La lettre n°82

Au sommaire :

– l’édito du Président de la section

– le concours des écrits

– la fête du chiffon rouge

– le racisme à l’université

– le droit de manifester

– les gilets jaunes du jaJnisy

– la campagne contre l’enfermement des familles au CRA

– la vidéosurveillance et la protection des données personnelles

– le billet de Françoise

– la protection des lanceurs d’alerte

Bonne lecture !

LA LETTRE N°80

Au sommaire :

  • Jeunesse et droits de l’Homme,
  • La vie de la section: rapport d’activité, rapport moral,
  • Réforme de la justice : Est-ce vraiment de justice dont il s’agit?,
  • 10 décembre: journée des droits de l’Homme,
  • Parcoursup: des soupçons de discrimination,
  • « C’est pas du luxe » Horizon Théâtre à Avignon,
  • Le poids des mots,
  • La démocratie outil des droits de l’Homme.

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Videosurveillance

« JE N’AI RIEN À CACHER ! »

POURQUOI FAUT-IL LIMITER LA VIDÉOPROTECTION MUNICIPALE ?

David Gonzalez, LDH Metz

 

Dans son récent essai sur la vidéosurveillance1, le sociologue Laurent Mucchielli, que nous accueillerons à Metz cet automne, rend compte de l’expansion fulgurante de la vidéosurveillance municipale en France depuis la présidence de Nicolas Sarkozy. Ce sont plus de 100 000 caméras qui surveillent la voie publique en France aujourd’hui2. Cette explosion de la vidéosurveillance de l’espace public n’a pas suscité une réponse massive de la société. La contestation a été animée par des associations telles que la LDH, qui a agi à travers son groupe de travail national sur les technologies de l’information et ses sections locales comme celles de Nice, Toulon ou Dijon, très actives face à la vidéosurveillance3. Le sujet préoccupe également la LDH Metz, qui vient de lancer un groupe de travail local sur les libertés et le numérique4. La contestation contre la vidéo­surveillance par le monde associatif est un garde-fou nécessaire, au vu des faibles moyens octroyés aux organismes chargés de veiller au respect des droits dans ce domaine (commissions départementales de vidéoprotection, CNIL)1.

Avec l’aimable autorisation de Yacine

Les ligueurs et les sympathisants de la LDH (parmi lesquels se comptera probablement le lecteur) sont presque unanimement opposés à la vidéosurveillance, parfois de façon féroce. En effet, comme le dit Mucchielli, la critique associative de la vidéosurveillance est « souvent assez dogmatique à sa façon »1. À mon avis, cette opposition émane d’un sentiment d’outrance face à l’intrusion des caméras dans notre quotidien, et ce sans notre consentement préalable. Mon outrance a cependant été incomprise par mon ami Georges, qui ne fréquente pas les associations et que je soupçonne de ne pas voter toujours à gauche : « La vidéosurveillance ne me pose aucun problème, m’a répondu Georges, moi je n’ai rien à cacher »5. J’ai eu du mal à contrer la réplique de Georges : « Dis-donc, David, quand tu laisses ta voiture dans un parking, n’es-tu pas bien content qu’il y ait des caméras?»6. La vidéosurveillance semble donc utile et appropriée dans des cas bien encadrés. Mais quels arguments puis-je donner à Georges en faveur de la limitation de l’étendue de la vidéosurveillance ?

 

Le livre de Mucchielli enquête sur l’efficacité de la vidéosurveillance et conclut qu’elle est inefficace pour lutter contre la délinquance, et encore plus contre le terrorisme. Mucchielli dénonce des dépenses faramineuses pour des résultats très limités. Par exemple, la vidéosurveillance à Marseille a coûté environ 17 millions d’euros d’investissements entre 2012 et 2016 et plus de 1,5 million annuel en fonctionnement. Elle a fourni des images utiles pour la résolution d’environ 1% des enquêtes menées par la police nationale, soit une affaire élucidée par caméra installée et par an.1 Comme le remarque Mucchielli, les investissements en vidéosurveillance auraient été plus efficaces ailleurs, par exemple pour recruter des policiers, ou pour réduire les inégalités à l’origine de la délinquance que la vidéosurveillance tâche de réprimer. Pour Mucchielli, la vidéosurveillance est un « bluff technologique » qui peut être démonté par des arguments quantitatifs et d’efficacité.

L’argumentation de Mucchielli est percutante. Elle a d’ailleurs le mérite d’être quantitative, basée sur la rationalité des dépenses publiques, et donc exprimée avec les codes du discours politique actuel. Malgré la force de cette argumentation, il me semble que le fond de la contestation contre la vidéosurveillance est ailleurs. Si la dystopie décrite par Orwell dans « Big Brother » nous révolte, ce n’est pas en raison d’une utilisation inefficace de l’argent public. Par ailleurs, la pertinence des arguments quantitatifs basés sur l’efficacité peut évoluer. Par exemple, l’exploitation des enregistrements est aujourd’hui limitée par la disponibilité des ressources humaines pour visionner les vidéos, mais pourrait demain être automatisée grâce aux algorithmes de reconnaissance d’images. Cependant, même si la vidéosurveillance devenait plus efficace à l’avenir, notre sentiment de révolte s’appuierait toujours sur des fondements de la société de droit. J’en identifie deux : le respect à la vie privée et l’équilibre des pouvoirs essentiels à la démocratie.

« Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée »

article 12 illustré par Elpuentea

C’est l’article 12 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Certes, la société dans son ensemble se soucie moins de la vie privée aujourd’hui qu’autrefois. Beaucoup sont ceux qui divulguent aisément des informations personnelles sur Internet, ce qui leur permet de construire leur identité numérique et de développer des relations sociales d’un nouveau type. Cette indifférence de beaucoup pour la confidentialité de leur vie privée n’empêche pas que l’État se doit de faire respecter le droit de ceux qui y tiennent. Le développement massif de la vidéosurveillance, où chacun est souvent filmé dans l’espace public, est incompatible avec le droit à la vie privée. Je souligne que l’atteinte à la vie privée peut en effet avoir lieu dans l’espace public, par exemple en traitant des images révélatrices de la vie ou familiale, ou des convictions politiques ou religieuses. Il est donc nécessaire de limiter la vidéosurveillance pour la réconcilier avec les droits de l’Homme.

Avec l’aimable autorisation de YACINE

Comment définir des limites à la vidéosurveillance pour la rendre compatible avec le droit à la vie privée ? Il me semble que la réponse doit suivre l’esprit du Règlement européen sur la protection des données (RGPD). En paraphrasant l’article 5 du RGPD, les images captées par les systèmes de vidéosurveillance devront servir à « des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement d’une manière incompatible avec ces finalités ». Les images collectées devront être « adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées (minimisation des données) ». A la lumière de ces principes, l’installation de caméras dans un parking avec un risque significatif de vols et dégradations serait en principe légitime. Par contre, la vidéosurveillance généralisée de la rue, que de nombreuses communes françaises développent aujourd’hui, est excessive et attentatoire aux droits de l’Homme.

Surveillance et démocratie.

Ma pensée revient à mon ami Georges, qui n’a toujours rien à cacher. Je l’entends déjà répondre que mon argument sur le droit à la vie privée manque de pragmatisme, et que tant mieux si l’État se donne les moyens d’arrêter tout malfaiteur et de punir toute « incivilité »7. Cependant, même Georges tient à la démocratie. Or la démocratie n’est pas un système acquis ; au contraire, elle dépend d’un équilibre de pouvoirs et de contre-pouvoirs qu’il faut préserver. Ainsi, l’État contrôle les citoyens, mais les citoyens doivent aussi pouvoir contrôler l’État. Mais quel contrôle avons-nous sur la bonne utilisation de ces réseaux de caméras ? Comment pourrions-nous nous assurer qu’ils ne sont pas et ne seront pas utilisés à des fins illégitimes, telles que la surveillance illégale des opposants politiques, des journalistes ou des syndicalistes ? Comment empêcher que, une fois mis en place, ces moyens de surveillance de masse puissent être détournés par un futur gouvernement à tendance encore plus autoritaire ?

Richard Stallman, célèbre informaticien américain et pionnier du logiciel libre, nous prévient que «l’information, une fois collectée, sera utilisée abusivement »8. Pour Stallman, « le niveau actuel de surveillance dans la société est incompatible avec les droits humains »8. Il appelle à réduire le niveau de surveillance en dessous d’un « niveau maximal tolérable ». Il faut donc maîtriser les réseaux de vidéosurveillance, qui sont aujourd’hui démesurés, et limiter leur utilisation à des cas justifiés par le risque identifié. Pour Stallman, la surveillance devient intolérable quand elle « interfère avec le fonctionnement de la démocratie : là où les lanceurs d’alerte (comme Snowden) vont probablement être arrêtés »8. En effet, l’existence d’opposants politiques et de dissidents est nécessaire à la démocratie. Eux, ils ont parfois des choses à cacher, et ce dans l’intérêt de tous.


1             Laurent Mucchielli, « Vous êtes filmés ! Enquête sur le bluff de la vidéosurveillance ». Armand Colin, 2018.

2             Auxquelles s’ajoutent plus d’un million de caméras des établissements privés ouverts au public, tels que les banques et les commerces (voir L. Mucchielli, op. cit.).

3             Voir par exemple l’excellente étude sur la vidéosur­veillance dans leur ville faite par la section de Nice de la LDH : https://goo.gl/gY8eq3

4             Si ce groupe vous intéresse, vous pouvez prendre contact avec l’auteur de cet article : dgonzalez@gougon.fr

5             Je fais ici référence au film documentaire « Nothing to hide » de Marc Meillassoux (2017), publié sous licence libre et accessible sur Internet, qui illustre comment nous avons tous des choses à cacher.

6             En fait j’ai réussi à contrer cet argument de Georges, puisque je n’ai pas de voiture.

7             La dénonciation des « incivilités » peut parfois avoir son origine dans l’intolérance croissante de la population, comme le discute Mucchielli dans le chapitre 6 de son livre (op. cit.).

8             « Stallman : How much surveillance can democracy withstand? » Publié sur wired.com le 14 octobre 2013.

La Lettre 77

Pour télécharger la LETTRE 77

Au sommaire :

  • Les comptes rendus de la dernière assemblée générale
  • 7 ans de présidence – G Grethen
  • Projet de loi asile immigration – H Leclerc
  • La santé dans tous ses états – G Grethen
  • Liberté de la presse – Perquisitions judiciaires – Grace FAVREL
  • La plus belle déclaration d’amour : les 70 ans de la DUDH – Françoise MAIX
  • Le rapport Spinetta
  • Les écrits de la fraternité

BIG DATA ET LIBERTÉS DU NUMÉRIQUE

Chaque mois, la section LdH de Metz vous invite à explorer et à débattre sur un sujet de droit. En attendant la prochaine session en janvier sur le thème de la santé, nous vous proposons une réflexion sur un point clé de notre discussion de novembre « Big data et libertés du numérique ».

Le terme big data désigne un volume de données tel qu’il devient impossible pour l’esprit humain de l’appréhender. Dans le cadre de la réflexion sur les droits de l’Homme, nous nous sommes intéressés aux données numériques sur les individus.

Ces données proviennent de sources variées : sé­quence et durée de visite des pages web, applications des smartphones, réseaux sociaux, objets connectés, etc. Elles sont traitées par des algorithmes dans l’idée générale de déduire une probabilité de comportement de l’individu à partir des données et comportements connus sur les autres individus.

La récolte de données massives sur nos habitudes met sur le devant de la scène le droit à la vie privée.

Des expériences montrent que lorsqu’un individu se pense observé, surveillé, il s’autocensure. Le droit à la vie privée est donc fonda­mental pour maintenir une sphère de liberté réelle1.

Mais dans quelle mesure la récolte et le traitement de don­nées, réalisés par des algo­rithmes et non par des indivi­dus, provoque-t-elle un senti­ment de sur­veillance ? Entre ceux qui les ressentent viscéra­lement comme une intrusion et ceux qui les considèrent inof­fensifs, le clivage rend le débat difficile.

Nous en déduisons trois enjeux principaux.

Le premier enjeu est de traitement des données. Ce manque d’information amène à sous-estimer la portée des données récoltées. Le documentaire Nothing to Hide2 montre ainsi com­ment un individu qui considé­rait « ne rien avoir à ca­cher » change de position après que des inconnus ac­quièrent une connaissance intime de ses habitudes et de ses pensées à partir de données apparemment mi­neures.

Au-delà du malaise occasionné par l’intrusion d’un inconnu dans nos pensées, la potentialité de consé­quences concrètes telles que des restrictions de liberté ou des augmentations de coût d’assurance3 amènerait chacun à censurer son comportement. Ceux qui ne ressentent pas d’atteinte à leur vie privée sont proba­blement ceux pour qui les récoltes de données ne re­présentent pas de risque aujourd’hui.

Auront-ils toujours la même position lorsque leur assurance augmentera sur la base de critères connus par les algorithmes seuls ?

Étant donné l’évolution de la place des données dans la société, une réflexion et un encadrement ap­propriés s’imposent dès aujourd’hui.

Qu’il s’agisse du jugement de nos pensées ou des risques encourus, ce sont les individus des courants minoritaires – minorités reli­gieuses, lanceurs d’alertes, ac­tivistes, qui sont les premiers à pâtir des atteintes au droit à la vie privée1. Déjà, l’utilisation des données numériques dans le cadre de la sur­veillance im­pacte une partie discriminée de la popula­tion. Le droit doit res­ter le droit de tous et pas d’une partie de la population.

En conclusion, une conscience individuelle des implications de nos pratiques numériques4 et une lé­gislation respectueuse des libertés5 sont indispen­sables pour préserver un droit à la vie privée pérenne et universel. Les législations sont en cours de construction et chacun peut les influer en s’informant et en participant aux initiatives citoyennes telles que celle menée par la Quadrature du Net dans le cadre de la loi e-privacy5.

Cécile Gouget- LDH Metz

Conseils de lecture

  1. Intervention en anglais sous-titré français de Glenn Greenwald, journaliste qui a participé à la publication des révélations d’Edward Snowden : https://www.ted.com/talks/glenn_greenwald_why_privacy_matters
  2. Documentaire « Nothing to Hide », par Marc Meillassoux et Mihaela Gladovic
  3. Séminaire LdH « Big data, algorithmes et risques de discriminations, l’exemple de l’assurance » : https://www.ldh-france.org/big-data-algorithmes-risques-discriminations-lexemple-lassurance/
  4. www.lececil.org: fiches pratiques analysant les outils numériques et leurs alternatives

5 Analyse des lois passées et à venir : https://www.laquadrature.net/fr/eprivacy_bilan_pe ;

 

Ne pas s’habituer

Thomas Kennington 1885

« Un premier SDF mort à cause du froid » titrait le journal local ce 3 décembre 2017, cela faisait juste quelques lignes dans les faits divers.

La formulation choisie, précisant volontairement « un premier » laissait bien entendre, que d’autres personnes allaient mourir de froid dans nos rues au cours de l’hiver…

A cause du froid… certes oui, sans doute au sens physiologique du terme « quand une personne meurt de froid, son métabolisme se ralentit, son cœur bat moins vite, sa respiration s’atténue, la personne n’a plus de défense, puis tout s’arrête » explique ce médecin du Samu.

Il est devenu fréquent, pour ne pas dire banal, de voir des personnes recroquevillées dans des abris de fortune, sur un matelas, ou sans matelas du tout, dehors, au coin des rues, au centre de nos villes, ou en périphérie, quand les températures sont négatives… Alors, seulement à cause du froid, ou aussi à cause de ce qu’on appelle pudiquement aujourd’hui la grande précarité, pour ne pas dire la misère, l’exclusion sociale ?

Est « habituel » ce qui est constant, ordinaire, courant, selon la définition du dictionnaire, un geste habituel devient vite une habi­tude, un regard aussi !

Serions-nous devenus des habitués de l’inacceptable ?

Il arrive parfois qu’une image bouscule les consciences, ce fut le cas en 2015, quand le monde entier a découvert la photo glaçante du petit Aylan, enfant syrien retrouvé mort sur une plage…

L’attitude de l’Europe a-t-elle changé face aux réfugiés ?

Il arrive parfois qu’un appel au secours comme ce cri de colère poussé par l’abbé Pierre en février 1954, dérange lui aussi les consciences… il faisait moins quinze cet hiver là ! Le lendemain, France Soir titrait : « per­sonne n’a couché dehors à Paris la nuit dernière »

Mais après l’indignation, les jours passent, d’autres événements prennent place dans l’actualité, pourtant, aujourd’hui comme hier, la mi­sère et l’exclusion sont et restent une atteinte to­tale aux Droits de l’Homme ;

Selon le témoignage du Collectif ‘Les Morts de la Rue’, « Nous apprenons chaque jour des décès de personnes dites SDF, âge moyen, 49 ans, espérance de vie nationale, 80 ans »

Contrairement à une idée reçue, c’est durant toute l’année que des personnes sans domicile fixe meurent dans la rue. Les associations humanitaires font tout pour venir en aide aux plus démunis, mais elles savent aussi que la vraie réponse a pour nom la Justice !

Lutter contre l’exclusion sociale, contre la pauvreté, c’est vouloir vivre sans la crainte du lendemain, c’est avoir un logement, vivre de son travail et non dépendre de l’assistance, cette lutte passe par une remise en cause totale de la manière dont fonctionne notre société.

On entend parfois dire autour de nous : « Aidons en priorité ceux qui sont ici, les autres, on verra après » comme si nous devions établir une grille de la misère… »

Réfugiés, Migrants, Sans-papiers, Sans-abri, d’ici où d’ailleurs, refusons cette concurrence entre les personnes en détresse, quel que soit son statut, son origine, un Homme reste un Homme, sans papiers, sans domicile, mais pas sans Droits.

L’année prochaine, le 10 décembre 2018, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme aura 70 ans, certes, ce texte reste l’idéal commun à atteindre pour tous les peuples, mais au présent, il demeure porteur de tous les combats à mener dans les enjeux contemporains qui sont les nôtres.

 

« Où commencent les Droits Universels après tout ? Ils commencent près de chez soi, en des lieux si proches et si petits qu’on ne peut les voir sur aucune carte du monde. Ils constituent pourtant l’universel personnel de chacun : le quartier où l’on vit, l’école ou l’université que l’on fréquente, l’usine, la ferme ou le bureau où l’on travaille. C’est là que chaque homme, chaque femme et chaque enfant aspire à l’équité dans la justice, à l’égalité des opportunités, et à la même dignité sans discrimination. Si dans ces lieux les Droits sont dénués de sens, ils n’en auront guère davantage ailleurs. Si chacun ne fait pas preuve du civisme nécessaire pour qu’ils soient respectés dans son entourage, il ne faut pas s’attendre à des progrès à l’échelle du monde »

Françoise Maix Pour la section de Metz

article paru dans le N° 76 de la Lettre Mosellane

La lettre n°76

Pour télécharger la lettre

au sommaire :

  • En finir avec les violences faites aux femmes
    • la convention d’Istanbul
    • la loi du 4 août 2014
    • le plan de mobilisation contre les violences faites aux femmes
  • Où en est-on de l’antiracisme à l’école?
  • Big data et libertés du numérique
    • nos pratiques du numérique, le droit à la vie privée, les libertés…
  • Ces états qui n’en sont plus vraiment – le pouvoir des multinationales
  • Les écrits de la fraternité
  • Ne pas s’habituer : « un premier SDF est mort de froid… »
  • Accueil des migrants, avec le réseau de solidarité des associations messines :
    • dénoncer les propos du secrétaire général de la Préfecture
    • lettre aux députés afin de se donner les moyens pour éviter un camp à Blida en 2018
  • Combat d’aujourd’hui et traces du passé colonial : le Rif marocain

Pour la liberté – François SUREAU

Pour la Liberté, répondre au terrorisme sans perdre raison

François Sureau (Tallandier)

Plaidoyer pour la liberté : interview de François Sureau sur France Culture

Le 31 août 2017 la Grande Table deuxième partie

Notre système de droits n’a pas été fait seulement pour les temps calmes mais pour tous les temps. Nous dispo­sons depuis longtemps d’un système pénal qui permet de punir très lourde­ment les auteurs d’attentats abjects. Mais jusqu’à aujourd’hui l’autorité judiciaire était la gardienne des liber­tés publiques.

L’état d’urgence et la loi de sécuri­té intérieure et de lutte contre le terro­risme qui va bientôt être promulguée pour le rem­placer, sans rien apporter à la lutte contre le terro­risme vont à l’encontre de ce principe en offrant une gamme inquiétante de possibilités à l’imagina­tion administrative, sans contrôle à priori du juge judiciaire.

Le 13 février 2017 les parlemen­taires ont rétabli le délit de consulta­tion de sites djiha­distes que le conseil constitutionnel avait déclaré non constitutionnel. On ne peut pas être jugé pour un délit qui consiste à s’in­former. On pourra bien sur plaider sa bonne foi, mais on su­bodore que cela sera plus facile à plaider si l’on s’ap­pelle Sureau que si on s’appelle Mou­loud. Ce n’est pas en ôtant du cerveau du citoyen le trouble de pen­ser que l’on peut espérer triompher de tous ceux qui précisément veulent qu’on ne pense pas. Or, si vous avez autorisé une fois l’état à vous dire ce que vous devez lire, c’est fini. C’est un point de dégradation civique ja­mais atteint. C’est la fin de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

La rédaction d’autres ar­ticles de la loi en préparation parlent d’atteinte à l’ordre pu­blic sans plus de précision, de préparer la commission de l’infraction jointe à l’intention de passer à l’acte… Depuis mille ans il n’y a jamais eu de condamnation sur des inten­tions : avant tout acte criminel, il n’y avait rien. Derrière le vague des faits déclencheurs, l’impré­cision des critères l’impossibil­ité des contrôles effectifs c’est toute une so­ciété qui bascule sous la coupe de corps d’état qui avaient pour but de lui procurer la sé­curité et qui loin de lui servir se la su­bordonnent.

Article paru dans la Lettre Mosellane N°75

SCOLARISATION des ENFANTS

 

  • Le droit d’accéder à l’école

En cette rentrée scolaire, tous les jeunes de moins de 16 ans ne seront pas accueillis dans des établissements scolaires  …

Surtout ceux   dont les familles demeurent dans des campements comme celui de  Blida. Ils sont plus d’une centaine.

Leur statut de primo – arrivants ou de demandeurs d’asile leur donne droit à une scolarité. Tous les textes l’attestent  que ce soit ceux de la convention internationale des Droits de l’enfant,  du Conseil de l’Europe, de l’UNESCO, de notre propre constitution, de notre  code de l’Education, complétés par de nombreuses circulaires dont celles- ci :

  • « l’éducation est un droit pour tous les enfants résidant sur le territoire national, quel que soit leur nationalité, leur statut migratoire ou leur parcours antérieur » circ. N° 2014- 088
  • « Le fait que la famille soit hébergée de manière provisoire sur le territoire d’une commune est sans incidence sur le droit à scolarisation »Circ. 2012-142
  • « Les préfets doivent prendre en charge, sans délai et avec un souci de continuité les enfants présents dans les campements et veiller aux conditions matérielles : le transport, les cantines, les fournitures scolaires » circ. du 26 août 2012

La réalité n’a pas grand-chose à voir avec ce que  recommandent ces textes !

  • L’information des familles

Elle repose entièrement sur les associations et les collectifs de bénévoles. Rien n’est fait au niveau de la préfecture pour organiser cette scolarisation. Ce sont les bénévoles  qui recensent, expliquent, fournissent les listes à la mairie, à l’inspection académique, contactent les collèges, le CIO, fournissent du matériel scolaire  ….

Bref, qui font le travail des institutions !

Rappelons que le code de l’Education prévoit qu’à l’occasion de la rentrée scolaire , le maire dresse la liste de tous les enfants résidant dans sa commune et soumis à l’obligation scolaire , soit tous les enfants des deux sexes , français et étrangers ,âgés de 6 à 16 ans .

  • De graves difficultés de solarisation pour les jeunes de 12 à 16 ans

Si l’inspection académique et la mairie de Metz sont en train d’organiser  l’accueil des 42 enfants d’âge élémentaire, reste la situation problématique des 12 / 16 ans.

Ils sont une quarantaine qui  parlent très peu le français et qui n’ont jamais été scolarisés en France.

Si on se réfère à la réglementation, dès leur arrivée en France, les élèves allophones doivent bénéficier d’une évaluation de niveau faite par le CIO, puis être orientés vers une classe correspondant à leurs besoins.

Là encore, la réalité est moins souriante …

Le CIO mettra certainement des semaines, voire des mois pour mener ces évaluations …Quant à l’affectation ensuite dans un établissement scolaire, elle peut  intervenir plusieurs mois après l’évaluation …

En somme, ces jeunes ne seront certainement plus à Metz quand on pourra (peut – être) leur proposer une classe…

En attendant, ils n’ont qu’à tuer le temps avec un vieux ballon dans la boue ou la poussière du campement, puis à se serrer  à 4, 5 ou 6 sous une tente Décathlon !

«  L’école pour tous est un droit fondamental pour chacun »

Agissons pour que cela soit vrai en signalant à la LDH Metz tout manquement à ce droit que vous pourriez être amené à constaer !

Hélène Leclerc, secrétaire de la LDH Metz

Article publié dans le numéro 75 de la lettre mosellane des droits de l’Homme