Vallée de la Roya : le corps médical alerte les autorités

                                                                                                                                   Vendredi 25 Novembre 2016

à
Mmes , Mrs les Maires et conseillers(ers) municipaux de :
Breil sur Roya – Fontan – Saorge – La Brigue – Tende /St Dalmas
Mmes et Mrs les conseillers départementaux des Alpes Maritimes 
M. Le président du conseil départemental des Alpes Maritimes 
M. Le préfet des Alpes Maritimes
M.le Directeur de l’ Agence Régionale de Santé de Provence Alpes Côte d’ Azur
M. le président de la communauté d’agglomération de la Riviera française.

Mesdames , Messieurs,
A ce jour la situation sanitaire créée par l’ arrivée de migrants dans la vallée de la Roya nous contraint de vous alerter:
Nous sommes 5 infirmières et 2 médecins pour l’ instant; d’ autres soignants vont se joindre à nous pour la partie haute de la vallée.
Nous sommes tous bénévoles et avons répondu présents sans aucune hésitation face aux besoins sanitaires nouveaux générés par l’arrivée de ces populations . Nos interventions se font chez des habitants de la vallée qui ont ouvert leurs portes, à ces femmes, hommes et enfants quémandant un abri et de la nourriture souvent après plusieurs heures de marche dans la nuit.
Les populations rencontrées sont en majorité des mineurs , provenant pour beaucoup d’ Érythrée et du Soudan.
Nos soins sont essentiellement liés aux conséquences de la vie sur les routes et les mers de ces jeunes depuis de longs mois . Donc beaucoup de plaies aux pieds souvent surinfectées ,d’entorses de cheville, de douleurs musculaires liées à la marche , de refroidissement et ses conséquences , de pathologies cutanées telle que la gale ,l’eczéma et les mycoses. D’autres pathologies sont également rencontrées telles que paludisme, asthme,rhumatisme articulaire et insuffisance cardiaque.
A l’ heure d’ aujourd’hui , nous sommes fin novembre, la saison d’hiver arrive, il n’ est pas difficile d’imaginer les conditions « complexes » à la fois de survie de ces populations et celles des gens qui les accueillent comme ils peuvent , sans confort pour beaucoup , démunis eux aussi mais ne pouvant refuser la demande d’ aide.
Il est donc de notre devoir , nous soignants bénévoles , témoins professionnels au plus près de la situation sanitaire actuelle , de faire connaître l’urgence des besoins à savoir essentiellement la mise en place de structures d’accueil sur place digne de ce nom avant l’arrivée de l’hiver afin de tenter d’éviter l’apparition de nouveaux drames dans notre vallée.
En vous remerciant – Bien cordialement .
Dr Legurun Dominique, Dr Dumontet Bernard, Mme Godart Corinne, infirmière Mme Solet Marie laure infirmière, Mme Leonardi Isabelle infirmière, Mme Perne Florence infirmière, Mme Cadoret Patricia infirmière.

 

Voir aussi lettre inter-associative au préfet des Alpes-Maritimes : [ ICI ]

Bénévoles à la frontière – Appel à dons

Bénévoles à la frontière italienne- Appel à dons.

Les humanitaires bénévoles poursuivis en justice pour avoir aidé des réfugiés venant la zone frontalière avec l’Italie ont à leur tour besoin de votre aide !

 fraternel-coupable

Plusieurs humanitaires bénévoles, avec ou sans affiliation à l’une des associations signataires de cet appel, sont actuellement poursuivis pour avoir porté secours ou aidé des réfugiés venant de la frontière italienne, y compris de nombreux mineurs isolés étrangers.

Les bénévoles poursuivis doivent faire face à des frais de justice, d’avocat et subissent souvent de lourdes contraintes personnelles ou professionnelles : saisies de véhicule, interdictions de séjour, etc. Toutefois, la collecte est destinée uniquement à couvrir tout ou partie des frais de justice et d’avocats.

Les associations signataires de cet appel se proposent, sous leur responsabilité, de collecter et de repartir les sommes ainsi perçues en faveur les bénévoles poursuivis.

  • Pour faire un don par carte bleue, cliquez :  [ ICI ]

  • Pour faire un don par chèque, envoyer à : Ligue des droits de l’Homme – section de Nice, Maison des associations – 12 ter Pl Garibaldi 06300 Nice en précisant au dos du chèque : « pour les bénévoles poursuivis »

MERCI

Association pour la démocratie à Nice (ADN).

Cimade 06.

Habitat et citoyenneté

Ligue des droits de l’Homme 06 et Comité régional PACA

Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP ). Comité Nice – Grasse

Réseau éducation sans frontières (RESF) 06.

Roya Citoyenne

 

M. le préfet des Alpes-Maritimes : la seule solution est d’ouvrir un ou plusieurs centres d’accueil pour les réfugiés

Nice, le 24 novembre 2016

Les associations signataires

c/o La Ligue des droits de l’Homme – Section de Nice – Maison des associations – 12 ter Pl Garibaldi – 06300 Nice

à

Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes – Cabinet du Préfet – 147, Bd du Mercantour – 06200 Nice

lettre rar

Objet : situation des réfugiés à la frontière italienne et dans le Département Alpes-Maritimes

Monsieur le préfet, nous avons lu avec grande attention les 64 pages de l’instruction ministérielle DGS/DUS [ …]/2015/319/du 28 octobre 2015 telle que publiée à ce jour sur le site le ministère des affaires sociales et de la santé (mis à jour au 30-06-2016).

Le directeur général de la santé vous donne ses instructions, à travers le « Guide national relatif à la prévention et à la gestion des impacts sanitaires et sociaux liés aux vagues de froid 2015/2016 » , lequel « a pour objectifs de définir les actions à mettre en œuvre au niveau local et national pour détecter prévenir et limiter les effets sanitaires et sociaux liés aux températures de l’hiver et ses aspects collatéraux en portant une attention particulière aux populations vulnérables »

Vos instructions sont donc de détecter, prévenir et limiter.

Or, il se trouve que des bénévoles humanitaires de la Vallée de la Roya ont tenté, à leur façon, de prévenir et de limiter les effets de l’hiver en ouvrant un refuge pour les réfugiés en transit à St-Dalmas-de-Tende, jeudi 21 octobre et la seule réponse que vous leur avez apporté en liaison avec le Parquet, est : évacuation, fermeture et inculpations.

Dès lors, nous vous alertons solennellement sur les dangers imminents encourus dans l’ensemble du Département des Alpes-Maritimes et plus particulièrement dans les vallées frontalières, par les réfugiés qui s’y trouvent, parmi lesquels bon nombre de mineurs non accompagnés.

Monsieur le Préfet, nous sommes en mesure de répondre par anticipation aux remontées d’informations que sollicite l’administration centrale :

Fiche n° 6 – I remontées des informations sur les places disponibles : vous pouvez dès à présent indiquer à Mme la ministre : très largement insuffisantes.

Depuis plus de cinq ans, les associations locales impliquées dans l’accueil et l’aide aux sans abri vous ont informé à maintes reprises de cette situation critique ; elle s’est aggravée depuis la crise migratoire qui impacte fortement notre Département.

Fiche n° 6- II remontées des informations sur les décès.

Tout dépendra des mesures que vous allez prendre pour protéger la population en état de fragilité, donc, aussi, les réfugiés, mineurs ou pas et quel que soit leur statut juridique, car leur humanité prime sur la catégorie administrative dans laquelle vous pourriez les ranger.

A l’évidence, la seule action préventive qu’il vous appartient de mener, est d’ouvrir un ou plusieurs centres d’accueil des réfugiés, « population vulnérable » s’il en est.

Vous le savez, dans les vallées frontalières, dès le mois de novembre, le froid peut être mortel.

Dans l’attente d’une réponse, nous vous prions de croire, Monsieur le Préfet à notre considération distinguée.

Signataires :

Association pour la démocratie à Nice (ADN) ; Cimade 06 ; Ligue des droits de l’Homme (LDH) Sections des Alpes-Maritimes et Comité régional PACA ; Médecins du Monde (MdM) ; Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP ). Comité Nice – Grasse ; Réseau éducation sans frontières (RESF) 06.

labellisations « amis des enfants » pour en finir avec les faux semblants

LETTRE OUVERTE A UNICEF FRANCE
Pour en finir avec les faux semblants de la labellisation des collectivités « amies des enfants »
Les associations signataires Nice, le 30 septembre 2016
c/o : Ligue des droits de l’Homme – section de Nice – Maison des associations- 12 ter place Garibaldi- 06300 Nice
à
Unicef France- M. Jean-Marie Dru, Président- 3 rue Duguay-Trouin-75282 Paris cedex 06
Monsieur le président,
Depuis plus de deux ans, les associations signataires vous ont alerté à propos de la situation des mineurs isolés étrangers dans le Département des Alpes-Maritimes. Le 26 décembre 2014, les associations ont porté à votre connaissance le profond malaise qu’elles ressentaient en constatant que l’Unicef avait labellisé plusieurs collectivités territoriales du Département des Alpes-Maritimes « amie des enfants » alors même que nous constations, sur le terrain, que certaines d’entre elles menaient un politique ouvertement hostile envers certains mineurs et plus particulièrement les mineurs étrangers.
A titre d’exemple, nous vous indiquions que M. Ciotti, président du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes, avait annoncé dans tous les médias, le 18 mars 2013, sa décision de refuser l’admission au sein des services du CG 06 des «mineurs délinquants étrangers » à compter du mois de juillet 2013 (cf. par exemple, article du quotidien Nice Matin du 19 mars 2013). Or, la protection des mineurs étrangers non accompagnés constitue une obligation internationalement souscrite par la France, notamment en application des articles 3.1, 20 et 22 de la convention internationale des droits de l’enfant.
De même, le 8/01/2014, le président du CD 06 prenait un arrêté provisoire suspendant toute admission dans le Foyer Départemental de l’Enfance ; le motif réel était clairement affiché dans l’avant dernier considérant de l’arrêté : « Considérant que le Département des Alpes-Maritimes accueille actuellement au Foyer de l’enfance  73 mineurs isolés étrangers en accueil de longue durée, soit 40 % de la capacité maximale d’accueil du foyer ». Nous vous avons aussi, par lettre datée du 1er juin 2015, signalé par courrier toute une série d’actes, de déclarations ou de décisions prises par des collectivités locales, contraires aux intérêts de certaines catégories d’enfants.
Sans méconnaître la situation particulière qui est celle, par exemple, du Département des Alpes-Maritimes, Département frontalier et en particulier la charge financière qui pèse sur cette collectivité, nous constatons avec amertume que vous continuez d’accorder un label flatteur, malgré nos alertes, à certaines collectivités qui stigmatisent les mineurs isolés étrangers.
Nous avons étudié en détail les dossiers d’habilitation à la labellisation « ami des enfants » des collectivités territoriales, y compris dans leur toute nouvelle version postérieure aux élections municipales et communautaires de 2014 et alors que de très graves problèmes concernant les mineurs isolés étrangers se posaient déjà dans notre Département : à aucun moment, ces dossiers d’habilitation n’abordent la question des mineurs isolés étrangers, comme si les mineurs isolés étrangers constituaient une sous catégorie négligeable.
Les associations signataires n’ignorent pas que l’Unicef s’est intéressé, depuis peu, à la situation des mineurs non accompagnés, en particulier dans le nord de la France, en publiant au mois de juin 2016 une enquête sans complaisance intitulée : « Ni sains, ni saufs, une enquête sociologique sur les enfants non accompagnés sur le littoral du Nord et de la Manche ».
Les associations signataires saluent cette nouvelle orientation, mais elles vous invitent à mettre, enfin, vos actes en accord avec vos paroles et vos écrits.
Nos associations restent à votre disposition pour vous expliquer, sur place et dans le détail, la situation actuelle, dans notre Département, des mineurs isolés étrangers ; nous sommes déjà en contact avec les services du Défenseur des Droits, ainsi qu’avec le HCR. La situation est actuellement proprement catastrophique : une bonne partie d’entre eux est laissée à l’abandon et vit dans la rue, le droit de déposer une demande d’asile leur est dénié, ils sont refoulés vers la frontière italienne en dépit du droit et de toutes les convention internationales signées par la France.
La situation des mineurs isolés étrangers perdure sans que, à notre connaissance, aucune des six collectivités que vous avez labellisées « amies des enfants » s’en soient émues publiquement ou aient pris des initiatives pour leur venir en aide, alors même que, du fait de leur statut de mineurs, ils ont le droit de rester en France et d’y être protégés. Vous devez faire cesser les faux semblants.
Dans l’attente d’une réponse, veuillez agréer l’expression de nos salutations distinguées.
Contact : amnestyasile06@yahoo.fr
Plus d’informations : https://amidesenfants.wordpress.com/
Association pour la démocratie à Nice (ADN).
Amesty international – Relais réfugiés 06.
Comité inter-mouvements auprès des évacués 06 (Cimade).
Habitat et Citoyenneté.
Ligue des droits de l’Homme (LDH) Sections des Alpes-Maritimes.

Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP ). Comité Nice – Grasse

Réseau éducation sans frontières (RESF) 06.

SOLIDARITÉ AVEC LES CITOYENS SOLIDAIRES DES RÉFUGIÉS !

Dernière minute : le procès de Cédric Herrou est reporté à une date ultérieure ; celui de Pierre-Alain Mannoni est maintenu au 23/11/2016 13h.
SOLIDARITÉ AVEC LES CITOYENS SOLIDAIRES DES RÉFUGIÉS !

La petition, ainsi que que la liste des premeirs signataires est sur le site « change.org »

Lisez et  signez la pétition ici : [ PETITION ]

Plus d’infos :
Facebook Roya citoyenne : https://www.facebook.com/royacitoyenne/?fref=ts
Blog Résistances en Roya : http://roya06.unblog.fr/
Blog Association pour la Démocratie à Nice : http://ademonice06.com/
Site Habitat et Citoyenneté : http://www.habitatetcitoyennete.fr/

Aide aux réfugiés – texte de Cédric Herrou poursuivi pour « aide au séjour illégal »

« La vallée de la Roya, connue par l’emblématique «Vallée des Merveilles», serpente sur les territoires français et italien à l’image de l’Europe : image ou mirage de Liberté, d’Egalité et de Fraternité portée à un peuple oppressé par des dictatures, des guerres, où l’implication de nos Etats impacte la condition humaine dans ces pays.

Des femmes, des enfants, des hommes, chassés par la guerre et la dictature, chassés de leur pays, de leur ville, leur quartier, leur famille, traversant désert et mer, finiront pour beaucoup par appartenir à cette « mer au milieu des terres », accueillant à elle seule la plus grande et la plus morbide des destinations.

Les plus chanceux arrivent enfin sur la terre «des sages», « doués de raison et de conscience, agissant les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ».

Terre connue pour ses valeurs fondant notre République, notre fierté; valeurs où le droit humain, la famille, l’enfant sont au sommet de la hiérarchie des droits.

Nous avons été éduqués par et pour ces valeurs

Et voilà que nos fondamentaux s’ébranlent à la vue de quelques milliers de réfugiés en Europe.

En vallée de la Roya, nous sommes las d’être spectateurs de cette crise humanitaire orchestrée par nos élites politiques, synthétisée par les accords de Dublin, accord confortant une politique populiste et irresponsable.

Des hommes, des femmes, des enfants, marchant des jours et des jours au péril de leur vie, ils tentent de passer la frontière, sur les chemins, sur la voie ferrée, l’autoroute, frôlés par les camions, les trains, et parfois percutés. Ces gens tentent de rejoindre femme, frère, mari, cousin, ou amis en Allemagne, Suède, Angleterre… La frontière est fermée aux Humains, non aux marchandises sous prétexte de crise. Mais qui est réellement responsable de cette crise ?

Alors quoi faire ?

A qui appartient le devoir d’agir ? Est-ce à nous simple citoyens de nous substituer un devoir d’Etat ?

Quelle est la réponse des pouvoirs publics à nos actions ?

Oui nous avons agi !

Oui nous avons accepté de porter secours à ces enfants, ces familles !

Oui nous avons peur de voir ces jeunes adolescentes seules à Vintimille, prêtes à monter dans un fourgon sans connaître la destination finale !

Nous nous sentons impuissants et à la fois responsables.

En leur portant secours nous avons enfreint la loi, non par irrespect de la justice, mais pour que la condition humaine prône avant tout.

Exigeons que les pouvoirs publics fassent leurs devoirs.

Exigeons que l’Etat respecte les lois.

Exigeons que le protocole de renvoi à la frontière soit respecté.

Exigeons que les mineurs isolés cessent d’être systématiquement reconduits à la frontière et exigeons que l’Etat français, Etat souverain, accepte que ces réfugiés puissent demander l’asile une fois sur le territoire et que ces réfugiés puissent accéder à leurs droits.

Parmi nous, des acteurs solidaires aux réfugiés sont menacés de 5 ans d’emprisonnement
et de 40 000 euros d’amende pour avoir porté assistance à des femmes, enfants et jeunes hommes mis en danger par l’entrave à la libre circulation sur le sol européen. Le désengagement des pouvoirs publics face à cette crise humanitaire, qui bafoue ainsi le droit international, la Convention de Genève et les droits de l’Homme, nous amène à agir et
nous avons agi. »

Cédric Herrou

Pourquoi j’ai secouru des réfugiés ? Texte de P.A Mannoni poursuivi pour « aide au séjour illégal »

Ci-dessous, le texte que Pierre-Alain Mannoni nous autorise à diffuser.

Pierre Alain est convoqué au TGI de Nice le mercredi 23 novembre 2016 à 13h30, prévenu, comme Cédric Herrou, d’aide au séjour irrégulier d’un étranger en France.

Pourquoi j’ai secouru des réfugiés ?

« J’ai 45 ans et 2 enfants. Je suis fonctionnaire de l’Education Nationale et travail comme ingénieur dans un laboratoire de recherche et aussi comme enseignant à la Faculté des Sciences. Je n’étais pas jusqu’à présent militant politique ou associatif.


Dans ma famille on est Corse. J’ai passé toutes mes vacances au village dans la maison de mon grand-père, le médecin du canton qui faisait ses visites à cheval. Au village, presque 50 ans après sa mort, les gens en parlent encore car que ce soit en pleine nuit à l’autre bout du canton, que ce soit un bandit blessé ou un paysan qui n’ait pas de quoi payer, il soignait. Dans les récits que me racontait mon père et dans les expériences que j’ai vécu là-bas, j’ai appris et compris qu’on ne laisse pas quelqu’un en danger sur le bord de la route, d’abord parce que c’est la montagne mais aussi parce que c’est une question de dignité. Ou d’honneur comme on dit.

J’ai la chance d’avoir des enfants et en tant que père avec la garde partagée, j’ai pris cette tâche pas évidente très au sérieux. Pas évidente car aujourd’hui le monde va mal que ce soit d’un point de vue social ou environnemental alors au delà d’une “bonne situation”, ce que je souhaite pour mes enfants, c’est qu’ils soient l’espoir d’un monde meilleur.
Le Dimanche 16 octobre en rentrant en voiture de la fête de la brebis à la Brigue avec ma fille de 12 ans, nous avons secourus 4 jeunes du Darfour. Ce village français est dans la vallée de la Roya qui est frontalière de Vintimille en Italie. C’est dans cette vallée que sont régulièrement secourus hommes mais surtout femmes et enfants qui se trouvent sur ces routes de montagnes et qu’on appelle migrants. Ces 4 jeunes étaient complètement perdus et se dirigeaient à pied, certains en bermuda, vers les montagnes enneigées. Avec ma fille on les a ramené à Nice, ils ont mangé et dormi avec nous dans mon appartement de 40m². Le lendemain comme tous les jours d’école nous nous sommes levés à 6h15. Ils sont venus avec moi déposer ma fille à l’école puis je les ai déposé dans une petite gare peu surveillée par la police et je leur ai payé un billet de train pour la première partie du trajet. Ils devaient retrouver leur famille à Marseille.

C’était ma première action de secours envers ces “migrants”. Pourquoi je l’ai fait ce jour là ? Jusqu’à présent avec mes enfants j’avais déposé des vêtements à la croix rouge à Vintimille, des chaussures, un sac à dos, pour aider mais aussi pour leur montrer qu’il y a des injustices dans le monde et que chacun de nous peut faire quelque chose… Là c’était la deuxième fois que je voyais un groupe sur le bord de la route. La première fois j’avais hésité, je n’avais pas eu le courage, mais cette fois ci il y avait ma fille et j’ai pu lui montrer l’exemple.

Le lendemain lundi 17 octobre, après une soirée chez des amis dans cette même vallée, sur le retour vers Nice, je décide de m’arrêter dans ce camp pour migrant à St Dalmas de Tende, un bâtiment désaffecté pour colonies de vacances de la SNCF qui a été ouvert en urgence quelques heures auparavant, sans autorisation, par un collectif d’associations dont la Ligue des Droits de l’Homme, Amnesty International et un tas d’associations nationales et locales. L’ouverture de ce lieu à fait l’objet d’un communiqué de ces associations dans les médias. Je sais bien que mon retour vers Nice est une opportunité d’en sortir quelques-un de ce lieu sans eau ni électricité et ou la température en pleine nuit ne doit pas dépasser 10 degrés. Je décide d’en ramener chez moi et de les déposer à la gare le lendemain.

Ce sont 3 filles qu’on vient d’aller chercher à l’étage. Elles sont contentes de ma proposition me dit on car elles sont attendues par une association à Marseille pour être soignées. Quand je les vois mon coeur se déchire. Elles ont peur, elles ont froid, elles sont épuisées, elles ont des pansements aux mains, aux jambes, l’une boite en faisant des grimaces de douleurs et l’autres ne peut pas porter son sac avec sa main blessée. J’apprendrais plus tard que l’une d’elles est la cousine de la jeune fille tuée sur l’autoroute vers Menton quelques semaines avant. Elles ne parlent ni français, ni anglais. Il faut marcher une centaine de mètres pour rejoindre ma voiture et cela prend très longtemps car l’une marche très difficilement. J’en profite pour essayer de savoir de quel pays elles sont. Erythrée. Une fois dans la voiture, je constate qu’elles n’ont jamais utilisé de ceinture de sécurité. Je suis dans l’embarras de m’approcher d’elles qui ont peur pour leur mettre la ceinture. Elles n’ont pas peur de moi mais dans leurs yeux je lis qu’elles savent que rien n’est gagné. Il ne faut pas être un génie pour comprendre qu’au long des 6000 km qu’elles ont fait pour arriver jusqu’ici, elles ont fréquenté la mort et le cortège d’horreurs qu’on n’ose imaginer. Je démarre avec à mon bord ces filles dont je dois prendre soin et que je dois amener à bon port. J’éteins la radio, la situation est suffisamment incroyable.

Nous n’arriverons pas à Nice. Au péage de la Turbie les gendarmes nous arrêtent et nous conduisent à la Police de l’Air et des Frontières. Ils m’ont séparé des Érythréennes. Ce n’est pas clair ce qu’ils ont fait d’elles mais je ne crois pas qu’elles aient été soignées. Elles auraient été renvoyées au sud de l’Italie comme ça se fait souvent. Les policiers m’ont dit qu’au moins l’une d’elle était mineure. Je n’ai pas réussi à les protéger.

Après 36h de garde à vue, j’ai été libéré sous contrôle judiciaire. Ma voiture a été saisie ainsi que mon téléphone et je n’ai pas le droit de quitter Nice sauf pour emmener mes enfants à l’école mais il n’y pas de transport en commun à moins de les réveiller à 5h30 du matin. Mon procès est renvoyé au 23 novembre 2016 à 13h30 à la même audience que Cédric Herrou membre d’associations humanitaires qui est également poursuivi pour avoir aidé des étrangers.

Le lendemain de ma libération, alors que, coup du sort, j’effectuais un point de compression sur un accidenté de la route qui se vidait de son sang en bas de chez moi, un “jeune migrant” est mort percuté par une voiture sur l’autoroute à Menton, il a été projeté par dessus le parapet du viaduc et a fait une chute de plusieurs dizaines de mètres. Venu du bout du monde, perdu sur l’autoroute et mort à 20 km de chez moi.

Mon geste n’est ni politique, ni militant, il est simplement humain et n’importe quel citoyen lambda aurait pu le faire et que ce soit pour l’honneur de notre patrie, pour notre dignité d’hommes libres, pour nos valeurs, nos croyances, par amour ou par compassion nous ne devons pas laisser des victimes mourir devant nos portes. L’histoire et l’actualité nous montrent suffisamment que la discrimination mène aux plus grandes horreurs et pour que l’histoire ne se répète plus, nous devons valoriser la solidarité et éduquer nos enfants par l’exemple. »

Pierre-Alain Mannoni

Les refoulements de mineurs étrangers à la frontière reprendront dès que les médias auront tourné le dos.

Réagissant à une lettre ouverte adressée à l’Unicef par plusieurs associations à propos de la situation des mineurs étrangers isolés, FR3 Cote d’Azur publiait un reportage le 6 octobre 2016 : « La situation des migrants mineurs non accompagnés se complexifie de plus en plus entre les autorités et les associations. Renvoyés en Italie, certaines ONG contestent la procédure » . Ce reportage contient une courte vidéo [ ICI ] dans laquelle le directeur de cabinet du préfet des Alpes-Maritimes conteste la position des associations (à la minute 1:28 ) et explique que depuis le rétablissement du contrôle des frontières, « aucune personne ne peut passer si elle n’a pas de titre, qu’elle soit mineure ou qu’elle soit adulte ». Effectivement, tous les observateurs présents dans la zone frontalière le savent, les mineurs étrangers interpellés sont refoulés vers l’Italie.

Toutefois, à la suite de l’action médiatisée de l’association « Roya Citoyenne » à St Dalmas de Tende, ouvrant « un lieu d’accueil humanitaire de transit » dans un local désaffecté propriété d’EDF, seront interpellés, outre les militants associatifs, 39 mineurs et 5 adultes. Bien que tenus à l’écart, les médias étaient présents. Le journaliste de Fr3  précise : « Les jeunes mineurs, ont été orientés vers une structure médicale pour un bilan de santé et tenter de vérifier la véracité de leur déclaration quant à leur âge. Les autres ont été remis à la police aux frontières ».  [ ICI ]

Il y aurait donc un changement d’attitude de la préfecture vis à vis des mineurs isolés étrangers entre le 6 et le 20 octobre ? L’avenir le dira, mais on peut très fortement en douter.

Les refoulements à la frontière recommenceront, dès lors que les médias auront tourné le dos.

 

 

Nice : quand la police nationale retient « en dehors de tout cadre juridique » une mineure étrangère

Nice : quand la police nationale retient « en dehors de tout cadre juridique » une mineure étrangère

A Nice, le 10 février 2016 à 4h20 du matin, la police nationale interpellait, entravait et retenait illégalement dans ses locaux, de 5h à 10h40, sans l’informer de ses droits, l’empêchant de prendre tout contact avec l’extérieur, Mlle M. H., mineure de 13 ans, demandeuse d’asile conjointement avec sa famille de nationalité Arménienne. Elle sera retenue dans les locaux de la police jusqu’à 10h40.

Alertée par la mère de la mineure, l’association « Habitat et Citoyenneté » nous alerte et contacte les avocats.

La mineure a été interpellée en compagnie de son beau père, tous deux soupçonnés à tort d’avoir commis une tentative de vol, alors que le beau père venait lui même de constater le vol de son téléphone portable. Pour tenter de le récupérer, ils compose le numéro du portable, un individu lui répond, lui fixant un rendez-vous à 4h du matin pour le lui restituer ; les deux personnes se rendent sur le lieu fixé, mais c’est la police qui les attend et les interpelle, car le rendez-vous avait été fixé par les policiers eux mêmes ; ils interpellent le beau-père et la mineure qui l’accompagnait pour servir d’interprète.

L’affaire, plaidée par Me Myriam Houam, à été jugée par le tribunal correctionnel de Nice, le 15 septembre 2016 ; les juges ont estimé que :

« il est incontestable que l’audition de la jeune fille […] n’a pas respecté la procédure pénale […] étant retenue en dehors de tout cadre juridique »

– « le procédé  imaginé par les policiers ayant en main un téléphone portable découvert à proximité d’un lieu où venait de se produire une tentative de cambriolage de proposer à ceux qui ne cessaient d’appeler sur ce téléphone aux fins de la récupérer de venir aux abords d’un centre commercial en pleine nuit vers 4h du matin apparaît  parfaitement déloyal à l’égard du titulaire du téléphone qui leur avait indiqué son adresse »

Le tribunal prononcera la nullité de la mesure de garde à vue, ordonnera le retrait des procès verbaux de placement en garde à vue et, bien entendu, prononcera la relaxe. Dans le silence de la presse locale, pour une affaire qui se termine bien, combien d’abus du même genre ne sont pas sanctionnés ?

Questionner la vidéosurveillance à Nice : utilité, coûts, dangers – édition mise à jour au 30/09/ 2016

Nous avions prévu d’actualiser notre étude sur la vidéosurveillance à Nice afin d’y intégrer les informations relatives à l’analyse des activités de la Commission Départementale de la vidéosurveillance. Le 14 juillet 2016, un massacre de masse venait endeuiller notre ville. La section de Nice de la Ligue des droits de l’Homme a obstinément refusé d’entrer dans les indécentes polémiques qui ont surgi moins de 24 heures plus tard, à propos du fonctionnement de la vidéosurveillance.

Dans cette deuxième édition, nous maintenons le même cap : notre objectif fondamental est d’alerter nos concitoyens sur le coût prohibitif, l’utilité très limitée et les dangers pour les libertés publiques que représente une vidéosurveillance massive, omniprésente et instrumentalisée par certains élus.

Télécharger ou consulter le dossier : [ ICI ]