A Perpignan après l’expulsion de trois familles albanaises, le comité de soutien aux sans-papiers-66 dénonce la violence de l’opération

De nouveau à Perpignan les services de l’état expulsent des familles albanaises déboutées du droit d’asile, dont un enfant arrêté à la sortie de son école. Les parents d’élèves et le comité de soutien aux papiers-66 (dont la LDH-66 fait partie) dénoncent ces pratiques abusives voire illégales.

Publié sur lindependant.fr

Expulsions de familles albanaises à Perpignan : militants et parents d’élèves s’insurgent

Ce mardi 28 janvier 2020, les services de l’État ont fait expulser trois familles albanaises déboutées du droit d’asile et résidant à Perpignan. Le comité de soutien aux sans-papiers dénonce, à l’instar des délégués de parents d’élèves d’écoles accueillant des enfants albanais, la « violence » de l’opération.

L’opération a débuté ce lundi 27 janvier. Ce jour-là, neuf familles albanaises déboutées du droit d’asile et résidant en région Occitanie se sont vues expédiées au centre de rétention de l’aéroport de Toulouse. Avant d’être renvoyées dès le lendemain matin dans leur pays d’origine, via un vol spécialement affrété pour l’occasion. Trois familles assignées à résidence à Perpignan faisaient partie du voyage.

Selon le comité de soutien aux sans-papiers des Pyrénées-Orientales, les trois familles en question auraient été transférées à Toulouse dans la foulée d’un des deux pointages hebdomadaires à la police aux frontières (PAF) qu’elles doivent effectuer avec leurs enfants (même s’il y a classe…). La préfecture des Pyrénées-Orientales, selon qui tout s’est déroulé « dans le calme », confirme.

Un traumatisme pour les enfants

Plus grave, selon le comité de soutien, en Lozère, l’enfant d’une des neuf familles expulsées d’Occitanie aurait été arrêté à la sortie de son école… Largement relayée sur Internet, la nouvelle attise encore les inquiétudes des Albanais du pays catalan.  « Une famille de Perpignan a même retiré son enfant de l’école », déplore le président départemental de la Cimade, Jacques Ollion, qui pointe du doigt « une politique de renvoi massif des Albanais ».

À l’instar de nombreux parents, le comité de soutien dénonce les conséquences des expulsions d’enfants pour leur entourage local. « Le lendemain d’une expulsion, je ne vous raconte pas l’ambiance dans la classe, quand les enfants s’aperçoivent qu’un de leurs camarades a disparu », soupire Jacques Ollion.

Mobilisation ce jeudi devant l’école Duruy

Plusieurs délégués de parents d’élèves d’écoles perpignanaises où de petits Albanais sont scolarisés, acquiescent. « Ces enfants sont bien intégrés, plaide Zahira, une maman de l’école Duruy. Il y en a qui sont nés ici. En les envoyant en Albanie, on les déracine. Ils n’ont connu que la France ! »  

Afin de dénoncer ces pratiques, qu’ils jugent abusives, voire illégales, le comité de soutien et les parents d’élèves organisent ce jeudi 6 janvier, à partir de 17 heures, un rassemblement devant l’école Duruy.

Arnaud Andreu

Le Conseil d’État valide sans sourciller le fichage des mineur∙e∙s non accompagné∙e∙s

*
Communiqué de presse de la  CIMADE – 7 février 2020

Le Conseil d’État, dans une décision du 5 février, rejette le recours porté par nos organisations contre le décret du 30 janvier 2019 sur le fichier d’appui à l’évaluation de la minorité (AEM), refuse de reconnaître les atteintes portées aux droits des mineur·es non accompagné·es et fait ainsi primer la lutte contre l’immigration irrégulière sur les droits de l’enfant.

Un risque accru d’expulsions illégales de mineurs

En ne prenant pas en compte les principes essentiels de présomption de minorité et de droit au recours effectif, le Conseil d’État laisse toute latitude aux préfectures pour expulser des personnes qui devraient être présumées mineures tant que le juge des enfants ne s’est pas prononcé sur leur situation. Il considère que la protection des enfants étrangers contre les mesures d’éloignement prévue par la loi « ne fait pas obstacle à ce qu’une mesure d’éloignement soit prise par l’autorité administrative à l’égard d’une personne dont elle estime, au terme de l’examen de sa situation, qu’elle est majeure, alors même qu’elle allèguerait être mineure ».

Il entérine ainsi la possibilité pour l’administration d’expulser un∙e jeune qui demande protection en raison de sa minorité et de son isolement dès lors qu’un département l’a considéré⋅e comme majeur⋅e, le plus souvent à l’issue d’une procédure d’évaluation sommaire fondée sur des critères subjectifs. Et peu importe au Conseil d’État que le ou la jeune n’ait pas pu exercer de recours devant le juge des enfants. On sait pourtant que – dans certains départements – la moitié des mineur∙es qui saisissent ce juge voient finalement leur minorité reconnue.

Tout au plus, le Conseil d’État consent-il à évoquer la possibilité pour le juge administratif saisi d’un recours contre la mesure d’éloignement de surseoir à statuer quand il a connaissance d’une saisine préalable du juge des enfants mais seulement « si une telle mesure est utile à la bonne administration de la justice ». De même, il peut aussi décider de poser une question préjudicielle à l’autorité judiciaire mais uniquement « en cas de difficulté sérieuse ». Ces précisions ne constituent en rien des garanties contre le risque d’expulsion d’enfants en danger par l’administration.

Contrôler avant de protéger

Nos organisations constatent que – dans de nombreux territoires – l’application du décret a pour effet de laisser à la rue des enfants en demande de protection pendant toute la procédure en préfecture. Le Conseil d’État prend acte de cette réalité et rappelle à juste titre qu’« il incombe aux autorités du département de mettre en place un accueil provisoire d’urgence pour toute personne se déclarant [MNA], sans pouvoir subordonner le bénéfice de cet accueil [à la mise en œuvre de la procédure prévue par le décret] ».

Il vide toutefois de tout son sens le principe de l’inconditionnalité de l’accueil provisoire en précisant qu’une telle obligation s’applique « sous réserve des cas où la condition de minorité ne serait à l’évidence pas remplie ».

Des pseudo-garanties qui ne suffiront pas.

Le Conseil d’État précise que « la majorité de l’intéressé ne saurait être déduite de son seul refus de communiquer les informations » aux agents de la préfecture. Il rappelle également qu’il ne suffit pas qu’un∙e jeune apparaisse comme majeur∙e dans l’une des bases de données consultées en préfecture pour qu’il ou elle soit évalué∙e comme majeur∙e. Aussi utiles qu’elles soient, ces précisions ne suffiront malheureusement pas à préserver les mineur∙es d’un refus de protection arbitraire de la part de certains départements. Pour preuve, alors que le Conseil constitutionnel avait déjà pris soin de préciser ce point, nombreux sont les protocoles signés entre les conseils départementaux et les préfectures qui mentionnent « l’impossibilité [pour le jeune] de refuser de communiquer [ses données personnelles] à l’agent de préfecture habilité». La notice d’information actuellement distribuée aux jeunes reprend cet énoncé contraire aux textes.

Alors qu’environ 70 départements mettent déjà en œuvre ce dispositif et qu’un mécanisme d’incitation financière a été annoncé par le premier ministre, nos organisations sont extrêmement inquiètes du sort réservé à ces enfants en situation de grande vulnérabilité.

Nous constatons qu’ils sont de moins en moins nombreux à se rendre dans nos permanences. Globalement, leur état de santé se dégrade et les suspicions de cas d’exploitation augmentent. Autant de signes qui confirment nos craintes que ces enfants et adolescent·es, dissuadé·es de demander une protection par un tel dispositif, restent exposé·es à tous les dangers. Nos organisations persistent à demander le retrait de ce décret et appellent tous les départements, chefs de file de la protection de l’enfance, à renoncer à participer à ce dispositif. »

Vaste coup de filet à Paris: 1 606 migrants évacués de deux campements de migrants porte de la Chapelle

Par ce vaste coup de filet et un déploiement policier disproportionné (600 policiers pour 1606 migrants), le gouvernement montre clairement la réponse qu’il va apporter aux migrants et réfugiés qui fuient des situations de guerre et/ou de famine…“Nous redoutons notamment des placements en détention pour une partie des exilés présents, qui n’auront plus le choix de monter ou non dans les bus”, explique à l’AFP Julie Lavayssière, d’Utopia56. « Nous dénonçons un coup de communication du gouvernement, sans prendre, comme à chaque évacuation, les personnes piégées par les accords de Dublin, qui les empêchent de faire leur demande d’asile en France. »

Publié sur afp   7-11-2019

La moitié des campements de migrants vidés dans le nord-est de Paris

Plus de 1.600 migrants ont été évacués dans le calme jeudi matin de deux importants campements du nord-est parisien, lors d’une opération d’envergure qui a vidé la moitié de ces camps insalubres de la capitale, signe selon les autorités d’un « changement de braquet » gouvernemental sur l’immigration.

Baluchon sur l’épaule ou sac à la main, parfois enveloppés dans des couvertures sous une pluie battante dès l’aube, 1.606 personnes selon les chiffres de la Préfecture de police sont montées dans des bus pour être mis à l’abri dans une quinzaine de gymnases en Ile-de-France ainsi que dans des centres d’accueil.

L’évacuation concernait deux camps en regroupés en 1km² à cheval sur Paris et la Seine-Saint-Denis, l’un Porte de la Chapelle, l’autre à Saint-Denis. Un troisième campement Porte d’Aubervilliers regroupe l’autre moitié des quelque 2.000 à 3.000 exilés dans les campements de la zone et doit être évacué dans les prochaines semaines.

Parmi les délogés, qui ont laissé derrière eux des tentes vides sous le périphérique, de nombreux Afghans et originaires d’Afrique sub-saharienne, ainsi que des familles avec enfants.

Environ 600 policiers étaient mobilisés pour cette évacuation d’une ampleur inédite depuis plus d’un an dans la capitale, qui intervient au lendemain de la présentation par le gouvernement d’un plan immigration controversé. A cette occasion, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner s’était engagé à évacuer les camps du nord-est parisien « avant la fin de l’année ».

AFP / MARTIN BUREAUOpération d’évacuation de migrants le 7 novembre 2019 dans le nord-est parisien

– « J’aurai un toit » –

Awa, Ivoirienne de 32 ans, dormait dans une tente Porte de la Chapelle depuis son arrivée en France il y a un an. « Il pleut, il fait froid. Je ne sais pas où je vais, mais ça me fait plaisir d’y aller, parce que j’aurai un toit ce soir », dit-elle à l’AFP en emportant juste un sac à dos.

« Je ne peux pas laisser une situation de danger de cette nature (…) tout ça ne peut plus durer », a expliqué sur place le préfet de police de Paris Didier Lallement, rappelant la volonté du gouvernement de « retrouver le contrôle » de l’immigration.

« C’est ce que nous faisons ce matin. Il faut changer de braquet », a-t-il ajouté. « Jusque-là, on avait des opérations de mise à l’abri de 200, 300 personnes, mais on ne vidait jamais les campements et ils revenaient. Avec cette opération, on a un objectif de zéro retour« , explique-t-on à la PP.

AFP / MARTIN BUREAUDes migrants sont évacués par la police dans le nord-est de Paris le 7 novembre 2019

C’est le préfet de police qui a pris un arrêté d’évacuation, jugeant de même source que les campements prenaient « trop d’ampleur » et qu’une « délinquance » s’y installait, dans une situation devenue « incontrôlable ».

La préfecture évoque 213 atteintes aux personnes répertoriées sur le « secteur » de la Porte de la Chapelle depuis début 2019.

– « Vidéo-patrouilles » –

AFP / MARTIN BUREAUAnne Hidalgo lors de l’évacuation des campements, le 7 novembre 2019

Alors que les files d’attente s’allongent devant les cars, Mahar, 21 ans, originaire du Pakistan et arrivé en France il y a 4 mois, montre des cicatrices après plusieurs tentatives de suicide. « Je vais être hébergé mais j’y vais surtout parce qu’on m’a dit qu’il y aurait une aide pour les formalités administratives, pour que je puisse demander l’asile », explique-t-il.

Les mises à l’abri se font sur la base du « volontariat » et sont « inconditionnelles », a insisté de son côté le préfet de la région Ile-de-France, Michel Cadot. « C’est une opération assez massive. Le but, c’est d’éviter les reconstitutions des camps », a-t-il ajouté.

« Chaque fois on nous a dit ça ne se reproduira plus », souligne la maire de Paris Anne Hidalgo, présente également, rappelant qu’il s’agit de la 59e mise à l’abri depuis l’été 2015. « Ça faisait des mois qu’on demandait cette mise à l’abri », explique-t-elle à l’AFP, « mais en évacuant ces camps et pas la Porte d’Aubervilliers, on court le risque d’une reformation ».

Pour éviter ce phénomène, des forces mobiles doivent « tourner 24h/24 sur place », pour effectuer des contrôles et « placer en centre de rétention s’il le faut », note de son côté la PP. Le tout accompagné d’un « dispositif de vidéo-patrouilles ».

Un dispositif policier ? Pierre Henry, directeur de l’association France Terre d’asile, qui opère les comptages sur ces camps, pense plutôt qu’il faudrait « mettre des moyens » et avoir « une capacité d’hébergement ». « Sans dispositif pensé nationalement », craint-il, « ça recommencera ».


Publié sur francetvinfo.fr   le 7-11-2019

Paris : 1 606 migrants évacués de deux campements de migrants porte de la Chapelle

Des policiers vont désormais rester sur place pour éviter « la reconstitution de ces camps », assure le préfet de région Michel Cadot.

1 606 migrants répartis dans deux campements, situés porte de la Chapelle, à cheval sur le nord-est parisien et la Seine-Saint-Denis, ont été évacués à partir de 6 heures dans la matinée du jeudi 7 novembre, a constaté l’envoyée spéciale de franceinfo sur place. Une heure plus tard, les premiers bus partaient en direction de 15 gymnases de la région parisienne, a constaté une reporter de France Bleu Paris. À 9h, l’évacuation était terminée.

600 policiers, 1 606 migrants

600 policiers ont été mobilisés pour cette opération concernant 1 606 migrants, d’après les derniers chiffres communiqués par la préfecture de police de Paris. De nombreux bénévoles de différentes associations étaient également présents.

Mercredi, lors des annonces gouvernementales sur l’immigration, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner avait pris « l’engagement d’évacuer d’ici la fin de l’année les campements du nord-est parisien ». La préfecture de police de Paris et la préfecture de la région Ile-de-France avaient annoncé dans la foulée que cette évacuation aurait lieu dans la matinée du 7 novembre.

Le préfet de région Michel Cadot, le préfet de police Didier Lallement et la maire de Paris Anne Hidalgo étaient présents. Michel Cadot a déclaré que l’évacuation permettra « de reconquérir normalement l’espace public« , « de manière stabilisée dans la durée puisqu’il y aura un maintien de présence policière permettant d’éviter la reconstitution de ces campements ».

« Nous mettons à l’abri, c’est une démarche humanitaire, pour assurer à ceux qui sont des situations extrêmement difficiles un hébergement, mais nous ne tolèrerons pas de réinstallations », a déclaré de son côté le préfet de police de Paris, Didier Lallement.

Des effectifs de police contrôleront systématiquement les gens. Ceux en situation irrégulière qui reviendront seront traités comme toutes les personnes en situation irrégulière. Ceux en situation régulière, on essaiera de leur trouver des solutions d’hébergement, mais je préfère être très clair, il n’est pas question qu’ils recampent. Didier Lallement, préfet de police de Parisà franceinfo

« Cette opération vise non seulement à prendre en charge les migrants, mais aussi à faire cesser ces installations déplorables qui sont sur des délaissés de voiries qui appartiennent à la commune de Paris ou à l’État, », a assuré le préfet de police de Paris.

Nous avons obtenu des garanties des deux préfets pour que les personnes soient acheminées vers des hébergements.  Anne Hidalgo, maire de Paris à franceinfo

« Une de nos conditions, c’était que ça ne peut pas être une évacuation pure et simple, où une partie des gens ici auraient été dirigés vers des centres de rétention. Nous n’aurions pas été présents dans ce cas-là », a indiqué Anne Hidalgo, la maire de Paris, qui dit avoir obtenu la garantie d’un « accueil inconditionnel » des personnes présentes sur les campements.

« La rue n’est pas un lieu pour vivre. C’est un lieu de danger et d’indignité », a ajouté Anne Hidalgo. « Et c’est un lieu où y compris les riverains ne peuvent pas accepter que l’espace public devienne ce qu’il était devenu ici porte de la Chapelle ».

Son adjointe chargée des solidarités et de l’accueil des réfugiés, Dominique Versini, a ensuite affirmé sur franceinfo « qu’une partie des personnes » présentes sur le campement « se sont évaporées dans Paris ».