Université d’automne 2013 : Europe, quelle sortie de crise ?

De crise de la dette en renoncement économique, l’Europe inquiète. Les choix des politiques économiques et sociales conduites par les gouvernements européens font perdurer voir augmenter le chômage, l’exclusion sociale, les inégalités territoriales.

Entre les objectifs proclamés – protection sociale de haut niveau, universalité des droits fondamentaux – et la réalité des politiques européennes – harmonisation par le bas, barrages croissants aux migrations et insécurisation des travailleurs migrants -, l’écart s’accroît cruellement.

Quant aux institutions européennes, elles ne permettent pas aux citoyens de peser réellement sur les choix essentiels, alors que les lobbies représentant les intérêts des grandes entreprises et de la finance inspirent des politiques trop souvent incompatibles avec un développement durable et solidaire.

L’intégration européenne, dont l’image était naguère positive dans l’esprit des peuples, est ainsi devenue un repoussoir qui encourage les replis identitaires et menace à terme l’existence même de l’Union.

L’Europe, les Européens, le monde entier méritent mieux !

L’élargissement, puis la crise de la finance dérégulée, ont considérablement accru les inégalités entre Etats membres : il faut renforcer les solidarités territoriales et sociales, donc non pas contracter mais augmenter les ressources budgétaires de l’Union.

L’Europe sociale, Arlésienne des débats électoraux, devrait se traduire concrètement sur le terrain par le principe d’un salaire minimum dans chaque Etat membre, par une protection sociale de base pour tout résident de l’Union, par le développement des services sociaux d’intérêt général européen.

Les politiques inspirées par le fantasme d’une « Europe forteresse », absurdes sur un continent qui a un besoin vital d’apport migratoire à moyen terme, devraient céder la place à un accompagnement de migrations qui constituent pour l’Union un enrichissement dans tous les sens du terme.

Le « géant commercial nain politique » devrait devenir un acteur mondial à la mesure de son poids et de ses responsabilités, un « éclaireur » du développement durable et un promoteur des valeurs proclamées par l’Union : respect du droit international dans le règlement des conflits ; répression des crimes de guerre par la juridiction pénale internationale ; accès aux biens publics mondiaux pour les populations qui en sont encore privées.

L’Union devrait, enfin, donner l’exemple du respect de la démocratie et des droits fondamentaux qu’elle exige des Etats candidats à l’adhésion : la démocratisation du « gouvernement réel » de l’Union ne peut plus attendre ; l’institution d’une citoyenneté européenne de résidence, le renforcement de la garantie des droits des justiciables, de leur vie privée et de leurs données personnelles ne sont pas moins urgents.

Refondation, renouveau, démocratisation ? Au-delà des mots, deux conceptions s’affrontent : celle d’une Europe de progrès social et de paix et celle d’une Europe réduite à un marché unique régi par les règles de la concurrence. La crise atteint un stade qualitatif qui remet profondément en cause le vivre ensemble et risque de porter la fragmentation sociale à un niveau irréversible. A défaut d’une alternative démocratique, sociale et écologique, prenant les droits au sérieux, d’autres forces capteront la déception et la colère populaire pour les mettre au service de l’exclusion, de la haine et de l’injustice.

Cette Europe de justice, de paix et de fraternité, cette Europe que nous voulons et qui reste à construire, doit être l’enjeu des élections européennes décisives du printemps 2014. Débattons-en, mobilisons les citoyennes et les citoyens européens, pendant qu’il en est encore temps.

PROGRAMME

Samedi 23 novembre, matin : « Aux défis des disparités croissantes »

(1) L’Europe est-elle encore un projet pouvant rassembler les citoyennes et citoyens du continent européen ?

Dans l’espace économique et monétaire aux règles toujours plus prégnantes, les inégalités de développement entre pays posent la question de l’accès aux droits économiques et sociaux tandis que les politiques d’austérité, l’accentuation de la précarité et la défiance à l’égard du politique alimentent frustrations, désespoir, tentations nationalistes et xénophobes. Quelles politiques, quelles articulations des responsabilités entre institutions mettre en débat pour refonder une Europe démocratique, au développement solidaire ?

(2) Quels fondements aux ressorts de l’extrême droite ?

La radicalisation nationaliste, raciste et xénophobe se manifeste d’un bout à l’autre de l’Europe ; quels sont les liens entre ces émergences, à la fois distinctes mais convergentes en terme de rejet des valeurs humanistes et de solidarités, dont le projet européen doit être porteur ?

Samedi 23 novembre, après-midi : « Aux défis du(des) monde(s) »

(3) Quels échanges et quelles solidarités au sein de l’Europe ?

L’Europe est un espace de migration qui devrait perdurer avec les évolutions démographiques. Comment les politiques publiques assurent le respect de la dignité et des droits fondamentaux des migrants, en référence notamment à la Convention internationale sur les droits des travailleurs migrants ? Comment s’émanciper des logiques d’ « Europe forteresse » ? Quels contenus doivent être portés par les « politiques de voisinage » à l’est et au sud et par les coopérations et solidarités internationales, tant dans les pays qu’au niveau de l’Union européenne ?

(4) Quelles solidarités entre les États membres, tant en période de crise que de façon pérenne ?

La construction de l’Union européenne implique qu’elle soit un espace de cohésion et de solidarité entre États membres, appuyé sur un budget conséquent. Les traités européens successifs ont construit la notion de « cohésion économique, sociale et territoriale ». Or, sur fond de crise systémique, les négociations actuelles sur le futur budget de l’Union font pour la première fois apparaître une diminution du budget en proportion du PIB européen, traduisant l’affrontement de deux conceptions : une Europe de progrès social et de paix ; une Europe réduite à un marché unique régi par les règles de la concurrence non régulée par l’objectif d’un bien-être partagé. Comment faire avancer une Europe au développement durable et solidaire ?

Dimanche 24 novembre, matin : « Aux défis de l’égalité »

(5) Quelles propositions et mobilisations pour garantir un renouveau démocratique ?

Quels sont les principaux enjeux et leurs articulations pour un renforcement de la démocratie alors que la crise économique et sociale se traduit par des reculs : citoyenneté européenne (incluant la citoyenneté de résidence) ; équilibre « horizontal » des pouvoirs (délibérant, gouvernant, juridictionnel…) ; séparation « verticale » des pouvoirs (entre les niveaux local, régional, national et européen, voire mondial) ; modalités de responsabilité politique des gouvernants et de contrôle citoyen ?

(6) Quel avenir pour la justice et les droits en Europe ?

La question d’un espace judiciaire européen reste en suspens tandis que des champs importants, tels par exemple la protection de la vie privée et des données personnelles, nécessitent la mise en place de garanties importantes et vérifiables. Dans le même temps, la Cour européenne des droits de l’Homme est l’objet d’une tentative de remise en cause par une partie des Etats membres. Quel projet commun peut être élaboré afin de relancer l’idéal de justice en Europe ?

Dimanche 24 novembre, après-midi : « Aux défis de l’avenir »

(7) Table ronde conclusive : Quelle voie européenne dans un monde dont le « commun » se tisse d’affirmations singulières et plurielles ?