En Argentine face au président d’extrême-droite qui impose un programme ultralibéral de destruction des droits démocratiques et sociaux la grève générale se prépare pour le 24 janvier

Publié le 29 décembre 2023 sur lemonde.fr avec AFP

Argentine : appel à la grève générale en janvier contre le programme de réforme ultralibéral du nouveau président

La principale centrale syndicale du pays a appelé à une mobilisation devant le Parlement le 24 janvier pour protester contre les premiers décrets et projets de loi de Javier Milei.

Manifestation contre le décret d’urgence du président argentin, Javier Milei, à La Matanza, dans la province de Buenos Aires, le 28 décembre 2023. LUIS ROBAYO / AFP

Pour la première fois en quarante ans de démocratie en Argentine un président doit faire face à une grève générale un mois et demi seulement après son arrivée au pouvoir.

Hector Daer, secrétaire général de la CGT − principale centrale syndicale d’Argentine, qui revendique 7 millions d’affiliés − a annoncé, jeudi 28 décembre en conférence de presse, une grève générale pour protester contre les premiers décrets et projets de loi de la présidence ultralibérale du nouveau président, Javier Milei.

Une mobilisation est également prévue devant le Parlement, qui examinera alors les projets de loi dérégulateurs « qui vont à l’encontre de toute la société » et concentrent « tous les pouvoirs publics » sur le président, a déclaré M. Daer. Cette mobilisation, a poursuivi le dirigeant syndical, vise en particulier un « décret de nécessité et d’urgence » publié le 20 décembre par le gouvernement, ouvrant la voie à une dérégulation massive de l’économie, mais au « caractère illégal et inconstitutionnel ».

« Ce décret s’en prend aux droits individuels des travailleurs, aux droits collectifs, à un système de santé universel et solidaire, et à un nombre incalculable de sujets qui constituent notre pays », a insisté M. Daer. « En moins d’une semaine, ils transforment l’Argentine et nous ramènent à l’Argentine pastorale », a-t-il dénoncé.

« Loi omnibus »

Javier Milei, ultralibéral et « anarcho-capitaliste », comme il se décrit lui-même, a depuis son investiture, le 10 décembre, publié un décret de dérégulation de l’économie à travers l’abrogation de quelque 300 normes. Un décret techniquement en vigueur à partir de vendredi, mais sous réserve d’approbation par le Parlement.

Il a aussi poursuivi son élan « libéral » en déposant mercredi au Parlement un ensemble détaillé de projets ou de modifications de lois qui affectent une multitude de domaines de la sphère publique et privée. Sont concernés, pêle-mêle, aussi bien le fiscal que l’électoral, la journée de travail, le calcul des retraites, le contrôle et les sanctions concernant les manifestations, ou l’instauration d’un « divorce express ».

Ce vaste train de réformes, dit « loi omnibus », doit lui aussi être examiné par le Parlement, et les avis juridiques divergent quant au temps effectif − des mois, voire des années selon certains − qu’il faudrait pour examiner les quelque 600 articles.

Une autre interrogation porte sur l’issue même du processus parlementaire en ce qui concerne certaines dispositions polémiques, avec un Parlement sans majorité absolue dans aucune des deux chambres. Et où le parti de Javier Milei, la Libertad Avanza, n’est que la troisième force − même s’il peut compter avec l’appui du bloc de centre droit, le deuxième par son importance.

Manifestations et recours en justice

La mobilisation n’a toutefois pas attendu, avec trois manifestations en un peu plus d’une semaine à Buenos Aires, et plusieurs recours en justice déposés contre le décret d’urgence du 20 décembre. Dont certains par la CGT elle-même, mercredi.

Sont d’ores et déjà effectives, et avec un effet immédiat sur le porte-monnaie des Argentins, une première série de mesures d’austérité, annoncées aux premiers jours de la présidence Milei. En particulier la dévaluation de plus de 50 % du peso, la devise nationale, et la baisse dès le début de janvier de subventions aux transports et à l’énergie, se traduisant en une hausse immédiate de tarifs vouée à affecter le quotidien de plusieurs millions d’Argentins.

L’objectif pour le gouvernement est la réduction drastique du déficit budgétaire chronique de l’Argentine, engluée dans une inflation à 160 % sur un an.

Le Monde avec AFP