P. Tartakowsky : « au-delà de l’alternance, nourrir l’alternative »

Éditorial de Pierre Tartakowsky, dans le dernier numéro de la revue interne de la Ligue des droits de l’Homme, « LDH info ».

Le score du Front national à l’élection présidentielle est un facteur d’amertume durable. Il risque même d’être bien davantage. Les 18 % de sa candidate renvoient certes, d‘abord, à un échec colossal de la pseudo-stratégie sarkozyste consistant à « assécher » la formation politique en empruntant ses idées. Comme une asphyxiante tunique de Nessus, le piège s‘est refermé sur le candidat Président, les électeurs préférant décidément l’original à la copie. Ce phénomène renvoie aussi – pourquoi ne pas le dire – à un échec des forces politiques ayant vocation à cristalliser un projet de société alternatif, structuré par les notions d’égalité et de justice, par les droits et les libertés. C’est contre ces valeurs que les peurs et les divisions ont gagné ; au moins à hauteur de 18 %…

La montée progressive du Front national au long de ces dernières décennies, l’existence de phénomènes du même ordre en Europe indiquent que nous sommes là confrontés à une tendance de fond, portée par les crises à répétition et le sentiment d’impuissance qui en résulte, par le décalage croissant entre nature des problèmes posés et effectivité de la souveraineté nationale, entre une hégémonie libérale du « tous contre tous », au moment où la solidarité n’a jamais été aussi vitale face aux défis du développement.

Cette toile de fond ne saurait pour autant exonérer les acteurs politiques de leurs responsabilités. Celles de Nicolas Sarkozy et de son gouvernement sont lourdes : en banalisant, l’un après l’autre, les thèmes les plus réactionnaires, les plus agressivement xénophobes, en reprenant à son compte les clichés les plus odieux sur les « étrangers », en les désignant officiellement comme « le » problème de la France, ils ont légitimé un courant d’idées certes plus ou moins dégagé des contentieux historiques de l’extrême droite – la collaboration, l’Algérie -, mais profondément enraciné dans le terreau nationaliste, exclusif et haineux.

Face à quoi, et même si les règles du jeu électoral incitent a la contorsion intellectuelle, il faut savoir opposer un refus et des convictions, les unes nourrissant l‘autre. Pour parler clair, faut-il « convaincre » les électeurs du Front national ? Sans conteste. Faut-il leur complaire ? Certainement pas. Entre les deux, la marge est étroite mais elle est nette. Il est vital qu’elle le reste. De ce point de vue, méfions-nous du couplet surgi entre les deux tours sur l’expression d‘une « souffrance sociale » que traduirait le vote FN. D‘abord parce que souffrance n’est pas vertu ; ensuite parce que nombre de nos compatriotes, confrontés à la souffrance sociale, ne font pas ce choix ; enfin, parce que la persistance d‘un vote FN indique un socle idéologique stable, lequel se compose de xénophobie, du refus de l’autre, du culte des origines et d’un passe mythifie et mystifiant, d’un nationalisme exclusif charriant avec lui des hiérarchies raciales et des exigences singulièrement réactionnaires quant aux droits et aux libertés des salariés, des jeunes, des gens fragilisés par la crise.

Que nombre de ceux-là, tentés par un « coup de gueule », choisissent pour ce faire le bulletin FN n‘est pas un mince paradoxe. Et il faut bien évidemment travailler à les extirper de ce piège ; mais sans sous-estimer les voluptés qu’on trouve à affirmer – au travers d’obscures raisons de « race » ou de nationalité – un semblant de revanche sur « les autres ». Il faut donc lui opposer fermement une conviction politique et des décisions qui, dépassant l’alternance institutionnelle, ouvrent la voie à une réelle alternative. C’est pourquoi la LDH a appelé à battre le candidat des droites au second tour. C‘est pour cela qu‘elle entend réhabiliter dans le débat public le fonctionnement démocratique des institutions, la justice et l’égalité, l’indispensable rupture avec la xénophobie d’État, la lutte contre le sentiment de déclassement et de dépossession, l‘inscription de la France dans une Europe dégagée du dogme de la concurrence, ouverte sur le monde.

Ces axes constituent autant de conditions nécessaires pour que notre société se dégage du péril de la haine, cesse de produire de l’injustice et de l’exclusion, construise l’espoir d’une société plus solidaire, plus libre.

 

 

Concarneau : la section Françoise-Bosser de la LDH agace les droites. Tant mieux.

La section Françoise-Bosser, de Concarneau – Quimperlé – Riec a transmis aux journaux (Le Télégramme, Ouest-France), un communiqué, appelant à « barrer la route au candidat des droites ». Ce communiqué reprend celui qui avait été publié par le siège national de la Ligue.

Ce communiqué, publié dans Le Télégramme, agace fortement les droites finistériennes. Le Nouveau ( ?) centre et l’UMP se sont donc fendu d’une réponse dans les mêmes quotidiens.

Vous trouverez ici le communiqué intégral de la section Françoise-Bosser, ce qu’il en est resté dans Le Télégramme, les réponses du Nouveau centre et de l’UMP, et les réponses de la section Françoise-Bosser, dont on ne sait pas si elles seront ou non publiées.

A noter que le blog dans lequel le signataire  du communiqué de l’UMP, M. Gilles David, écrit régulièrement, a publié, pendant la campagne du 1er tour de la présidentielle, un article scandaleux sur les origines de la candidate d’Europe écologie les Verts. Il ne devait pas être particulièrement fier de cet article, (ou alors reste-t-il quelques démocrates dans ce parti ?) puisque qu’il a disparu du blog de l’UMP de la 8ème circonscription du Finistère. M. David est donc particulièrement bien placé pour donner des leçons de morales politique.

Il est aussi intéressant de noter que le journal Ouest-France n’a pas publié le communiqué de la section LDH. Cela ne l’empêche pas de publier le communiqué du Nouveau centre, qui est une réponse à la LDH… Comprenne qui pourra !

Voici donc dans l’ordre :

  • Le communiqué original de la LDH section Françoise-Bosser ;
  • Le communiqué paru dans le Télégramme du 27 avril ;
  • La réponse du Nouveau centre (Le Télégramme, 2 mai);
  • La réponse de l’UMP (Le Télégramme, 20 avril)
  • Le droit de réponse de la LDH au communiqué du Nouveau centre ;
  • Le droit de réponse de la LDH au communiqué de l’UMP.

 

Communiqué original de la section Françoise-Bosser.

Barrer la route au candidat des Droites

La  LDH, section Françoise Bosser,  se réjouit du haut niveau de participation au premier tour de l’élection présidentielle. Elle y voit la volonté du peuple français de restituer à la politique son rôle primordial, sans céder aux injonctions des se plier aux intérêts économiques.

Elle constate également  l’ampleur du désaveu qui frappe le Président sortant qui a mené une politique au service des puissants, caractérisée par des choix aggravant les injustices sociales, légitimant la xénophobie d’Etat, multipliant les atteintes aux droits et aux libertés, enfermant les citoyens dans une société de surveillance et dans une démocratie limitée. En s’en prenant à tout-va à diverses catégories de la population, parce qu’au chômage, selon leur origine, et même selon leur religion, en désignant des boucs émissaires et en attisant les peurs et les haines, Nicolas Sarkozy a légitimé les idées du Front national, qui s’en trouve plus fort que jamais.

Parce que notre pays ne peut continuer à se livrer, à lui-même, une guerre civile froide, parce que sa défaite est une étape nécessaire, il faut, le 6 mai 2012, barrer la route à Nicolas Sarkozy.

Mais, infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs que traduit le premier tour des élections présidentielles. Ce sera au nouveau président de la République d’impulser une autre politique qui, dépassant l’alternance institutionnelle, ouvre la voie à une réelle alternative politique.

  • Rétablir un fonctionnement démocratique des institutions en supprimant le cumul des mandats, en assurant l’indépendance de la justice et en élisant les membres du Conseil constitutionnel, ainsi que les autres Autorités indépendantes, à une majorité des deux tiers du Parlement.
  • Bannir la xénophobie d’État en régularisant les sans-papiers qui étudient, vivent et travaillent ici, en ouvrant enfin un réel débat sur l’immigration, en accordant aux étrangers non européens le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales, et faire reculer le racisme en cessant de stigmatiser des catégories entières de population en raison de leur origine ou de leur religion.
  • Restituer aux citoyens leurs libertés en réformant profondément la justice pénale, en abolissant les lois d’exception, en rétablissant la justice des mineurs dans toute son exceptionnalité, en limitant les fichiers et leur usage à des fins proportionnées, contrôlables et à la finalité établie.
  • Reconstruire des services publics qui soient à la disposition de tous et auxquels tous doivent avoir accès, lancer un plan d’action pour l’hébergement d’urgence et le logement social, construire une justice fiscale et sociale qui assure la progressivité de l’impôt et la redistribution des richesses.
  • Construire une autre Europe, aux institutions démocratiques, dégagée du dogme de la concurrence, et ouverte sur le monde.

Notre section, au cours des mois à venir, portera ces revendications comme autant de conditions nécessaires pour que notre société cesse de produire de l’injustice et de l’exclusion, pour que se construise l’espoir d’une société plus solidaire et plus libre.

Communiqué paru dans le Télégramme.

La LDH appelle à « barrer la route à Nicolas Sarkozy »

Dans un long communiqué, la Ligue des Droits de l’Homme de Concarneau-Quimperlé (section Françoise-Bosser) se réjouit du haut niveau de participation au premier tour de l’élection présidentielle », qu’elle traduit comme une « volonté du peuple français de restituer à la politique son rôle primordial, sans céder aux injonctions de se plier aux intérêts économiques ». La LDH poursuit en appelant « le 6 mai 2012, à barrer la route à Nicolas Sarkozy ». Elle précise qu’ « infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs». « Ce sera au nouveau président de la République d’impulser une autre politique», écrit la Ligue avant de détailler ses revendications; à rétablir un fonctionnement démocratique des institutions en supprimant le cumul des mandats (…) bannir la xénophobie d’État en régularisant les sans-papiers qui étudient, vivent et travaillent ici (…), restituer aux citoyens leurs libertés en réformant profondément la justice pénale (…), reconstruire des services publics qui soient à la disposition de tous et auxquels tous doivent avoir accès ».

Communiqué du Nouveau centre.

Réaction. Le Nouveau centre fustige la LDH

Georges Maurice, délégué Nouveau centre sur la 8ème circonscription réagit, à son tour, à l’appel de la section locale de la Ligue des droits de l’Homme à « barrer la route à Nicolas Sarkozy » (Le Télégramme de vendredi). La LDH « tombe le masque et sort complètement de son rôle premier », estime-t-il. « En prenant une position partisane dans cette élection, elle se discrédite aux yeux des habitants de la circonscription. (…) Les raisons invoquées n’ont aucune justification compte-tenu de la responsabilité d’un chef d’État de protéger les Français et étrangers en situation régulière d’une immigration non contrôlée ». « Quant au non-cumul des mandats, en tant que relais du Parti socialiste, elle est très mal placée pour donner des leçons aux autres. Enfin, que je sache, les citoyens français n’ont jamais perdu leur liberté. Preuve en est, le déferlement sans précédent de haine envers le chef de l’État. Devant de telles déviances, nous sommes en droit de craindre le pire pour la démocratie ». Georges Maurice conclut en appelant à voter pour Nicolas Sarkozy, « seul garant de toutes les libertés » .

Communiqué de l’UMP.

Présidentielle. L’UMP agacée par la Ligue des Droits de l’Homme

L’appel à « barrer la route à Nicolas Sarkozy » de la section locale de la Ligue des Droits de l’Homme (Le Télégramme de vendredi) n’a pas manqué de faire réagir le délégué UMP de la circonscription, Gilles David. Dans un communiqué, il s’étonne: « Il est extraordinaire dans cette circonscription qu’une association s’immisce dans le débat présidentiel, sans aucune légitimité. Cette association qui s’approprie les lettres de noblesses des droits de l’Homme, roule bien sûr, pour le PS au même titre que les Verts, qui roulent pour l’extrême gauche, s’approprient l’écologie. Les valeurs des droits de l’homme et celles de l’écologie ne sont pas des propriétés de gauche ».

Gilles David ajoute : « De quel droit, et avec quelle légitimité, la LDH qui donne des leçons démocratiques, veut imposer le droit de vote des étrangers? Je vais vous donner la réponse : leur but ultime est d’avoir une passerelle, via les grands électeurs, sur le Sénat. Par ce biais, tous ces petits groupes, aux ordres du PS, seront présents dans l’hémicycle du Sénat et feront régner leur démocratie. Ensuite, le petit couplet sur le cumul de mandats, me fait gausser de rire, car la LDH devrait d’abord regarder dans son camp (…) ». Et Gilles David d’appeler à voter Nicolas Sarkozy dimanche.

Réponse au Nouveau centre.

Au délégué du Nouveau Centre  qui se pose la question de la légitimité de la LDH à  s’immiscer dans le débat présidentiel , nous rappelons simplement que la LDH est  une association politique et citoyenne qui défend les principes énoncés dans les Déclarations des Droits de l’Homme et, pour ce qui concerne la France, les principes de la République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle n’ en a  évidemment et heureusement pas le monopole, mais, concourant au fonctionnement de la démocratie,  elle se doit d’intervenir dès que ces principes  lui semblent menacés.

C’est ce qu’elle a fait tout au long d’un quinquennat qui n’a cessé d’affaiblir la démocratie et d’installer l’insécurité sociale. Elle l’a fait, d’abord, en lançant une campagne  intitulée « urgence pour les libertés et les droits », puis en proposant avec une cinquantaine d’autres associations un nouveau « Pacte pour les Droits et la Citoyenneté » assorti de 35 propositions qui ont été soumises à l’étude des partis politiques à la veille des élections présidentielles.

Le non cumul des mandats figure effectivement  et de longue date, parmi ces propositions, comme bien d’autres propositions qui « agacent » semble-t-il les partis de droite.

Pour autant,  non, Monsieur Maurice,  la LDH  ne « roule « pas « pour le PS ». Le fait d’appeler à barrer la route au candidat sortant n’autorise nullement ce raccourci simpliste. Attachée à la diversité des origines et des opinions la LDH tient avant tout  à une indépendance dont dépendent sa survie et sa crédibilité.  Indépendance ne veut toutefois pas dire neutralité.

Dans son communiqué, la LDH appelle très exactement, à « barrer la route au candidat des droites » dans la logique du combat qu’elle mène depuis toujours contre la xénophobie et le racisme, terreau sur lequel prospère l’extrême-droite. En  instaurant une politique du bouc émissaire et de la peur, sur fond d’injustice sociale, le président sortant laisse s’installer une situation de « guerre civile froide » à laquelle il est urgent de mettre un terme. C’est la raison pour laquelle la LDH qui se contente généralement d’appeler à voter, est sortie de sa réserve habituelle. C’est contre une politique  économiquement, socialement, politiquement  et culturellement désastreuse que nous appelons à voter, conscients, cependant, comme nous l’écrivions dans le communiqué, qu’infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs que traduit le premier tour des élections présidentielles.

Croyez bien, Monsieur le délégué du Nouveau Centre, que nous resterons mobilisés au-delà du 6 mai et que nous saurons rappeler le futur président à ses engagements de campagne autant qu’il sera nécessaire…En attendant, nous persistons à appeler à « battre le candidat des droites » dans l’espoir de voir se construire une société plus solidaire et plus libre.

Réponse à l’UMP.

Il y a bien entendu des parties communes aux deux réponses.

Droit de réponse :

Au délégué UMP de la circonscription qui se pose la question de la légitimité de la LDH à « s’immiscer dans le débat présidentiel », nous rappelons simplement que la LDH est  une association politique et citoyenne qui défend les principes énoncés dans les Déclarations des Droits de l’Homme et, pour ce qui concerne la France, les principes de la République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle n’ en a  évidemment et heureusement pas le monopole, mais, concourant au fonctionnement de la démocratie,  elle se doit d’intervenir dès que ces principes  lui semblent menacés.

C’est ce qu’elle a fait tout au long d’un quinquennat qui n’a cessé d’affaiblir la démocratie et d’installer l’insécurité sociale. Elle l’a fait, d’abord, en lançant une campagne  intitulée « urgence pour les libertés et les droits », puis en proposant avec une cinquantaine d’autres associations un nouveau « Pacte pour les Droits et la Citoyenneté » assorti de 35 propositions qui ont été soumises à l’étude des partis politiques à la veille des élections présidentielles.

Le droit de vote des étrangers en situation régulière aux élections municipales figure effectivement parmi ces propositions et cela, d’ailleurs, depuis une trentaine d’années. La LDH y voit un enjeu démocratique majeur et un facteur de cohésion sociale (ce qu’ont d’ailleurs, de temps à autre, ici ou là, également reconnu des personnalités majeures de l’UMP …). Contrairement à ce qu’affirme le délégué de circonscription qui semble méconnaître le dossier, les étrangers non européens, pas plus que les étrangers de l’Union Européenne qui bénéficient déjà de ce droit,   ne seront éligibles aux fonctions de maire ou d’adjoint, ni ne participeront aux élections sénatoriales si cette loi est votée.

Enfin, non, Monsieur David, la LDH ne « roule « pas « pour le PS ». Le fait d’appeler à ne pas voter pour le candidat sortant n’autorise nullement ce raccourci simpliste. Attachée à la diversité des origines et des opinions la LDH tient avant tout  à une indépendance dont dépendent sa survie et sa crédibilité.  Indépendance ne veut toutefois pas dire neutralité.

Dans son communiqué, la LDH appelle d’ailleurs, très exactement, à « barrer la route au candidat des droites » dans la logique du combat qu’elle mène depuis toujours contre la xénophobie et le racisme, terreau sur lequel prospère l’extrême-droite. En  instaurant une politique du bouc émissaire et de la peur, sur fond d’injustice sociale, le président sortant laisse s’installer une situation de « guerre civile froide » à laquelle il est urgent de mettre un terme. C’est la raison pour laquelle la LDH qui se contente généralement d’appeler à voter, est sortie de sa réserve habituelle. C’est contre une politique socialement, politiquement  et culturellement désastreuse que nous appelons à voter, conscients, cependant, comme nous l’écrivions dans le communiqué, qu’ infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs que traduit le premier tour des élections présidentielles.

Croyez bien, Monsieur le délégué de l’UMP, que nous resterons mobilisés au-delà du 6 mai et que nous saurons rappeler le futur président à ses engagements de campagne autant qu’il sera nécessaire…En attendant, nous persistons à appeler à « battre le candidat des droites » dans l’espoir de voir se construire une société plus solidaire et plus libre.

 

Flash-ball contre manifestants : sortir de l’impunité !

Le candidat sortant sort de son chapeau « une présomption de légitime défense », qui a le mérite de bien faire rigoler tous les juristes. Il y a quelques jours, un procès s’est tenu à Nantes : celui d’un policier auteur d’un tir de flash-ball qui a provoqué la perte d’un oeil à un jeune manifestant. Le policier a été relaxé. La Ligue des droits de l’Homme s’était constituée partie civile dans cette affaire, et elle accompagnera le jeune homme en appel : il faut lui reconnaître le statut de victime, et l’usage de cette arme doit être reconnu dangereux. Voici le communique publié à cette occasion par la LDH.

Communiqué LDH

Flash ball contre manifestants : sortir de l’impunité !

Le 27 novembre 2007, un lycéen âgé de 16 ans était grièvement blessé à l’œil alors qu’il participait à une manifestation à Nantes contre la loi Pécresse sur « les libertés et responsabilités des universités ». La blessure a entraîné une incapacité totale de travail de six mois. L’acuité visuelle de l’œil de l’intéressé est presque totalement perdue, sans amélioration possible

L’intéressé et sa famille ayant porté plainte ; le 3 avril 2012, le tribunal correctionnel de Nantes a jugé que la blessure avait bien été occasionnée par l’usage d’une arme − un lanceur de balle de défense, à l’époque en cours d’expérimentation, proche du Flash-ball − par une personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions.

Cependant, le policier auteur du tir a été relaxé par le tribunal. En effet, l’ordre de tirer ayant été donné par un supérieur hiérarchique, le policier n’est pas pénalement responsable sauf si cet acte est manifestement illégal.

Or, pour le tribunal, tirer avec une arme de type Flash ball sur un manifestant n’est pas illégal dès lors que le tir a été réalisé dans un temps voisin de jets de projectiles en direction de la police, et avait pour finalité de les faire cesser dans le cadre d’une opération de maintien de l’ordre.  Enfin, il aurait été enseigné au policier que l’emploi de cette arme était justifié dans un tel cadre. Dès lors, il ne pouvait pas savoir que cette arme était susceptible de causer une blessure aussi grave.

Pour le tribunal, la blessure du manifestant a été occasionnée dans le cadre d’une opération de police administrative et les demandes de la victime ne sont pas de la compétence d’un tribunal pénal mais d’un tribunal administratif. Le tribunal a reçu la constitution de partie civile de la LDH, mais, compte tenu de la relaxe prononcée, elle a été déboutée de ses demandes.

Quand ils  protestent ou manifestent, les étudiants et lycéens, expriment comme les adultes, une des nombreuses formes de la citoyenneté, de la démocratie et de leur apprentissage. Dans un conflit social et collectif, comme dans une manifestation, les comportements individuels se situent, et doivent être restitués dans leur dimension d’implication collective.

L’action de la police ne doit pas avoir pour effet de dissuader les citoyen(ne)s de participer à des manifestations, car c’est une des libertés fondamentales que de pouvoir contester collectivement ce que l’on estime injuste. Le droit de manifester n’est pas respecté si les manifestants peuvent être gravement blessés.

Plusieurs manifestants, jeunes pour la plupart, ont été gravement blessés, ces dernières années, du fait de tirs de Flash-ball. Cette situation doit cesser. Les jeunes ne sont pas une classe dangereuse dont il faudrait avoir peur. La police doit accomplir sa mission de service public et de maintien de l’ordre, de manière adaptée et proportionnée. A défaut, si des abus sont commis dans l’exercice des compétences policières, ceux-ci constituent des violences policières illégitimes, qui, dans un Etat de droit, doivent être condamnées.

Le Flash-ball est une arme de tir. L’utilisation de cette arme ne peut être légitime dans les conditions d’une manifestation comme celle du 27 novembre 2007 qui a abouti à la mutilation d’un jeune âgé de 16 ans. Depuis, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) a recommandé « de ne pas utiliser cette arme lors de manifestations sur la voie publique [estimant] qu’elle présente un degré de dangerosité totalement disproportionné ». Le Défenseur des droits, qui a succédé à la CNDS, « recommande aux responsables policiers de s’interroger sur l’opportunité d’emploi de tous les lanceurs de balles de défense ».

La procédure judiciaire ne doit pas se terminer par une relaxe qui deviendrait une référence pour l’avenir. Il n’est pas acceptable que la très grave blessure de ce jeune du fait de l’utilisation du Flash-ball, demeure impunie et que son statut de victime ne soit pas reconnu. La Ligue des droits de l’Homme accompagnera les actions demandant à la justice de se prononcer sur l’illégitimité de l’utilisation d’une arme de tir comme le Flash-ball lors de manifestations, d’affirmer que cette utilisation est un abus qui doit être condamné dans un État de droit.

 

Quand les mots n’ont plus de sens

Le numéro de mars de la revue trimestrielle de la Ligue des droits de l’Homme, « Hommes et libertés », s’ouvre sur un éditorial signé par son président, Pierre Tartakowsky. Écrit au début de la campagne pour l’élection présidentielle, et, de surcroît, avant les tueries de Montauban et de Toulouse, le texte a conservé une actualité saisissante, et le lire aujourd’hui, à la lumière de ce qui s’est passé depuis sa rédaction, lui apporte une autre dimension.

Entendre le président de la République se présenter comme candidat du peuple, en figure de la France qui se lève tôt, en apôtre du gagner plus…

Entendre Jean-François Copé expliquer, main sur le cœur, que la crise – que dis-je ? – les crises, étaient totalement imprévisibles.

Entendre un ministre de l’intérieur, intime parmi les intimes du Président, expliquer que certaines civilisations valent « évidemment « mieux que d’autres…

On peut évidemment en rire, tant les ficelles sont grosses et la pensée épaisse. Et miser sur le bon sens politique du peuple, sur l’expérience pour estimer que ces boniments de bas étage trouveront bientôt leur juste sanction électorale.

On peut aussi s’inquiéter. Du contenu même des propos tenus, tant ils sont incroyablement racoleurs et mensongers. Qui pourrait accepter l’idée que les crises financières étaient « imprévisibles », alors même que des dizaines d’ouvrages entassés sur les rayons de nos bibliothèques en avaient, à l’avance, démonté les mécanismes? Qui pourrait avaler que Nicolas Sarkozy est un enfant des faubourgs ouvriers, «très simple », comme le confie si délicieusement sa femme aux médias qui veulent bien l’entendre ? Qui voudrait, enfin, croire que ce gouvernement a pris le parti du travail et non des acteurs de la mondialisation financière?

Notre inquiétude va plus loin.

Aussi étrange que cela puisse paraitre à l’ère de la société du spectacle, nous considérons qu’il n’est pas fatal que la démocratie chemine aux côtés de la démagogie, et moins encore d’une anomie portée à un niveau de saturation permanente.

Tordre les mots pour piétiner le réel

La campagne présidentielle est loin d’être terminée, au moment où nous écrivons ces lignes, mais elle aura été marquée par deux séquences politiques assez singulières en termes de représentation.

La première, évoquée par l’image du «capitaine à la barre», visait à nous présenter un président de la République trop absorbé par les tâches urgentes de la conjoncture pour se livrer au jeu de la démocratie. Les alternatives possibles, les débats d’idées, la possibilité même d’une rupture avec les dogmes en cours, tout cela était renvoyé au domaine du futile : foin de bavardages, en quelque sorte. il faut insister sur la violence symbolique et politique que cela constitue, de la part d’un élu aux affaires depuis dix années, et président de la République depuis cinq !

La seconde phase, tout aussi catastrophique pour l’idée démocratique, a été constituée par ce que l’on a appelé la «droitisation » du discours – réaffirmation de la hiérarchie entre les civilisations, Dénonciation de l’immigration comme « problème », centralité de la viande hallal… -,doublée d’un populisme débridé avec la condamnation convenue des retraites chapeau, et autres outrances » de la finance ».

Ces deux moments partagent en commun de tordre les mots pour mieux piétiner le réel. Là est le risque majeur.

Certes, ni le mensonge ni l’approximation ne sont des maux nouveaux en démocratie; mais la systématisation de leur mésusage, alliée aux souffrances qui travaillent le corps social, constituent un mélange stuporeux, pathogène.

Dit plus simplement, le risque est énorme que les gens n’y comprennent plus rien, pire encore, qu’ils doutent de tout. Cette pédagogie de la désespérance est déjà à l’œuvre ; elle se lit dans l’abstention, elle nourrit les dérives les plus outrancières, les plus régressives. Car si plus rien n’est vrai, plus rien n’est faux et tout se vaut. Dans ces conditions, pourquoi ne pas expérimenter le Front national? Pourquoi ne pas sortir de l’euro, revenir au franc, taxer les chômeurs, expulser plus encore et toujours plus? Ainsi l’hubris sarkozienne conduit-elle tout droit à une novlangue à la puissance dix, un monde d’apparences, d’autant plus cruel et injuste qu’il n’est que d’apparences: un débat mais sans raison, un ordre mais sans justice, une démocratie mais sans sanction populaire…

Une presse qui rassemble les intelligences

Dans ce contexte assez délétère, la presse écrite nationale, si l’on excepte Le Figaro, tristement ramèné par son propriétaire à un rôle de chien couchant, joue un rôle d’éclairage non négligeable. Au gré de la crise de la représentation politique, elle en est venue a assumer un rôle nouveau, de « rassembleur d’intelligences », au travers de grandes réunions nationales, tables rondes, rencontres d’intellectuels. C’est un phénomène relativement neuf auquel il convient de réfléchir, tant il témoigne d’un intérêt pour un débat d’idées au détriment d’une information jugée comme trop pauvre, trop uniforme. À cet égard, la vigueur de la presse Internet, notamment avec Mediapart, doit également être soulignée.

En ce sens, la réflexion sur les médias, les contradictions qui les traversent, les rapports de connivence et de pouvoir qu’ils entretiennent à la représentation politique ne cessent de se modifier, contraignant ainsi les citoyens à revisiter en permanence l’analyse qu’ils ont de leur fonctionnement.

Reste que le réel n’est pas fait d’apparences. Un élément frappant de la présente phase électorale tient sans doute au décalage fascinant qui se confirme, de sondage en sondage, entre les efforts médiatiques du Président sortant, ses «coups », « sorties » et autres petites phrases calibrées, et l’impact négligeable qu’ils ont sur l’opinion publique. La crise, évoquée comme un mantra par Nicolas Sarkozy pour échapper à ses responsabilités, pèse réellement et appelle de vraies réponses, de celles qui, justement, passent par de vrais débats, peuplés de mots ayant un sens, et permettant de ce fait d’échanger des désaccords qui valent toujours mieux que des malentendus.

Hugo, en son temps, se targuait d’avoir « mis un bonnet rouge au dictionnaire ». Sans doute est-il temps de penser aux bonnets que nous entendons faire portera la représentation politique, aux mots qu’elle choisira pour incarner son projet, au fonctionnement médiatique qui en assurera la vitalité en l’exposant aux vents salutaires de la confrontation.

Cet éditorial, écrit avant les tueries de Montauban et de Toulouse, n’a pas été modifié. À sa façon, il en éclaire le contexte.

 

On vous fiche, ne vous en fichez pas !

La Ligue des droits de l’Homme vient d’éditer une plaquette, véritable « mode d’emploi » du STIC, ou Système de traitement des infractions constatées, un fichier redoutable qui a déjà bouleversé la vie de centaines de citoyens honnêtes. A télécharger ici.

Vous êtes peut-être fiché(e) au STIC…

Le saviez-vous ?

LE SYSTEME DE TRAITEMENT DES INFRACTIONS CONSTATEES (STIC) : qu’est-ce que c’est ?

Un fichier informatisé qui répertorie des informations provenant des comptes rendus d’enquêtes de police.

II concernait au 1er janvier 2009 (chiffres Cnil):

  • 5 552 313 personnes mises en cause
  • 28 329 276 victimes, pour 37 911 000 infractions

Depuis les chiffres ont encore augmenté !

A QUI SERT CE FICHIER ?

  • Répertorier les personnes mises en cause et les victimes des infractions constatées.
  • Faciliter, pour les enquêtes de police, le rassemblement des preuves des infractions et la recherche de leurs auteurs.
  • Être utilisé pour (loi du 15 novembre 2001) :
    • les décisions d’habilitation des personnes en ce qui concerne l’exercice de missions de sécurité ;
    • les autorisations d’accès a des zones protégées en raison de l’activité qui s‘y exerce;
    • les demandes d’acquisition de nationalité française, délivrance des titres de séjour des étrangers, nomination et promotion dans les ordres nationaux (la loi du 18 mars 2003).

QUI EST RESPONSABLE DU FICHIER ?

La Direction générale de la police nationale (la DGPN) sous le contrôle du Procureur de La République.

LES DONNEES FIGURANT DANS LE STIC

  • Pour les personnes mises en cause : identité détaillée.
  • Pour les victimes 2 identité détaillée et/ou signalement des personnes disparues et corps non identifiés), photographie (personnes disparues et corps non identifiés).
  • Pour les faits objet de l’enquête, les lieux, dates de l’infraction et modes opératoires, ainsi que les informations relatives aux objets, y compris celles qui sont indirectement nominatives.

Les informations sont saisies et codifiées par les policiers ou gendarmes en charge d‘une enquête et comprennent:

Tous indices ou les éléments graves et concordants attestant de la participation à la commission d’un crime, d`un délit ou de certaines des contraventions de 5ème classe concernant le(s) mis en cause et le(s) victimes de l’une de ces infractions.

QUI CONTROLE LE STIC ?

1. Le fichier est sous le contrôle du Procureur de la République. C’est à lui qu’on s’adresse pour le faire rectifier.

II transmet à la Direction de la police générale de la police nationale :

  • les relaxes ou acquittements devenus définitifs pour suppression;
  • les non-lieu ou classements sans suite pour mise à jour et complément;
  • les mesures d’amnistie pour effacement.

Cette transmission ne se fait pas de manière régulière en raison de la pénurie de moyens de la Justice.

Durée de conservation : 5 à 40 ans pour les majeurs mis en cause, 5 à 20ans pour les mineurs, 15 ans maximum pour les victimes.

2. Le droit d’opposition (art. 26 loi 06/01/78) ne s’applique pas. Toute victime peut cependant demander la suppression des données la concernant après condamnation définitive de l’auteur des faits.

3. La DGPN (Art. 10) fait un compte rendu annuel à la Cnil sur la vérification, la mise à jour et l’effacement des données du Stic.

QUI PEUT CONSULTER LE STIC ?

  • Les personnels individuellement désignés et spécialement habilités des services de la police nationale et de la gendarmerie nationale ainsi que les agents des douanes habilités à effectuer des missions de police judiciaire. Au total, des milliers de policiers et gendarmes.
  • Les magistrats du parquet ainsi que les magistrats instructeurs pour les recherches relatives aux infractions dont ils sont saisis.
  • Sous certaines conditions, les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le préfet.

En décembre 2008, près de 100 000 personnes étaient habilitées à accéder au STIC dans le cadre de missions de police judiciaire, de police administrative ou de fonctions de gestion du fichier.

On comptait en 2009 20 millions de consultations du STIC par an.

ON VOUS FICHE, NE VOUS EN FICHEZ PAS !

COMMISSION NATIONALE DE L’INFORMATIQUE ET DES LIBERTES ET DES LIBERTES

8 rue Vivienne CS 30223

75083 Paris CEDEX 02

Tél:0153 73 22 22 Fax : 01 53 73 22 00

Vous devez adresser à la Cnil un courrier recommandé, indiquant adresse et téléphone, photocopie d’un titre d‘identité en précisant le fichier pour lequel vous demandez que des vérifications soient entreprises.

Vous n‘avez pas à motiver votre demande.

La Cnil ne gère pas les fichiers concernés et n’a donc pas connaissance des personnes qui y figurent.

Le Président désigne un membre de la Commission, magistrat ou ancien magistrat, pour faire les investigations nécessaires, auprès du ministère de l’intérieur.

Si la communication des données ne met pas en cause les finalités du traitement, la sûreté de l’État, la défense ou la sécurité publique, la Cnil vous les communique avec l’accord du responsable du traitement.

À défaut, elle vous informe par courrier qu’elle a effectué les vérifications nécessaires.

Cette procédure est longue car la Cnil a énormément de demandes.

LE STIC EST UN FICHIER DANGEREUX EN TERMES DE PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES ET DE LIBERTES INDIVIDUELLES

  • Parce que ces données ne sont pas facilement accessibles aux intéressé-es.
  • Parce que la mise à jour des données n’est pas contrôlée régulièrement.
  • Parce que les données sont conservées sur une très longue durée (de 5 ans à 40 ans).
  • Parce que de nombreuses personnes peuvent y avoir accès et utiliser les informations alors qu’elles ne sont pas validées.
  • Par les conséquences sociales possibles car il peut hypothéquer la vie professionnelle. Il conditionne souvent un recrutement ou un renouvellement de fonctions. 1 million d’emplois sont concernés.

Informez-vous !

Demandez communication de votre fiche STIC !

 

Appel de la Ligue des droits de l’Homme : 1er Mai 2012, manifestons pour la démocratie et le progrès social

(Communiqué LDH)

La mobilisation sociale du 1er Mai de cette année revêt une place singulière en raison du contexte de l’élection présidentielle et des tentatives d’instrumentalisation dont il est l’objet.

Parce qu’elle défend l’idée que les droits sociaux sont indivisibles des droits et des libertés politiques, parce qu’elle pense que la solidarité est une valeur universelle, ici et là-bas, parce qu’elle a la conviction que le dialogue social doit irriguer une démocratie effective et vivante, la Ligue des droits de l’Homme appelle toujours ceux qui vivent et travaillent en France à participer aux défilés syndicaux unitaires.

Cette année plus que jamais, il est important, face aux crises et aux politiques d’austérité, de faire entendre les priorités sociales et les préoccupations des salariés, des demandeurs d’emploi, des jeunes et des retraités ; d’exprimer la défense des droits fondamentaux et des libertés partout dans le monde ; de faire reculer la xénophobie, le racisme et l’antisémitisme.

De fait, la crise ne peut être le prétexte pour remettre en cause des systèmes sociaux construits sur la solidarité, les libertés publiques, le principe de l’égalité des droits qui fondent notre vivre ensemble.

Tout au long du quinquennat de Nicolas Sarkozy, la Ligue des droits de l’Homme s’est mobilisée contre un gouvernement qui a asphyxié la démocratie, nié les droits, discriminé en fonction d’une origine supposée ou réelle, augmenté les inégalités, attaqué le service public, et enfin, développé un tel sentiment de peur de tous contre tous qu’il a voulu faire des services de la justice et de la police les gardiens de son propre pouvoir.

Persuadée qu’infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs que traduit le premier tour des élections présidentielles, la LDH appelle à manifester aux côtés des organisations syndicales qui défileront dans l’unité, et à faire du 1er Mai 2012 un moment d’affirmation de la démocratie et du progrès social.

La Ligue des droits de l’Homme appelle à battre le candidat des droites

La Ligue des droits de l’Homme vient de publier le communiqué suivant, pour le 2ème tour de l’élection présidentielle.

Battre le candidat des droites

La Ligue des droits de l’Homme se félicite du haut niveau de participation au premier tour de l’élection présidentielle. Elle y voit la volonté du peuple français de restituer à la politique son rôle primordial, sans céder aux injonctions de se plier aux intérêts économiques.

La LDH constate l’ampleur du désaveu qui frappe le Président sortant. Ce qui a été sanctionné, c’est un quinquennat au service des puissants, caractérisé par des choix aggravant les injustices sociales, légitimant la xénophobie d’Etat, multipliant les atteintes aux droits et aux libertés, enfermant les citoyens dans une société de surveillance et dans une démocratie limitée. En s’en prenant à tout-va à diverses catégories de la population, parce qu’au chômage, selon leur origine, et même selon leur religion, en désignant des boucs émissaires et en attisant les peurs et les haines, Nicolas Sarkozy a légitimé les idées du Front national, qui s’en trouve plus fort que jamais.

Parce que notre pays ne peut continuer à se livrer, à lui-même, une guerre civile froide, parce que sa défaite est une étape nécessaire, il faut, le 6 mai 2012, barrer la route à Nicolas Sarkozy.

Mais, infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs que traduit le premier tour des élections présidentielles. Ce sera au nouveau président de la République d’impulser une autre politique qui, dépassant l’alternance institutionnelle, ouvre la voie à une réelle alternative politique.

Rétablir un fonctionnement démocratique des institutions en supprimant le cumul des mandats, en assurant l’indépendance de la justice et en élisant les membres du Conseil constitutionnel, ainsi que les autres Autorités indépendantes, à une majorité des deux tiers du Parlement.

Bannir la xénophobie d’Etat en régularisant les sans-papiers qui étudient, vivent et travaillent ici, en ouvrant enfin un réel débat sur l’immigration, en accordant aux étrangers non européens le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales, et faire reculer le racisme en cessant de stigmatiser des catégories entières de population en raison de leur origine ou de leur religion.

Restituer aux citoyens leurs libertés en réformant profondément la justice pénale, en abolissant les lois d’exception, en rétablissant la justice des mineurs dans toute son exceptionnalité, en limitant les fichiers et leur usage à des fins proportionnées, contrôlables et à la finalité établie.

Reconstruire des services publics qui soient à la disposition de tous et auxquels tous doivent avoir accès, lancer un plan d’action pour l’hébergement d’urgence et le logement social, construire une justice fiscale et sociale qui assure la progressivité de l’impôt et la redistribution des richesses.

Construire une autre Europe, aux institutions démocratiques, dégagée du dogme de la concurrence, et ouverte sur le monde.

La LDH, au cours des mois à venir, portera ces revendications comme autant de conditions nécessaires pour que notre société cesse de produire de l’injustice et de l’exclusion, pour que se construise l’espoir d’une société plus solidaire et plus libre.

 

Un site pour voir la prison autrement

www.carceropolis.fr

 

UNE INITIATIVE CITOYENNE POUR VOIR AUTREMENT LA PRISON

 Site soutenu par la LDH

Le 17 avril 2012 a été mise en ligne une plate-forme multimédia inédite, dont l’objectif est de proposer un nouveau regard sur la prison et ainsi inviter le grand public à la réflexion sur la condition carcérale en France.

Comment fonctionnent les prisons françaises ? Comment se compose la population carcérale ? Quel est le quotidien des détenus et du personnel pénitentiaire ? Ces questions, pourtant nécessaires à la réflexion sur le sens et l’efficacité des peines d’emprisonnement, sont peu présentes dans les débats de la campagne présidentielle et plus globalement dans le débat public.

Entre deux faits divers, le traitement réservé à la prison oscille entre fantasme, stigmatisation ou ignorance. Pourtant, beaucoup d’autres regards existent : de nombreux auteurs, réalisateurs et producteurs se sont intéressés au sujet, proposant des représentations variées et de réelles informations sur la nature de la condition carcérale en France.

Convaincu que le sujet de la prison mérite une attention plus accrue, car il questionne le thème majeur du vivre ensemble, et soutenu dans sa démarche par des associations*, un groupe de citoyens bénévoles s’est attelé à regrouper sur une seule et même plate-forme web de nombreuses ressources, jusque-là éparpillées et parfois difficilement diffusables : reportages photographiques, reportages vidéo, web-documentaires, documents audio, …

Les différentes œuvres, mises à disposition gratuitement par plus d’une trentaine d’auteurs, sont proposées en accès libre et classées par thèmes (femmes, mineurs, travail, santé, culture…). Le site propose également la visite modélisée d’une prison, des infographies de chiffres clés, ainsi que des cartes présentant l’implantation des prisons en France et leur taux de densité carcérale.

Cette plate-forme multimédia, qui a vocation à accueillir de nouvelles contributions, propose ainsi un ensemble de regards sur la prison, dans un unique but citoyen : permettre à chacun de se construire une opinion sur le sujet, et ainsi nourrir la nécessaire réflexion que doit mener notre société sur sa politique carcérale.

LES ASSOCIATIONS PARTENAIRES

Acat France . Act Up . Banc Public . Bibliothèque Philippe Soummeroff . Genepi . La Cimade . Ligue des droits de l’Homme . Observatoire international des prisons . Raidh .

Consultez le site www.carceropolis.fr

 

 

Enfants étrangers à la rue en région parisienne : quinze associations saisissent le défenseur des droits

Communiqué

Enfants étrangers à la rue en région parisienne
Quinze organisations* saisissent le Défenseur des droits
(*) ADMIE / CGT-PJJ / La Cimade / Collectif de soutien des exilés Paris / DEI France / Fasti /Gisti / Hors-la-Rue / Ligue des Droits de l’Homme / Mrap / RESF / Sud Collectivités territoriales du CG 93 / Secours catholique-Réseau mondial Caritas / Syndicat de la magistrature /
La Voix de l’enfant

Quinze associations et syndicats ont décidé de saisir le Défenseur des droits de la situation dramatique des mineurs étrangers en danger en région parisienne. Depuis quelques mois, la situation des mineurs isolés étrangers a connu une nouvelle dégradation. Jamais autant de ces enfants n’ont été laissés en errance, à la rue jour et nuit, y compris au plus fort de l’hiver. Pour ces jeunes, l’accès à une protection relève du parcours du combattant. Soupçonnés en permanence de mentir sur leur âge ou sur leur situation, ils font face à la défiance et au rejet des institutions en responsabilité de les accueillir, à commencer par les conseils généraux.

Plutôt qu’organiser leur prise en charge, les institutions responsables de l’accueil des mineurs multiplient les obstacles : sous-traitance de leur accueil, rejets purs et simples sur la base d’entretiens expéditifs surtout fondés sur l’apparence physique, utilisation quasi systématique de l’« âge osseux » dont l’absence totale de fiabilité est démontrée depuis des années par les scientifiques, etc.

Pour les mineurs qui franchissent malgré tout ces multiples barrières, la garantie d’une véritable protection est loin d’être assurée. Pour beaucoup, elle ne comporte aucune prise en charge éducative. Elle se limite à une mise à l’abri sous forme de placement à l’hôtel sans formation dans l’attente de la date fatidique de leur majorité. Cet « accueil » vécu comme une charge financière insupportable conduit le plus souvent ces jeunes regardés comme des étrangers avant d’être considérés comme des enfants à un avenir de sans-papiers, alors qu’une véritable prise en charge pourrait leur permettre d’obtenir un titre de séjour à leur majorité, gage de leur insertion dans la société.

Ces pratiques sont graves. Elles exposent ces jeunes déjà vulnérables à la précarité la plus extrême et au monde de la rue. Indéfendables sur le plan moral, elles sont avant tout illégales au regard du droit français comme des textes internationaux, en particulier de la Convention internationale des droits de l’enfant.

C’est pourquoi les organisations signataires interpellent aujourd’hui le Défenseur des droits et lui demandent d’agir le plus vite et le plus fortement possible pour exiger des pouvoirs publics la protection effective de ces mineurs dans le respect de leurs obligations légales comme des plus élémentaires principes d’humanité. Il y a urgence.

Paris, le 16 avril 2012

 

Election présidentielle : la position de la Ligue des droits de l’Homme

Organisation politique, mais non partisane (lire ici), la Ligue des droits de l’Homme, si elle prend régulièrement position sur les problèmes liés aux droits de l’Homme, n’a pas l’habitude de prendre position à la veille d’une élection présidentielle. L’importance du choix qui se jouera les 22 avril et 6 mai, pour l’élection présidentielle, puis les 10 et 17 juin, pour les élections législatives, et l’extrême gravité de la situation des droits au terme de ce mandat qui s’achève, ont conduit le Comité central de la Ligue a voter la résolution suivante. Téléchargeable ici au format pdf.

Résolution du Comité central de la Ligue des droits de l’Homme, réuni le 14 avril 2012

Notre avenir est l’affaire de toutes et de tous !

 L’élection présidentielle a lieu ces 22 avril et 6 mai ; elle sera suivie des élections législatives les 10 et 17 juin. La Ligue des droits de l’Homme appelle les citoyennes et les citoyens à s’approprier ces élections et à voter.

La Ligue des droits de l’Homme, qui combat depuis 1898 pour les droits politiques et sociaux de tous, Français et étrangers, n’a pas pour tradition de s’exprimer sur le vote avant le premier tour de la présidentielle.

Aujourd’hui, elle le fait avec gravité, en pleine conscience de ses responsabilités, sur la base des valeurs républicaines qu’elle défend et avec la diversité des choix et sensibilités politiques qui la caractérisent.

En juin 2005, face à une loi arbitraire réservant un sort inhumain aux étrangers, la Ligue des droits de l’Homme alertait sur les risques que cette politique faisait peser sur notre démocratie et sur la République. Dans une démarche exceptionnelle, elle lançait un « appel à l’insurrection des consciences ».

En mai 2007, sous l’impulsion directe de Nicolas Sarkozy, ex-ministre de l’Intérieur devenu président de la République, son gouvernement adoptait une série de mesures liberticides, asphyxiant la démocratie, construisant une société de méfiance, de surveillance et d’exclusion, bafouant la justice ainsi que la dignité et les valeurs de la République. Au point qu’en 2009, la Ligue des droits de l’Homme lançait un véritable cri d’alarme sous forme d’une campagne de mobilisation citoyenne, proclamant « Urgence pour les droits, urgence pour les libertés ! ».

En cinq ans, l’action du président de la République − à nouveau candidat − s’est partagée entre le mauvais et le pire : stigmatisation des populations fragilisées par les crises, agressions contre les organisations syndicales, exaltation de la xénophobie portée par le funeste débat sur « l’identité nationale », refus obstiné de mettre en débat les choix d’austérité, de débattre de l’emploi, des droits sociaux, régulièrement donnés comme les sujets principaux de préoccupation, avant la sécurité et l’immigration, pourtant cyniquement mis en avant pour tenter de rallier des voix sur l’unique base de la peur.

La Ligue des droits de l’Homme considère que poursuivre dans cette voie constituerait une menace des plus graves pour la République. C’est pourquoi, elle appelle les électrices et électeurs à refuser que soit poursuivie − et a fortiori aggravée − la régression des droits et des libertés, la xénophobie d’État et l’autoritarisme, la mise en cause de l’égalité des citoyens.

Elle les appelle à exprimer dans les urnes leur volonté de retrouver le vrai visage de la République, et à rester mobilisés au-delà des élections.