Refugiés : Les pays de l’Union européenne délèguent à la Turquie le soin (et l’argent) de s’en occuper

aedhOn a beaucoup parlé ces derniers temps de l’accord scandaleux passé entre l’Union européenne et la Turquie sur les réfugiés. Mais on a peu entendu ou lu de présentation claire des termes de cet accord.

Le communiqué que vient de publier l’Association européenne de défense de droits de l’Homme (AEDH) présidée par le Français Dominique Guibert (ancien secrétaire général de la Ligue des droits de l’Homme), vient à point nommé. Et permet de mesurer à quel point ce marché (il s’agit en effet d’avantage d’un marché que d’un accord) est effectivement scandaleux. On peut aujourd’hui affirmer que le morts qui se multiplient en Méditerranée sont de la responsabilité de l’Europe. Et encore ne  connaîtrons-nous sans doute jamais le nombre de victimes que feront les renvois de personnes fuyant les persécutions vers leurs pays d’origine, qui auront été classés dans les « pays sûrs » par cette même Europe. Et les Européens ne pourront pas dire « nous ne savions pas ».

Communiqué de l’AEDH

Refugiés : Les pays de l’Union européenne délèguent à la Turquie le soin (et l’argent) de s’en occuper

La venue de demandeurs d’asile restera le moment où les pays de l’UE se sont dérobés à leurs responsabilités en sous-traitant moyennant finances à la Turquie l’accueil, le confinement et la réadmission des réfugiés parvenus en Grèce. Pourtant, selon le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des migrants, François Crépeau, dans une interview à Mediapart, cet accord est illégal : « Je suis convaincu qu’il va être cassé par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui ne manqueront pas d’être saisies par un ou plusieurs des migrants renvoyés de Grèce en Turquie ». La principale faille de ce texte est de définir a priori la Turquie comme un « pays tiers sûr ». Le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe vient de renforcer cette appréciation. En effet, après une visite de 9 jours en Turquie, Nils Muizniks vient de faire part de sa préoccupation quant au respect des principes relatifs à un Etat de droit et aux droits de l’Homme. Aussi, tenant compte de sa jurisprudence, la CEDH a jugé, dans le cadre des renvois prévus par le règlement de Dublin, que la Grèce ne pouvait être prédéfinie comme un « pays sûr » pour l’ensemble des migrants et qu’une analyse personnalisée s’imposait avant chaque renvoi. Ce qui vaut pour la Grèce vaut aussi pour la Turquie. Dans le cas présent, les États membres de l’UE veulent éviter les examens individuels qui, étant donné le nombre de personnes concernées, empêchent de pouvoir les renvoyer rapidement et massivement alors que cette procédure est contraire aux principes du droit d’asile qui prévoit un examen individuel de chaque demande d’un côté et interdit le renvoi groupé de l’autre. Il convient d’ajouter que l’accord UE – Turquie se limite à l’échange de 72 000 personnes entrées « illégalement » en Grèce contre des réfugiés syriens enregistrés en Turquie. Reste la question embarrassante que la Turquie, déclarée pays sûr, organise des retours forcés de ressortissants iraquiens, afghans, etc. Nous assistons donc à des «renvois massifs » en chaine. Le Rapporteur spécial des Nations unies ajoute : « Plutôt que de sauver des vies, [cet accord] va mettre davantage de gens en danger » en provoquant l’ouverture de nouvelles routes migratoires plus dangereuses et plus coûteuses. Il poursuit :« Les politiques migratoires fondées sur la répression créent un marché pour les passeurs. » La solidarité entre États membres qui devrait être la règle pour l’accueil des réfugiés, comme le prévoient les conventions internationales, s’effondre sous la surenchère de mesures répressives et de fermeture des frontières. Les gouvernements plient sous la pression des fractions les plus populistes et de leurs raisonnements simplistes auxquels ils ne parviennent pas à apporter des réponses politiques basées sur les valeurs qui fondent l’UE. C’est d’ailleurs le plus petit dénominateur commun négocié entre les pays qui semble être dorénavant le fil rouge de la politique européenne de migration et d’asile. La Commission européenne, dans sa communication présentée la semaine dernière, a pris acte de ces rapports de force entre les États-membres en restant modeste quant à ses ambitions et refusant de faire des propositions à la mesure des défis actuels. Au contraire de cette politique de fermeture aux êtres humains en détresse, nos organisations signataires veulent une politique de solidarité et de responsabilité. Pour nos organisations, l’ouverture de voies légales d’immigration est à court terme la seule alternative au commerce des passeurs. L’ouverture de voies sûres et légales d’immigration est la seule alternative au commerce des passeurs. Il faut agir aussi pour une solution politique du conflit en Syrie et Iraq et pour la reconstruction qui, elles, prendront du temps. La répartition des 160 000 réfugiés entre les Etats membres décidée en automne dernier sous présidence luxembourgeoise, selon un schéma convenu, aurait pu être le premier pas vers une politique d’accueil, alors que maintenant les États-membres veulent imposer la fermeture absolue des frontières et le renvoi immédiat et brutal vers les pays de transit ou d’origine. Cette insupportable décision s’accompagnera d’une indécente liste de pays dits sûrs où les ressortissants originaires seront renvoyés au risque de leur vie. Des Etats-membres de l’UE dévient une part croissante de leurs budgets de coopération au développement pour la consacrer à l’accueil des réfugiés. Ces fonds font défaut pour agir sur les causes des migrations dites économiques : incohérence et myopie ! Nos organisations attendent du Conseil des ministres JAI de jeudi qu’il prenne la mesure de la situation. Il ne s’agit pas d’une « crise des réfugiés » qu’il suffirait de contenir en les éloignant par tous les moyens du territoire de l’UE. Il s’agit des conséquences de l’instabilité du monde dont les pays de l’UE ne se soustrairont pas en déléguant leurs responsabilités à d’autres. La participation du Haut Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés au Conseil des Ministres Affaires Générales ce lundi au Luxembourg sera–telle l’occasion pour les 28 Etats membres de répondre aux graves critiques émises par Monsieur Filippo Grandi ? Luxembourg et Bruxelles, le 17 avril 2016 AEDH, association européenne de défense des droits de l’Homme ALOS- LDH, action Luxembourg ouvert et solidaire – ligue des droits de l’Homme ASTI, association de soutien aux travailleurs immigrés Cercle de Coopération MSF, médecins sans frontières

Succès total des Droits en fête 2016 sur les migrations

Une partie de l'assistance de Droits en fête 2016.

Une partie de l’assistance de Droits en fête 2016.

La grande migration a bien eu lieu au foyer municipal de Loudéac, ce samedi 23 avril ! Un après-midi de fraternité, avec ses moments d’émotion intense, pendant les témoignages vidéo des migrants installés dans la région depuis de longues années pour certains ; mais aussi des moments de franche rigolade, quand Paul a raconté l’entretien d’embauche de sa sœur, ou quand Tarik a rappelé Dieu a ses responsablités…

Vous ne verrez pas ces vidéos sur Internet. Pour des raisons de sécurité. Les régimes politiques mis en cause sont capables de tout, et notamment de représailles sur les familles restées au pays de ceux qui ont eu le courage de témoigner.

Ces témoignages ont été commentés, analysés, avec brio mais surtout avec pudeur et sensibilité par Didier Urschitz, connu aussi sous le surnom de Laké. Laké, ce Roumain pour qui tant de Costarmoricains s’étaient mobilisés en 1991 pour lui faire obtenir des papiers, ainsi qu’à ses compagnons d’infortune, Amadou, maintenant installé dans la région de Loudéac, et qui était là samedi, et à Constantin, qu’on a perdu de vue. Les retrouvailles, 25 ans après, entre ces trois-là et ceux qui avaient créé et animé leur comité de soutien étaient poignantes.

Pendant ce débat sur les migrations internationales dont Laké était médiateur avec Daniel Bessonnat, Catherine Wihtol de Wenden, professeur à Sciences po, a rebondi, après un exposé théorique passionnant, sur les huit témoignages vidéo, qui ont donné chair à son exposé.

Auparavant, Roger Toinard, agrégé de géographie, avait raconté et analysé les migrations bretonnes des XIXème et XXème siècles, et singulièrement celles des Côtes du Nord de l’époque : leur mise en perspective avec ce qu’on appelle maintenant la « crise migratoire » actuelle était riche d’enseignements.

Les photos commentées de Pascale Thoraval et Franck Perrin ont elles aussi donné chair aux drames qui se jouent à côté de chez nous : Calais n’est pas si loin. La Méditerranée non plus, et Bérangère Matta, administratrice de l’association SOS Méditerranée, qui affrète le bateau Aquarius qui sauve jour après jour des centaines de migrants de la noyade, en a fait une présentation saisissante. Le magazine « Interception » de France-Inter, dont les journalistes ont passé une semaine sur l’Aquarius, consacrera son prochain numéro, dimanche 1er mai de 9h10 à 10h, à SOS Méditerranée. C’est un bateau de ce type qui avait sauvé Hang, petite Vietnammiene de 12ans, en 1987, lorsqu’elle est arrivée en France. Sauf que son bateau avait été affrété par, ou au moins avec l’aide du gouvernement de l’époque… Autre époque, autres moeurs…

Un programme pas très joyeux pour une fête ! mais ceci s’est déroulé sans pathos, et le soir, l’humour d’un Jean Kergrist très en forme a permis de décompresser, grâce aux rires qu’il a su provoquer !

Une belle journée, qui a permis de balayer toutes les âneries propagées par l’extrême droite sur les migrations, et qui a redonné un peu d’espoir à tous ses participants !

 

Les Droits en fête : des ajouts au programme du 23 avril à Loudéac

De gauche à droite au premier plan, Mamadou Baguiri, Constantin Aldea, Dezideriu Urshitz et Michel Rault, à la fête de l'intégration, le 7 décembre 1991 (Collection Michel Rault)

De gauche à droite au premier plan, Mamadou Baguiri, Constantin Aldea, Dezideriu Urshitz et Michel Rault, à la fête de l’intégration, le 7 décembre 1991 (Collection Michel Rault)

Les Droits en fête, ça approche !

D’un jour à l’autre, le programme s’enrichit : des associations, alertées par les articles de presse qui nous ont annoncés, nous contactent pour participer à la manifestation. Trop tard pour certaines, malheureusement, mais ça n’est que partie remise.

Mais on a cependant réussi à proposer un accueil à certaines autres. C’est le cas de SOS Méditerranée, dont Bérangère Tara, la représentante dans la région, viendra projeter un diaporama sur son association, qui a hélas fort à faire en ce moment avec les naufrages qui se multiplient (lire ici).

Ce sera le cas également de l’association culturelle Nurhak, qui rassemble les Kurdes de la région de Saint-Brieuc. Un de leurs musiciens viendra jouer à l’ouverture et pendant la pause repas, avec Paul Rousseau (tambour de Guadeloupe), tandis que ses camarades vendront les spécialités pâtissières du Kurdistan qu’ils auront fabriquées.

Il y a 25 ans : la fête de l’intégration à Bon-Repos

Michel Rault, un des organisateurs de la mobilisation qui avait eu lieu en 1991 pour obtenir des papiers à Dezideriou, Constantin et Amadou, viendra évoquer ce souvenir, avec Dezideriou et Amadou, présents à la fête. Une exposition d’articles et de photos de l’époque rappellera cette histoire qui a donné lieu à l’organisation d’un grand repas à Bon-Repos et d’une course relais de Bon-Repos à Saint-Brieuc. Une mobilisation qui, une fois n’est pas coutume, s’est bien terminée : ils ont tous les trois obtenu des titres de séjour. De nombreux membres du collectif sont toujours militants dans des associations de défense des droits de l’Homme comme l’ASTI, la CIMADE, la LDH…

Dans la petite salle du foyer municipal, une cabine sonore, installée par les Bistrots de l’Histoire, proposera une bande sonore sur l’histoire des réfugiés espagnols arrivés à Saint-Brieuc pendant la guerre d’Espagne, et accueillis par le Secours rouge, organisation dans laquelle l’écrivain Louis Guilloux était très engage. Un atelier proposera des jeux et des petits films aux enfants, et pendant la pose repas (apéritif, sandwiches variés, buvette sur place), le film « Paroles de migrants » sera projeté à l’intention de ceux qui n’auront pas pu le voir l’après-midi.

SOS Méditerranée à Droits en fête : « Sauver des vies, maintenant ! »

SOS Méditerranée est une organisation non gouvernementale créée pour porter secours aux migrants qui traversent la Méditerranée dans des conditions effroyables. Devant l’ampleur et l’extrême gravité du problème, une telle association ne pouvait se concevoir qu’à l’échelle européenne, ne serait-ce que pour rassembler la somme nécessaire à sa réalisation. C’est le cas.

L'Aquarius, affrété par SOS Méditerranée, a déjà sauvé des centaines de vies en Méditerranée.

L’Aquarius, affrété par SOS Méditerranée, a déjà sauvé des centaines de vies en Méditerranée.

Créée fin 2015, après une campagne de « crowfunding » très efficace, complétée par  de nombreux mécénats, elle a loué l’Aquarius, un bateau de secours en mer, auquel l’émission « 13.15 le samedi » a consacré un numéro, encore visible ici.

Cette première opération de secours, commencée en février 2016, qui doit s’achever fin avril, devrait être prolongée si le deuxième appel à dons fonctionne. Une telle campagne coûte une fortune : 11.000€ par jour, soit 330.000€ par mois.

Le volet maritime de l’opération est évident, mais le volet médical est lui aussi essentiel. C’est la raison pour laquel SOS Méditerranée travaille en partenariat avec Médecins du monde, qui envisage, à terme, de créer une flotte de secours pérenne.

Le site de l’association présente en détail le projet et le carnet de bord du bateau, qui a déjà sauvé des centaines de vies humaines sur son site.

Le comité de soutien de SOS Méditerranée rassemble dans chaque pays européens des noms illustres, et parmi ses soutiens français on trouve, à côté de Philippe Toreton, Eric Orsenna ou Thomas Piketti, Catherine Wihtol de Wenden, qui interviendra à droits en fête sur le volet des migrations internationales (lire le dossier de presse de l’association ici). Ce qui, entre parenthèses, privera l’extrême droite de son argument préféré : « et vous, vous faites quelque chose pour les aider ? »

Bérangère, membre de SOS Méditerranée, viendra présenter l’association à Droits en fête, après le diaporama sur la Jungle de Calais de Pascale Thoraval et Franck Perrin (soit vers 18h45). Et l’argent recueilli dans l’urne qui sera installée au foyer municipal pendant la totalité de la fête sera partagé entre SOS Méditerranée et le comité de soutien à une famille de demandeurs d’asile dont la demande a été refusée et qui va se trouver dans une situation dramatique, sans logement, dès le mois de juillet à Saint-Brieuc.

Pratique : http://www.sosmediterranee.fr/#

78,9 : le nouveau spectacle de Jean Kergrist à Droits en fête, samedi 23 avril, 21h

JEAN KERGRIST DIT LE CLOWN ATOMIQUE ICI PRENANT LA POSE CHEZ LUI A GLOMEL EN COMPAGNIE DE SON THEATRE AMBULANT VIEUX COMPLICE DE TRENTE ANNEES DE SPECTACLES ENGAGES

JEAN KERGRIST DIT LE CLOWN ATOMIQUE ICI PRENANT LA POSE CHEZ LUI A GLOMEL EN COMPAGNIE DE SON THEATRE AMBULANT VIEUX COMPLICE DE TRENTE ANNEES DE SPECTACLES ENGAGES

Non, Jean Kergrist n’est pas mort, car il joue encore ! et il jouera à Droits en fête samedi 23 avril

76 ans. Quand il a appris que l’espérance de vie des hommes était de 79,3 ans, il a fait le calcul : il lui restait 3 ans et 3 mois. Il était donc temps de faire le point : cela pris la forme d’un spectacle autobiographique, qu’il a, du coup, intitulé tout naturellement  79,3.

Fin janvier, patatras ! L’espérance de vie diminue : elle passe à 78,9. Non seulement la « date de péremption » se rapproche, mais en plus il est obligé de changer de titre… de modifier ses affiches… Heureusement le sous-titre reste valide : « mémoires d’un âne ». « Ça aurait pu être Mémoires d’un ange, mais une lettre a sauté à l’imprimerie ».

Et voilà Jean reparti sur les routes pour jouer un nouveau spectacle, tout juste après avoir fait voyager le pape : « le pape voyage », spectacle hilarant qui mettait en scène l’auteur et son comparse Lors Jouin.

Nouveau spectacle, donc. Dès les premières phrases, le ton est donné : « Statistiquement, il me reste encore 2,9 ans pour obtenir quelques trophées manquants à mon tableau : la légion d’honneur, les palmes académiques, les arts et lettres, le mérite agricole. Ou à défaut, pourquoi pas, la médaille de la ville de Saint-Lo, à laquelle, dites-le bien au maire, je ne suis pas opposé. Pour la médaille militaire, la croix de guerre ou celle des anciens d’Algérie, je crois que c’est fichu, car j’ai renvoyé autrefois mon livret militaire. Tant que j’y suis, j’aimerais aussi, avant la date de péremption fatidique, récupérer 6 points à mon permis de conduire. Partir fauché oui, mais pas chauffard. ».

Jean Kergrist avait toute sa place dans cette 4ème édition des Droits en fête consacrée aux migrations. Ne se qualifie-t-il pas lui-même comme étant un « perpétuel migrant » ?

Jean Kergrist n’a pour le moment joué son spectacle que deux fois dans les Côtes d’Armor : à Binic, en février, et au Gouray, à la Grange aux abeilles, chez Stéphanie et Martial Vivier, dimanche 17 avril, où plus de cent personnes l’attendaient en compagnie des caméras de France 3 Bretagne. Et il revient dans le coin samedi 23, à Droits en fête, au foyer municipal de Loudéac, à 21h. Une soirée réjouissante en perspective !

Et comme le reste de la journée, entrée libre ! Généralement, à la fin de son spectacle, Jean Kergrist fait circuler un chapeau, « pour le repos de son âme ». A droits en fête, le chapeau circulera, mais cette fois ça sera au bénéfice de l’association « SOS Méditerranée », qui affrète le bateau « Aquarius », qui sauve les migrants qui traversent la Méditerranée dans des embarcations de fortune (un reportage lui a été consacré par le journal de 13h de France 2 (à voir ici). SOS Méditerranée sera représentée à Droits en fête par Bérangère Mata.

Henri Leclerc : « un état d’urgence qui inquiète »

Henri Leclerc est une des grandes voix de la Ligue des droits de l’Homme. Il en vit et en construit l’histoire depuis des dizaines d’années, en a été le président, et il en est aujourd’hui le vice-président. Avocat, sa voix compte également dans le débat moral et politique du pays. Ce n’est pas l’homme des idées simples ni simplistes. Aussi, lorsqu’il s’inquiète des conséquences possibles de l’état d’urgence décrété après les attentats du 13 novembre dernier, on a tout intérêt à l’écouter, et surtout à l’entendre. Il signe, ce mercredi 9 décembre 2015, un « point » de vue en une du quotidien Ouest-France, sous le titre « un état d’urgence qui inquiète ».

Un état d’urgence qui inquiète

On l’a appris par un communiqué du secrétariat général du Conseil de l’Europe : les autorités françaises l’avaient informe qu’un certain nombre de mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence étaient susceptibles de nécessiter une dérogation à certains droits garantis par la Convention européenne des droits de l’homme ».

Nous en sommes abasourdis.

Cette Convention lie les pays européens. Elle reconnait et garantit, comme le dit son préambule, leur patrimoine commun d’idéal et de traditions politiques, de respect de la liberté et de prééminence du droit ». ·

Certes, l’article 15 de la Convention le permet dans des circonstances très exceptionnelles, lorsque la vie même de la nation est menacée — ce qui n’est quand même pas tout à fait le cas de la France — mais surtout, on peut s’étonner de ce qu’une mesure aussi chargée de sens n’ait pas donné lieu à une information solennelle de la nation.

Les crimes commis à Paris nous ont secoués de chagrin, d’effroi et même de colère. Le gouvernement a pris des mesures pour circonscrire la menace immédiate, enquêter et prévenir d‘autres crimes peut- être en train de se préparer.

Pour cela, il a proclame l’état d’urgence qui donne des pouvoirs considérables a l’exécutif et relègue au second plan l’autorité judiciaire, constitutionnellement gardienne de la liberté individuelle. Fallait-il que le Parlement le proroge au-delà des douze jours initiaux prévus par la loi et surtout pour une durée longue de trois mois ? Jusqu’à quand ?

C’est en tout cas aujourd’hui la loi. Mais, comme on pouvait s’y attendre, un tel régime se prolongeant ouvre la porte a des excès, voire à des débordements préoccupants : perquisitions de nuit parfois arbitraires, brutales et dévastatrices ; assignations à résidence qui deviennent de fait de véritables rétentions administratives ; utilisation de ces mesures au-dela de la sphère des terroristes pour toucher ceux qui veulent manifester pour des raisons politiques ou sociales.

Le gouvernement envisage de réformer la Constitution dans la précipitation, et de se donner les moyens de prolonger encore dans le temps un tel régime d’exception. Jusqu’à quand ? Qui sera au pouvoir demain ‘? Qui, dans de telles conditions, aura le courage de mettre un terme à cet état d’exception, alors que chacun sait que le terrorisme ne sera pas « éradiqué » comme l’a souhaité le président de la République ?

Le ministre de l’intérieur a affirmé que l’état d’urgence est un État de droit ». Alors, on ne saurait envisager de déroger à la Convention européenne des droits de l’homme qui permet déjà de porter atteinte à de nombreux droits par des mesures prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique à la protection des intérêts essentiels, dont la sécurité publique.

Les autorités françaises ne peuvent avoir pour intention de déroger aux droits indérogeables comme le droit à la vie ou celui de ne pas être torturé. S’agit—il alors du droit at la présomption d’innocence, de celui de n’être privé de sa liberté que dans des cas prévus par la loi, pour des motifs précis et sous le contrôle d’un juge ?

Les criminels du 13 novembre ne doivent pas avoir réussi à montrer que nos principes fondamentaux, qu’ils haïssent tant, ne seraient que des leurres. La peur ne saurait aujourd’hui diminuer la vigilance des citoyens.

(*) Avocat, président d’honneur de la Ligue des droits de l’nomme.

 

 

Jean-Pierre Dubois : « Nous sommes dans une logique de l’impuissance guerrière ».

Jean-Pierre Dubois, au congrès de la LDH à Reims en 2011.

A en croire les médias, piller le fonds de commerce idéologique de la droite c’est faire preuve d’une « grande habileté politique ». Si tel est le cas, alors, oui, chapeau bas M. Hollande.

Ce pillage, dont le président de la république avait chargé sa créature, M. Macron, de l’accomplir au niveau social et économique, il l’a assumé lui-même, au niveau des libertés et de la « sécurité » devant le Parlement réuni en congrès à Versailles, lundi. Il avait déjà bien commencé le boulot, avec les lois sécuritaires, il le poursuit aujourd’hui sans vergogne, allant même jusqu’à recycler des propositions de d’Edouard Balladur…

Objectif atteint : Mme Le Pen elle-même salue l’exercice…

Lundi, le congrès, convoqué par le président de la République, s’est réuni à Versailles. « Le Parlement n’est pas encore une Chambre bleu horizon, comme en 1919, puisque la gauche est au pouvoir. Mais il est de toute évidence une Chambre bleue, convertie à la nécessité de la « guerre » et prête à approuver des mesures d’exception », commente Mathieu Magnaudeix dans Médiapart.

Rares sont les voix qui se lèvent pour dénoncer ce que tout le monde aurait dénoncé si cela avait été proposé par la droite.

On en entend cependant quelques-unes. Rafraichissantes. Celle de Jean-Pierre Dubois, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, par exemple. Qui, dans Rue 89, déclare : « nous sommes dans une logique de l’impuissance guerrière ».

Interrogé par  Robin Prudent, qui lui rappelle : « Après les attentats de Charlie Hebdo, vous nous mettiez en garde contre une possible « hystérie sécuritaire », Jean-Pierre Dubois répond : « Après les attentats de janvier, on a entendu dans la bouche de certains gouvernants, notamment Manuel Valls et François Hollande, que nous étions en guerre.

C’est exactement ce que l’on entend de nouveau.

Si on est dans une logique de guerre, les mots n’ont pas beaucoup de sens, parce que personne ne sait comment faire la guerre à des gens qui ne sont pas un Etat. Comment fait-on la guerre à des gens qui ouvrent le feu au hasard avec des armes rudimentaires que l’on peut trouver très facilement ?

Surtout, cela signifie que nous allons vers ce qui est le sort des démocraties en guerre : l’état d’exception.

L’état d’urgence a été proclamé. Dans un premier temps, on peut se dire que c’est une situation exceptionnelle et que l’on ne peut pas y répondre autrement que par des mesures exceptionnelles.

Sauf que quand on regarde bien, l’état d’urgence n’ajoute pas grand-chose à ce qui est devenu permanent. Les mesures antiterroristes, les lois sur le renseignement, on les a déjà, et cela ne fonctionne pas ».

Lisez l’interview de Jean-Pierre Dubois du 14 novembre 2015 par Robin Prudent, ici.

Et relisez son interview du 8 janvier 2015 par Xavier Delaporte ici.

Ils ne gagneront pas, parce que #NousSommesTousUnis

Les attentats qui ont frappé Paris et Saint-Denis vendredi 13 novembre sont évidemment pain bénit pour les extrémistes de tous poils, qui n’ont pas tardé à distiller leur venin. Le front « national » en tête, évidemment, bien dans son rôle, accompagné par quelques excités tels que Wauquiez  (pardon à René Vautier d’avoir confondu son nom avec celui de cet individu !… Erreur corrigée !), Morano et Ciotti, rejoint par leur chef de meute, l’ancien président de la République pour réclamer davantage de mesures sécuritaires. #NousSommesTousUnis, oui, mais pas avec n’importe qui.

La Ligue des droits de l’Homme, et la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme ont publié, ce samedi 14 novembre en début d’après midi, des communiqués qui mettent en garde contre d’éventuelles dérives prétendues sécuritaires, qui ont largement et depuis longtemps prouvé leur totale inefficacité. Nous les reproduisons ci-dessous.

Communiqué de la Ligue de droits de l’Homme

Ils ne gagneront pas

L’assassinat de plus de 120 personnes à Paris dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015 restera comme un des pires outrages infligé aux habitants de ce pays. Ces actes provoquent horreur et révolte.

C’est d’abord aux victimes et à leurs familles que la LDH pense en toute solidarité et avec émotion.

Parce que notre démocratie a le droit et le devoir de se défendre, l’adoption de mesures exceptionnelles peut répondre à l’urgence du moment.

Ces mesures qui s’ajoutent aux possibilités déjà très larges ouvertes par la législation antiterroriste ne peuvent être appliquées que pour une période limitée et doivent l’être sans aucune stigmatisation.

C’est ensemble, tous ensemble, que nous devons répondre à l’immense défi qui nous est lancé. C’est par une réaction citoyenne que nous devons réaffirmer notre volonté de vivre ensemble et de protéger notre démocratie et nos libertés parce que nous refusons la peur et parce que les assassins

ne gagneront pas.

Communiqué commun de la Ligue des droits de l’Homme et de la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH)

#NousSommesTousUnis

La FIDH et son affiliée française la LDH (Ligue des droits de l’Homme et du citoyen) condamnent avec la plus grande fermeté les actes terroristes intervenus dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015 à Paris et à Saint-Denis.

Nous exprimons nos sincères condoléances aux familles des victimes décédées ainsi que notre solidarité et nos vœux de rétablissement aux nombreux blessés. Nous témoignons de la solidarité exprimée ces dernières heures par de nombreuses organisations membres et défenseurs des droits de l’Homme à travers le monde. C’est l’humanité qui est visée par ces attaques ignobles.

Nous soulignons que les mesures exceptionnelles adoptées, si elles peuvent répondre à l’urgence du moment, ne doivent être appliquées que pour une période limitée et sans aucune stigmatisation.

Nous nous joignons aux appels à l’union citoyenne contre la peur, pour protéger les libertés, la démocratie et notre volonté de vivre ensemble.

La coordination française du droit d’asile écrit au ministre de l’intérieur

Cécile Duflot, qui a dénoncé l’expulsion de migrants porte de La Chapelle, à Paris, s’est vue invitée à les accueillir dans son arrondissement.

Cet argument est un grand classique qui revient depuis des années dans les conversations avec ceux qui voudraient empêcher l’arrivée d’étrangers en France. Jusqu’ici, c’était le monopole de l’extrême droite. Puis la droite s’y est mise aussi. Et aujourd’hui, c’est un socialiste qui s’y colle. Et pas n’importe lequel : un secrétaire d’Etat, en la personne du responsable des relations du gouvernement avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen. Et il semble bien que ce propos n’ait choqué personne au gouvernement…

Ceci est le symptôme de la crise morale qui secoue notre pays. Qu’un membre éminent du parti socialiste puisse lancer une telle énormité montre le degré de cette crise. On se trouve en face de personnes qui quittent leur pays en laissant tout derrière eux, non pas pour « vivre mieux », non pas pour « profiter du système social français », mais simplement pour ne pas mourir, pour échapper à des situations dramatiques qui les condamnent, eux et leurs enfants, à brève échéance.

Heureusement, les associations continuent, contre vents et marées, d’assister ces réfugiés, de leur apporter une aide morale, matérielle, pour qu’ils puissent survivre, et faire valoir leurs droits. Parce qu’ils ont des droits : peu de droits, mais des droits. Et il importe que ces droits soient respectés.

C’est le sens de la lettre ouverte que plusieurs associations regroupées dans la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA), à laquelle appartient la Ligue des droits de l’Homme, viennent d’adresser au ministre de l’Intérieur (liste des associations en fin d’article).

Coordination française pour le droit d’asile (CFDA)

Des associations membres de la CFDA interpellent le ministre de l’Intérieur suite aux expulsions de La Chapelle

Lettre ouverte à Monsieur le ministre de l’Intérieur

Copies à :

Monsieur le ministre de l’Intérieur,

Monsieur le Directeur général de l’OFII,

Monsieur le Directeur général de l’OFPRA,

Madame la Maire de Paris.

Après avoir transité par Calais ou les rivages de la Méditerranée, au péril de leur vie, des personnes migrantes demandent la protection de la France. A la rue, cachées dans un jardin du 18e arrondissement ou sur le quai d’Austerlitz, aux abords de la cité de la mode, elles sont nombreuses à dormir dehors depuis plusieurs semaines à Paris. Elles viennent dans leur grande majorité de la Corne de l’Afrique, notamment du Soudan et d’Érythrée.

Nos associations peuvent témoigner de la détresse de ces nouveaux arrivants. En même temps que nous les informons de leurs droits, nous sommes bien obligés, à notre grande honte, de les avertir que ces droits ont de grandes chances d’être bafoués.

Leur présence dans la rue fait apparaître au grand jour la défaillance systémique des pouvoirs publics, incapables de fournir un accueil décent aux demandeurs d’asile comme aux personnes précaires en général et qui choisissent de recourir à la répression face à une situation humanitaire qu’ils ont laissée dégénérer.

La priorité, aujourd’hui, est que ces personnes puissent accéder à un hébergement stable. Toutes sont confrontées au manque de place en centre d’accueil pour demandeurs d’asile, à la saturation du dispositif d’hébergement de droit commun. Certaines n’auraient, nous dit-on, pas le droit d’être hébergées ? Faux : le droit à l’hébergement est un principe inconditionnel.

Ces personnes doivent avoir un lieu pour se laver, se nourrir, mais aussi se retrouver, être accompagnées et prendre le temps de réfléchir à leur avenir et aux démarches qu’elles souhaitent entreprendre en France.

A cet égard, celles qui souhaitent demander l’asile doivent pouvoir le faire rapidement et dans des conditions conformes à la loi. En Ile-de-France comme ailleurs, déposer une demande de protection est un véritable parcours du combattant. Les organismes de domiciliation sont saturés et la préfecture de police fait courir des délais de plusieurs mois avant de permettre le dépôt d’une demande d’asile. Les traitements éclairs exceptionnels par l’OFPRA de quelques demandes d’asile, qui ont ces derniers jours fait la une des médias, ne font que mettre en lumière, par contraste, l’arbitraire qui règne en la matière et l’absence de volonté politique d’accorder l’asile à toutes celles et ceux qui y ont droit.

Il faut enfin et surtout, que cessent les violences policières. Les évacuations pour quelques heures, avec destruction des effets personnels, comme nous en avons été les témoins ces derniers jours, sont inadmissibles car à la fois inhumaines et purement gratuites. Ce type de politique ne fait qu’aggraver la misère et attiser la défiance envers les pouvoirs publics. Le placement en rétention est évidemment intolérable quand il vise à expulser des personnes vers des pays où les violations des droits de l’homme sont généralisées ; mais il est tout aussi inacceptable lorsqu’on sait par avance que ces personnes ne pourront pas être expulsées et que l’enfermement est une mesure purement vexatoire.

Les personnes concernées et les associations qui les soutiennent ne demandent qu’une chose : qu’on applique le droit ! Le contexte de violences internationales nécessite la mise en place de dispositifs d’accueil et de protection pérennes. Ces solutions doivent répondre aux urgences d’aujourd’hui et aux préoccupations futures.

Ainsi nous demandons :

  • La cessation immédiate des violences et du harcèlement policiers (violences, intimidations, menaces, destruction des biens matériels) à l’encontre des personnes étrangères sans hébergement.
  • L’arrêt des interpellations et du recours à la rétention, la libération des personnes enfermées et l’abrogation des décisions d’éloignement.
  • Une réponse immédiate, humaine et conséquente des pouvoirs publics, par la mise en place d’un dispositif pérenne, pour assurer durablement la dignité et la sécurité de toutes ces personnes, et la garantie effective, transparente et égale de leurs droits :
    • à l’hébergement et à la santé,
    • à décider librement de leur sort,
    • à accéder à la demande d’asile.

Le 12 juin 2015

Signataires : ACAT France, ATMF, Centre Primo Levi, La Cimade, Comede, Dom’Asile, Elena, Fasti, GAS, GISTI, JRS, LdH, MRAP, Secours Catholique

Vous pouvez retrouver ce communiqué sur le site cfda.rezo.net

Congrès du Mans : résolution « Soutenir les droits du peuple palestinien »

Michel Tubiana a défendu la résolution "soutenir les droits du peuple palestien"

Les congrès de la Ligue des droits de l’Homme sont l’occasion de voter des « résolutions », qui sont des textes politiques qui préciseront la ligne que suivra la LDH pendant les deux années qui la séparent du congrès suivant. Au congrès du Mans, les 23,24 et 25 mai 2015, les congressistes ont examiné et adopté quatre résolutions.

La première fait écho aux événements dramatiques qui ont secoué la Palestine l’été 2014. Elle est intitulée « Soutenir les droits du peuple palestinien », et a été adoptée à l’unanimité moins deux abstentions. Elle a été défendue par Michel Tubiana, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme.

En voici le texte.

Le peuple palestinien est victime d’un double déni : celui que lui infligent les autorités israéliennes par leur occupation, et celui que lui inflige la communauté internationale par son refus de reconnaître son droit à l’indépendance.

Aucune organisation de défense des droits de l’Homme ne peut accepter que quiconque s’en prenne à des civils, soit volontairement, soit de manière indiscriminée ou par un recours à la force, la responsabilité des gouvernants successifs d’Israël est, dans le crescendo de violences, écrasante. L’accélération de la colonisation qui n’est rien d’autre que le vol de terres par la puissance occupante, l’impunité légalisée de l’armée israélienne et l’impunité de fait reconnue aux colons, la détention administrative des prisonniers et les juridictions militaires, l’interdiction de tout développement économique de la Cisjordanie, le blocus de Gaza, la rétention des droits de douane dus à l’autorité palestinienne, tout simplement l’empêchement de vivre et l’enfermement que subissent quotidiennement les hommes, les femmes, les enfants de Cisjordanie et de Gaza ne peuvent qu’entraîner une résistance légitime mais aussi générer la violence du désespoir.

En construisant un mur dans lequel elles croient pouvoir enfermer le peuple palestinien, c’est aussi le peuple israélien que les autorités de ce pays enferment. Coupé de son environnement, entretenu dans l’illusion qu’une politique de force pourrait se poursuivre indéfiniment, celui-ci est lui-même atteint par les maux que génère inévitablement la domination d’un peuple par un autre : restrictions démocratiques, attaques contre les voix dissonantes, usage de la torture, injustice sociale, gonflement démesuré du lobby militaro industriel, discrimination à l’égard des Arabes israéliens.

Mais le conflit israélo-palestinien n’aurait pas perduré, ni pris cette ampleur et cette résonance, si la communauté internationale n’avait fait preuve d’une telle partialité. Celle-ci n’a cessé et ne cesse de cautionner la politique israélienne et ce n’est que très récemment que, face à leurs opinions publiques révoltées par le sort réservé au peuple palestinien, plusieurs pays européens ont infléchi leur politique en reconnaissant un Etat palestinien, ou en manifestant leur intention de le faire.

Cela ne suffit pas. Parce que l’Etat d’Israël est un Etat comme un autre, aux mêmes droits et aux mêmes responsabilités, il convient qu’il rende compte de ses actes. Et c’est aux opinions publiques mobilisées qu’il appartient d’exiger de leurs gouvernements que l’ONU fasse respecter ses résolutions, impose des sanctions à l’Etat d’Israël et prenne les mesures nécessaires pour la création d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale, l’accès à tous les lieux saints devant être préservé.

La Palestine doit devenir un membre à part entière des Nations unies. La Cour pénale internationale doit se saisir des crimes de guerre commis. Si la communauté internationale doit faciliter le dialogue et la négociation entre les parties, c’est sans oublier qui est l’occupant et qui est l’occupé, et en faisant respecter le droit international sous tous ses aspects.

D’ores et déjà, il convient d’organiser le boycott des produits issus des colonies et des entreprises qui en tirent profit, ainsi que l’arrêt du commerce des armes. La communauté internationale doit s’opposer à la consolidation des faits accomplis illégaux. L’Europe doit  suspendre l’accord d’association qui la lie avec Israël. C’est aussi de cette manière que l’on peut tenter, aux côtés des forces de paix israéliennes auxquelles il faut rendre hommage, de changer les choses en Israël même.

Fidèle à son engagement en faveur d’un droit international respectueux des peuples et des individus, la LDH réaffirme le droit à l’existence de l’Etat d’Israël et renouvelle son plein et entier soutien aux droits du peuple palestinien.

Résolution adoptée à l’unanimité moins 2 abstentions