RESF 78 : assises départementales des lycéens sans-papiers – 7 février à Versailles

«  Un titre de séjour étudiant et après ? »

Être jeune et sans-papiers, c’est, au quotidien, vivre avec la peur et les galères.

C’est pourquoi, ces jeunes acceptent ce que la Préfecture leur donne : une Autorisation provisoire de séjour (APS) ou un titre de séjour « étudiant ». Et cela, alors même qu’un tel titre les condamne à se retrouver sous peu « sans-papiers ». Car un titre « étudiant », c’est prévu pour de jeunes étrangers qui ne séjournent en France que le temps de leurs études (et ont déjà prévu de retourner ensuite dans leur pays d’origine), pas pour ceux qui souhaitent construire leur vie en France.

POUR CEUX VENUS REJOINDRE QUELQU’UN DE LEUR FAMILLE, un oncle, une tante, une sœur, … pour continuer leurs études, pour éviter un mariage forcé, pour construire leur vie, … Leurs parents sont restés au pays, souvent pauvres, eux-mêmes en difficultés familiales ou vivant dans des zones de combat. Ils ont dû attendre leurs 16 ans, pour que leur famille leur donne leur autonomie et les laisse partir

Or, la circulaire Valls du 28 novembre 2012 exige, pour régulariser les jeunes majeurs, qu’ils soient arrivés avant l’âge de 16 ans et qu’ils vivent avec l’un de leurs parents. La grande majorité des jeunes connus du RESF 78 ne sont pas dans cette situation. Ils n’obtiennent alors qu’un titre de séjour « étudiant » qui, comme son nom l’indique, ne sera pas renouvelé à la fin de leurs études.

POUR LES JEUNES ISOLÉS, pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE), la circulaire Valls du 28 novembre 2012, rappelle la loi et indique que les Préfectures sont invitées à l’appliquer de manière « bienveillante».

« S’agissant du cas spécifique des mineurs étrangers isolés, je vous rappelle que les dispositions de l’article L. 313-15 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile vous permettent de délivrer une carte de séjour temporaire mention « salarié » ou « travailleur temporaire » à ceux qui, pris en charge par l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de 16 et de 18 ans, sont engagés dans une formation professionnelle qualifiante. Vous pourrez faire un usage bienveillant de ces dispositions, dès lors que le mineur étranger isolé a satisfait à l’ensemble des conditions prévues par cet article et que la qualité de son parcours de formation est de nature à lui permettre une insertion durable dans la société française,  »

La réalité dans les Yvelines est toute autre : ces jeunes n’obtiennent pas un titre de séjour « salarié » même s’ils sont en formation professionnelle en lycée, même s’ils ont signé un contrat d’apprentissage avec un patron, même si le Défenseur des Droits, alerté, donne raison au jeune.

Pour tous ces jeunes en formation, qu’ils soient « en famille » ou isolés, c’est une vraie angoisse au quotidien quand ils envisagent la fin de leurs études. Ils devront alors engager une nouvelle procédure de régularisation appelée « changement de statut » pour obtenir un titre de séjour « salarié ». Ils auront à affronter, comme tous les jeunes de France, la difficulté de trouver un travail, compliquée par les discriminations d’embauche que malheureusement personne ne nie, auxquelles se rajoute la difficulté de trouver un patron qui accepte de les embaucher en CDI et s’engage à payer lors de leur embauche la taxe OFII (égale à 55% de leur salaire brut mensuel dans la limite de 2,5 SMIC).

Scolarisés, ayant appris un métier, insérés dans la vie de leur quartier, de leur lycée, leur vie est ici.

– pour les jeunes isolés en formation professionnelle, la Préfecture des Yvelines doit appliquer l’article L313-15 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et leur donner un titre de séjour « salarié ».

– pour les autres, jeunes « en famille » ou jeunes isolés en formation générale, la loi doit changer pour leur permettre une régularisation avec un titre de séjour pérenne.

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Ils seront là pour témoigner, à côté d’autres lycéens yvelinois sans-papiers ou qui ont peur de le devenir – à cause des lois, à cause de leur histoire ou de celle de leur pays,
le 7 février 2015, dès 14h30,
au Centre Huit – 8 rue de la porte de Buc à Versailles (gare des Chantiers).

Ils étudient ici, ils vivent ici

Ils sont une richesse pour la France de demain

La loi doit les régulariser

Le grand déménagement des mineurs isolés étrangers (MIE) des Yvelines

article paru sur le blog du RESF (site de médiapart)

http://blogs.mediapart.fr/blog/resf/151214/le-grand-demenagement-des-mineurs-isoles-etrangers-mie-des-yvelines

Un courrier lapidaire, une valise à faire à la hâte, des au revoir aux copains, aux profs, aux éducateurs. En Yvelines, le grand déménagement des mineurs isolés étrangers (MIE) a commencé le 3 novembre et va s’accélérer cette semaine. D’ici peu, ces jeunes, venus de pays de misère et de guerre, au terme de voyages souvent longs et périlleux, devraient tous être confiés à une association locale d’insertion par le logement, le Lien Yvelinois, sur la base d’un contrat signé le 10 octobre 2014 avec le Conseil général des Yvelines, présidé par Pierre Bédier.

Une avancée ? Un danger ? Les travailleurs sociaux du département en charge de ces MIE sont inquiets et protestent.

Comme tout mineur en danger, les jeunes étrangers sont pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE), financée par le Conseil général.La protection de l’enfance est une mission importante de la République, se rattachant à des conventions internationales ratifiées par la France.

Près de 250 MIE seraient confiés à l’ASE des Yvelines, un département pas vraiment pauvre, pas très loin de Paris, avec une implantation ancienne de foyers d’accueil pour la jeunesse en danger.

La situation depuis plusieurs mois est la suivante : Dès son arrivée en France et plus particulièrement dans notre département, tout MIE est soumis à un véritable parcours du combattant : souvent on lui refuse même de l’écouter sous prétexte que ses papiers seraient des faux. S’il arrive à se faire enregistrer, le plus souvent, il doit subir des « tests osseux ». S’il est déclaré majeur, c’est la rue. Si le test confirme sa minorité, l’ASE doit le prendre en charge et le placer : une partie d’entre eux se retrouvent en foyer éducatif spécialisé avec un réel suivi. Mais, de plus en plus nombreux, sont les jeunes, logés à l’hôtel, seuls, sans suivi éducatif, sans scolarisation et bien sûr, sans accompagnement pour effectuer les démarches nécessaires pour obtenir un passeport et un acte de naissance, pour préparer leur dossier afin d’être régularisé à 18 ans. Pour l’ASE, il s’agit «qu’ils attendent leurs 18 ans…. et qu’ils repartent au pays » comme le suggère ouvertement la hiérarchie !

C’est dans ce contexte qu’a été signé, le 10 octobre 2014, un contrat avec le Lien Yvelinois, une association locale d’insertion par le logement.

Dès le 3 novembre, le déménagement des MIE de 16 ans placés en hôtel a commencé, et depuis, il s’est poursuivi, affectant l’ensemble des MIE du département.

 

Les mineurs isolés étrangers « virés » sans ménagement

En novembre, l’ASE a vidé les hôtels d’une quarantaine de MIE. Ils ont été regroupés dans un hôtel à Coignières, puis certains ont ensuite emménagé dans des appartements loués par le Lien Yvelinois à leur intention.

Mais depuis le 9 décembre une offensive a été prise concernant les MIE hébergés en foyer (c’est à dire ceux qui bénéficient d’une réelle prise en charge éducative), pour les en faire sortir, pour qu’ils vident les lieux rapidement ; un courrier contenant la liste des jeunes concernés est arrivé dans chaque foyer leur donnant rendez-vous avec leur valise la semaine prochaine – une accélération incompréhensible pour les travailleurs sociaux.

Et cela, sans contact officiel en amont entre le Lien et les éducateurs des foyers qui accueillaient jusqu’ici ces jeunes, dans la précipitation, en cassant pour nombre d’entre eux ce qui existe :

C’est irresponsable. Quand bien même les déménagements projetés le seraient dans l’intérêt des jeunes, ils ne peuvent pas être imposés uniformément, sans tenir compte de la situation, des intérêts et de la volonté de chacun des jeunes.

Le texte du contrat signé entre le Conseil général et le Lien Yvelinois donne à cette association une mission qui correspond exactement à ce que l’on peut attendre d’une prise en charge d’un mineur isolé : accueil, hébergement, accompagnement éducatif et social,…

Les travailleurs sociaux qui accompagnent ces mineurs isolés témoignent

« Notre intention était de préparer un départ vers « le Lien ». Nous pensions avoir un peu de temps pour cela, cependant, nous avons reçu une liste du Conseil général avant-hier, mentionnant le nom de tous les jeunes sur le départ. »

« Il doit quitter notre établissement en début de semaine prochaine, soit 6 jours après la réception du courrier et nous n’avons aucune information sur le lieu où il doit être accueilli, ni sur la prise en charge qui va lui être proposée. »

« Nous pensions au moins avoir des informations sur le lieu d’accueil. Cela nous aurait permis de mettre en place un certain nombre de choses qui lui permettent de rester dans une dynamique mais cela n’est pas envisageable. Il n’y a aucune négociation possible avec l’ASE. Sans compter qu’il doit également interrompre brutalement son suivi scolaire. »

« Tous les jeunes mineurs isolés sont sous le même régime. Y compris ceux arrivés depuis déjà plusieurs années et étant inscrits dans un projet. »

« Nous avons donc peu de temps pour les préparer et surtout peu d’éléments sur où ils vont atterrir et qui les suivra. Nous gardons le contact avec ces jeunes pour obtenir plus d’infos. »

Que dire du mépris avec lequel le Conseil général traite ces travailleurs sociaux, investis avec une haute conception de leur mission ?

Et que dire de la maltraitance du même Conseil Général à l’égard des jeunes étrangers en danger, déplacés sans assurance sur leur avenir proche, sans lien assuré avec leur éducateur et avec la structure où ils ont commencé à se reconstruire? Que dire des risques de rupture de leurs projets et de leur formation en cours ?

Le Conseil général « se débarrasse » des Mineurs Isolés Étrangers

Pourquoi le Conseil général a-t-il décidé de confier les MIE à une structure telle que « le Lien Yvelinois » ?

C’est tout à fait légal : le juge décide le placement du jeune à l’ASE, puis l’ASE confie le jeune à une association et peut à tout moment le retirer pour le placer ailleurs, sans même à avoir à donner des explications.

Il est donc logique que le foyer informe le jeune de sa convocation par « le Lien Yvelinois » pour qu’il se présente avec sa valise.

Mais dans la pratique, la méthode contrevient directement aux principes énoncés dans la loi de rénovation sociale de 2002 qui place le jeune au cœur de sa prise en charge, qui pose le libre choix de son accompagnement social et définit le projet personnalisé qui a une valeur contractuelle qui lie le jeune à sa structure d’accueil.

Alors, pourquoi ce contrat ?

Intérêt financier ? Cela voudrait dire que « le Lien Yvelinois » recevrait une dotation plus faible que les foyers actuellement ?

En Yvelines, comme ailleurs, l’ensemble des budgets à caractère social subit de sévères coupes sombres et tout au bout de la chaîne de la Protection de la jeunesse, on trouve les MIE, les plus fragiles, les plus isolés.

Faute d’informations, on peut s’interroger sur la capacité dans la durée de l’association à assurer pleinement le suivi des jeunes. Ainsi la responsabilité des défaillances liées à un manque de moyens retomberait sur « le Lien Yvelinois » et laisserait le Conseil général blanc comme neige.

Intérêt politique ? La méthode a toutes les apparences d’une tentative d’isolement et de ghettoïsation. Actuellement dans les foyers les jeunes étrangers apprennent le français et les habitudes de vie en côtoyant d’autres jeunes. Souvent, motivés pour avancer, ils sont même les éléments sûrs dans la vie collective du foyer. Les priver de cette vie collective en les « parquant entre eux », c’est à coup sûr, favoriser leur repliement, et rendre difficile, voire impossible leur insertion sociale. Dans quel but ?

RESF s’oppose à la discrimination des mineurs isolés étrangers

Dans ce contrat, le Conseil général et l’ASE restent maîtres des décisions importantes qui plombent la vie des MIE : recours à des vérifications d’âge avec les tests osseux, poursuite ou non, d’une prise en charge avec un contrat jeune majeur au delà de 18 ans. On peut craindre que sur ces deux points, la politique du Conseil général ne change pas : tests osseux pour tous et contrat « jeune majeur » pour aucun.

Cette délégation de prise en charge qui frappe spécifiquement les MIE, est en fait un traitement discriminatoire et inégalitaire entre les mineurs qui sont confiés à l’ASE par une ordonnance de protection.

Les structures éducatives en charge jusque-là des MIE des Yvelines n’ont pas l’intention d’en rester là. Effet direct des plaintes et protestations des travailleurs sociaux, certains départs des foyers ont été différés, le Conseil général est directement interpellé (cf lettre envoyée le 10 décembre par le groupe inter-associatif protection de l’enfance des yvelines), comme le sera le Défenseur des droits sur les questions de maltraitance et de discrimination, s’il y a lieu.

Pour RESF

  • La pratique de tests osseux qui jettent à la rue de nombreux mineurs doit cesser.
  • Tous les mineurs isolés étrangers (MIE) doivent être pris en charge dans les mêmes conditions que les autres jeunes confiés à l’Aide sociale à l’enfance (ASE).
  • Ils doivent tous pouvoir recevoir une formation comme ils le souhaitent
  • À leur majorité, ils doivent pouvoir signer un « contrat jeune majeur » comme la loi l’indique pour leur laisser le temps d’aller au bout de leurs projets qui les rendrait autonomes.
  • Ils doivent tous obtenir de la Préfecture un titre de séjour qui leur permettrait de rester sur le territoire.

 

Communiqué RESF

20 novembre 2013, journée internationale des droits de l’enfant
sous la présidence de François Hollande

18 mois de présidence Hollande, et pour les enfants de parents sans papiers, les mineurs isolés et les
jeunes majeurs étrangers, un début de quinquennat à l’image du reste : vous voulez un dessin ?
Le nombre des enfants enfermés en rétention avec leurs parents dans l’attente d’une expulsion a
largement diminué depuis juillet 2012. Mais cette pratique (pour laquelle l’Etat français a été condamné
par la cour européenne de justice), n’est toujours pas interdite et au moins une vingtaine d’enfants en
ont été victimes. Si Mitterrand et Badinter avaient supprimé la peine de mort comme Hollande et Valls
ont interdit la rétention des enfants, la guillotine continuerait à fonctionner.
Quant aux enfants des familles sans papiers qui échappent à l’enfermement, ils sont assignés à
résidence, le plus souvent arrachés à leur école, leur quotidien est fait de l’angoisse de leurs parents,
qui pour échapper aux menaces, discriminations, violences, aux guerres et à la misère, ont fait le choix
de partir vers un pays d’asile. Errant d’un pays à l’autre pendant des mois, parfois des années d’exil,
rejetés de partout, ils continuent à espérer pour leurs enfants et pour eux-mêmes une autre vie, un
avenir.
Pour échapper à l’expulsion qui les renverra, bannis de France, dans un pays hostile, certaines familles
vivent cachées, sans savoir quand ils pourront un jour revivre librement, ici ou ailleurs.
Dans les écoles, on continue à compter les chaises vides des enfants déplacés, cachés, et celles de
ceux qui ont été expulsés avec leurs parents. Celles des enfants qui dorment dans la rue, dans des
cabines téléphoniques, sur des cartons, celles des enfants roms, déplacés, stigmatisés, celles des
mineurs isolés, que les passeurs ont jetés sur le trottoir des gares et des aéroports, et qu’on se repasse,
d’un département à un autre, sans prise en charge, sans leur assurer le droit fondamental à une vraie
scolarisation qui leur ouvre l’accès à une formation et un avenir. Enfants invisibles, coupables d’être
mineurs, accusés de mentir sur leur âge, sur leur nom, sur leur vie pour apaiser la conscience de ceux
qui sont chargés de s’en débarrasser, de les exiler, de les renvoyer à leur misère natale ?
Est-ce que c’est normal d’avoir peur quand on va à l’école ? demandaient en 2007 les enfants de
parents sans papiers ? Est-ce normal ? en 2013 ? Avec un président de la République, un Premier
ministre, un ministre de l’Intérieur socialistes ?
L’affaire Léonarda et l’expulsion de Khatchik, les manifestations de lycéens
ont obligé le ministre l’Intérieur à suspendre les expulsions de familles ayant
des enfants scolarisés et celle de lycéens. Il ne s’en vante pas, mais les faits
sont là. C’est un progrès mais ce n’est pas assez. Il faut maintenant
l’assumer publiquement, le revendiquer même. Et surtout le traduire dans les
lois. La loi doit changer, offrir un avenir aux enfants, à tous les enfants et
pour cela régulariser et assurer avec une application qui change
profondément avec les méthodes antérieures, les droits fondamentaux des
enfants.

Réseau national des militants, collectifs
d’établissements, syndicats et associations
pour l’information et le soutien aux jeunes
scolarisés étrangers sans papiers

Adresse postale : C/o EDMP 8 Impasse Crozatier 75012 Paris –
educsansfrontieres@free.fr / www.educationsansfrontieres.org