La vidéosurveillance dans les lycées

« À la veille des élections régionales de 2010, de graves agressions d’élèves dans trois lycées franciliens, dont l’une a entraîné la mort d’un adolescent, ont réactivé en France le débat autour de la vidéosurveillance dans les établissements scolaires. Pour lutter contre les intrusions  le gouvernement a en effet souhaité équiper systématiquement de cette technologie les collèges et les lycées les plus « exposés ». Promues comme la principale solution pour prévenir la délinquance dans les espaces publics, les caméras de surveillance seraient donc également la solution la plus appropriée pour lutter contre les « violences scolaires »  »

La suite de l’article de Tangy Le Gof  : [ ICI ]

La vidéosurveillance réduit-elle la délinquance ?

La vidéosurveillance, garante de la tranquillité ? C’est ce que l’on pourrait croire en lisant le rapport rendu en 2009 par l’Inspection générale de l’administration au ministre de l’Intérieur français. Mais selon les études scientifiques, rien n’est moins sûr.L’auteur : Sebastian Roché Directeur de recherche au  CNRS . PIEP – Université de Grenoble.

Pour la Science N°394 – Août 2010.  Accès à la totalité de l’article : [ ICI ]

 

« L’usage de la vidéosurveillance s’est considérablement développé depuis les années 1960. Parmi les finalités recherchées, la prévention et la dissuasion de la délinquance et de la criminalité sont les plus souvent invoquées. En Europe et aux États-Unis, certaines autorités politiques, mais également des gestionnaires d’équipements qui y sont liés (transports publics, complexes sportifs, par exemple) ont choisi de s’équiper de caméras pour lutter contre les cambriolages, les vols et les agressions dans les espaces publics – une tendance aussi notée en Australie. En Grande-Bretagne, la vidéosurveillance est le program­me de prévention de la délinquance le mieux financé depuis 1996 : en 1998, 170 millions de livres sterling étaient alloués à 684 projets d’installation de caméras dans divers emplacements, principalement des centres-villes, des quartiers résidentiels et des parkings, avec l’idée que la vidéosurveillance découragerait les comportements déviants. La France s’est engagée dans la même politique 13 ans après. Nous y avons observé que la plupart des nouvelles équipes municipales développent les équipements mis en place par leurs prédécesseurs.

Ces dernières années, grâce aux progrès des méthodes de la criminologie – devenues plus scientifiques –, les impacts de ces dispositifs ont été étudiés dans plusieurs pays – Angleterre, États-Unis, Australie –, de telle sorte qu’on peut connaître les effets associés au déploiement de caméras toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire en éliminant un maximum de biais. Deux méta-analyses scientifiques de ces études ont récemment fourni les premiers résultats fiables concernant l’impact de la vidéosurveillance sur la délinquance et la criminalité. Les conclusions de ces méta-analyses sont sans appel : la vidéosurveillance ne diminue pas la délinquance, sauf dans certains lieux délimités ou clos, tels des parkings. Elles contredisent les études réalisées sans méthode rigoureuse, toutes peu fiables, à l’instar de celles produites aujourd’hui encore en France (voir l’encadré page 24). Quels sont les ingrédients d’une étude fiable de l’impact de la vidéosurveil­lance ? Et d’une méta-analyse ? Quelles conclusions ces études nous permettent-elles ou ne nous permettent-elles pas de tirer sur l’impact de la vidéosurveillance ? Telles sont les questions que nous allons examiner ici.

Des études plus scientifiques

C’est aux États-Unis, il y a une vingtaine d’années, que la criminologie a pris un nouvel essor, tant par la diversification des études – étude des propensions individuelles à commettre un délit, des facteurs contextuels, de l’action policière ou des peines infligées – que par l’amélioration des méthodes utilisées, inspirée de la science médicale et des études cliniques. Les études cliniques évaluent les effets des traitements selon des protocoles expérimentaux rigoureux : le sexe, l’âge, les antécédents médicaux, la condition sociale des patients sont pris en compte, ainsi que la taille des échantillons de patients ; des études comparant des groupes recevant ou non un traitement, ou selon différents dosages, sont menées.

En criminologie, les pouvoirs publics américains ont encouragé une telle approche. Différents organismes universitaires ont diffusé de nouvelles normes, qui sont aujourd’hui indispensables pour réaliser les synthèses quantitatives des études criminologiques. La Campbell Collaboration, un consortium scientifique international qui promeut les études d’impact – telles celles de l’impact de la vidéosurveillance sur la délinquance –, a ainsi indiqué qu’il ne fallait inclure dans les synthèses que les études situées au niveau 3 de « l’échelle pour une méthode scientifique » réalisée par l’Université du Maryland, en Floride : ces études répondent à un certain nom­bre de critères de rigueur, telles la mesure des mêmes variables avant et après une intervention, la prise en compte du contexte et des effets concurrents, la comparaison des sujets traités avec ceux qui ne le sont pas (voir l’encadré page 22). Cette échelle de mesure de la qualité permet de sélectionner les études pouvant être retenues et intégrées dans les méta-analyses.

Une méta-analyse commence par recenser toutes les études expérimentales (pu­bliées ou non), puis retient celles qui atteignent le niveau 3 de l’échelle du Maryland. La taille de l’effet statistique observé est associée à chaque étude : dans le cas de la vidéosurveillance, cette grandeur statistique mesure l’importance de la baisse ou de la hausse de la délinquance associée à l’installation de caméras dans un lieu donné, pour une étude donnée. Les études sont classées en fonction de la taille de l’effet. Toutes les variables susceptibles d’intervenir dans ces études sont prises en compte (le type de lieu vidéosurveillé est-il un parking, une rue ? A-t-on identifié les effets concurrents, tel l’éclairage ?). On peut ainsi connaître la taille de l’effet pour certaines sous-populations étudiées (par exemple les parkings vidéosurveillés).

Les deux méta-analyses obte­nues jusqu’à présent selon ces critères – l’une en 2002, l’autre en 2005 – sont britanniques. Ce n’est pas un hasard : depuis 20 ans, les décideurs publics prônent une approche de la criminalité « fondée sur des preuves », et de nombreux investissements financiers et intellectuels ont été réalisés dans ce sens. Les deux méta-analyses ont été financées par le Home Office, centre de décision et d’analyse des politiques de sécurité. Toutefois, contrairement au ministère de l’Intérieur qui tient ce rôle en France, il n’a pas fait produire les études par ses propres services internes (voir l’encadré page 24).

L’effet dépend des lieux et des délits

La première méta-analyse couvre 46 études menées aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Parmi elles, 22 ont été jugées d’une qualité suffisante. Les données de 18 d’entre elles ont pu être entrées dans la méta-analyse. Neuf études indiquent une baisse de la délinquance dans les zones vidéosurveillées par rapport à celles qui ne le sont pas, mais les neuf autres ne retrouvent pas cet effet (voir la figure 1). Les auteurs ont montré que l’efficacité de la vidéosurveillance pour dissuader la délinquance varie suivant les lieux et les délits. D’un côté, les cinq études qui portent sur les rues de centres-villes, les immeubles d’habitation (et non les espaces autour des immeubles) dans les quartiers de type hlm et les quatre études dans les transports publics montrent respectivement peu (moins de deux pour cent) ou pas de réduction significative du niveau de délinquance imputable aux caméras : l’usage des caméras affecte peu la fréquence des violences physiques. De l’autre côté, huit études ciblant des parkings montrent une réduction de 41 pour cent des effractions ou vols de voitures (la neuvième n’est pas interprétable).

Il s’agit là d’une conclusion simple, mais importante : d’une part, elle n’exclut pas les bénéfices de l’utilisation des caméras et, d’autre part, elle prouve qu’on n’obtient pas un effet quel que soit le problème à régler. En d’autres termes, la caméra n’est pas un « médicament universel ». Notons cependant que les effets concurrents n’étaient pas toujours pris en compte dans les études, en partie en raison de leur ancienneté. En outre, la période pendant laquelle les caméras ont opéré n’était pas toujours suffisante pour pouvoir parler d’un effet bénéfique durable (quatre des études portent sur une période inférieure ou égale à six mois).

La méta-analyse de 2005 présente plusieurs améliorations. Elle porte sur 13 des 352 projets d’équipement décidés par le Home Office lors de la seconde phase du programme lancé en 1998 par le gouvernement. Toutes les zones étudiées sont urbaines, situées à trois kilomètres au plus du centre d’une agglomération. La plupart des projets portent sur des centres-villes et des quartiers d’habitation, souvent d’habitat social. De plus, le travail prend en considération des traits du système de vidéosurveillance lui-même (nombre de caméras, fonctionnement de la salle de contrôle des images – les données sont-elles surveillées 24 heures sur 24 ? La salle est-elle en liaison continue avec la police ? –, etc.). Par exemple, on sait que les systèmes de vidéosurveillance passés au crible comportaient de 8 (pour les zones d’habitation) à 600 caméras (pour un en­semble de 60 parkings).

Enfin, l’impact sur la délinquance est mesuré 6, 12 et 24 mois avant et après l’installation, et pour chaque délit répertorié : vol à l’étalage, vol avec effraction, agression, viol, etc.

Sur les 13 projets, 6 indiquent une réduction de la délinquance, mais pour 4 d’entre eux, cette réduction n’est pas significative après comparaison avec les zones témoins. Sept indiquent une augmentation de la délinquance sans que la vidéosurveillance en soit logiquement la cause. Dans les zones tests, le nombre de vols à l’étalage, de délits liés aux stupéfiants ou de violences aux personnes ne diminue pas plus que dans les zones témoins.

Il n’est pas établi que la vidéosurveillance soit toujours efficace dans les parkings une fois contrôlés les autres paramètres (éclairage, réparation des clôtures) : sur les sept études retenues concernant les parkings, seules deux se sont avérées statistiquement significatives. Dans l’une, l’efficacité est explicable par d’autres variables. Elle est en revanche avérée dans l’autre, consacrée à Hawkeye, une zone de Londres qui couvre 58 parkings. Dans cette zone, l’effet attendu est observé dans certains parkings : alors que la délinquance contre les véhicules baisse de 10 pour cent dans les zones de contrôle, elle décroît respectivement de 80 pour cent et 62 pour cent dans les parkings à taux de vols haut et moyen. Ces variations sont significatives. En d’autres termes, la vidéosurveillance n’est efficace que dans les parkings où le risque de vol est important.

Une population pas plus rassurée

L’étude britannique de 2005 traite aussi des perceptions de la population. Elle montre que les personnes interrogées après l’installation de caméras se sentent tout autant en insécurité qu’auparavant, mais un peu moins inquiètes des violations des libertés publiques ; elles sont en outre moins souvent « contentes ou très contentes » de l’installation des caméras et pas plus souvent prêtes à sortir dans les lieux vidéosurveillés ; enfin, elles sont bien moins nombreuses à croire que la « délinquance diminuera » et que « la police répondra plus rapidement aux incidents ». Il n’en reste pas moins que la population est majoritairement favorable à la vidéosurveillance : l’étude du Home Office indique plus de 70 pour cent de satisfaction. En France, bien que les mesures utilisées ne soient pas standardisées d’un pays à l’autre, des études éparses donnent des résultats voisins : en 2008, selon l’Institut Ipsos, 78 pour cent des personnes interrogées sont « très favorables » ou « favorables » au développement de la vidéosurveillance. Cela dit, si on leur donne le choix, les sondés préfèrent avoir des policiers dans la rue plutôt que des caméras.

Des résultats similaires ont été obtenus en Australie, par deux études menées avec des méthodes proches de celles des analyses britanniques. Ces études comparent des lieux vidéosurveillés et non surveillés, d’une part, dans les zones au bord de mer de deux localités australiennes entre 1995 et 2002 et, d’autre part, dans quatre gares ferroviaires situées sur la même ligne. La variation du nombre total de délits commis, de vols ou d’autres atteintes à la propriété, telles les dégradations, est la même dans les zones surveillées et dans les zones non surveillées. La population a plutôt bien accueilli les caméras : entre 57 et 72 pour cent des individus sondés (selon les lieux) se disent contents que la vidéosurveillance soit utilisée.

La vidéosurveillance déplace-t-elle la délinquance dans d’autres zones ? La question est souvent soulevée par ses opposants. La littérature scientifique indique que ce phénomène est observable, mais elle n’est pas en mesure de dire si cela annule l’effet positif global lorsqu’il se produit. Dire qu’une partie des délits est déplacée ne signifie pas pour autant qu’aucun n’a été évité. Aux États-Unis, il est estimé que certains délits, tels les vols à main armée dans la rue, ne sont pas déplacés, tandis que d’autres, tel le vol de voitures, le sont. Dans la méta-analyse britannique de 2005, les auteurs concluent que des déplacements ont été observés dans les «zones tampons» qui entourent la zone test, dans un cas pour les cambriolages, dans un autre pour les vols de voiture. Mais, pour les six études qui enregistrent une baisse de la délinquance en zone test (réelle ou non par rapport aux zones témoins), une seule décrit un déplacement de la délinquance générale.

La vidéosurveillance ne fait pas baisser la délinquance

La principale conclusion des travaux les plus rigoureux disponibles est ainsi que la vidéosurveillance est inefficace pour dissuader la délinquance en général ou pour réduire le sentiment d’insécurité. Ce point est notable, car les études de piètre qualité (exclues des méta-analyses) montrent des résultats bien plus positifs que les études fiables (voir l’encadré ci-dessus). Il apparaît aussi que la population perd ses illusions quant aux bénéfices de la vidéosurveillance après qu’elle a commencé à opérer. En revanche, il semble que les caméras soient efficaces dans les lieux bien délimités ou clos, avec des points d’accès et de sortie bien déterminés. La densité de couverture en caméras influe sur l’efficacité tant qu’elle ne dépasse pas le point de saturation (au-delà d’une certaine densité, il n’y a plus d’amélioration). Enfin, malgré son désillusionnement, la population reste majoritairement favorable à l’usage de la vidéosurveillance. Les bénéfices politiques de l’installation de caméras n’ont pas fait l’objet d’études scientifiques répétées, de sorte qu’il est impossible de savoir si la popularité d’un maire ou d’un ministre de l’Intérieur en sort renforcée aux yeux de la population.

Les études disponibles nous renseignent sur l’impact de la vidéosurveillance telle qu’elle a été utilisée sur différents délits. En somme, elles nous disent : on a fait comme cela, et voici les résultats obtenus. Elles constituent une contribution importante, qui doit être distinguée des appréciations, de l’impression personnelle ou de l’injonction politique, toutes de l’ordre du jugement. Pour autant, les études expérimentales ne nous renseignent pas sur ce que pourrait apporter la vidéosurveillance si elle était utilisée différemment (par exemple avec plus d’agents pour visionner des images d’une meilleure qualité, ou avec des caméras centrées sur d’autres cibles). La méthode expérimentale décrit les effets enregistrés. Elle n’est pas un jugement de valeur sur une technologie ou ses potentialités. Elle ne se confond pas non plus avec l’analyse du cadre légal ou éthique. »

Quand les consultants se saissient de la sécurité urbaine

 

Laurent Bonelli    – Groupe d’analyse politique de l’université de Paris-Ouest-Nanterre –

« imaginons un instant que les responsables des principales industries pharmaceutiques soient chargés des diagnostics médicaux des patients. On hurlerait à la collusion d’intérêts et l’on soupçonnerait, sans doute avec raison, que leurs préoccupations commerciales priment sur les logiques strictement thérapeutiques. Or, c’est l’ambition de nombre de consultants en sécurité urbaine pour ce qui concerne la lutte contre la délinquance et les petits désordres urbains. » La suite ici : sécurité -les experts -Bonnelli

Chambre Régionale Cour des Comptes la vidéosurveillance à Nice

La Chambre Régionale de la Cours des Comptes de Provence Alpes Côte d’Azur à rendu en 2010 un rapport d’observations définitives sur la politique de sécurité de la commune de Nice. Nous présentons ici l’extrait de ce rapport qui traite de la vidéosurveillance à Nice.  Cliquez ici : CRC Nice vidéosurv 2010

Visdéosurveillance : la Chambre Régionale des comptes pas convaicue

Le rapport d’observations définitives publié en mai 2010 par la Chambre Régionale des Comptes Rhône-Alpes, après analyse des activités de sécurité publique de la ville de Lyon , contient un volet « Vidéosurveillance » dont les conclusions sont très réservées quant à l’efficacité réelle du dispositif mis en place par les édiles lyonnais. Pour accéder à la partie « vidéosurveillance » du rapport, cliquez ici : CRC Lyon extraits vidéosurv

 

Vidéosurveillance, qui vous surveille ?

« Que fait un agent de vidéosurveillance devant son écran? Principalement, il s’ennuie… assure le journaliste Jérôme Thorel qui se base sur une étude faite par le sociologue Tanguy Le Goff, chercheur de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile-de-France (IAU-IDF). La conclusion du journaliste est sans appel : exiger une cellule psychologique dans chaque CSU [Centres de surpervision urbaines] de France et de Navarre. »
Jérôme Thorel  – Le blues du vidéosurveillant.
Pour accéder à l’article, cliquez ici : Qui vous surveille ?

Vidéosurveillance : une étude qui ne prouve rien

Par Tanguy LE GOFF * et Eric HEILMANN **

La vidéosurveillance a montré son « efficacité en matière de prévention de la délinquance » affirme un récent rapport du ministère de l’Intérieur1. On ne peut que se réjouir qu’il y ait enfin, en France, une tentative de mesurer l’efficacité de la vidéosurveillance.

Pour accéder à l’article :  Cliquez ici

* Sociologue à l’IAU île-de-France, chercheur associé au CESDIP. Courriel : tanguy.le-goff@iau-idf.fr
** Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Dijon.

Vidéo-Surveillance – Quand le Royaume Uni fait marche arrière.

La vidéo-surveillance a connu ces dernières années un grand développement dans toute la France et plus particulièrement à Nice, qui s’enorgueillit de détenir le record de France de caméras par habitant. Les attentats du mois de janvier ont été mis à profit par la municipalité de Nice pour élargir un peu plus le domaine d’intervention des caméras, en particulier en intégrant les caméras privés des offices HLM dans le système de la commune, déjà tentaculaire. Or, si il y a bien un point sur lequel tous les observateurs semblent d’accord, c’est l’inutilité de la vidéosurveillance pour la prévention des attentats, de la grande criminalité, de la violence de rue.

Le Royaume Uni, qui a été à la pointe du développement de la vidéo-surveillance, semble désormais faire marche arrière ; comme toujours très pragmatiques, les britanniques considèrent que le bilan coût/avantages de la vidéo-surveillance est extrêmement défavorable. Combien de décennies faudra-t-il à nos édiles pour faire une analyse rationnelle de l’utilité réelle de ces dispositifs, par ailleurs potentiellement  dangereux pour les libertés publiques ? En effet, en France comme au Royaume Uni, l’absence de contrôle dans lequel les dispositifs de vidéo-surveillance fonctionnent est un grand sujet d’inquiétude.

BBC News magasine  « The end of de CCTV era ? »       Cliquez ici pour accéder à l’article en anglais : The end of de CCTV era

Vous trouverez ci-dessous une traduction in extenso de l’article, proposée par la section de Nice de la LDH

La fin de l’ère de la vidéosurveillance?

Il y a vingt ans, le gouvernement a soutenu une expansion importante du réseau de video-surveillance – aujourd’hui les aides fincières sont coupés et les caméras éteintes. Le boom de la video-surveillance au Royaume-Uni est-il terminé ? demande Rachel Argyle.

En 1994, le gouvernement conservateur a pris l’initiative de la création d’un groupe de Partenaires contre le crime, avec (Home Secrétairele Ministre de l’intérieur Michael Howard qui déclarait qu’il était « absolument convaincu que la video-surveillance avait un rôle essentiel à jouer pour aider à détecter, réduire la criminalité et à condamner les criminels ».

L’année suivante, le fond au développement de la video-surveillance était crée pour encourager les autorités locales à mettre en place des systèmes de surveillance – le Ministère de l’Intérieur et les collectivités locales ont investi 120 millions de livres sterling en systèmes de vidéosurveillance dans les trois ans suivantes.

Le Royaume-Uni possède l’un des plus grands réseaux de télévision en circuit fermé au monde. Mais comme les municipalités, à court de liquidités, recherchent des mesures de réduction des coûts, l’efficacité de publique est sous le feu des projecteurs.

La police de Dyfed Powys s’est mise à faire des coupes sombres dans le budget de la video-surveillance à la suite d’un rapport indépendant rédigé par Christopher Salmon, Commissaire anti-criminalité. Les forces de surveillance en question couvre plus de la moitié du pays de Galles et un peu moins d’un demi-million d’habitants.

Le rapport a constaté que la suppression du système de video-surveillance de la région de Powys n’a pas entraîné une hausse importante de la criminalité ou de comportements anti-sociaux et il y a peu de preuves qui démontrent que la video-surveillance dissuade les crimes violents ou liés à l’alcool. Salmon déclare que la police orientera l’utilisation des fonds la où la population le souhaite, avec « plus de policiers municipaux à faire des rondes sur le terrain ».

Ces réductions ne sont pas un cas isolé.

La Cornouaille a été l’une des premières régions à réduire leur budget de video-surveillance- de £ 350,000 dès Avril 2011 . La municipalité du Denbighshire arrêtera son financement et réalisera une économie de £ 200 000 à partir de 2016-17. Les autorités municipales d’Anglesey ont abandonné leur système complètement l’an dernier, mais après l’offre d’une fiducie caritative, le système sera maintenant géré par les cinq conseils municipaux de l’île. A Derby, 48 caméras du centre-ville vont peut-être se voir coupées.

D’autres secteurs réduisent leurs systèmes. 250 caméras de vidéo-surveillance de Birmingham ne seront plus contrôlées 24 heures sur 24 et des gestionnaires de vidéosurveillance, à travers tout le pays, risquent le chômage.

La police se retrouve sous les mêmes contraintes financières. La Police de la vallée de la Tamise pourrait faire passer son financement de la video-surveillance pour la ville de £ 225 000 par an, à moins de £ 50 000 en 2018.

Une demande d’accès à l’information faite par la député travailliste Gloria de Piero, en Mars 2013, a constaté qu’un conseil municipal sur cinq avait réduit le nombre de caméras de vidéosurveillance dans les rues depuis la dernière élection.

Les partisans de la video-surveillance soulignent le succès des caméras dans l’identification des suspects dans des affaires criminelles très importantes, comme l’assassinat du jeune James Bulger par Robert Thompson et Jon Venables, l’attentat du Marathon de Boston, les attentats à Londres le 7 Juillet 2005 et les émeutes en Grande Bretagne en 2011. La video-surveillance a joué un rôle crucial dans la chasse des terroristes Charlie Hebdo.

Mais les militants contre la video-surveillance estiment qu’elle viole la vie privée et s’ interrogent sur son efficacité.

« Le taux de criminalité de la Grande-Bretagne n’est pas significativement plus faible que dans des pays comparables qui n’ont pas de système de surveillance aussi développé», dit Emma Carr, directeur de « Big Brother Watch »

Le groupe de pression se félicite que ces restrictions budgétaires puissent amener les autorités municipales à vérifier de plus près si la video-surveillance fonctionne vraiment. Carr ajoute: « Les municipalités qui font le choix de réduire le nombre de caméras de vidéosurveillance inefficaces, et d’orienter les ressources là où la sécurité de la population est plus nessécaire, doivent être félicitées. »

Charles Farrier, porte-parole des opposants à la video-surveillance, est un peu plus inquiet. « La réduction des coûts présumés conduit à une restructuration plutôt qu’à une réduction réelle de la vidéosurveillance. » Il souligne que les coupes budgétaires vont voir d’autres partenaires venir à la rescousse. « Souvent, les solutions proposées sont de fusionner les salles de contrôle ou de retirer les caméras des mains des collectivités locales démocratiques pour les mettre dans les mains des entreprises privées guidées par un souci de rentabilité, » a-t-il ajouté. Il appelle à un débat public urgent.

Pour certaines personnes, il existe une alternative plus humaine à la lutte contre la criminalité qu’une augmentation des cameras de video-surveillance. Farrier croit que la solution réside dans les conclusions d’un rapport de 2013 intitulé Grande-Bretagne Forteresse, publié par la New Economics Foundation, qui a constaté que les résidents dans des lotissements à Londres ont estimé que « connaître les gens » était la clé pour créer la confiance.

« Nous n’avons plus de gardiens de parc, de receveurs d’autobus, de « dames-pipi » -, des gens présents pour aider à cimenter la communauté. Maintenant, nous donnons cette responsabilité à une machine. En effet, au lieu de dépenser tout cet argent sur des caméras de surveillance, nous devrions le dépenser en stratégies qui ont fait la preuve de leur efficacité et encourager plus de gens à marcher, parler, et résoudre des problèmes dans leurs propres communautés.

Il ya eu beaucoup de recherches sur l’efficacité de la vidéosurveillance comme outil de lutte contre la criminalité pendant les années de grand boom de ce système.

Une étude intitulée les effets sur la criminalité de la video de surveillance en circuit fermé (2008) ont constaté que les systèmes de vidéosurveillance ont peu d’effet sur la dissuasion des délits , autres que le vol de voiture.

Un autre rapport, de l’Ecole de la police en 2013, intitulé « Ce qui marche, en un mot: Les effets de la vidéosurveillance sur la criminalité » dit que la video-surveillance  agit pour une petite part, néanmoins statistiquement significative, dans la réduction de la criminalité, et ajoute que tout en réduisant le vol de et dans les véhicules, il n’a pas d’impact sur les niveaux de la criminalité violente.

Le psychologue britannique Gordon Trasler a souligné qu’une raison à cela pourrait être que la video-surveillance est efficace pour des infractions «instrumentales» (tels que les délits contre les biens ou les cambriolages), mais pas si efficace pour les infractions «expressives» comme les crimes violents lorsque le comportement est impulsif et ne laisse pas de temps à la prise de décision rationnelle.

Selon e chef de la police adjoint Mark Bates du syndicat nationale des commissaires de police chargé de la gestion de la video-surveillance,les caméras jouent un rôle important dans la protection de nos communautés. « Nous avons une vraie responsabilité dans la réflexion à mener avant de prendre toute décision de se désinvestir de la video-surveillance dans le cadre d’enjeux liés à une politique d’austérité.

En 2009, 95% des cas de meurtre traités Scotland Yard ont utilisé des images de vidéosurveillance comme preuve.

Alors, combien de caméras nous observent effectivement? La réponse est difficile à évaluer. La British Security Industry Association (BSIA) estime qu’il y a entre 4.000.000 et 5.900.000 caméras.

Pauline Norstrom, président du BSIA, dit que la pression budgétaire sur le secteur public et les coupes financières sur la video-surveillance ne signifient pas un déclin plus important au Royaume-Uni. « Alors que les budgets du secteur public ont mis la pression sur ses caméras, celles du secteur privé sont maintenant plus nombreuses de l’ordre de 70 pour une, » dit-elle. « Elles sont la clé dans la dissuasion des activités criminelles et dans l’obtention de condamnations. »

Alors que les systèmes publics peuvent être confrontés à des baisses, il y a une hausse des caméras privées et à usage domestique.

C’est un sujet de préoccupation pour Tony Porter, le commissaire du gouvernement chargé de la video- surveillance. Dans son rapport annuel, il dit: « Le coût des systèmes de vidéosurveillance à usage domestique est minime maintenant que les détaillants vendent des systèmes de vidéosurveillance HD pour un peu plus de £ 100. » Plus de 80% des questions qu’ils reçoivent portent sur l’utilisation de la vidéosurveillance dans un cadre domestique.

Si les conseils municipaux continuent à diminuer, consolider ou externaliser leurs services de vidéosurveillance, les groupes de campagne « Non à la video-surveillance » craignent qu’il ne soit de plus en plus difficile de contrôler ceux qui doivent rendre des comptes. Mais Porter, qui a pris, en mars dernier, la responsabilité de Commissaire indépendant chargé du système video-surveillance espère que la prise en compte des nouvelles orientations pour la video-surveillance nationale , enjeux dans les prochains mois, contribuera à clarifier les choses.

Il semble que le Royaume-Uni continuera à être étroitement surveillé pendant encore un certain temps.

Nice – Adresse aux élus de l’opposition républicaine –

 

 

GABARIT-LDH-SECTIONS

Adresse aux élus de l’opposition républicaine du conseil municipal de la commune de Nice

« La démocratie pure peut engendrer la démagogie. Le remède à cette pente dangereuse c’est notre république #colloquejihad » – M. Christian Estrosi – Twitter 24/01/2015

Nous venons de vivre des événements d’une grande violence, lesquels vont sans doute influencer, pour une longue période, la vie politique de notre pays et notre ville, gérée depuis des lustres par la droite la plus réactionnaire, en ces moments de grande inquiétude, a su montrer à la hauteur de sa réputation. Nous en voulons pour preuve la grand messe médiatique organisée dans la précipitation, sous couvert d’un conseil municipal extraordinaire, par notre maire, lequel, à l’évidence, se contenterait d’un république, certes démocratique, ma non troppo.

Dans un élan d’une unité républicaine bien factice, vous avez voté, à notre grand étonnement, quatorze délibérations, certaines insignifiantes, d’autres sans doute utiles et plusieurs potentiellement dangereuses pour les libertés publiques.

Vous avez voté, comme un seul homme, la délibération n°1-3 « Commerces de proximité, politique en matière de fermetures tardives » alors que saviez parfaitement que cette délibération vise de façon à peine voilée les petits commerces maghrébins du centre ville. Vous avez voté cette délibération « Considérant les attentats perpétrés en France les 7, 8 et 9 janvier 2015 » suscitant la suspicion et jetant l’opprobre sur une population harcelée en permanence et de longue date, par des arrêtés municipaux, sans qu’il y ait eu à cette époque l’ombre d’une menace terroriste. Vous avez prêté votre concours à cette basse manœuvre.

Vous avez voté la délibération n° 0.4 «Décision de principe d’autoriser la transmission d’images de caméras privées au centre de supervision urbain.» alors que vous saviez parfaitement que ce sont principalement les immeubles gérés par l’office HLM qui sont visés par cette délibération, que l’objectif réel est d’intensifier le contrôle policier qui s »exerce sur les populations « des quartiers », que malheureusement, ce ne sont pas les caméras vidéo qui vont arrêter les terroristes déterminés et aguerris.

Bien que cette mesure ne soit envisageable que « lors de circonstances faisant redouter la commission imminente d’une atteinte grave aux biens ou aux personnes », une fois ces circonstances disparues, il sera, dans la pratique, impossible d’en contrôler leur stricte application. Si vous avez eu connaissance d’un quelconque rapport ou observation de la fantomatique « Commission départementale de la vidéoprotection » des Alpes Maritimes, nous vous serions reconnaissants de nous en communiquer une copie. En tout état de cause, la Cour des Comptes, dans son rapport sur « L’organisation et la gestion des forces de sécurité publique » (7/7/2011), indiquait : « Le taux d’élucidation des faits de délinquance de proximité n’a pas davantage progressé dans les circonscriptions de sécurité publique (CSP) équipées de caméras de vidéosurveillance de la voie publique que dans celles qui ne le sont pas. ». Ne pensez-vous pas que les 400.000€ consacrés à ces caméras supplémentaires auraient pu être investis plus efficacement pour favoriser l’insertion sociale de jeunes désœuvrés, potentiellement victimes des leaders jihadistes qui nous menacent ? La menace est réelle, nous le savons tous ; mais, favoriser la mise en place des dispositifs liberticides est une très mauvaise réponse à cette menace.

Vous avez voté la délibération n° 8.1 « Mesures complémentaires de sécurité pour les moyens informatiques d’accès à internet mis à disposition du public.» enjoignant aux fournisseurs d’accès à internet (F.A.I) de bien vouloir respecter la loi, comme si ces grandes entreprises internationales avaient attendu les rodomontades médiatiques de M. le maire de Nice pour appliquer la loi ; moins comique, mais plus grave : vous avez autorisé notre maire d’opérer sur les moyens mis à disposition du public, sans plus de précisions, « une surveillance particulière de l’utilisation de ces moyens par le public. ». Ainsi donc, la surveillance des communications internet déjà exercée par les services compétents de l’Etat serait dédoublée, en parallèle, par une surveillance exercée sous les ordres du maire.

Nous savons parfaitement que la menace terroriste plane toujours sur notre ville, notre région, notre pays. L’Etat et c’est son rôle, a pris toute une série de mesures pour garantir la sécurité des citoyens, même si certaines sont, à nos yeux, contestables ; pour autant, nous n’avons pas connaissance que d’autres collectivités territoriales aient pris, dans la précipitation et le battage médiatique, comme cela a été fait à Nice, certaines mesures dont l’objectif réel est le contrôle purement policier de la population par des élus locaux.

Nous sommes atterrés : vous avez prêté votre concours zélé à cette triste comédie.

« il y a d’autres façons de porter atteinte à l’Etat de droit que par la guerre ou l’état d’exception. Au nom de la prévention du terrorisme », la législation de ce pays « utilise » déjà « des pratiques dérogatoires d’évitement du juge judiciaire au profit de pouvoirs de plus en plus larges confiés à l’administration ou à la police, constituant un véritable régime de police qui ne dit pas son nom ».

Mireille Delmas-Marty, professeure honoraire au Collège de France, citée par O. Le Cour Grandmaison politologue.