« AUCUNE RÉPONSE ! »

Lorsque les citoyens et citoyennes ou les associations garantes de l’intérêt général adressent des demandes d’information aux autorités, la moindre des choses serait que celles-ci leur répondent dès lors que les demandes ne sont pas manifestement abusives. Or, au travers de deux exemples récents sur la place de Nice, nous voyons que, au contraire, des demandes réitérées par tous les moyens légaux se heurtent à un silence confinant au mépris. Aucune réponse n’a été apportée dans les deux cas évoqués ci-dessous.

Une caméra de très longue portée

Le 5 décembre 2023 le quotidien Nice-Matin publiait un article indiquant que la commune de Nice envisagerait d’installer (ou a installé) une ou des « caméras qui ont des capacités de zoom impressionnantes comme celle de Rauba Capeu (sur le quai des Etats Unis) qui permet de voir très précisément ce qu’il se passe jusqu’à l’aéroport »

Mesurée sur https://www.geoportail.gouv.fr/ la distance entre Rauba Capeu et l’aéroport de Nice est de 6km à vol d’oiseau.

Le 18 décembre 2023, notre association interrogeait M. le président de la commission départementale de la vidéoprotection à propos de la capacité d’un tel dispositif à répondre à l’exigence d’information du public posée par l’article R253-6 du CSI et – dans ce cas particulier – du public fréquentant l’aéroport de Nice, ses abords ou la Promenade des Anglais.

Compte-tenu du caractère si spécifique de cet équipement particulièrement furtif, donc potentiellement intrusif, nous souhaiterions aussi savoir si une étude d’impact a été effectuée avant son installation. De plus, nous sollicitions communication des caractéristiques techniques précises de cette caméra.

A ce jour : aucune réponse.

Nous avons donc saisi le 30 janvier 2024, dans des termes similaires, M. le préfet des Alpes-Maritimes, qui est l’autorité administrative qui, in fine, autorise l’installation des caméras de vidéosurveillance sur la voie publique.

A ce jour : aucune réponse.

Le 29 février 2024, nous adressions un courrier en RAR à M. le préfet des Alpes-Maritimes.

A ce jour : aucune réponse.

Vraisemblablement, il doit s’agir d’un équipement similaire à celui-ci, qui se trouve, comme presque toujours en matière de vidéosurveillance de la population, à l’intersection entre le militaire et le civil.

Voir la vidéo ici : [ OSIRIS ]

Autre exemple : que sont devenus les 10,9 millions d’euros de subventions pour Safe City ?

Le 7 juin 2018, le conseil municipal de la commune de Nice approuvait une convention avec Thalès comme chef de file regroupant treize autres entreprises, ainsi que l’INRIA, afin d’installer à Nice un démonstrateur dit « Safe City »

Le 18 juillet 2018, la banque publique BPI-France publie un communiqué indiquant qu’elle finance les projets « Safe City » de Nice et du quartier de la Défense à Paris à hauteur de 10,9 M €, sous forme de subventions et d’avances remboursables. Le capital de BPI-France est détenu par la Caisse des dépôts et consignations (institution publique) et par l’Etat Français.

Depuis, les Niçois, pourtant abondamment abreuvés d’informations liées aux technologies de pointe en matière de surveillance de la population, n’ont plus jamais entendu parler du démonstrateur « Safe City ». 

Nous nous sommes alors interrogés : BPI-France n’a finalement versé aucune subvention ou a-t-elle subventionné une ou des entreprises du consortium ? Si oui, laquelle ? pour quels montants ? pour quels résultats ?

Afin d’obtenir une réponse, nous avons contacté BPI-France le 2 juin 2023 par message déposé sur leur site internet.

A ce jour : aucune réponse.

Le 27 novembre 2023, nous réitéré notre demande d’information par lettre RAR adressée au siège de la banque publique.

A ce jour : aucune réponse.

Quelle conception de la démocratie, des droits et libertés prévaut en France en 2024, lorsqu’aux légitimes demandes d’information, la réponse est systématiquement : « Aucune réponse ». Les associations, les citoyens et citoyennes qui sollicitent des informations concernant leurs libertés individuelles ou collectives sont traités avec le plus grand mépris ; et s’il leur vient l’idée de s’adresser aux tribunaux, immanquablement, il leur sera répondu « secret défense » ou « secret des affaires ».

Est-ce que des collectivités territoriales, des préfectures, des commissions, des organismes paraétatiques peuvent encore en toute impunité se comporter comme sous l’Ancien régime : « l’Etat, c’est moi ; circulez, il n’y a rien à voir » ?

Protection des données personnelles : la CNIL met en demeure Côte d’Azur Habitat

Communiqué

Convention ville de Nice, Côte d’Azur Habitat, préfecture des Alpes-Maritimes et procureur de Nice.

Protection des données personnelles : la CNIL met en demeure Côte d’Azur Habitat

Le 25 mars 2021 le conseil municipal de la ville de Nice autorisait la signature d’une convention de partenariat entre la ville de Nice, le préfet des Alpes-Maritimes, le procureur de la république et le bailleur social Côte d’Azur Habitat. L’article 4 de la convention prévoit la transmission au bailleur social, en particulier par le procureur, d’informations nominatives dont certaines peuvent être qualifiées de particulièrement sensibles.

En se prévalant de cette convention, le bailleur social Côte d’Azur Habitat lançait, à grands renforts de publicité, un plan d’expulsions de locataires, dont un des volets les plus scandaleux consistait à infliger une punition collective à toute famille dont un des membres aurait commis un délit.

Le 4 octobre 2021 les associations LDH-Nice, SAF-Nice, DAL-Nice, Habitat et Citoyenneté et Tous citoyens publiaient un communiqué [ cliquez ici] pour dénoncer ces pratiques inadmissibles favorisées par la convention.

Le 8 décembre 2021 les associations LDH-Nice, SAF-Nice, DAL-Nice, Habitat et Citoyenneté et Tous citoyens saisissaient la CNIL par l’intermédiaire de la LDH-Nice en mettant en évidence que la convention quadripartite ne contenait aucune disposition en vue de protéger les données nominatives sensibles dont Côte d’Azur Habitat pourrait éventuellement être le destinataire.

Le 24 avril 2023 la CNIL adressait une réponse aux associations   [ cliquez ici]

Il ressort de ce document que :

Après consultation par la CNIL des délégués à la protection des données (DPO) de la ville de Nice, du ministère de l’intérieur, du ministère de la justice et de Côte d’Azur Habitat, la CNIL conclut :

  • Rappel au ministère de l’intérieur 

Dans la mesure ou la convention prévoyait une éventuelle transmission de données personnelles, il lui appartenait de réaliser une analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD), ce qui n’a pas été fait.

  • Rappel au ministère de la justice 

L’analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD) globale effectuée par les services du ministère de la justice dans le cadre de la mise en place du dossier pénal numérique ne permettent pas de vérifier l’effectivité des mesures de sécurité mises en œuvre à chaque fois que les transmissions prévues par la convention étaient opérées.  Ces éléments ont conduit le secrétaire général de la CNIL à adresser un rappel à la réglementation applicable au procureur de la République de Nice. Les échanges avec d’autres organismes doivent être particulièrement sécurisés, les données d’infraction doivent être chiffrées.

  • Mise en demeure adressée à Côte d’Azur habitat 

Aucune analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD) n’a été faite dans le cadre de la convention quadripartite ; or la CNIL considère qu’elle est nécessaire puisque l’autorisation invoquée par CAH, d’une part est obsolète et que, d’autre part, le champ couvert par la convention est beaucoup plus large que celui couvert par l’autorisation alléguée par CAH. En outre, la CNIL considère que la protection des accès aux messageries des destinataires d’éléments éventuellement transmis à CAH par la police ou le procureur est insuffisante.

Mises en demeure :

a/ réaliser une analyse d’impact .

b/ mettre en œuvre des mesures appropriées afin de garantir un niveau des sécurité adapté.

c/ mettre en œuvre une procédure afin que les données nominatives soient conservées  pendant une durée n’excédant pas celle nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées.

Le bailleur social Côte d’Azur Habitat, dans sa vision purement répressive des réponses à apporter aux réels problèmes qu’il rencontre parfois, a beaucoup communiqué à propos d’une convention censée apporter une réponse à tous les maux de l’habitat social ; méprisant à l’égard de ses administrés, Il a totalement négligé la protection de leurs données personnelles.

Le préfet et surtout le procureur ont paraphé une convention qui ne prend pas en compte les principes élémentaires du RGPD, alors qu’ils auraient dû attirer l’attention de Côte d’Azur Habitat sur les dangers de cette convention.

Sans l’intervention des associations, sans les rappels et les mises en demeure de la CNIL – qualifiée par le maire de Nice « d’institution poussiéreuse » – les locataires du bailleur social Cote d’Azur Habitat, souvent d’origine fort modeste, auraient pu voir leurs droits fondamentaux bafoués. 

Les associations signataires resteront attentives aux dispositions prises par le bailleur social afin de garantir la protection des données personnelles des locataires.

Droit au logement 06 – Habitat et Citoyenneté – Ligue des droits de l’Homme Nice  

Syndicat des avocats de France 06 – Tous Citoyens

IMREDD Nice : grattez un peu la smart-city et vous trouverez rapidement la police-city

L’IMREDD

L’Institut Méditerranéen du Risque de l’Environnement et du Développement Durable (IMREDD) est un institut de l’université Côte d’Azur (ex université Nice Sophia-Antipolis) qui « s’intéresse à un défi sociétal : le territoire intelligent et résilient, territoire « aimable » face à l’ensemble des problématiques environnementales. »

« Intelligent », « résilient », « aimable » : une avalanche de qualificatifs charmants, qui évoquent plus le confort douillet du cocooning que l’univers de la barbouzerie digitale ; et pour faire bonne mesure, comme c’est désormais le cas assez souvent, on enrobe le tout avec des « problématiques environnementales » : qui pourrait s’opposer à ça ?

Cette technique du « paquet cadeau » qui consiste à mixer, dans un même projet, surveillance généralisée et invasive des populations avec des solutions qui pourraient s’avérer utiles (alertes tremblements de terre, accidents Seveso, etc.) est utilisée par la ville de Nice dans son projet « Safe city » piloté par Thalès  https://site.ldh-france.org/nice/2018/08/27/safe-city-criminogene/

Dans tous les cas, l’objectif est d’éviter de prononcer les mots qui fâchent comme surveillance, contrôle des réseaux sociaux, reconnaissance faciale, etc.

SERENITY

Prenons l’exemple de « Serenity », projet piloté par l’IMREDD :

« L’ambition stratégique de SERENITY est avant tout d’apporter une solution globale et clés en main aux acteurs du tissu urbain, avec des avantages croisés et mutualisés autour des grandes thématiques de la sureté / sécurité et de l’écoresponsabilité. En renforçant au sein même du projet l’acceptabilité de cette technologie disruptive, l’objectif est de supprimer les barrières et freins à l’adoption. »

Il s’agirait de proposer une « solution globale » autour des « grandes thématiques de la sureté/sécurité et de l’écoresponsabilité », sans plus de précisions, sans doute parce que les concepteurs savent parfaitement que la vidéosurveillance généralisée et autres techniques de pistage algorithmique des citoyens, ça passe mal ; c’est pourquoi on inclut dans le paquet cadeau un peu d’écoresponsabilité fort consesuelle.

D’ailleurs, si « Serenity », dont le titre même évoque immanquablement « dormez bien les enfants » est une solution technologique  exempte d’atteintes aux libertés publiques, on se demande bien pourquoi « l’objectif est de supprimer les barrières et freins à l’adoption. » Le directeur de l’IMREDD lui-même tente de convaincre en déclarant sur Twitter (23/06/2022) :  » le premier besoin du citoyen quand il sort de chez lui, c’est de sen sentir en sécurité dans la ville » version à peine modifiée du fameux « la première des libertés, c’est la sécurité » chère chère à tous les marchands de solutions techno-policières.

Le consortium de Serenity

Pour y regarder d’un peu plus près, il suffit de consulter le savoir faire de toutes les entreprises qui composent le consortium de Serenity, pour comprendre que nous n’avons pas à faire à des bisounours  

ONHYS : spécialisée dans la simulation du comportement humain

SIRADEL ENGIE :  l’optimisation d’infrastructures (connectivité 5G/6G, mobilité, vidéosurveillance, etc.), et les territoires dans leurs transformations digitales, énergétiques, environnementales et sociétales

INOCESS : captation des flux par IoT qui permet la mise en place et l’administration d’un ensemble de capteurs sur le terrain, le prétraitement et l’anonymisation des données.

VIDETICS : propose des solutions d’analyse vidéo par intelligence artificielle permettant de se connecter aux réseaux des caméras de vidéoprotection et de retransmettre en temps réel des informations

ATRISC : compétences fortes autour de toutes les questions liées à l’innovation dans les domaines de la gestion des risques, menaces et vulnérabilités des organisations et des territoires. Le sujet de l’acceptabilité des solutions ou méthodes proposées aux usagers. ATRISC assure le pilotage de l’acceptation

Mots clé : Simulation de comportement humain, transformations sociétales, analyse vidéo par intelligence artificielle, caméras de vidéoprotection, vulnérabilités des organisations.

Sans doute, ils pensent que les français sont encore un peu archaïques, un peu trop Amish pour accepter leurs solutions intrusives, mais avec le « pilotage de l’acceptation » (traduisez un bon lobbying) , le groupe de pression sécuritaire espère y arriver.

En appuyant sur un bouton

Lors de l’émission « C Politique » diffusée sur la 5 samedi 7 mai, il a été diffusé un reportage sur la gestion de la pandémie par la Chine avec les méthodes techno-policières que l’on connait. Ci dessous, un extrait de 7 minutes :

(cliquez sur le triangle en bas à gauche)

Dans ce bref extrait, on voit les policiers chinois utiliser toute une gamme d’objets technologiques et de procédures qui existent aussi en France, même s’ils ne sont pas généralisés, systématisés et poussés à leur paroxysme comme en Chine : vidéosurveillance généralisée, reconnaissance faciale, géolocalisation, Pass, drones pour surveiller et  invectiver la population ; nous n’avons pas encore ces effrayants cloportes-robots développés sur le modèle de ceux de Boston Dynamics et munis de hauts parleurs.

Pas de ça chez nous

La première réaction est de penser que tout cela ne peut se produire en France, parce que nous sommes une démocratie, même autoritaire et avec de très forts penchants policiers, même très friande d’états d’urgence prolongés et « régimes transitoires ». Mis à part quelques représentants du tout sécuritaire tels qu’Estrosi et autres Rebsamen, on imagine volontiers la réponse de la majorité des élus : pas de ça chez nous !

Le « Crisis data hub »

 Toutefois, on ne peut s’empêcher de penser à quelques-unes des propositions contenues dans le rapport produit en juin 2021 par nos braves et paisibles sénateurs de la « Délégation sénatoriale à la prospective »  [   ICI   ] dont nous avons extrait quelques propositions :

« Quarantaine obligatoire pour les seules personnes positives, strictement contrôlée grâce à des outils numériques (géolocalisation en temps réel avec alerte des autorités » « Dans les cas les plus extrêmes […] toute violation de quarantaine pourrait conduire à une information en temps réel des forces de l’ordre, à une désactivation du titre de transport, ou encore à une amende prélevée automatiquement sur son compte bancaire »

Mais la proposition phare est celle de la création d’un « Crisis data hub » plateforme de collecte, de concentration de données personnelles (comme par exemple les données médicales) croisées avec celles produites par des tiers (opérateurs télécoms (géolocalisation), entreprises dites « technologiques » , transports, banques, etc. Le tout à mettre en œuvre uniquement en « cas de crise sanitaire ou autre ».

En appuyant sur le bouton

Les sénateurs se placent dans l’hypothèse d’une « situation de crise sanitaire ou autre » pour s’autoriser à « croiser, entre autres, des données médicales avec des données de géolocalisation » ; c’est exactement ce que fait actuellement le gouvernement chinois.

Le très vague et inquiétant « ou autre » devrait alerter tous les défenseurs et défenseuses de l’Etat de droit ; c’est la porte ouverte à tous les abus et à toutes les tyrannies. Que se passera-t-il si un jour est déclenchée dans notre pays une grève générale illimitée et qu’elle dure plusieurs semaines ? Qui est en mesure de garantir que ce dispositif ne sera pas détourné pour surveiller ou entraver les mouvements des syndicalistes, des journalistes ou de simples militants ?

L’expérience montre que lorsqu’un dispositif techno est disponible, son utilisation finit toujours par être dévoyée et utilisée à d’autres fins que celles prévues à l’origine, dans un premier temps illégalement, puis ensuite avalisé par la loi, Cf par exemple : la reconnaissance faciale sur les fichiers du TAJ, les valises IMSI Catcher, l’utilisation policière des drones.  

Les sénateurs  font preuve d’une certaine candeur s’ils pensent qu’ils vont pouvoir venir à bout d’une pandémie « ou autre » « en appuyant sur le bouton » ;  leurs propositions sont très inquiétantes, car « en appuyant sur un bouton » il serait alors possible de porter un coup fatal à l’Etat de droit.  

 Texte de la LDH Nice, lu lors de la manifestation contre la loi « Sécurité globale » du samedi 16 janvier 2021


La démocratie n’est jamais acquise, il faut toujours la défendre ! Aujourd’hui, c’est contre cette loi liberticide « Sécurité globale » que nous allons manifester, pour notamment le droit de manifester, d’informer et d’être informé.

Dans son état actuel, l’art. 24 de la proposition de loi empêcherait de filmer les forces de police en action ; les journalistes devront bientôt être agréés pour couvrir les évènements.

Des décrets parus en décembre étendent les possibilités de fichage de trois fichiers de police et de gendarmerie, des seules activités comme c’était le cas auparavant, aux opinions politiques ou syndicales, aux convictions religieuses ou philosophiques, aux données de santé, aux habitudes de vie ou à l’activité sur les réseaux sociaux.Le nouveau schéma national du maintien de l’ordre va dans le sens d’une utilisation massive de la vidéo-surveillance et des drones et tend à organiser un dangereux continuum entre polices nationales et municipales et polices privées.

A Nice, nous sommes particulièrement sensibles à cette problématique Sécurité / Libertés, puisque notre ville est en quelque sorte « l’appartement témoin » des dispositifs de surveillance de haute technologie, dont notre maire est le zélé expérimentateur et démonstrateur. Rappelons-nous les tentatives de la reconnaissance faciale, avortée, au lycée des Eucalyptus, grâce à l’action conjointe de la Quadrature du Net, de la Fcpe 06, de la Cgt 06 et de la Ldh, mais aussi celle réalisée lors du carnaval de 2019, sur une population de soi-disant « volontaires » qui a suscité les commentaires négatifs de la Cnil.

Rappelons-nous le projet d’application pour smartphone « Reporty », proposée par la ville en 2018, heureusement retoquée par la Cnil, qui aurait permis d’intégrer les smartphones de particuliers dans le dispositif de vidéosurveillance municipal.

Tout ceci s’inscrit dans la vision du maire de Nice d’une Safe City, dont des capteurs, reliés au Centre de Supervision Urbain, pourraient permettre une surveillance en direct de tous les instants, sur l’ensemble de l’espace public. La mise en place de cette Safe City, rebaptisée Smart City, pour ne pas effaroucher les citoyens et citoyennes, a fait l’objet d’un marché public d’expérimentation, contracté avec l’entreprise Thalès et une kyrielle de sociétés de haute technologie, la plupart ayant fait leurs premières armes dans le domaine militaire. Pas de doute, Nice est vraiment en pointe de la communication politique sur ces technologies du « sécuritaire », sans qu’une quelconque efficacité n’ait pu être démontré, ce qu’a bien mis en évidence l’attentat du 14 juillet, si cruellement !

Pour terminer, la LDH veut souligner que les efforts pour tenter d’aligner les statuts de la police municipale sur ceux de la police nationale, en acceptant de lui donner les mêmes accès directs à certains fichiers sensibles, contribuent à un mélange des genres qui ne nous paraît pas souhaitable. Il est sain que les missions de police nationale restent du ressort du pouvoir régalien de l’État, gardien de l’indépendance de l’utilisation de la force publique sur l’ensemble du territoire.

Une police municipale, recrutée et gérée par le maire, devient rapidement la police du maire. Donc, oui à une police municipale de proximité et non à une police municipale progressivement alignée sur la politique nationale.

Pour toutes ces raisons et considérations, nous ne pouvons, nous, LDH, mais aussi toutes les organisations qui ont appelé à manifester aujourd’hui, que nous opposer à la loi « Sécurité globale » et nous ne demandons pas seulement au président de la république de revoir tel ou tel article de la loi, mais nous demandons purement et simplement l’abrogation de cette loi liberticide !

Christian Braquet

Président de la section LDH de Nice.

LES ALGORITHMES VONT-ILS PRENDRE LE POUVOIR DANS LES ADMINISTRATIONS ?

LES ALGORITHMES VONT-ILS PRENDRE LE POUVOIR DANS LES ADMINISTRATIONS ?

Les algorithmes sont de plus en plus utilisés dans les administrations, ils permettent de gagner en efficacité, mais ils peuvent aussi produire des effets discriminatoires, c’est pourquoi le législateur devrait créer des obligations de transparence pour que les citoyens puissent garder un œil sur leur fonctionnement.

Aujourd’hui ces algorithmes concourent à optimiser les politiques publiques dans des domaines très variés, mais sont le plus souvent invisibles aux yeux des usagers, voire des agents.

Qu’est-ce qu’un algorithme ? La Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés) le définit comme « une suite finie et non ambiguë d’instructions permettant un résultat à partir d’éléments fournis en entrée ».

Les domaines d’application des algorithmes sont multiples, c’est pourquoi ils sont le plus souvent présentés comme des assistants aux pouvoirs numériques extraordinaires mais peuvent devenir de véritables « boites noires », dont les décisions sont difficiles à expliquer, ou pire, à comprendre !

Tout d’abord, il s’est agi d’attribuer ou de calculer le montant de prestations sociales ou de l’impôt. Ensuite, les administrations ont employé des algorithmes pour réaliser des appariements entre une « offre » et une « demande » (au sens large des termes). Enfin, l’usage d’algorithmes « apprenants » est beaucoup plus récent et n’est pas encore généralisé dans les administrations publiques.

Dans la plupart des cas, ces outils sont une aide à la décision, ils ne prennent pas la décision eux-mêmes. Quand c’est le cas, depuis le 1er juillet 2020, la mention est obligatoire sous peine de nullité de la décision.

Attributions de subventions, de places en crèche ou de logements, logiciel Parcoursup pour des inscriptions des étudiants dans l’enseignement supérieur, en principe, au plus près de leurs choix, gestion des flux de déplacements, logiciels de police prédictive ou de reconnaissance faciale… la liste des cas d’usages des algorithmes fondant des décisions individuelles est longue et reste à écrire : des décisions au moins en partie automatisées, il y en a partout, mais le sujet est minoré, voire invisibilisé.

En mai 2020, le Défenseur des droits a même tiré la sonnette d’alarme avec la Cnil, en rappelant que « le système algorithmique, neutre en apparence, peut produire des discriminations » et appelant à une « mobilisation collective ». Car, tout numérique qu’il soit, l’algorithme n’est au final, que la retranscription de choix humains.

Cette prise de conscience doit conduire à prendre en compte la dimension éthique dans le choix des outils et ce de la conception à la phase opérationnelle de tout projet, le Défenseur des droits recommandant notamment la réalisation d’études d’impact pour anticiper les effets discriminatoires des algorithmes.

C’est-à-dire, en amont des projets, se poser les bonnes questions : quel problème veut-on résoudre ?

Est-on vraiment sûr qu’un outil algorithmique soit la meilleure solution ? Quelles sont les alternatives, y compris non technologiques ?

(Source : la Gazette des Communes du 24/08/20)

Appli Stop Covid : les Dassault, Cap-Gemini et autres font l’aumône à l’Etat de quelques lignes de code

Le secrétaire d’Etat Cédric O déclare que « l’application n’a rien couté au gouvernement, hormis le salaire des agents publics qui ont participé à son développement, car les entreprises qui ont travaillé sur stop Covid l’ont fait gratuitement » La Voix du Nord 1/06/2020.

Les agents publics qui ont participé au développement apprécieront surement de constater que leurs salaires sont juste un peu plus que « rien ».

Ainsi, après avoir fait les poches de l’Etat en particulier à travers le crédit impôt recherche ou la commande publique militaire, les Dassault, Cap-Gemini et autres Orange font l’aumône à l’Etat de quelques lignes de code. Quelle grandeur d’âme !