Rapport d’Amnesty International sur les violences policières et la violation des droits humains pendant le confinement

Publié sur francebleu.fr le 24 juin 2020

Dans un rapport publié ce mercredi, l’ONG Amnesty International dénonce des « violences policières » et une « tendance préoccupante aux préjugés racistes dans la police », mis en évidence pendant les confinements notamment en France. Sa présidente en France répond aux questions de France Bleu Paris.

Amnesty International lance ce mercredi un appel à lutter « de toute urgence contre la triple menace que représentent la discrimination, l’utilisation illégale de la force et l’impunité de la police »L’ONG publie un rapport sur les pratiques policières pendant le confinement dans douze pays d’Europe, dont la France. Elle affirme « mettre en évidence une tendance préoccupante aux préjugés racistes au sein des forces de police, également soupçonnées d’exercer un racisme institutionnel« . 

Les chercheurs d’Amnesty International assurent que « les violences policières et les inquiétudes liées au racisme institutionnel ne sont pas nouvelles, mais la pandémie de COVID-19 et le contrôle coercitif de l’application des mesures de confinement qui en découlent ont révélé leur ampleur ».

Invitée de France Bleu Paris ce mercredi matin, la présidente d’Amnesty International France assure que « force est de constater que l’état d’urgence et le contrôle du respect des mesures sanitaires se sont malheureusement accompagnés de violations des droits humains. » Cécile Coudriou cite des discriminations envers « des populations déjà vulnérables ou marginalisées, comme les personnes migrantes et réfugiées ou Roms », et des « discriminations liées à l’origine ethnique, notamment dans des quartiers plus défavorisés »

Le rapport relève ainsi qu’en Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France métropolitaine, où « une part élevée des habitants est noire ou d’origine nord-africaine, le nombre de contraventions pour infraction au confinement a été trois fois plus élevé que dans le reste du pays ». Et ce, « alors que le préfet disait lui-même que le confinement était bien respecté », souligne Cécile Coudriou sur France Bleu Paris. 

Dans la mesure où il y a une contradiction entre la déclaration du préfet et le fait qu’il y a eu trois fois plus d’amendes, on peut s’interroger sur le fait qu’il y ait eu discriminations » en Seine-Saint-Denis – Cécile Coudriou, présidente d’Amnesty International France 

Dix vidéos tournées en Ile-de-France analysées

L’ONG a aussi analysé 15 vidéos de contrôles de police ou d’interpellations en France pendant le confinement contre le coronavirus, dont dix en Ile-de-France. Selon le rapport, l’usage de la force « n’était justifié dans aucun des cas, car dans aucune de ces situations, les personnes ne représentaient une menace apparente pour l’intégrité physique des policiers ou autres ».

Cécile Coudriou précise : « il y a un croisement des violations. Il y a la question de la discrimination, mais aussi ce qu’on appelle l’usage illégitime de la force : une forme d’escalade dans la réponse par la répression, plutôt que de chercher au contraire à désamorcer la situation », poursuit la présidente d’Amnesty International France. 

Une réforme en profondeur 

Parmi les images analysées : celles de l’arrestation de Samir, 27 ans, Egyptien résidant en France depuis dix ans. Il s’était jeté dans la Seine pour fuir la police, à l’Ile-Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) le 26 avril. Sur la vidéo, on entend les policiers proférer des propos racistes. « Les policiers ont heureusement été suspendu immédiatement – ce qui est rare, trop rare », salue Cécile Coudriou.

Amnesty International France appelle _« à une réforme qui permette de lutter plus efficacement contre l’impunité_. C’est la troisième violation : le manque d’accès à la justice quand des personnes sont victimes de discriminations. Il y a trop peu souvent des cas où cela amène justement à des poursuites judiciaires et à des sanctions. » 

La stratégie du déni, que ce soit par rapport aux violences policières ou aux discriminations, ne peut plus fonctionner. Aujourd’hui, il faut regarder en face la réalité, sans pour autant généraliser. Il faut vraiment trouver des solutions » – Cécile Coudriou, présidente d’Amnesty International France