Paris, le 10 février 2017
Madame Anne Hidalgo, maire de Paris
Monsieur Michel Cadot, préfet de Police
Monsieur Jean -Francois Carenco, préfet de la région Ile de France, préfet de Paris
Copie à:
Madame Hélène Bidard, adjointe au maire de Paris, lutte contre les discriminations
Monsieur Gilles Clavreuil, préfet délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme (DILCRA)
Monsieur Jacques Toubon, défenseur des droits
Madame la Maire, Messieurs les Préfets,
Dans notre courrier du 16 janvier dernier resté sans réponse de votre part, nous vous faisions part de nos plus grandes inquiétudes au sujet de deux bidonvilles parisiens menacés d’une expulsion dès le 22 février et regroupant quelques 500 personnes dont 150 à 200 enfants. Depuis notre interpellation, des éléments nouveaux sont intervenu set viennent renforcer notre demande de surseoir à ces expulsions, à savoir :
- L’application à travers la loi « Egalité et citoyenneté » du 27 janvier 2017 des dispositifs permettant à des personnes et familles vivant en bidonville, dans des tentes, cabanes, abris de fortune de pouvoir jouir des mêmes droits que les locataires et occupants de squats face aux expulsions. Cette avancée législative donne un cadre juridique nouveau permettant de bénéficier de la protection de la trêve hivernale et ce, quel que soit son type d’habitat avant l’exécution de l’expulsion,
- L’application du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 4 janvier 2017 qui accorde un délai de six mois afin de réaliser un diagnostic social et son accompagnement tel que prévu par la circulaire du 26 août 2012.
- L’application du vœu adopté le 30 janvier dernier par le Conseil de Paris exprimant trois demandes que nos associations reprennent et appuient, à savoir :
- Que la Ville de Paris demande à la Préfecture de surseoir à l’expulsion et d’engager de manière immédiate des pourparlers avec la ville et la région pour commencer à loger des familles dans les semaines qui viennent ;
- Que les familles présentes sur ces bidonvilles fassent l’objet d’un relogement et de diagnostics sociaux approfondis pour que les solutions proposées soient adéquates et durables ;
- Que les projets d’habitats concertés soient mis en œuvre le plus rapidement possible par la ville de Paris.
- Cette dernière demande vient renforcer celle formulée dans le courrier qui vous a été adressé par les familles du bidonville du boulevard Ney et signé par 146 personnes. Il exprimait, entre autres, que les engagements pris le 17 février 2016 par le Conseil de Paris concernant le « projet d’habitat concerté pour les familles Roms dans Paris devant être réalisé au plus tard en 2017 » soient tenus.
Eté comme hiver, expulser des habitants de leur domicile sans proposition alternative de relogement pérenne et adapté aggrave leur précarité et ne fait que déplacer le problème.
Nous souhaitons donc le rappeler dans ce courrier : chaque expulsion sans solution durable est un drame humain pour les familles qui sont forcées de trouver, en urgence, d’autres abris de fortune sur un nouveau terrain pour éviter de dormir dans les rues. Les expulsions à répétition les fragilisent encore davantage, socialement et économiquement, empêchant également un accès durable à l’école pour les enfants. Non seulement ces expulsions n’apportent aucune solution, mais de plus elles coûtent plus cher à terme que des solutions de constructions innovantes.
Nous souhaitons également réaffirmer à travers ce courrier que des solutions immédiates, transitoires ou pérennes, existent.Architectes et coopératives de l’économie sociale et solidaire en proposent depuis plusieurs années. Des terrains existent à Paris comme en Ile de France pour les mettre en œuvre. Des financements européens, gérés par la Région Ile de France, existent également.
Les volontés sont là, l’évolution du cadre juridique et législatif permet d’organiser un cadre de réflexion nouveau et un cadre prospectif différent. Osons dans la recherche de solutions nouvelles et innovantes. A ce titre et pour donner suite à notre courrier, nous demandons qu’une réunion de concertation entre les représentants de toutes les parties concernées puisse se tenir à votre initiative.
Vous comprendrez que nous rendions cette lettre publique.
Nous vous prions de croire, Madame la Maire, Messieurs les Préfets, en l’expression de notre haute considération.
Marie Montolieu, présidente fédération MRAP Paris
Gilles Affaticati, président fédération LDH Paris