Edito : Que cachent nos violences politiques ?

Claque à Macron, enfarinage de Mélenchon, et voilà que les chaines de TV d’info continue en tirent vite les conclusions sur l’ensauvagement de la société française. Pourtant, les violences sur les dépositaires de l’autorité publique ne sont pas nouvelles. Peu de médias ont parlé du meurtre d’Audrey Adam, travailleuse sociale, elle aussi était dépositaire d’une mission de service public. C’est peut-être cela qui pose problème, la violence est bien souvent invisible pour celles et ceux qui ne se fient qu’au buzz médiatique. Dans les quartiers populaires, la violence gangrène bien souvent la vie quotidienne, ce sont les rodéos, le deal, les insultes racistes, les contrôles de police au faciès, l’insécurité du lendemain, des logements mal entretenus, le déficit de service public et la ghettoïsation qui créent cette insécurité, cette violence et encore pire le sentiment d’insécurité.

Très probablement, la question des violences et des libertés seront centrales dans les années à venir et la LDH, comme d’autres organisations et partis de gauche, devra aussi être beaucoup plus claire non pas sur les causes sociales, non pas sur le traitement judiciaire mais bien sur la capacité de nos sociétés à pouvoir apporter une réponse promotrice de droits et de libertés dans une société apaisée. Aujourd’hui, les débats sont souvent passionnés et crier contre les manifestations d’une police qui au quotidien vit au contact d’une société fragmentée sans prendre en compte cette réalité, c’est forcément rendre encore plus tendues nos relations avec une police républicaine, citoyenne et luttant contre les discriminations. Pour les défenseurs des droits et des libertés, il n’y a pas d’avancée possible sans justice. Et ce n’est pas la justice qui est un problème pour la police, mais ce sont les  violences de la domination économique des plus riches ou de l’économie souterraine, les inégalités nombreuses et une police qui est trop souvent au service des intérêts des gouvernants et non du peuple qui posent problème.

Une autre des difficultés de notre police est le penchant sécuritaire qui s’est développé ces 20 dernières années au détriment d’une police de contact, de dialogue et de médiation. Maintenant, pour exemple, lorsque les travailleurs sociaux effectuent un placement de protection de l’enfance avec les forces de l’ordre, ce qui est bien évidemment très rare, ils sont escortés d’une brigade de 7 policiers surarmés. Il y a encore quelques années, ils avaient deux policiers en civil avec eux, formés au dialogue. Ces procédures sécuritaires existent dans bon nombre de missions de la police nationale ou de la gendarmerie. Cela entraine forcément un surarmement et des effets d’incompréhension et d’illégitimité. Accroitre les procédures, l’armement et la démesure sécuritaire revient à créer une escalade de violence, c’est ce que tous les spécialistes de la sociologie des violences urbaines et de la criminologie familiale disent. Mais forcément, lorsque l’on est gouvernant, face à la droitisation syndicale policière, on répond avec des peines toujours plus lourdes et une militarisation de nos policiers.

Le résultat de cette politique est malheureusement de plus en plus un risque démocratique car cela entraine une montée des polices parallèles, le marché de la sécurité augmente et dans les quartiers populaires, il existe maintenant des réseaux mafieux qui sécurisent une partie des habitants.

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 13 juin 2021

Edito : Droits de l’Homme et scène internationale

Ces dernières semaines, l’actualité internationale nous a ramenés au conflit israélo-palestinien. La LDH s’est exprimée à plusieurs reprises et nous avons largement incité nos adhérents à venir aux manifestations en soutien au peuple palestinien pris en otage entre une politique du Hamas visant à faire des Gazaouis un peuple vivant sous une mainmise musulmane de plus en plus radicale et un gouvernement israélien où NETANYAHOU cherche des alliances chez des extrémistes religieux pour former une majorité gouvernementale. Sur fond d’une politique colonialiste d’un refus de deux Etats viables et d’un côté d’une logique de terreur et de l’autre d’une supériorité militaire écrasante, la frustration, la colère et l’humiliation vont probablement durer encore des années et des années tant que la communauté internationale n’aura pas reconnu les Palestiniens dans leurs droits essentiels, que ceux-ci soient des droits économiques, sociaux, culturels et bien évidemment leur droit à un Etat souverain. Nous pouvons constater qu’en France, produire une parole critique sur la colonisation sioniste et extrémiste revient pour certains à tenir une position antisémite. Une fois de plus, les défenseurs des droits de l’Homme doivent se méfier de toutes celles et ceux qui veulent instrumentaliser ce conflit pour parfaire une hégémonie religieuse sur fond de frustration sociale et territoriale, ou d’exploitation des ignobles délits et crimes antisémites.

En Loire Atlantique, à l’approche des élections départementales, les personnels de l’Aide Sociale à l’Enfance ont fait grève pour dénoncer le manque de moyens pour protéger les enfants et des conditions de travail de plus en plus dégradées qui conduisent à une perte de sens et à une rotation du personnel inquiétante. Notre section et celle de Nantes se sont associées dans la signature d’une lettre commune adressée aux différents partis hors RN, candidats à ces élections départementales. Nous demandons qu’un plan de création de places en maison d’enfants, en familles d’accueil, en lieux de vie, soit conduit ainsi que des moyens renforcés pour pouvoir exercer toutes les mesures d’aide éducative en milieu ouvert. Souhaitons que la protection de l’enfance soit l’enjeu d’un nouvel élan pour le prochain exécutif départemental.

Notre section défendra toujours les conditions d’un accueil digne et d’une intégration sociale et citoyenne des exilé.e.s avec ou sans papiers. C’est pour cela que nous demandons l’abrogation du règlement de Dublin et la défense d’un droit d’asile large et non discriminant. Nous voulons une harmonisation du droit d’asile par le haut. Nous voulons promouvoir le sauvetage et la mise à l’abri inconditionnel des exilé.e.s en danger. Nous souhaitons que le pacte mondial pour des migrations sûres soit mis en place et nous demandons la ratification de la convention internationale des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Nous voulons aussi assurer la protection, l’éducation des mineurs non accompagnés et des jeunes majeurs.

La lutte contre le racisme et la xénophobie et la dénonciation d’un enjeu migratoire largement diabolisé pour restreindre les droits des étrangers et des exilés restera au centre de notre combat. Pour autant, notre section ne confond pas droits des exilés avec droits et installation inconditionnelle et suppression de toute procédure visant à accueillir dignement. Une politique migratoire doit offrir des possibilités réelles de protection, de sauvegarde d’éducation, de formation et d’intégration. Aujourd’hui, faire des migrations un combat qui, au nom d’une inconditionnalité ne permettrait pas une lecture dépassionnée mais réelle de ce qu’engendrent les migrations en termes humain, socioculturel, économique, religieux et spatial, c’est nuire à l’intérêt des migrants et bien évidemment c’est jeter de l’huile sur le feu et donner encore plus de gages à celles et ceux, fort nombreux, qui veulent restreindre les politiques migratoires et qui bien souvent reprennent les thèses de l’extrême-droite.

Jean-Luc BOERO, Président de la section

Le 24 mai 2021

Edito : Des préoccupations majeures sur la situation des Ouïghours et des Palestiniens

En avril dernier, je vous faisais état de l’espoir que la nouvelle politique américaine pouvait donner concernant la justice fiscale. Cependant, nous voyons bien que les Etats Unis poursuivent actuellement une stratégie d’accommodements avec la politique de l’état israélien d’invasion de territoires palestiniens. Cette situation est à l’origine de la nouvelle crise qui fait beaucoup de morts chez les Palestiniens et qui conduit le Hamas à faire de son peuple un otage de cette surenchère de la violence. Il est temps que la France et l’Europe puissent faire respecter l’ensemble des résolutions onusiennes prises dans le cadre de ce conflit.

La situation est catastrophique pour la population de Gaza. La section est toujours en lien avec le Comité Solidarité Palestine de la Région Nazairienne qui a appelé à une manifestation vendredi 14 mai.

Concernant les Ouïghours, le dernier « Droits et Libertés » consacre un article signé d’Alain BOUC que nous vous conseillons de lire. La situation est pour le moins terriblement inquiétante. Le nombre de détenus passés par les camps depuis 5 ans s’élèverait à un million. L’union européenne, face à cette situation, doit pouvoir conditionner l’hégémonie économique chinoise à la question des droits de l’homme. L’interdiction du travail forcé doit devenir un combat. S’il ne s’agit pas de tomber dans une incohérence à l’égard de la Chine en acceptant son expansionnisme économique et militaire, nous devons aussi sortir la tête de l’eau et pouvoir chacun de la place que l’on occupe, faire pression sur nos parlementaires pour que le pouvoir de Xi Jinping respecte les religions et en particulier l’Islam.

En France, deux tribunes sont parues dans le magazine d’extrême droite « Valeurs Actuelles » sur le séparatisme et le délitement de notre pacte républicain. Les militaires de réserve ou d’active ainsi que quelques généraux retraités agitent le chiffon rouge et parlent d’une situation incontrôlable. Il ne faudrait pas qu’au nom d’une islamophobie galopante les partis républicains restent aussi fades dans leurs réactions face à cette tentative de déstabilisation et de pression politique. Nous pouvons regretter la réponse fade du gouvernement et de Macron fasse à cette prise de position dangereuse pour les enjeux économiques et sociaux que nous défendons. Que dirait notre Président si en Allemagne des militaires, nostalgiques du 3ème Reich, faisaient de même ?

Souhaitons, s’il en est besoin, que la prochaine élection présidentielle ne tourne pas à cette simplification politique autour de deux thèmes : l’insécurité et l’Islam. La LDH a toute sa place pour diffuser l’universalité et l’effectivité des droits humains. Nous devons rester vigilants même si la période reste incertaine, en lien avec une évolution pandémique non maitrisée. 

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 16 mai 2021

Edito : Une actualité qui peut donner de l’espoir

Le 23 avril 2021

L’ère TRUMP est définitivement remisée. Le nouveau Président des Etats-Unis nous montre une voie à poursuivre, celle d’une relance verte et d’une lutte contre l’injustice fiscale en prônant une base fiscale minimale de plus de 20 % pour toutes les entreprises. Timidement, MACRON le rejoint. Cela fait des années que des ONG comme OXFAM ou ATTAC nous font des rapports alarmants sur la fraude fiscale, des GAFAM et sur le dumping fiscal de certains Etats. Des avancées depuis la crise de 2008 ont eu lieu, mais elles restent largement insuffisantes. Il faut souligner que Joe BIDEN est un démocrate qui semble se démarquer de la doctrine libérale dominante. Il n’a pas besoin de tweeter ou d’agiter les chiffons rouges ou des thèses complotistes pour tenter à sa manière de réguler les mouvements économiques et financiers. Souhaitons-lui de réussir dans son projet et espérons que la communauté européenne et notre Président seront à la hauteur des enjeux.

Les commentateurs politiques ne cessent de nous dire que les voix de gauche et progressistes sont minoritaires en France, sans pour autant faire référence à des études sociologiques sérieuses. Une fois de plus, ce sont les grands cabinets d’opinion qui dictent l’air du temps. Méfions-nous de ces thèses et de cette pensée qui viendraient nous ramollir dans nos combats. Les idéaux humanistes, les idéaux de justice sociale, l’universalité des droits de l’homme ne sont pas morts. Nous fêtons les 150 ans des 72 jours de la Commune libre de Paris. Nous restons très attachés à la direction et aux valeurs de liberté et de progrès social qu’elle a nommées. Les commentateurs et autres faiseurs d’opinion n’ont pas vu venir le mouvement des gilets jaunes. Ils n’ont pas non plus expliqué la pensée économique de BIDEN.

Restons lucides et combatifs.

Prochainement, nous serons conviés à des élections très importantes pour notre vie quotidienne. Les régions et les départements ont un rôle essentiel en termes d’aménagement territorial et de services publics de proximité. Leurs missions économiques sur l’apprentissage, sur la construction des collèges, des lycées, sur l’aménagement des zones sensibles, sur le tourisme, sur la protection de l’enfance, sur les personnes âgées, sur les personnes handicapées, sur l’accès au numérique, etc.

La LDH Nationale se penche sur la question et proposera rapidement une plateforme à l’attention des candidats. Comme nous l’avons fait pour les élections municipales, nous relaierons cela. Dès maintenant, n’hésitez pas à promouvoir le vote dans vos réseaux et auprès de vos collègues, amis et famille.

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 23 avril 2021

Edito : Défendons un droit au logement pour tous

La section vous informe depuis quelques mois de l’action du collectif Géronimo devenu « Collectif Urgence Sociale Saint-Nazaire Plus Jamais Sans Toi-t ». Largement vilipendés par la majorité municipale, traités d’anarchistes, de manipulateurs et de casseurs, ils ont résisté à ces grossiers pièges qui leur étaient tendus. Pourtant, lorsqu’ils occupaient un local dans le centre-ville, ils l’ont souvent tagué. Aujourd’hui, ce collectif a gagné en maturité. Leurs compte rendus sont de qualité, leur budget prévisionnel est bien construit, ils ont compris que pour avoir l’adhésion des Nazairiens et des associations, il leur fallait développer une stratégie acceptable et sans bavure. Dorénavant, ils occupent deux maisons non occupées depuis quelques années et appartenant à la Silène, situées boulevard Jean de Neyman. Ils ont un projet de CHRS autogéré. Un dossier est en cours de constitution. Ils réhabilitent les deux maisons. La section a décidé de leur attribuer une aide de 100 euros.

Hier, samedi 27 mars, ils ont lu un texte de belle facture lors de la manifestation devant la mairie de St-Nazaire dans le cadre de la journée européenne du droit au logement. Nous serons avec eux, s’ils le souhaitent, lorsque des négociations s’ouvriront avec la municipalité si celle-ci se montre plus disposée à leur égard. Nous n’hésiterons pas à valoriser leur action et à le faire savoir publiquement.

Didier OTT et moi-même avons participé à une visio avec Audrey DUFEU-SCHUBERT, députée de St-Nazaire sur le thème du « Beauvau de la sécurité ». Elle avait courageusement choisi de rencontrer sur le terrain les policiers, les associations, les élus et avait proposé un questionnaire. Nous sommes intervenus sur la question de la vidéo surveillance, des drones et des technologies de traçage numérique et de reconnaissance faciale. Mais en amont, nous avons bien précisé que la question de la sécurité est globale. Nous avons fait état des questions sociales qui insécurisent, d’une approche de la lutte contre le trafic de drogue qui est un vrai échec, de l’absence de formation des enfants à la communication non violente, d’un manque criant de présence humaine sur le terrain et entre-autre de médiateurs. Nous avons bien dit que la LDH ne pouvait être considérée comme une association angélique en matière de sécurité. La surenchère politicienne sur la sécurité a aussi été évoquée à partir d’un rappel du nombre de lois et d’une polarisation excessive sur quelques faits-divers crapuleux.

Concernant l’idéologie numérique en matière de sécurité, il fut bien précisé que son efficacité est très réduite, qu’elle fait les poches des mairies au profit de lobbys industriels et de grandes entreprises dont certaines sont chinoises. Didier a bien précisé que leurs technologies comprenaient parfois des logiciels espions pouvant bien évidemment avoir un impact sur notre indépendance nationale.

Le National fait une campagne intitulée « Jeunes Majeurs étrangers, sortir de l’impasse ». Nous vous demandons de vous mobiliser.

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 28 mars 2021

Edito : Privilégions les biens communs et des services publics de qualité !

Ces dernières semaines, l’actualité a été consacrée aux questions de violences de jeunes en bandes. Comme il est noté dans la tribune collective, le phénomène des bandes existe depuis toujours et aujourd’hui, il prend des formes nouvelles par le canal des réseaux sociaux et une médiatisation immédiate.

Ce phénomène vient avant tout interroger la place des politiques publiques et du soutien aux associations dans l’encadrement de la jeunesse. L’action sociale dans les quartiers s’est largement amoindrie. Les médiateurs, la prévention spécialisée font cruellement défaut dans certains quartiers. Les politiques d’éducation populaire deviennent insuffisantes et parfois hors sol. Le manque de locaux pour l’accueil des publics jeunes, la baisse des subventions, la précarisation des associations ou leur fusion dans des ensembles prônant l’entreprenariat social ont dilué les responsabilités, créé un malaise et une fuite des professionnels expérimentés. Il y a une désertion de l’espace public par des adultes pouvant encadrer la jeunesse.

Face à l’absence d’interlocuteurs, face à un monde segmenté et dangereux, face à une essentialisation et une racialisation de plus en plus importante, maintenir sa place dans le territoire, s’agréger aux autres adolescents est une forme de protection. Ainsi, les jeunes sont souvent livrés à eux-mêmes. L’ennui, le désœuvrement, la frustration, l’argent facile grâce aux trafics, les phénomènes d’errance, l’absence d’avenir ont des conséquences très fortes pour les jeunes et les populations y vivant. Les premières victimes, rappelons-le, sont avant tout les jeunes. La logique répressive prônant la reconquête de l’espace public par l’envoi en nombre de compagnies de CRS est médiatiquement rassurante.  

Cependant, la question de l’encadrement de ces jeunes, de leur délinquance et de leurs souffrances, de leurs désinscriptions sociales, familiales parfois et scolaires ne se réglera pas avec des politiques purement répressives et spectaculaires. Le travail de fond est long, souvent épuisant et malheureusement trop méconnu de nos concitoyens. Il n’y a pas que les professionnels de l’ASE de 92 qui souffrent du manque de moyens et de considération.

Enfin, les médias nous abreuvent de la question de la vaccination, parfois on nous oppose des logiques concurrentielles entre les pays. Les chaines d’info en continue n’ont de cesse de faire des comparaisons chiffrées sur les moyens mis en œuvre par les Etats pour aider la recherche vaccinale. La LDH comme un certain nombre d’organisations appelle à ce que le vaccin soit reconnu comme un bien universel. Il est important, effectivement, de lever les brevets sur les vaccins et les médicaments à l’OMC. Nous vous engageons en ce sens à signer la pétition et à la faire circuler.

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 14 mars 2021

Edito : De la classe ouvrière au dernier de cordée

Le capitalisme a gagné sur un bon nombre de sujets, entre autre celui de l’euphémisation des mots et concepts. Aujourd’hui, on ne parle plus de classe ouvrière mais de techniciennes de surface, d’agents de maintenance, de tuyauteurs, de soudeurs, etc ; parfois lorsque les sans grades, les premiers de corvée sont sans emploi, on parle d’eux dans des termes où le misérabilisme côtoie la considération dans une classe sociale dangereuse.

C’est ainsi que les invisibles ont dû porter une chasuble jaune pour faire parler d’eux. L’expression éparse et parfois violent des revendications des gilets jaunes a conduit à ce que l’Etat revoit la mise en œuvre de la taxe carbone et injecte, selon certains économistes, 10 milliards pour répondre à cette crise sociale. A l’époque, et ce n’est pas si vieux que cela, fin 2018, nos gouvernants nous disaient qu’ils ne pouvaient pas faire plus. La crise de la Covid-19 coûtera largement plus, les plans de relance se comptent en centaines de milliards !

Ainsi donc, les questions de budgets nationaux et européens viennent nous dire que l’orthodoxie budgétaire peut être contrebalancée lorsque nécessité fait loi. Pourquoi donc « les  sans dents », « les illettrés des Conti » ont-ils peu voix au chapitre ?

La classe ouvrière a disparu, du moins dans son expression marxiste. Le capitalisme a segmenté les catégories professionnelles pour ne plus en faire une classe qui puisse revendiquer. Regardez dernièrement, les intermittents ont pris d’autres appellations et on parle de permittents. Cette division des appellations vient aussi diviser le mouvement social et participe de l’atomisation des luttes. En rendant invisible la classe ouvrière, en déconsidérant la valeur intrinsèque du travail et des travailleurs, en réduisant le travail à la portion congrue du coût des produits pour optimiser les profits des actionnaires, on fait des ouvriers une variable d’ajustement économique et financière.

Mais cette euphémisation et cette disparition de la notion de classe sociale ont aussi des effets sur chaque travailleur. Le risque du chômage, la précarité, le déclassement réduisent la solidarité, et comme le disait Marx, le capitalisme entretient un volant suffisant de chômeurs pour réduire la contestation.

Aujourd’hui, le bel ouvrage, l’amour du travail bien fait, la considération de l’ouvrier sont devenus des denrées très rares qui ne rentrent pas dans la valeur financière de l’entreprise. A conduire une politique industrielle et sociale de casse du travail, les gouvernements successifs depuis 20 ans ont aussi participé à renforcer la désindustrialisation. Il n’en fallait pas plus à la mondialisation pour faire subir la baisse des coûts de production aux travailleurs.

On a parlé du monde d’après, d’un monde de reconnaissance pour ceux qui ont fait tourner le pays durant le premier confinement, d’une autre répartition de l’échelle de la valeur de l’activité, de la fin des  « jobs pourris », et pourtant aujourd’hui, les éboueurs, les ouvriers de l’agroalimentaire, les paysans, les ouvriers des services aux personnes sont au point mort en matière d’amélioration de salaire et de convention collective.

Pour celles et ceux qui aiment la littérature, je ne peux que vous conseiller de lire le magnifique roman de Joseph PONTHUS « A la ligne, feuillets d’usine ». Cet ancien travailleur social, qui n’a pas pu trouver un job en rapport avec sa formation lorsqu’il est venu vivre auprès de sa femme, nous fait vivre et partager dans son ouvrage sa vie d’ouvrier intérimaire dans les usines de poissons et les abattoirs bretons. Il est mort le 23 février. C’est sa lucidité, son amour de la poésie (de BAUDELAIRE à RIMBAUD) et d’auteurs essentiels (de MARX à PEGUY) qui lui ont permis, grâce à une écriture généreuse, vive, implacable, sans ponctuation et concise, de nous rendre lumineuse la beauté du geste ouvrier et la paradoxale force des ouvriers.

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 1er mars 2021

Editorial

La loi renforçant les principes républicains suit son examen à l’Assemblée Nationale. Contrairement à la forte mobilisation concernant la loi de sécurité globale, ce projet de loi ne mobilise pas autant. Pourtant, c’est un projet de loi liberticide car il remet en cause la liberté d’enseignement à domicile, un contrôle poussé de la liberté d’association et ne prend aucune mesure concernant la mise en place de l’égalité réelle dans les quartiers, que ce soit en matière éducative, citoyenne ou économique ; nous avons d’ailleurs fait un communiqué dont la presse locale n’en a pas fait écho.

Cette situation renvoie à la question de l’Islam radical et du terrorisme. Empêtrée dans la question de la défense d’une laïcité d’exclusion face aux libertés religieuses, la gauche est divisée sur la réalité républicaine des quartiers. Entre ceux qui considèrent que la misère, l’exclusion et la recherche identitaire conduisent à la radicalité religieuse et ceux qui veulent défendre des principes républicains sans prise en compte des questions sociales et religieuses, la LDH se trouve dans un chemin très escarpé qui malheureusement conduit à l’associer à celles et ceux qui par leur position défendraient indirectement le terrorisme.

Se positionner clairement en défenseur des principes fondateurs de la laïcité est la boussole de la LDH.

Refuser l’islamophobie d’où qu’elle vienne tout comme l’antisémitisme fait partie de l’ADN de la LDH.

S’exprimer sur les causes socioéconomiques des inégalités reste et restera toujours une nécessité forte et vitale pour obtenir une démocratie apaisée.

Lutter contre les lois d’exception, qu’elles puissent concerner le terrorisme ou la sécurité intérieure, a toujours été un combat majeur de la LDH.

Manifester fortement son soutien aux défenseurs des libertés, prôner une liberté d’expression faisant parfois l’objet d’attaques de l’extrême-droite, des religieux radicaux, des régimes et politiciens autoritaires a toujours été une ligne directrice de notre action. Nous ne confondrons jamais la laïcité avec un combat antireligieux.

Cependant, la LDH Nationale doit aussi, tout comme la section, se montrer beaucoup plus intransigeante concernant le terrorisme religieux qui fragilise nos démocraties. Il n’y a pas d’excuse au terrorisme, être radicalisé n’est pas l’apanage des seuls quartiers populaires. Lutter contre l’islamisme radical doit aussi conduire l’Etat à revoir sa politique diplomatique avec tous les Etats qui instrumentalisent l’Islam à des fins politiques et d’expansionnisme. 

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 14 février 2021

Editorial

La dernière réunion de section a eu lieu par conférence téléphonique. Si ce système présente des inconvénients, pour autant il permet de garder une vie démocratique à la section. En effet, 2021 doit pouvoir être une année où les avis, la parole doivent circuler, d’autant plus qu’il y a plein de sujets complexes qui nécessitent des échanges d’opinion et de points de vue.

Les lignes politiques ne sont jamais figées à tout va, elles doivent être l’expression d’une vision en lien avec l’universalité des droits de l’homme. Parfois, l’hystérisation médiatique et politique nuit à la prise en compte des enjeux sociétaux, d’une vision démocratique et promotrice des droits et libertés individuelles et collectives.

Face à une société fracturée, à une accélération du temps qui conduit à tourner les feuilles du calendrier sans lire véritablement ce que l’actualité peut nous apprendre, nous constatons que le monde d’après n’est que la poursuite voire l’accélération pour rejoindre le monde d’avant. Pourtant, lors du premier confinement, il était question de réfléchir sur l’accélération du monde, la déforestation, l’impact du productivisme et du néolibéralisme sur la destruction de la planète et l’engendrement de la pandémie et du réchauffement climatique.

Aujourd’hui, le monde court à des plans de relance qui tentent de relancer la machine économique sans pour autant accroitre la lutte contre les paradis fiscaux, les inégalités territoriales ou la gentrification des centre-villes, etc …

Qu’avons-nous retenu du grand débat  et quelles leçons avons-nous tirées du mouvement des gilets jaunes ? Peu de choses à en croire la frénésie médiatique et législative du gouvernement.

Après l’odieux assassinat de Samuel PATY, un projet de loi sur les séparatismes s’est transformé en projet de loi renforçant les principes républicains. Projet de loi fourre-tout, projet de loi liberticide et ayant une conception autoritaire et excluante de la laïcité.

En ce début d’année 2021, Camille KOUCHNER sort un livre qui fait le buzz médiatique, et toujours dans le cadre de cette société du spectacle tel que l’a défini Guy DEBORD, le Président de la République, son ministre de la justice et le secrétaire d’état à la protection de l’enfance viennent de faire une déclaration officielle sur l’inceste. Encore une nouvelle loi, un nouveau processus et de nouvelles règles qui couvriront l’étendue médiatique de cette lourde problématique. Pourtant, ces dernières décennies et depuis les excellents travaux de Claude LEVI-STRAUSS sur ce qui fonde la société; les violences sexuelles, la question de la lutte contre la pédophilie, les débats sur l’imprescribilité de l’inceste ont souvent conduit les juristes et les professionnels de l’action sociale à la prudence. Si l’inceste est un crime, l’étendard de la victimisation est aussi un processus mortifère s’il conduit, comme l’on sait aujourd’hui, à 80 % de classement sans suites dans les affaires de violences sexuelles par manque de preuves et un traitement policier caractérisé par un manque de moyens.

La parole politique est de plus en plus une parole émotionnelle comme si pour vaincre les maux de la société il fallait être au diapason d’une émotion légitime mais pas toujours bonne conseillère. A quand un projet politique fédérateur et convergeant vers une démocratie où les valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité deviennent une réalité tangibles ?

Jean-Luc BOERO, président de la section LDH St-Nazaire

Le 24 janvier 2021