refusé, a-t-il indiqué. Je pense que si l’on avait mis en place ce comité, on se serait prémunis contre beaucoup des accusations qui sont portées aujourd’hui. » Début avril, à l’issue des municipales, l’ancien premier ministre avait demandé la mise en place d’un comité de surveillance pour superviser la gestion financière de l’UMP. Jean-François Copé lui avait alors opposé une fin de non-recevoir, indiquant qu’il allait mettre tous les comptes sur la table.

Jean-François Copé.
Jean-François Copé. © Reuters

Pour finir, le patron de l’opposition s’était contenté d’exposer aux ténors du parti une synthèse de sa gestion financière de l’UMP, sans toutefois leur présenter de documents comptables. Mais aujourd’hui, les moitiés d’explications et les appels à laisser « la justice faire son travail » ne suffisent plus. « Nous sommes dans une autre séquence que celle des municipales, estime un parlementaire UMP sous couvert d’anonymat. Cette fois-ci, on ne se contentera pas d’un “circulez, il n’y a rien à voir”. Les premières informations du Point étaient moins précises que celles de Libération. Là, on est dans du factuel. Cela prend une dimension politique en interne, qui sera forcément différenciée du traitement judiciaire. »

Jean-François Copé, lui-même, a bien compris que la donne avait changé depuis le mois de février. Alors qu’il dénonçait, il y a encore quelques semaines, « le bûcher médiatique » et « la manipulation » que constituaient, à ses yeux, les révélations du Point « à quelques semaines de scrutins très importants pour notre pays », le député et maire UMP de Meaux fait désormais profil bas. Depuis peu, il répète à l’envi qu’en qualité de président du parti, il n’est pas « au fait de la gestion quotidienne de l’UMP dans sa dimension comptable ». Un argument qui peine à convaincre les membres de sa famille politique tant sa proximité avec la société Bygmalion – qui a empoché 12,7 millions d’euros au cours du premier semestre 2012 pour l’organisation de conventions dont personne ne se souvient – est de notoriété publique.

 

Pour répondre aux critiques émanant de son propre camp, Jean-François Copé a demandé au directeur général de l’UMP, Éric Césari, de préparer un rapport détaillé sur les factures payées à Bygmalion. Il sera présenté mardi 27 mai, devant le bureau politique statutaire, exceptionnellement convoqué le matin, en lieu et place du comité politique du parti. « Je peux vous dire que tout le monde sera là !, s’amuse un parlementaire UMP en “off”. Si le rapport de Césari est aussi accablant que les affirmations de Libération, ce sera difficile pour Copé de rester. »

En cas de démission du patron de l’UMP, le parti va se retrouver confronté à l’épineux problème de sa succession. « Il y a une grande différence entre les désirs de chacun et leurs intérêts politiques, poursuit le même parlementaire. Les ténors du parti se réservent pour la primaire de 2016. Le maintien de Copé les arrangerait bien, dans le sens où ils ne veulent pas se griller dans une nouvelle élection interne après le fiasco de 2012. Le calendrier n’est pas favorable. On n’a pas de solution toute faite. »

Car si Copé venait à présenter sa démission la semaine prochaine, une nouvelle élection devrait avoir lieu dès le mois d’octobre, selon les statuts de l’UMP, adoptés par les adhérents en juin 2013. Et pour l’heure, les candidats à la tête du parti ne se bousculent pas. En coulisses, d’aucuns évoquent l’éventualité d’une « mise sous tutelle » du patron de l’opposition par une partie du bureau politique statutaire. Une sorte de “direction collégiale” qui ne porterait pas son nom. « On trouvera bien un nom élégant pour l’habiller », souffle un cadre du parti. D’autres considèrent déjà l’UMP comme « une coquille vide » et avancent timidement une tout autre hypothèse : la création d’un nouveau mouvement par Nicolas Sarkozy, en vue de 2017.

 

Campagne européenne: le grand écart du PS

Mediapart.fr

21 mai 2014 | Par Stéphane Alliès

 Comment, sur le terrain, les socialistes parviennent-ils à mettre en musique le discours anti-austérité de Martin Schulz et la politique de François Hollande et Manuel Valls ? Esquisse de réponse à La Flèche (Sarthe), où les candidats Emmanuel Maurel, figure de l’aile gauche du PS, et Christophe Rouillon, « fabiusien réaliste », affichent leur « complémentarité ».

La Flèche, de notre envoyé spécial.   Depuis trois semaines, la campagne des européennes offre le visage d’un PS tiraillé entre son discours au pouvoir et son discours sur les estrades. Et si elles paraissent surmontées, les contradictions des socialistes se réveillent parfois, sur la forme comme sur le fond.

Sur la forme, comme quand Manuel Valls doit supporter la perfidie d’une Martine Aubry qui, au terme d’un meeting à Lille, fait jouer « une vraie chanson de gauche » (Le chiffon rouge de Michel Fugain) quand celui-ci s’attendait à la Marseillaise (voir ici la vidéo). Ou sur le fond, comme quand Pervenche Bérès plaide en meeting à Évry contre la règle des 3 % de déficit public des États-membres, face à un Manuel Valls ne cessant de les réaffirmer. Ou encore quand Martin Schulz fixe des lignes rouges à la négociation du traité transatlantique, loin de la volonté énoncée par Hollande en février de le signer « au plus vite ».

Pris dans ce grand écart permanent, comment le PS fait-il campagne, sur le terrain ? Mediapart est allé s’en rendre compte dans le sud de la Sarthe, au cœur d’une circonscription Grand Ouest, qui lui a apporté l’un de ses moins mauvais scores lors des dernières européennes en 2008 (17,3 %). À l’ombre d’un Martin Schulz, chef de file des socialistes européens, largement mis en avant et occupant médias, meetings et rencontre avec les ouvriers (lire ici), comment le PS gère-t-il sa double ambivalence, celle de militants et candidats, soutiens et critiques de l’action gouvernementale, faisant campagne contre une austérité que le pouvoir socialiste met en œuvre ?

À La Flèche, à mi-chemin entre Le Mans et Angers, on retrouve un duo emblématique de cet équilibre fragile. Deux quadras, Christophe Rouillon (47 ans) et Emmanuel Maurel (41 ans). Le premier est un fabiusien réaliste, soutien inébranlable du pouvoir, maire réélu de Coulaines (Sarthe) et membre du comité des régions européennes. Il espérait être premier homme sur la liste, et donc éligible derrière la sortante Isabelle Thomas. Mais le second lui a grillé la politesse, un peu par hasard, au gré des aléas d’une nuit de négociations dans les arcanes de Solférino, dont seul le PS a le secret (lire ici).

Trouver une place à Maurel en tant que chef de file du courant de l’aile gauche PS, ayant réalisé un score surprise (28 %) face à Harlem Désir en 2012, ne s’est pas fait sans mal. Son implantation dans la région Ouest (après avoir espéré être un temps tête de liste dans le Sud-Ouest, puis le Centre) s’est heurtée à un refus militant massif dans les fédérations du Finistère et des Côtes-d’Armor. Jugé trop parisien et trop à gauche, deux gros défauts dans le contexte de la colère fiscale d’une partie des bonnets rouges.

Dans la Sarthe aussi, la fédération de Christophe Rouillon, le vote contre Emmanuel Maurel a été massif. Mais au total des votes de l’eurorégion (Bretagne, Pays de la Loire et Poitou-Charentes), sa candidature a finalement été validée. Désormais, s’ils ne seront pas les meilleurs amis du monde, l’entente est cordiale. Les deux hommes se retrouvent un midi à l’ombre d’un moulin à aube sur les bords du Loir, pour casse-croûter avant d’aller visiter une PME commercialisant des vélos électriques.

Emmanuel Maurel sur le marché de La Flèche
Emmanuel Maurel sur le marché de La Flèche © S.A

« On s’est réparti les rôles et les territoires », explique Maurel, que l’on dit « persona non grata en Bretagne », du fait de la rancœur militante locale. Ce qu’il réfute au milieu d’une distribution de tracts sur l’important marché de La Flèche. « La semaine dernière, j’étais à Saint-Malo », dit-il, en donnant des gages localistes à ceux qui lui reprochent un parachutage. Vice-président de la région Île-de-France, il dit avoir quitté son Val-d’Oise pour se baser à Nantes le temps de la campagne, et aller « depuis toujours » en vacances dans les Pays de la Loire.

Ancien de Sciences-Po et diplômé en lettres modernes, Emmanuel Maurel assume un socialisme à l’ancienne, davantage branché par le social et l’emploi que par le sociétal et les minorités ou les questions de genre. Il semble intarissable sur le sujet agricole, et nous apprend même qu’« appeler une vache par son prénom améliore la “tartinabilité” du beurre ».

« C’est paradoxal au vu du climat politique, mais la campagne est très sympa, explique cet ancien proche du ministre Jean Poperen. Les militants ont envie d’en découdre, notamment dans les villes qui ont connu des défaites aux municipales ». Ici à La Flèche, beaucoup de gens ne sont pas au courant quand on leur tend un tract. Les militants sur place le confirment en soupirant : « On passe notre temps à informer qu’il y a un vote. » Mais Emmanuel Maurel veut y croire. « On parle beaucoup du prix de l’euro, et de sa nécessaire dévaluation, assure-t-il. C’est le vrai problème pour tous les agriculteurs ou les entrepreneurs que l’on rencontre, bien plus que les travailleurs détachés. Sans cette directive, ce serait une vraie jungle… »

Retrouver l’électorat de la primaire

Déprimé par le contexte national, Maurel se revigore sur le terrain. Il a mis son animation nationale de l’aile gauche en “stand-by” depuis le débat sur le plan d’austérité. Même s’il profite de la campagne pour rencontrer un grand nombre de militants. Tout en achetant un miel aux vertus miraculeuses (« ça fait gagner les élections ? »), il évoque une campagne qu’il semble affectionner, chaque jour dans un endroit différent. Petites réunions publiques et rencontre avec des représentants de la société civile de gauche, syndicalistes, petits patrons de PME ou associations type Ligue des droits de l’homme ou Ligue de l’enseignement…

À travers ces choix, il y a un objectif électoral assumé : « Si on parvient à retrouver les 2 à 3 millions qui ont voté pour nous à la primaire présidentielle, les militants et les sympathisants socialistes, on peut faire un score respectable – compte-tenu de l’abstention – et participer à une alternance en Europe. » Quand on lui objecte que la dynamique de mobilisation n’est pas franchement la même, au sortir d’élections municipales catastrophiques, il rétorque : « Je pense que ce message a été entendu par le parti, quand même. » Mais admet, aussi : « Bon d’accord, il ne l’a peut-être pas été par François Hollande… »

Christophe Rouillon répondant aux questions d'un journaliste
Christophe Rouillon répondant aux questions d’un journaliste © Facebook de Christophe Rouillon

Avant d’aller organiser une conférence de presse et un meeting avec Élisabeth Guigou, Christophe Rouillon laisse poindre davantage d’optimisme. « Les européennes, c’est quand même plus simple pour nous, lâche-t-il. Là où il faut faire de la triangulation aux municipales, on revient ici aux valeurs, aux bases du clivage gauche/droite. » Pour sa part, il assume une stratégie électorale ignorant les concurrences à gauche, préférant défendre une vision tripartite de l’enjeu électoral. À ses yeux, seul le PS peut endiguer le Front national et l’UMP : « On joue sur la conscientisation et la culpabilisation de notre électorat : “Si vous ne votez pas, le FN sera devant et l’Europe restera conservatrice.” Faudra pas se plaindre après ! »

Rouillon l’assure, « on est dans une région très pro-européenne, alors il faut parler concret », et surtout argumenter contre le FN. Il décline : « Aux agriculteurs, on explique qu’avec le FN, les crédits de la PAC seront en baisse. Aux jeunes, on parle des rétablissement des visas que l’extrême droite propose, aux vieux de l’Europe de la paix face au retour aux frontières. Avec l’Ukraine, c’est un message pas si éculé. » Rouillon est garant de la cause pro-européenne, presque a-critique. « L’Europe ne peut pas être un défouloir, martèle-t-il. Il faut arrêter de croire que le chômage se réglera au niveau hexagonal, ou dire que tout se réglera d’un coup. Il faut expliquer que c’est une avancée pas à pas. » Il dit miser beaucoup sur Schulz, et espère qu’il sera « la figure européenne qui manque à la social-démocratie en crise ».

Pour le coup, Emmanuel Maurel partage ce point de vue : « Sa campagne et son programme me vont très bien. Il dit ce que je dis depuis deux ans en France. » « L’idéal serait qu’il fasse alliance sur sa gauche, et il commence à le dire publiquement, renchérit-il. Cette logique est la même que ce que je dis au PS… » Il s’accroche à cette perspective, même si l’accord de majorité a beaucoup plus de chances de réunir à nouveau le PSE avec les conservateurs du PPE, voire les libéraux de l’ADLE. Qu’importe, Maurel a envie d’y croire.

« Il y a quand même une différence entre la discipline budgétaire et l’austérité »

Cette ambivalence ne vire-t-elle pas à la schizophrénie, à force de faire campagne sur le terrain en prônant le refus de l’austérité, tout en appartenant au parti qui la met en œuvre en France ? Christophe Rouillon ne le pense pas. « Il y a quand même une différence entre la discipline budgétaire et l’austérité, dit-il, même si elle est dans l’épaisseur du trait. Avec nous, c’est une rigueur sans sacrifices insupportables. »

À ses yeux, « la relance ne peut pas se faire tout seul en France, sinon on est cuit, mais au niveau européen ». Et si Manuel Valls s’est engagé à respecter les 3 % de déficit, « il demande dans le même temps un changement de politique monétaire », tranche-t-il. Pour Emmanuel Maurel, la défense est plus aisée : « Il n’y a aucune schizophrénie chez moi : je suis contre l’austérité en France ET en Europe, et je ne cesse de le dire. Être dans l’aile gauche du PS n’est pas un désavantage dans cette campagne. »

Christophe Rouillon et Emmanuel Maurel, dans l'entreprise Ecomouv, à La Flèche
Christophe Rouillon et Emmanuel Maurel, dans l’entreprise Ecomouv, à La Flèche © S.A

Les deux candidats veulent convaincre de leur complémentarité. À l’épreuve face au chef d’entreprise rencontré de concert, on peut juger le tandem opérationnel. Les réactions sont rarement les mêmes, face au propos du petit patron. Quand Rouillon approuve les demandes de simplification de la réglementation, s’interroge sur les commandes auprès des collectivités locales et opine à l’évocation des critiques de l’entrepreneur sur le poids des normes de sécurité européennes, Maurel ne dit mot. En revanche, il tique quand le petit patron cause production des pièces en Chine et coût de la main-d’œuvre, alors que son camarade écoute attentivement.

Parfois, le naturel « aile gauche » de Maurel refait surface. Comme quand il s’insurge illico en entendant que « le vrai problème, c’est le droit du travail », « la difficulté à licencier » et « les condamnations au prudhommes ». « Attendez, les prudhommes, c’est pas l’Union soviétique, coupe-t-il net. C’est quand même normal que ce ne soit pas anodin de virer des gens. Ça se saurait si les salariés dictaient leurs lois aux patrons dans ce pays… »

Puis, Maurel se fait taquin :
« Et sinon, vous touchez le CICE  (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) ?
— Oui mais au risque de vous choquer, ce n’est pas ça qui va me faire embaucher.
 Vous ne me choquez pas du tout, au contraire. En tout cas moins que mon co-listier. Pourquoi ?
 Je ne sais pas si ça va pas être retiré, et de toute façon je n’embauche que quand j’ai du travail…
 L’important, c’est le carnet de commandes, en somme ?
 Voilà ! »

Fier de son effet, visiblement rodé avec d’autres petits patrons rencontrés auparavant, Maurel conforte sa croyance en une politique de relance et d’investissement, et son rejet du socialisme de l’offre. « Je n’ai jamais caché ni mes opinions ni mes mécontentements, dit-il, mais je suis loyal et je reste attaché à l’intérêt de mon parti. »

C’est d’ailleurs en vertu de cet attachement au PS que Maurel affiche son aisance sur l’épineux sujet de l’accord transatlantique de libre échange Etats-Unis Europe: « Je vous rappelle que lors de la convention Europe du PS, les militants ont voté un amendement sur cette question, à 80 %, pour suspendre les négociations » (lire ici et ici). Et de se faire bravache : « Si je suis élu, je voterais contre, quoi que les autres disent. » Et de retrouver ses accents de militant inébranlable d’un socialisme historique, refusant de voir le recentrage de son parti, en tout cas se refusant à le juger inéluctable. « Je n’ai pas à quitter mon parti, ce sont eux qui s’éloignent du socialisme », a-t-il ainsi coutume d’expliquer depuis deux ans.

Sur le marché de La Flèche, à une retraitée, comme au chef d’entreprise dans son bureau ensuite, qui lui disent « Je vous dis merde », il a la même réplique automatique, à chaque fois lâchée d’un sourire en coin à la Droopy. « Oui, c’est le mot qui convient. »

La boîte noire :Je me suis rendu à La Flèche le 14 mai dernier, et ai passé la journée avec les deux candidats.

Les partis européens sont-ils vraiment des partis ?

Vous n’en entendez jamais parler, vous ne pouvez pas voter pour eux ni même, pour la plupart, y adhérer. Et pourtant, les partis politiques européens existent. En 2014, treize formations transnationales, officiellement reconnues, reçoivent des subventions européennes. Comme le Parti populaire européen (PPE), principale formation de droite, le Parti socialiste européen (PSE), les centristes de l’Alliance des libéraux et des démocrates pour l’Europe (ALDE), ou encore les radicaux du Parti de la gauche européenne (PGE). Ces mouvements sont d’un genre particulier, puisque leurs membres sont eux-mêmes des partis : ils regroupent en effet des formations nationales aux idées identiques ou similaires.

Ainsi, le PPE, qui domine actuellement le Parlement européen, regroupe une cinquantaine de partis libéraux-conservateurs de l’UE, dont l’UMP française. Le PSE comprend 33 partis sociaux-démocrates, et notamment le Parti socialiste. Le Parti vert européen représente 32 mouvements, y compris Europe Ecologie-les Verts; quant à la très eurosceptique Alliance européenne pour la liberté (AEL), elle affiche 7 membres dont le Front national. Mais ces coalitions européennes méritent-elles vraiment le titre de parti ?

«La question se pose depuis longtemps, souligne Francisco Roa Bastos, docteur en sciences politiques et spécialiste du sujet. Le problème est qu’on ne sait pas définir précisément ce qu’est un parti. On sait, en gros, que ce sont des entreprises politiques qui tentent d’arriver au pouvoir. Mais en Europe, où se situe le pouvoir au juste ? Qui plus est ces partis n’ont pas vraiment de militants. Ce sont donc surtout des structures décoratives.»

Former une «conscience européenne»

Celles-ci ne sont pourtant pas nées d’hier : des structures de coordination entre mouvements européens se sont mises en place dès les années 1950, et se sont consolidées à partir de la création du Parlement de Strasbourg, en 1976. Ce n’est pourtant qu’en 1992 que les formations européennes ont reçu une reconnaissance officielle : le traité de Maastricht les mentionne alors comme «facteur d’intégration au sein de l’Union», contribuant à «la formation d’une conscience européenne». «Mais le grand tournant, ce fut 2004», explique Kostas Sasmatzoglou, porte-parole du PPE. Cette année-là, un règlement met en place un statut précis pour les «partis politiques au niveau européen», et la possibilité pour eux d’un financement public.

Selon ce statut, le parti doit être doté de la personnalité juridique dans l’Etat membre où il a son siège; disposer d’élus locaux ou nationaux dans au moins un quart des Etats membres (soit sept pays minimum) ou y avoir réuni au moins 3% lors des dernières européennes; respecter les grands principes de l’UE, notamment en matière de droits de l’homme; et avoir participé aux élections européennes, ou en avoir l’intention. Une réforme adoptée en avril 2014 prévoit que ces partis devront à l’avenir être enregistré sous droit européen, et non plus sous droit national. Ils devront également disposer d’un eurodéputé au moins. Ce sont le Parlement européen ainsi qu’une autorité indépendante qui évalueront le respect de ces règles.

A condition de respecter quelques obligations supplémentaires, le mouvement reçoit également des subventions européennes – qu’il n’a pas le droit de reverser à ses partis membres ni à ses eurodéputés. En 2014, un montant total de 27,5 millions d’euros sera mobilisé à cet effet, les sommes par partis s’étalonnant de 354 000 euros (EUDemocrats) à 9,4 millions (PPE). A ces sommes s’ajoutent les cotisations des partis membres. Les mouvements européens disposent donc d’un statut juridique et de moyens parfois conséquents. Cela suffit-il pour en faire des partis à part entière ?

«Une sorte de club politique»

Pour Didrik de Schaetzen, responsable de la communication de l’ALDE, pas de doute : «Nous organisons des réunions de coordination entre nos Premiers ministres avant les sommets européens, nous produisons un manifeste politique pour les élections européennes… ce sont des activités traditionnellement réservées à un parti». La co-présidente des Verts européen, Monica Frassoni, insiste : «Nous sommes un parti à part entière, avec des organes internes ayant autorité sur des questions importants, et un rôle de légitimation pour les partis nationaux qui en auraient besoin – c’est arrivé en Espagne, où nous avons privilégié un nouveau parti écologiste plutôt que l’ancien».

«C’est vrai, appuie Francisco Roa Bastos, ces partis organisent régulièrement des congrès pour élire leurs instances dirigeantes, des réunions entre leaders… Mais c’est une coordination très faible, une sorte de club politique. Les plates-formes communes en question sont très vagues puisqu’elles doivent être acceptables, au PSE par exemple, à la fois par les travaillistes britanniques et les socialistes grecs». De son côté, le PPE embrasse des formations démocrate-chrétiennes comme la CDU allemande d’Angela Merkel, mais aussi le Popolo della Liberta de Silvio Berlusconi et le Fidesz hongrois du Premier ministre Vikto Orban, volontiers autoritaire et économiquement interventionniste. La plate-forme électorale du PPE – intitulé, de manière révélatrice, «manifeste» et non «programme» – s’en tient donc, elle aussi, à des orientations très générales.

De fait, les statuts des partis européens, où figurent leurs objectifs, n’évoquent pour la plupart qu’une meilleure «coopération» entre les partis membres. Certains sont plus explicites encore : le Parti de la gauche européenne se veut «une organisation flexible et décentralisés de partis […] indépendants et souverains»; au PPE, si «les partis membres […] soutiennent les positions prises par l’association dans le cadre de l’UE», ils «maintiendront leur nom propre, leur identité et leur liberté d’action dans le contexte de leurs responsabilités nationales». Chez les souverainistes de l’AEL, leurs membres conservent également «leur nom, leur identité et leur autonomie d’action». Les groupes au Parlement de Strasbourg – dont les contours ne recoupent pas toujours ceux des partis – ne dépendent pas plus des partis européens.

Qui plus est, la plupart de ces partis n’acceptent pas de membres individuels, à l’exception de leurs propres parlementaires européens et des élus nationaux d’un parti membre. Seuls la Gauche européenne, l’ALDE, l’AEL, les EUDémocrats et le Parti démocrate européen ouvrent clairement cette possibilité –  toutefois assortie, chez certains, de conditions particulières et de restrictions au droit de vote dans les instances internes. A l’ALDE, le nombre de militants individuels est de «moins de mille», reconnaît Didrik de Schaetzen.

Des circonscriptions transnationales ?

Le rôle de ces partis est sans doute amené à grandir, celui du Parlement européen ayant été renforcé dans la désignation du président de la Commission. Pour la première fois, les candidats désignés par les cinq principaux partis européens (1)-certains à l’issue de primaires internes ou ouvertes à tous- ont mené une véritable campagne à travers l’UE, jusqu’à débattre en eurovision jeudi dernier«C’est nous qui finançons la campagne de Jean-Claude Juncker pour la présidence de la Commission, souligne Kostas Sasmatzoglou, du PPE. Nous planifions ses déplacements, ses meetings, tout cela depuis notre QG. Le budget est de 1,6 million d’euros.» Chez les écologistes, «sur les questions purement européennes, c’est le Parti vert européen qui décide, insiste Monica Frassoni. La candidature Skeller-Bové a été pilotée par nous depuis le début».

Toutefois, selon Francisco Roa Bastos, «seule une modification institutionnelle importante pourrait changer les chose s: notamment la création de circonscriptions transnationales, franco-allemandes par exemple, réunissant des électeurs des deux côtés du Rhin. L’eurodéputé libéral Andrew Duff avait porté une telle proposition, mais, en raison de l’opposition du PPE, celle-ci n’a même pas été examinée par le Parlement européen».

 

(1) Le conservateur Jean-Claude Juncker (PPE), le social-démocrate allemand Martin Schulz (PSE), le libéral belge Guy Verhofstadt (ALDE), l’Allemande Ska Keller avec le Français José Bové (Parti vert européen), et le Grec Alexis Tsipras (PGE).

Dominique ALBERTINI

Européennes: l’exécutif entre dans la campagne à reculons

Mediapart.fr

12 mai 2014 | Par Lénaïg Bredoux

 Longtemps, la majorité et les proches de François Hollande ont espéré un score honorable pour le parti socialiste le 25 mai. Après la débâcle des municipales, le doute les étreint. Mais ils minorent par avance l’importance politique d’un scrutin où l’abstention risque d’être très forte.  

Ces derniers mois, la majorité socialiste s’est délectée d’une expression jargonneuse à souhait : elle allait, disait-elle, « enjamber » les scrutins à venir. Les municipales d’abord, en contenant l’impopularité de l’exécutif par la solidité de ses baronnies, puis les européennes où elle pariait sur un score égal voire supérieur à la claque déjà subie en 2009. La débâcle de mars a semé le doute. Mais l’exécutif espère encore que, quel que soit le résultat, le scrutin sera aussi vite oublié que la campagne est atone.

Officiellement, elle est ouverte ce lundi 12 mai, pour deux semaines. Peu d’électeurs savent pour l’instant qu’ils auront à se prononcer le 25 mai pour leurs députés européens. Les grands médias télévisés en parlent peu – France Télévisions a même refusé de retransmettre le débat entre les candidats à la Commission européenne. « Mais pourquoi on n’oblige pas le service public à le faire ? C’est une décision scandaleuse », s’insurge l’ancien ministre délégué aux affaires européennes Thierry Repentin, remplacé le mois dernier lors du remaniement par Harlem Désir.

 

Les partis politiques se sont aussi lancés tardivement en campagne, obnubilés jusqu’à fin mars par les municipales et, pour certains, englués dans leurs divisions internes sur l’Europe – c’est par exemple le cas de l’UMP (lire nos articles ici, et ). Le PS commence tout juste sa tournée de grands meetings, avec des ministres en guest stars – comme Marylise Lebranchu à Rezé, près de Nantes lundi – et le premier ministre Manuel Valls sera jeudi à Lille aux côtés de Martine Aubry et Jacques Delors. Il était déjà dimanche soir au 20 h de TF1.

Jusque-là, l’exécutif a plutôt donné l’impression de faire comme si les européennes n’existaient pas. La semaine dernière, le président de la République a même passé une heure sur RMC et BFM-TV sans les évoquer. Aucune question ne lui a été posée sur le sujet, rétorquent ses proches. Mais François Hollande aurait pu prendre l’initiative – il est suffisamment aguerri à l’exercice pour le savoir. Ce n’est que parce que la presse s’en est étonnée que le chef de l’État s’est finalement décidé à publier une tribune jeudi 8 mai dans le Monde. Un choix d’un classicisme déprimant, et sur la forme et sur le fond – Hollande a commencé sa tribune par un long hommage à l’Europe de la paix en ce jour de commémoration de l’armistice.

À l’Élysée, on explique que ce n’est pas le rôle du président de la République de se mêler directement de la campagne et que c’est au parti et au premier ministre de s’exposer. Soit. Sauf que l’Europe fait partie des domaines où le chef de l’État est précisément en pointe – c’est lui qui se rend au conseil européen tous les mois et qui décide de fait de la politique de la France à Bruxelles. La récente modification de l’organigramme de l’Élysée, qui a vu le conseiller Europe de Hollande devenir également secrétaire général aux affaires européennes, en est une nouvelle preuve. En Allemagne d’ailleurs, c’est la chancelière Angela Merkel qui figure sur une partie des affiches de campagne de son parti, la CDU.

Affiche de campagne de la CDU pour les européennes
Affiche de campagne de la CDU pour les européennes

« Jusque-là, le président de la République a eu une façon de nier les européennes. C’est ce qu’entre nous on appelait la “tentation du silence”. Pendant longtemps, l’Élysée a cru que le PS allait bien s’en tirer, en faisant un meilleur score que la dernière fois », explique un diplomate spécialiste des questions européennes. « Pendant la campagne présidentielle, François Hollande avait parlé de réorienter l’Europe. Cette réorientation existe, mais elle n’est peut-être pas à la hauteur des attentes. Et puis François Hollande se dit qu’il doit d’abord se mobiliser sur la scène nationale – c’est d’ailleurs la demande politique de nos concitoyens », dit aussi un cadre socialiste.

Il y a encore quelques semaines, le discours des scialistes était bien rodé : sur le plan intérieur, les européennes n’ont que peu d’importance ; l’abstention, très élevée, en fait un scrutin mineur ; l’exécutif pourra donc « enjamber » le 25 mai sans dégâts. Certains prédisaient même qu’un FN en tête dans les sondages permettrait de remobiliser l’électorat de gauche et les troupes socialistes.

« Les européennes n’ont jamais été un traumatisme dans la vie politique française »

« Je ne suis pas sûr que notre score soit plus mauvais que la dernière fois. On était au plancher. Après, ce n’est pas impossible qu’on soit derrière le FN. Mais les européennes, ça a un impact pendant 15 jours », expliquait cet hiver François Rebsamen, qui n’était pas encore ministre du travail mais président du groupe socialiste au Sénat. « Les européennes n’ont jamais été un traumatisme dans la vie politique française », jugeait aussi Thierry Mandon, porte-parole du groupe PS à l’Assemblée nationale.

Début mars, une ministre du gouvernement Ayrault rappelait également la stratégie du calendrier du remaniement : « Remanier son gouvernement avant les européennes permet au président de se ressaisir de l’agenda et de ne pas voir son tempo déterminé par les élections. Cela permet de relativiser le résultat des européennes. »

 

François Hollande à Bruxelles
François Hollande à Bruxelles © Reuters

 

L’an dernier, l’exécutif avait aussi pris deux décisions, passées relativement inaperçues mais révélatrices de son envie de réduire au minimum l’enjeu de ce scrutin. Fin mars 2013, après de longues hésitations, le PS s’était opposé à la mise en place d’une circonscription unique, proposée par les radicaux de gauche, et qui avait l’avantage de politiser davantage une élection régionalisée sur huit zones qui ne correspondent à rien. La décision avait été prise par François Hollande. En cause : la peur de voir Marine Le Pen en profiter. « On disait à l’époque que ça allait promouvoir le FN », explique un conseiller du gouvernement, alors en poste.

Quelques mois plus tard, Manuel Valls, ministre de l’intérieur, a quant à lui défendu la dématérialisation des professions de foi. En clair, plus de courrier mais une version numérique adressée aux électeurs. Le gouvernement l’avait inscrit dans le projet de loi de finances pour 2014 présenté à l’automne, histoire de faire quelques menues économies (27,6 millions d’euros). Mais le ministre délégué aux affaires européennes Thierry Repentin s’y était vertement opposé. Il a fini par avoir gain de cause auprès de François Hollande, mais la tentative avait renforcé le sentiment d’un désintérêt profond de l’exécutif français pour le scrutin du 25 mai.

« J’ai l’impression que le PS se protège, et protège peut-être aussi l’UMP, en faisant de telle sorte qu’il n’y ait pas de forte mobilisation pour les européennes », s’était à l’époque emporté l’eurodéputé écologiste Daniel Cohn-Bendit. Même soupçon alors exprimé par le Parti de gauche : « Après avoir renié ses engagements sur une liste unique nationale, le gouvernement parie clairement sur l’abstention et cherche à museler les voix qui pourraient porter plus haut que la sienne. »

Plus récemment, l’exclusion de plusieurs parlementaires PS actifs à Bruxelles – comme Liêm Hoang Ngoc, Françoise Castex ou Bernadette Vergnaux – a fait grincer les dents au PS (le même phénomène s’est produit à l’UMP). Tout comme le choix de l’ancienne directrice de cabinet de Sylvia Pinel, la PRG Virginie Rozière, pour conduire la liste dans le Sud-Ouest dans le cadre d’un accord avec les radicaux de Jean-Michel Baylet.

« On s’est souvent répété que ça aurait été plus simple avec une liste nationale », se désolait un dirigeant du PS en novembre dernier, à l’issue de la douloureuse constitution des listes socialistes (lire ici). « On fait l’inverse de l’Allemagne, qui a une vraie stratégie d’influence au sein des institutions européennes. La France néglige le parlement européen. Même au gouvernement, il n’y a pas assez de ministres à s’y rendre », souligne un spécialiste socialiste des dossiers européens.

La stratégie choisie par le PS a aussi de quoi surprendre : il fait surtout campagne pour Martin Schulz, actuel président du parlement et candidat des sociaux-démocrates pour la présidence de la Commission. « Cela prouve que les européennes ne sont pas là pour faire élire des députés européens inconnus, mais qu’il y a un vrai enjeu politique à court terme. Schulz, c’est une réorientation de l’Europe possible », décrypte un “hollandais”. « On a vraiment un coup à jouer, estimait aussi récemment Christophe Borgel, secrétaire national aux élections du PS. Les écolos et la gauche radicale, une fois qu’ils auront dit qu’il “faut une autre Europe”, ils n’auront plus grand-chose à dire. Avec Martin (Schulz), on a l’incarnation d’un changement de majorité, un mec qui crédibilise la nécessité de voter PSE pour battre la droite. »

Mais l’eurodéputé allemand reste largement inconnu en France. Surtout, il est contesté à gauche : son parti, le SPD, est membre de la grande coalition avec la CDU au pouvoir en Allemagne, et Schulz est lui-même accusé d’incarner la politique d’austérité européenne qu’il est pourtant censé combattre. « Schulz, c’est pas Jules Guesde mais c’est quelqu’un qui dit que le budget européen pour la jeunesse doit être augmenté et qu’il faut relancer la croissance », défend un conseiller ministériel. L’exécutif et le PS redoutent désormais une correction le 25 mai. « Le FN en tête serait un échec de notre politique », prévient un ami de François Hollande.

URL source: http://www.mediapart.fr/journal/international/120514/europeennes-lexecutif-entre-dans-la-campagne-reculons

A Mantes-la-Ville, le maire FN bloque la vente d’une salle de prière

Le processus est pourtant quasi-bouclé. Les trois acteurs de la vente, la Communauté d’agglomération de Mantes-En-Yvelines (Camy), la ville et l’Asscociation des musulmans de Mantes-sud (AMMS), sont convoqués chez le notaire ce jeudi pour signer la vente définitive. Joint par Libération, Cyril Nauth a prévenu qu’il sécherait ce rendez-vous. Au risque de voir l’affaire portée devant les tribunaux administratif et de grande instance, comme l’envisage l’AMMS. «Confiant», l’élu, mis en contact par le FN avec un avocat, dit «avoir trouvé une solution» pour échapper aux dommages et intérêts et à une éventuelle demande d’exécution forcée. Mais joue le mystère : «Je n’ai pas envie de trop en dire pour l’instant.» Pour Saïd Benmouffok, conseiller municipal (PS), le maire n’a «pas de réponse juridique. Il veut faire un geste politique, quitte à en payer le prix».

«Pas un centime à la ville»

C’est que Nauth est convaincu de devoir son élection – face à une gauche déchirée – à son opposition à la «salle de prière-mosquée». Pendant la campagne, le frontiste accusait l’ex-maire, Monique Brochot, d’«électoralisme communautariste» : «Elle a voulu manipuler les musulmans en leur proposant des mosquées en échange d’un vote à l’élection, ça a échoué.»

Le projet remonte pourtant à 2008, au début du mandat de Monique Brochot. La socialiste commence alors à travailler avec la communauté musulmane qui demande depuis vingt ans un lieu pour exercer son culte. Depuis 2002, un bâtiment lui est prêté puis loué mais le pavillon de 70m2, trop exigu, n’est pas conforme aux normes de sécurité et d’hygiène. En 2011, ils s’accordent sur un lieu, l’ancienne trésorerie municipale, proche du quartier des Merisiers, qui peut accueillir jusqu’à 690 personnes et que l’AMMS souhaite acheter.

Le bien appartient à la Camy mais l’intercommunalité préfère passer par l’intermédiaire de la municipalité qui détient la compétence «culte». Une opération immobilière classique : il est convenu de vendre la salle à la ville, qui la revend illico à l’association. «C’est une opération blanche pour la ville, qui ne lui coûte pas un centime, ni TVA ni frais de transaction», souligne Abdelaziz El Jaouhari, président de l’AMMS.

«Les adhérents FN n’ont pas de permanence»

Des délibérations sont votées à l’automne 2013 en conseil municipal et au sein de la communauté d’agglomération débouchant sur la promesse de vente, signée en décembre. L’association obtient aussi le permis de construire et le feu vert de la commission départementale de sécurité. Et réunit, via des dons et des prêts aux fidèles, les 650 000 euros qu’elle dépose chez le notaire début mai. Ne manquait qu’une ultime signature. Entre-temps, la commune de 20 000 habitants est passée à l’extrême droite.

Nauth n’en démord pas : le projet de vente masquait la construction d’une mosquée. Il en veut pour preuve le visuel mis en ligne sur le site de l’AMMS, représentant l’actuelle trésorerie surmontée d’une mini-coupole et d’un minaret. Il critique aussi l’emplacement choisi, le «manque de concertation» et maintient que «des mosquées existent déjà dans le Mantois» : «Les adhérents FN aussi sont nombreux et on n’a pas de permanence !»

«Mais nous payons nos impôts ici !», proteste Abdelaziz El Jaouhari, qui rappelle que les autres religions disposent de lieux de culte. Quant à un minaret, il assure que le projet, «loin d’être ostentatoire», n’en comporte pas : «Que le maire consulte le permis de construire, il n’en est pas question.» Depuis leur entretien mi-avril, le président de l’AMMS n’a pas de nouvelles de l’élu FN.

Cyril Nauth contre-attaque en évoquant les querelles entre El Fethe, la première association qui a piloté le projet et l’AMMS, créée en octobre 2013. Dénonçant une «manipulation politique», il accuse El Jaouhari soit de rouler pour le PS soit d’être proche de Pierre Bédier, président du conseil général (UMP) des Yvelines. Peu importe : «De toute façon c’est l’UMPS.» «Il n’est même pas mantevillois», balance encore Nauth… qui réside toujours à Mantes-la-Jolie. «Tout ça c’est pour se défiler et esquiver les vraies questions : les musulmans n’ont-ils pas droit à un lieu de culte ? La ville est-elle engagée par des actes de vente qu’elle doit honorée ?», réplique El Jaouhari. Son association compte manifester devant la mairie vendredi pour être reçue par Cyril Nauth.

Laure EQUY

Libre-échange : qui pense quoi sur le Tafta ?

Le principe du traité, le modus operandi des discussions et l’impact sur notre législation divisent profondément les partis en compétition pour le scrutin du 25 mai. Décryptage des positions prises par les candidats EE-LV, Front de gauche, PS, UMP, Alternative et FN.

A lire aussi Européennes : qui propose quoi ?

Un débat crucial pour EE-LV et le Front de gauche

Ateliers de lecture, clips sur le Web, débats centrés sur le Tafta, agit-prop, etc. Le Front de gauche et Europe Ecologie-les Verts veulent profiter de l’élection pour mobiliser contre le partenariat transatlantique, dossier le plus important, selon eux, sur le bureau des prochains eurodéputés et de la future Commission. «Ce traité c’est la fin du projet européen, la fin de notre capacité à décider de nos choix, la remise en cause de notre souveraineté, une faute politique considérable», attaque l’écologiste Yannick Jadot. Le Front de gauche s’empare de la campagne comme d’un référendum pour ou contre le Tafta, et s’assigne une mission d’«éducation populaire» sur l’accord UE-Etats-Unis. «Comme pour le Traité constitutionnel européen en 2005, on va chercher l’info, on fait de la pédagogie, compare Raquel Garrido, candidate en Ile-de-France. Le fait que l’on en sache aussi peu est en soi un signal d’alerte.»

Car les «anti» dénoncent d’abord l’opacité dans lesquelles sont menées les discussions entre le commissaire européen au commerce Karel de Gucht et son homologue américain. Les Etats-membres et le Parlement européen ont donné mandat à la Commission pour négocier en leur nom. Si le texte a été connu, c’est accidentellement, au détour de fuites dans la presse. Et quatre cycles de négociations ont déjà eu lieu sans que les citoyens en sachent les détails, pointent les opposants. Pour Jadot, «cela renforce le sentiment que l’Europe travaille sans les citoyens ou contre eux».

Si «l’oligarchie avance dans le dos des peuples», c’est qu’elle ne négocie pas franchement dans leur intérêt, reprend Raquel Garrido. Front de gauche et EE-LV redoutent que l’harmonisation des normes européennes et américaines, condition à l’ouverture d’un grand marché commun, ne se fasse au détriment de l’UE, plus avancée dans ce domaine, et à l’avantage des grands groupes. «Ils préparent une harmonisation par le bas de nos législations au profit de l’extension de nos multinationales», accuse Jadot, qui cite l’exemple des exploitations agricoles et prédit la «fin des petits paysans en Europe» : «Une ferme américaine, c’est en moyenne 180 hectares contre 13 hectares en Europe, 1 000 vaches aux Etats-Unis, 50 en Europe. Comment lutter ? L’accord risque de les saborder.»

Le point le plus dur pour les opposants au texte : un différend opposant un investisseur à un Etat pourrait, selon ce que prévoit le Traité, être arbitré par un tribunal privé. Garrido y voit un signe de «défiance à l’égard de notre système juridique» : «nos tribunaux sont assez indépendants et justes pour traiter également les investisseurs européens et étrangers.» Négociateurs «illégitimes», «logique néolibérale» et risque de «régression de notre protection sociale, sanitaire, environnementale» : les députés du Front de gauche ont déposé une proposition de résolution pour suspendre le processus, qui sera débattue le 22 mai à l’Assemblée nationale… Trois jours avant les européennes.

A lire aussiLe discret traité transatlanfric

Le PS «vigilant» mais discret

«L’accord transatlantique est propice au déchaînement des fantasmes et des bobards, certains en font une exploitation», balance l’eurodéputé socialiste Henri Weber. Front de gauche et écolos «ont besoin d’agiter cela pour exister», renchérit Guillaume Balas, numéro deux de la liste PS en Ile-de-France. S’ils s’agacent de la campagne des «anti» et alors que François Hollande a prôné l’accélération des discussions, les socialistes ne sont pas pour autant enthousiasmés par le Tafta. Dans le texte de sa convention «Europe», le PS, «extrêmement réservé», freine même des quatre fers, appelant à «ne pas se précipiter». Sans aller jusqu’à réclamer l’arrêt des discussions avec les Etats-Unis. Pour Henri Weber, le traité, s’il est bien ficelé, comporterait deux avantages clés: l’accès plus large des entreprises européennes aux marchés publics américains – ouverts seulement à 35% aux étrangers contre 85% pour les marchés publics européens – et la «bataille mondiale pour le pouvoir normatif». «Si Européens et Américains s’entendent, leurs normes s’imposeront comme les normes mondiales. Sinon ce sera Pékin et les émergents qui fixeront les leurs», prévient l’eurodéputé qui ne brigue pas de nouveau mandat.

Surtout, le PS veut rassurer, «dédramatiser» dixit la secrétaire d’Etat au commerce extérieur, Fleur Pellerin. Dans son mandat de négociation, le Parlement européen a posé des «lignes rouges» : interdiction de toucher à l’audiovisuel, la culture, la défense, protection des données personnelles et des ambitions environnementales de l’UE. Et le groupe d’eurodéputés socialistes a rajouté une série de conditions dont l’exclusion du Traité des fameux tribunaux privés. Ce qu’a répété Martin Schulz à Mediapart : «Il faudra un accord juste, transparent, symétrique et sûr, pour le bénéfice de l’ensemble des citoyens.» Si les normes européennes sont abaissées, les socialistes promettent que le traité «ne verra pas le jour» et invoquent un triple verrou : l’accord devra être voté par le Parlement européen à la majorité absolue, ratifié à l’unanimité par les Etats-membres et adopté par les parlements nationaux des 28. Or les députés européens ont déjà rejeté des traités internationaux, comme Acta (accord commercial anti-contrefaçon) en juillet 2012. Le Tafta devra être ultra-consensuel ou ne sera pas, assure Guillaume Balas : «Si le texte contient ce qu’on entend aujourd’hui, j’y serais opposé. Qui peut penser que le Parlement acceptera la création de tribunaux arbitraux, l’imposition des normes américaines et la fin des contrôles pour la finance ? Je ne vois même pas comment la droite voterait ça !»

A l’UMP, un «a priori favorable»

Les accords de libre-échange, Alain Lamassoure connaît bien, pour en avoir négociés il y a vingt ans lorsqu’il était ministre du gouvernement Balladur. Il justifie donc sans complexe le déroulement des discussions dans le plus grand secret : «Comme au poker, on garde ses cartes en main. On n’annonce pas à l’avance les concessions que l’on acceptera.» Loin de craindre un nivellement des normes par le bas, l’eurodéputé qui mène la campagne UMP en Ile-de-France estime que l’UE, ayant engagé une harmonisation de ses normes depuis trente ans, a une longueur d’avance et se trouverait «en position de force» face aux Américains. Par contre, comme le PS, il s’oppose à l’idée de l’arbitrage privé investisseurs-Etats : «Il suffit de l’interdire, on ne va pas juger à l’avance que c’est un problème insoluble», balaie Lamassoure. Et si le bras de fer n’avantage pas l’UE, «on arrêtera les frais et on ne votera pas». L’UMP évoque d’une ligne le Tafta dans son programme – prônant seulement «le principe de réciprocité» –, le sujet est de nature à diviser la droite. «Beaucoup plus réservé», un député du courant Droite populaire, souverainiste, voit dans le traité l’illustration des deux visions de l’UE qui cohabitent à droite.

Les centristes fermes sur les standards européens

Pas sûr que cet argument séduise les centristes. Plus fédéralistes que l’UMP, ils semblent toutefois extrêmement méfiants à l’égard du Tafta. Refusant de «laisser Washington piétiner les intérêts européens sans avoir le courage de les défendre avec fermeté», Jean Arthuis a livré une virulente tribune anti-marché transatlantique,dans le Figaro. Et l’Alternative, l’alliance UDI-Modem, a appelé à «refuser la dégradation des standards de qualité» et défend le modèle européen, «pas négociable». «Dans l’état actuel, la France doit manifester fermement ses désaccords», exigent les centristes également opposés à la mise en place d’une «justice arbitrale aléatoire».

Le FN opposé à un «jeu de massacre ultralibéral»

En avril, Marine Le Pen lançait, dans une vidéo, «un appel solennel» pour «faire éclater la vérité sur les dangers» du Traité qui «menace la santé des consommateurs» et favorise «la rapacité des spéculateurs et des banques». Sa formation dénonce aussi un «jeu de massacre ultralibéral» et «l’assujettissement définitif au droit des multinationales». Et promet que ses eurodéputés «voteront contre la ratification». Ce qui n’a pas empêché certains élus régionaux du FN de s’abstenir ou de voter contre des propositions de résolution déposées par la gauche déclarant symboliquement leur collectivité (Picardie, Paca) «zones hors-Tafta».

(1) Tafta (Transatlantic Free Trade Area), TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership), PTCI (Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement), GMT (grand marché transatlantique).

Laure EQUY

Européennes : où trouver les programmes des candidats ?

Libération

13 mai 2014 à 09:37
Fête de l'Europe à Marseille, le 9 mai.
Fête de l’Europe à Marseille, le 9 mai. (Photo Boris Horvat. AFP)

L’Europe, dit-on, n’intéresse pas ou peu les électeurs : en France, ils pourraient être 60% à s’abstenir le 25 mai. En cause, notamment, la complexité des institutions européennes, dont beaucoup ne comprennent pas le rôle ni le fonctionnement. Pour tenter d’y voir plus clair, cet article, rédigé en partenariat avec le site Toute l’Europe, compile les questions les plus fréquentes sur le scrutin à venir. Il sera mis à jour régulièrement jusqu’au jour du vote.

Qui propose quoi ?

Avec un maximum de 31 listes présentes en Île-de-France, rarement l’offre électorale aura été aussi pléthorique que lors de ces européennes. Comment, dès lors, faire son choix ? Libération a comparé les propositions des principaux partis sur onze grandes questions européennes. Pour aller plus loin, les liens suivants vous conduiront vers les programmes du Parti Socialiste, de l’UMP, d’Europe Ecologie-Les Verts, du Front National, du Front de Gauche et de l’alliance UDI-Modem.

Vous pouvez également consulter les sites de L’Alliance écologiste indépendante, La Bretagne pour une Europe sociale, Citoyens du vote blanc, Debout la République, Démocratie Réelle, Europe Citoyenne, Europe Démocratie Esperanto,Fédération Régions et Peuples solidaires, Féministes pour une Europe solidaire, Force Vie, le Mouvement socialiste alternatif, Nous Citoyens, le Nouveau parti anticapitaliste, Nouvelle Donne, du Parti Fédéraliste européen, du Parti européen, du Parti pirate, de l’Union démocratique bretonne ou encore de l’Union Populaire Républicaine.

C’est quand le second tour ?

Il n’y en a pas ! En France, les élections européennes sont le seul scrutin proportionnel à un seul tour. Les 74 sièges français au Parlement européen seront répartis entre les listes concurrentes selon le pourcentage de voix obtenus le 25 mai – mais seules les listes ayant obtenu au moins 5% des voix prendront part au partage. Plus précisément, cette répartition aura lieu dans chacune des huit circonscriptions de l’Hexagone : Ile-de-France (15 sièges en jeu), Sud-Est (13 sièges), Nord-Ouest (10 sièges), Sud-Ouest (10 sièges), Ouest (9 sièges), Est (9 sièges), Centre (5 sièges) et Outre-mer (3 sièges). Le mode de scrutin varie selon les pays, certains votant par exemple au niveau national plutôt que dans des circonscriptions.

A consulter Le mode de scrutin détaillé

 Comment voter par procuration?

Si vous êtes absent le 25 mai, vous pouvez faire établir une procuration. Le mandataire doit être inscrit dans votre commune (mais pas forcément dans le même bureau de vote ni le même arrondissement) et ne pas avoir reçu d’autre procuration en France. Vous devez vous présenter au commissariat, à la gendarmerie, au tribunal d’instance ou auprès des autorités consulaires, avec un justificatif d’identité (carte nationale d’identité, passeport ou permis de conduire par exemple) et remplir un formulaire (disponible en ligne). Si votre état de santé l’exige, un policier peut se déplacer à domicile pour établir la procuration.

En principe, vous pouvez faire établir une procuration jusqu’à la veille du scrutin, mais la commune risque de ne pas la recevoir à temps. Le mandataire, lui, ne reçoit aucun document. N’oubliez pas de lui dire dans quel bureau il devra se présenter le jour du scrutin, muni de sa propre pièce d’identité, pour voter à votre place.

A consulter Le site service public.fr

 Pour qui vote-t-on ?

Le nombre total de candidats en France est de 3 753, dont la moitié de femmes. Ils se répartissent sur 193 listes, soit 20% de plus qu’en 2009. Rassurez-vous, toutes ne seront pas présentes dans les huit circonscriptions : les électeurs franciliens devront ainsi choisir entre 31 listes; ceux de l’Ouest, du Sud-Ouest et du Centre auront 25 bulletins sous les yeux le jour du vote.

En plus des grands partis traditionnels, des formations plus exotiques concourent dans ces européennes, telles que «Citoyens du vote blanc», «Féministes pour une Europe solidaire», «Parti pirate», «Union démocratique bretonne» ou encore «Europe Démocratie Esperanto».

A consulter Les principaux candidats français

 A quoi sert le Parlement européen ?

Ses grandes compétences sont similaires à celles d’un Parlement national, mais il les exerce différemment et en association avec d’autres institutions. Le Parlement européen intervient dans l’adoption des lois communautaires. Il ne peut cependant se prononcer que sur des propositions de la Commission européenne. Dans la procédure la plus courante, le texte est examiné alternativement par le Parlement et par le Conseil de l’Union européenne, composé de représentants des Etats-membres. Chacun peut l’amender, et l’accord des deux institutions est nécessaire pour qu’il soit adopté. Dans certains domaines, d’autres procédures prévalent, dans lesquelles le Parlement joue un rôle moins important.

Le Parlement contrôle la Commission, qu’il peut censurer et interroger. Et en 2014, pour la première fois, le président de celle-ci devrait être issu de la majorité politique européenne.

 A consulterLe rôle du Parlement européen

 Retrouvez toutes les informations pratiques sur le site de notre partenaire Toute l’Europe

Laurence DEFRANOUX et Dominique ALBERTINI