Reine, jeune Nigériane, expulsée vers l’enfer par Valls et Cazeneuve

On peut légitimement imaginer que Manuel Valls, et son homme lige Bernard Cazeneuve n’avaient qu’un souci : dépasser les Hortefeux, Besson, et autres Guéant dans l’inhumanité. Cela fait déjà un moment qu’ils les talonaient : c’est désormais chose faite.

La preuve ? Ce témoignage du réseau Welcome, qui raconte l’histoire (ça n’est pas un conte de Noël…) de Reine, une jeune Nigériane de 24 ans, qui vient de vivre l’horreur dans le « pays des droits de l’Homme ». Sans commentaire.

Le récit de l’histoire de Reine

Rennes, le 23/12/14.

Madame, Monsieur,

 Elle s’appelle Reine . C’est une femme nigériane âgée de 24 ans, arrivée en France le 8 février 2010. Après bientôt 5 ans de présence en France, elle s’est fait arrêter à Tours, lors d’un banal contrôle en bus, pour défaut de titre de transport.

Elle est placée en rétention au local de rétention de Tours, le 16/11/14, puis transférée à Rennes. Elle se retrouve, le 17 novembre 2014, enfermée au CRA de Rennes-Saint-Jacques.

Après 4 jours d’enfermement, elle a des douleurs au ventre et souffre de saignements. Elle est hospitalisée quelques heures, puis ramenée au CRA. Le médecin estime que « son état n’est pas incompatible avec la rétention ». Pourtant Reine ne va pas bien et présente quelques troubles. La Cimade demande à ce qu’elle voit un psychiatre, mais elle n’aura droit qu’à un entretien avec l’infirmière du centre.

 Reine reçoit le soutien régulier de F., une visiteuse, qui lui apporte un peu de réconfort et de nourriture car elle ne peut plus ingérer les repas du centre, notamment le soir. Au 25e jour de rétention, alors qu’elle doit être présentée pour la seconde fois devant le JLD, Reine est réveillée brutalement, à 4h du matin, pour être conduite à l’aéroport. Face à ses cris en montant dans l’avion, l’escorte décide de la ramener à Rennes pour la présenter au juge. Malgré le désespoir de la jeune femme, le JLD prononce une nouvelle prolongation de 20 jours.

De retour au CRA, Reine se retrouve seule face à ses angoisses.

 Selon le témoignage de la visiteuse, samedi 20 décembre, « vers 4h, sans avoir été invitée àse préparer a minima, Reine a été entravée, pieds et mains, et n’a pu s’opposer à son départ…Elle se retrouve au Nigéria, pays dangereux, seule, sans argent, ne sachant pas où est sa famille … »

Comment peut-on , en notre nom à tous, infliger de tels traitements à un être humain, et qui plus est, à une femme en danger à son retour au Nigéria compte tenu de son histoire antérieure ?

 Comme de nombreuses femmes nigérianes, Reine fuyait un réseau d’esclavagisme moderne qui l’obligeait à se prostituer pour rembourser le passeur. Malgré ses craintes de représailles, elle avait fini par se résoudre à dénoncer ses proxénètes en espérant obtenir la protection de la France…

Il faut rappeler qu’en avril 2013, Reine avait envoyé une plainte écrite au procureur de la République de Tours pour dénoncer le réseau organisé de proxénétisme (dont l’activité s’apparente à une traite des êtres humains) qui avait organisé sa venue en France et l’avait soumise à la prostitution à Bordeaux, plainte classée sans suite par le Procureur de Tours…

Au CRA de Rennes St-Jacques, Reine avait souhaité être entendue par les services de police pour, à nouveau, dénoncer le réseau de proxénétisme, demande non suivie d’effets !

 Si la plainte avait été classée sans suite en 2013, c’est que Reine n’avait pu donner alors plus d’éléments suffisants aux forces de police par peur des représailles. Par la suite, elle s’est finalement résolue à aller plus loin dans la dénonciation du réseau dont elle était victime, lorsqu’elle a été enfermée au centre de rétention. Rien que pour cette raison, elle aurait dû bénéficier du dispositif prévu dans la loi (CESEDA article L316-1 et R316-1) qui lui aurait permis d’être mise à l’abri durant 30 jours, afin de poursuivre sa démarche dans les meilleures conditions possibles.

Au lieu de cette protection que la France lui devait, les autorités françaises ont décidé de l’expulser !  Un plan d’action national contre la traite des êtres humains a pourtant été adopté en mai 2014 et cette lutte est une politique publique à part entière…

 Nous tenions à vous informer que nous sommes profondément révoltés par cette expulsion que nous trouvons ignoble et cette politique inhumaine rendue en notre nom et financée par nos impôts. Nous continuerons de lutter contre cette politique migratoire basée sur la suspicion et l’obsession sécuritaire au mépris des valeurs humaines qui nous animent.

 Signatures : MRAP 35 ; RESF 35 ; CCFD -Terre solidaire 35 ; La Cimade Rennes / Hendaye ; La Vie Nouvelle 35 ; Ensemble ! 35 ;  Bienvenue 35 ! ; Cercle de silence 35 ; Un toit, c’est un droit ; LDH Rennes/ Redon / Paris ; Parti de Gauche 35. (Cette liste n’est sans doute pas exhaustive, elle est susceptible d’évoluer, tant ce drame a suscité d’indignation).

Projet de réforme du droit d’asile : peut mieux faire !

Le premier ministre avait annoncé une réforme du droit d’asile. Des consultations ont eu lieu, avec les associations de défense des droits de l’Homme, mais le résultat de cette démarche est loin de les satisfaire.

Nous publions ici un avis important, celui de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNDH), où siège notamment Michel Miné, membre du comité central de la Ligue des droits de l’Homme, et qui était venu en octobre 2013 à Loudéac à l’invitation de la section LDH Loudéac centre Bretagne, dans le cadre de la journée internationale du refus de la misère, faire une conférence intitulée « la reconnaissance de la discrimination de la misère, une utopie ? ».

D’autres avis ont été émis, par la Ligue des droits de l’Homme (lire ici), le Défenseur des droits (télécharger ici), ainsi que par le groupe de travail « Asile et immigration » du réseau Alerte (lire ici). La liste n’est pas exhaustive. Avis tous très partagés comme vous pourrez le constater, en raison du manque notable d’ambition, malgré quelques avancées comme le caractère suspensif des recours.

Rappelons que les articles 13, 14, et 15 de la déclaration universelle des droits de l’Homme, qui a été adoptée par la France, établit le droit d’asile comme un droit fondamental :

Article 13

1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat.
2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays.

Article 14

1. Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays.
2. Ce droit ne peut être invoqué dans le cas de poursuites réellement fondées sur un crime de droit commun ou sur des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

Article 15

1. Tout individu a droit à une nationalité.
2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité.

Avis de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNDH)

Paris, le 21 novembre 2014 – La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), sur saisine du ministre de l’Intérieur, rend aujourd’hui un avis sur le projet de loi relatif à la réforme de l’asile, présenté le 23 juillet 2014 en Conseil des ministres. Ce projet s’inscrit dans le processus de communautarisation de l’asile, au titre duquel la France se doit d’assurer la transposition de quatre directives européennes définissant un régime d’asile européen commun.

Dans le contexte actuel marqué par les conflits armés en Irak, en Syrie et ailleurs, ainsi que par la survenance d’événements tragiques aux frontières de l’espace Schengen, il est à craindre que les pouvoirs publics ne soient, une fois de plus, tentés de durcir leur politique de contrôle des flux migratoires, et de prendre des mesures de plus en plus restrictives concernant l’exercice du droit fondamental d’asile. Pour Christine Lazerges, présidente de la CNCDH, « La prolifération de discours sécuritaires assimilant à tort politique d’asile et politique d’immigration et opposant les « bons » demandeurs d’asile aux « mauvais » risque d’entraîner un repli identitaire portant préjudice à l’exercice du droit d’asile par l’alimentation d’un climat de suspicion généralisée à l’encontre de ceux qui sollicitent une protection internationale ».

Pourtant, en 60 ans le nombre de bénéficiaires de l’asile est resté le même. La crainte, souvent exprimée, d’un afflux massif n’est donc pas fondée.

Par son avis, la CNCDH s’inscrit dans sa tradition de défense des droits fondamentaux et appelle le gouvernement et le législateur à aborder la réforme du droit d’asile avec davantage d’ambition. Certes elle relève plusieurs aspects positifs dans le projet de loi, comme notamment l’extension de l’effet suspensif des voies de recours, la présence d’un tiers lors de l’entretien mené par l’agent de l’OFPRA, la reconnaissance d’un droit à l’hébergement pour tous les demandeurs d’asile ou le maintien d’un juge spécialisé de l’asile. Mais le projet lui paraît devoir être amélioré dans le sens d’une meilleure garantie des droits et libertés fondamentaux.

A cette fin, la CNCDH propose dans son avis articulé en quatre axes, des recommandations concrètes qui permettront de garantir mieux encore :

  • le droit à un accès effectif à la procédure d’asile ;
  • le droit au traitement équitable de la demande d’asile ;
  • le droit à des conditions matérielles d’accueil ;
  • le droit à la prise en compte de l’état de vulnérabilité.

 Synthèse des principales recommandations de la CNCDH

Recommandation n° 1 : La CNCDH recommande aux pouvoirs publics de valoriser le savoir-faire associatif et de prévoir des financements permettant aux associations de remplir leurs missions dans de bonnes conditions. Elle se doit tout particulièrement de saluer le travail considérable et le dévouement exemplaire des associations impliquées au premier chef dans l’accueil, l’orientation, l’hébergement et l’accompagnement des demandeurs d’asile.

Recommandation n° 2 : La CNCDH recommande l’urgente simplification de la législation relative au droit d’asile.

Recommandation n° 3 : La CNCDH recommande de supprimer du projet de loi toutes formulations et terminologies entretenant une confusion fâcheuse entre les questions d’asile et d’immigration (par exemple, l’emploi du vocable « l’étranger »), ainsi que celles pouvant être interprétées comme l’expression d’une méfiance de principe manifestée à l’égard de ceux qui sollicitent une protection internationale (par exemple, l’emploi récurrent de doubles négations telles que l’exigence que la demande de réexamen ne soit pas irrecevable ou que la demande d’asile à la frontière ne soit pas manifestement infondée).

Recommandation n° 4 : La CNCDH recommande de consacrer dans le CESEDA la définition donnée par le HCR des motifs de craintes de persécution tenant à l’appartenance à un certain groupe social.

Recommandation n° 5 : La CNCDH recommande de faciliter la domiciliation des demandeurs d’asile.

Recommandation n° 6 : La CNCDH recommande de supprimer le préalable du passage en préfecture. A tout le moins, si celui-ci devait être maintenu, elle en souhaite ardemment l’extrême simplification.

Recommandation n° 7 : La CNCDH recommande de confier à une autorité qui n’est ni sous la tutelle ni sous le pouvoir hiérarchique de l’exécutif, l’ensemble des questions relatives à l’accès au territoire français des demandeurs d’asile et à la décision à prendre sur l’octroi d’une protection internationale.

Recommandation n° 8 : La CNCDH recommande qu’il soit procédé à l’enregistrement de la demande d’asile dans un délai de trois jours.

Recommandation n° 9 : La CNCDH recommande de reconnaître à tous ceux qui sollicitent une protection internationale, sans distinction, un véritable droit au séjour sur le territoire français pendant la durée de la procédure d’asile.

Recommandation n° 10 : La CNCDH recommande de remédier aux difficultés relatives à l’orientation de la procédure d’asile en garantissant les droits des demandeurs faisant l’objet d’une « procédure Dublin » par l’application systématique des clauses humanitaire et de souveraineté. En outre, la CNCDH est opposée à la possibilité de placer en rétention ces demandeurs d’asile.

Recommandation n° 11 : La CNCDH recommande d’entourer la décision de placement en procédure accélérée de davantage de garanties en confiant à la seule autorité responsable de la détermination, le soin de décider de l’orientation de la procédure d’asile. Elle recommande également de permettre à la CNDA, en cas de décision de placement en procédure accélérée affectée d’un vice de procédure, d’annuler celle-ci et de renvoyer à l’OFPRA l’examen de la demande d’asile.

Recommandation n° 12 : La CNCDH recommande d’interdire le placement des mineurs isolés étrangers en procédure accélérée.

Recommandation n° 13 : La CNCDH recommande de revoir les motifs de placement en procédure accélérée, en rappelant tout particulièrement sa ferme opposition à la notion de « pays d’origine sûr ».

Recommandation n° 14 : La CNCDH recommande de garantir une aide lors du dépôt de la demande d’asile en :

  • informant les demandeurs, dans une langue qu’ils comprennent, de la procédure à suivre et de leurs droits et obligations au cours de la procédure,
  • leur permettant de bénéficier gratuitement des services d’un interprète
  • Recommandation n° 15 : La CNCDH recommande d’entourer l’examen des demandes d’asile à la frontière de davantage de garanties en rappelant notamment que l’appréciation de la recevabilité de ces demandes ne peut en aucun cas relever d’un examen au fond des craintes de persécution invoquées par l’intéressé.

Recommandation n° 16 : La CNCDH recommande l’organisation en zone d’attente d’une permanence d’information et d’une permanence d’avocat au titre de l’aide juridictionnelle.

Recommandation n° 17 : La CNCDH recommande d’améliorer l’examen de la demande d’asile sur le territoire en renforçant la qualité des auditions et celle du compte rendu d’audition. En outre, le principe du contradictoire exige que la discussion sur la transcription de l’entretien et sa communication aient systématiquement lieu avant la prise de décision et ce, que la procédure soit normale ou accélérée.

Recommandation n° 18 : La CNCDH recommande que :

  • le demandeur soit informé avant l’entretien de la possibilité d’être assisté par un conseil ;
  • le demandeur puisse se présenter à l’entretien accompagné d’un avocat ou d’un représentant d’une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d’asile, étant précisé que l’effectivité de cette garantie dépendra des moyens consacrés à cette assistance ;
  • le conseil puisse jouer un rôle actif au cours de l’entretien et non uniquement à la fin de celui-ci.

Recommandation n° 19 : La CNCDH recommande de supprimer toute référence à la preuve dans les dispositions du projet de loi relatives à l’appréciation par l’OFPRA de la demande d’asile. Elle entend également rappeler que le principe d’intime conviction s’oppose à la fixation de toute règle gouvernant l’appréciation d’une demande d’asile et interdit de déterminer a priori la valeur probatoire d’un indice ou de tout autre élément de fait. Elle recommande tout particulièrement de veiller à ce que les nouvelles dispositions n’établissent aucune hiérarchie entre les « craintes de persécution » et les « persécutions déjà subies ».

Recommandation n° 20 : La CNCDH recommande de réduire la durée de la procédure d’asile en écartant tout gel du traitement des demandes. La procédure menée devant l’OFPRA doit être encadrée dans un délai de 6 mois, étant précisé que la réduction des délais ne doit aucunement nuire à l’effectivité des garanties procédurales reconnues aux demandeurs d’asile.

Recommandation n° 21 : La CNCDH recommande que toute décision d’irrecevabilité rendue par l’OFPRA soit conditionnée par l’exigence d’effectivité de la protection dans l’Etat concerné – qu’il soit ou non membre de l’UE – et la possibilité d’une réadmission. La CNCDH préconise également de permettre à la CNDA, en cas de décision d’irrecevabilité affectée d’un vice de légalité, d’annuler celle-ci et de renvoyer à l’OFPRA l’examen de la demande d’asile.

Recommandation n° 22 : La CNCDH recommande d’améliorer le régime juridique des décisions de clôture.

Recommandation n° 23 : La CNCDH recommande d’instituer un recours suspensif de plein droit dans le cadre de l’ensemble des procédures d’asile.

Recommandation n° 24 : La CNCDH recommande d’allonger le délai de recours à l’encontre des décisions de refus d’entrée sur le territoire français, des décisions de transfert des personnes faisant l’objet d’une procédure « Dublin » et des décisions d’irrecevabilité ou de rejet prononcées à l’encontre d’un demandeur d’asile en rétention. Elle recommande également la transformation des délais d’heure à heure en délais à jours ouvrés.

Recommandation n° 25 : S’agissant de la procédure d’asile à la frontière, la CNCDH recommande de fixer pour point de départ du délai de recours contre les décisions de refus d’entrée, la date de remise des notes d’entretien de l’OFPRA, afin que le demandeur soit mis à même de motiver son recours contre la décision de rejet de l’office.

Recommandation n° 26 : La CNCDH recommande que la CNDA statue en formation collégiale, que la procédure soit accélérée ou normale. Devant cette juridiction, le libre choix d’un défenseur doit en outre être préservé, y compris au titre de l’aide juridictionnelle. Un temps suffisant pour la préparation de la défense doit être impérativement garanti.

Recommandation n° 27 : La CNCDH recommande de garantir des conditions matérielles d’accueil en :

  • améliorant l’accueil, l’hébergement et l’accompagnement, notamment par la création de nouvelles places dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile,
  • réévaluant le montant de l’allocation temporaire d’attente,
  • renforçant les droits sociaux des demandeurs d’asile, afin de leur permettre d’accéder au marché de l’emploi après le dépôt de la demande, d’être affiliés au régime général de l’assurance maladie et de bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire.

Recommandation n° 28 : La CNCDH, marquant son attachement au libre choix par les demandeurs d’asile de leur lieu de résidence, recommande aux pouvoirs publics de ne pas opter pour un hébergement directif et surtout de ne pas mettre en place un système de contrôle des demandeurs d’asile proche d’un régime d’assignation à résidence. En effet, chaque demandeur d’asile doit avoir la faculté de pourvoir lui-même à son hébergement ou d’être hébergé par un tiers sans se voir pénalisé par la perte de son droit à une allocation. Si le principe d’un hébergement directif devait néanmoins être retenu, la CNCDH estime qu’il est nécessaire de recueillir le consentement du demandeur d’asile.

Recommandation n° 29 : La CNCDH recommande de prendre en compte l’état de vulnérabilité des demandeurs d’asile afin de répondre à leurs besoins réels et sans que cela se fasse au détriment de ceux qui ne présentent pas un tel état de vulnérabilité. En outre, l’utilisation d’outils d’identification de la vulnérabilité ne saurait pallier le manque de moyens dédiés à l’accompagnement et à l’offre de soins afférents. Ces outils doivent être appréciés et validés par les instances responsables, en particulier par le ministère de la santé et des affaires sociales ; ils doivent également être discutés au préalable, de manière pluridisciplinaire, avec les institutions référentes sur le sujet (autorités universitaires, sociétés savantes reconnues, etc.), afin d’éviter que ne soit créée une filière spécialisée pour les demandeurs d’asile sous la responsabilité du ministère de l’intérieur. Enfin, la vulnérabilité doit pouvoir être identifiée tout au long du parcours du demandeur d’asile, et non exclusivement en amont ou lors du dépôt de la demande.

Recommandation n° 30 : La CNCDH recommande l’interdiction de toute privation de liberté pour les mineurs isolés étrangers, ceux-ci ne devant en aucun cas être placés en zone d’attente ou en rétention administrative. Pour la CNCDH, les pouvoirs publics doivent considérer que le fait pour un mineur d’être isolé et étranger emporte une présomption de danger, qui fonde, à son tour, le droit d’accéder à la protection du juge des enfants. En conséquence, les mineurs isolés étrangers doivent recevoir une protection judiciaire et le soutien de l’aide sociale à l’enfance.

 

Les 25 ans de la convention internationale des droits de l’enfant : la France à la traîne…

Ce 20 novembre, on célèbre le 25ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant. On ne sait pas si Manuel Valls a prévu quelque chose… Peut-être lui reste-t-il suffisamment de pudeur pour ne pas trop se manifester. Parce que les droits de l’enfant, en France, en 2014, sous un gouvernement « de gauche », ça fait quand même un peu rêver… Enfants en rétention, malgré les promesses, mineurs isolés abandonnés, dans le meilleur des cas, expulsés… Enfants Rroms condamnés à l’errance… Enfants handicapés non scolarisés (enfants autistes notamment)… le tableau est sombre. Et on n’a pas vu de progrès par rapport à la triste période sarkozyque.

Le réseau éducation sans frontière est évidemment bien placé pour dresser un bilan à l’occasion de cet anniversaire. Il le fait dans communiqué publié ce jour, et diffusé également par la Ligue des droits de l’Homme. Nous le reproduisons ci-dessous. En lien ici, le texte de la déclaration avec les réserves émises par la France.

25e anniversaire de la CIDE
La France piétine allègrement les droits des enfants

 

25ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, ratifiée par la France en 1990. Au cœur de ses principes, la non-discrimination, la recherche de l’intérêt supérieur de l’enfant et la participation de celui-ci aux décisions qui le concernent.

Dans ce pays, de nombreux mineurs n’en bénéficient pas, ou pas autant que d’autres. Parce qu’ils font partie des pauvres, ceux que l’on ne veut pas voir, qui font peur. Parmi eux, certains en sont encore davantage exclus.

Des enfants ballotés d’un hébergement de fortune à l’autre, qui dorment dans la rue, changeant d’école au gré des hébergements insalubres, déplacés, refusés d’inscription scolaire (forcément, ils sont roms)

Des enfants cachés, des enfants qui redoutent le jour, où avec leurs parents déboutés de leur demande d’asile, la Police viendra en force les chercher pour les arracher au quartier, à la ville où ils avaient repris l’espoir d’une vie normale. Des enfants qui voient leurs parents menottés, certains subir des violences lorsqu’ils refusent l’expulsion vers un pays où ils sont menacés.

Des enfants privés de liberté des jours et des jours, enfermés dans un Centre de rétention administrative, vivant eux-aussi l’angoisse de l’expulsion annoncée

Des adolescents isolés étrangers, pris en charge par l’Aide Sociale parce qu’ils sont mineurs, soupçonnés au moment de leurs 18 ans d’avoir menti, sur leur âge, leur vie : convoqués à la police, conduits à l’hôpital sous escorte policière, ils subissent des tests osseux, des examens physiologiques humiliants destinés à les caractériser comme majeurs, quelle que soit la réalité de leur parcours ou des documents fournis, et leur attribuent un âge compris entre 19,7 et 35 ans… En les disant majeurs, on fait d’eux des menteurs, profiteurs, coupables, et certains sont emprisonnés. La plupart sont « seulement » rejetés, mis hors des circuits d’accueil. Parfaits boucs émissaires de fantasmes sur l’étranger parasite. D’autres encore, mineurs ou jeunes majeurs isolés, pourtant scolarisés, vivent dans la rue.

Nous exigeons

  • Que soient vraiment appliqués tous les droits fondamentaux prévus par la Convention Internationale des Droits de lʼEnfant.
  • Qu’une politique d’accueil et d’asile, véritablement protectrice, assure aux mineurs et à leurs familles des conditions de vie décentes et durables dans ce pays.

Le 19 novembre 2014

La chasse à l’enfant continue : deux ados en rétention à Rennes Saint-Jacques

En mai 2012, lorsque Sarkozy a été renvoyé, on ne pensait pas avoir à s’occuper de mineurs isolés placés en centre de rétention administrative par un gouvernement socialiste.

Eh bien si…

Et les ministres de l’intérieur de ce gouvernement n’ont pas grand-chose à envier à leurs sinistres prédécesseurs…

Ainsi, aujourd’hui, deux mineurs sont enfermés au CRA de Rennes. Les jours derniers, c’est un bambin de 15 mois qui était enfermé dans un autre centre.

Le Cimade, qui assiste ces adolescents, a envoyé un communiqué à la presse pour dénoncer ces pratiques odieuses.

Deux mineurs en rétention au Centre de Rétention Administrative (CRA) de Rennes

 

Ces derniers jours, ce sont deux jeunes qui ont été placés en rétention par la préfecture de Loire Atlantique, au mépris de leur situation de mineurs isolés arrivés en France quelques jours auparavant.

Il s’agit d’un jeune homme âgé de 16 ans et demi en provenance du Mali et d’une jeune fille âgée de 14 ans et demi en provenance d’Angola. Ils ont tous deux présenté des documents d’état civil attestant de leur âge, mais ont malgré tout été assimilés à des majeurs par les autorités françaises. Une prise d’empreintes a en effet révélé une fausse identité de personnes majeures, identité utilisée par des tiers pour obtenir de faux passeports.

Si les conditions de leur arrivée en France ne peuvent être élucidées, les autorités françaises font délibérément le choix de traiter ces jeunes sans tenir compte de leur jeune âge, ni des documents qu’ils présentent pour en attester. Aucune procédure d’authentification n’a été diligentée avant leur placement en rétention en vue de leur expulsion. Ce, au mépris de leur situation de grande vulnérabilité.

Le jeune homme a été remis en liberté par le Juge des libertés et de la détention mardi 28 octobre. La jeune fille va être présentée aux juges administratif et judiciaire ce jeudi 30 octobre.

Tous ces éléments démontrent l’acharnement dont sont victimes ces deux jeunes. La toute jeune fille est privée de sa liberté depuis cinq jours, dans un lieu d’enfermement où elle n’a pas sa place en tant que mineure, en attente de son expulsion vers un pays où elle a été victime de traitements inhumains et dégradants.

La Cimade dénonce l’acharnement de la préfecture de Loire Atlantique à l’égard de ces deux jeunes. C’est la marque d’une politique aveugle menée contre les personnes étrangères, notamment les plus vulnérables.

La Cimade demande la régularisation de leur situation, c’est-à-dire leur protection, à laquelle ils ont droit en tant que mineurs.

Rennes, le 30 octobre 2014

 

Famille congolaise expulsée en Belgique : elle va être prise en charge par RESF

La famille congolaise qui  a successivement séjourné à Saint-Brieuc, Loudéac, puis Dinan, où on l’avait envoyée il y a quelques jours pour semble-t-il les expulser plus discrètement, n’a su où on l’emmenait que quand l’avion a atterri, à Bruxelles. On vous a dit « avec humanité » !

Les parents et leurs deux enfants étaient naturellement injoignables, jusqu’à ce qu’ils réussissent à nous appeler il y a quelques minutes. Ce qui a permis de le remettre en contact avec leur avocat, qui cherchait lui aussi à les retrouver, pour qu’ils soient pris en charge par le Réseau éducation sans frontière belge, ce qui va être fait très rapidement. Leur avocat va maintenant pouvoir entamer les procédures pour essayer de les faire revenir en France, et de leur éviter un retour au Congo où ils courent des risques majeurs.

La section s’est occupée aujourd’hui de récupérer les affaires qu’ils n’ont pas pu prendre avec eux, dont un petit four micro-ondes qu’ils ont acheté vendredi dernier…

Acharnement de la préfecture d’Ile et Vilaine contre un jeune Géorgien

Ça s’appelle de l’acharnement. Edouard Balasanov, fils aîné d’une famille de deux enfants, arrivé en France avec ses parents en 2009 à Rennes, vient d’être placé en rétention. Nous avions déjà consacré un article à Edouard et sa famille, en novembre 2012 : il venait d’écrire au préfet d’Ile et Vilaine pour lui expliquer la situation de sa famille. Voici le communiqué que vient de publier RESF,et qui explique la nouvelle situation d’Edouard. Une pétition est en ligne ici.

D’origine arménienne, la famille Balasanov a fui la Géorgie dès 2004 pour la Russie, avant de solliciter la protection de la France en 2009.
Le couple est arrivé en octobre 2009 à Rennes, où est né Elina un mois plus tard. Elle est aujourd’hui scolarisée à l’école maternelle du Clos Joury au Rheu.
Eduard, le fils aîné, les a rejoint en décembre 2009. Agé de 17 ans, Eduard n’a pas eu la chance d’être scolarisé, mais a rapidement appris le français. Toujours prêt à faire l’interprète auprès des associations, Eduard a été interpellé jeudi 27 septembre lors d’un contrôle routier en se rendant au secours populaire, où il travaille comme bénévole.
La famille étant déboutée de l’asile depuis avril 2012, la Préfecture d’Ille et Vilaine a décidé de placer Eduard en rétention et de sortir ses parents et sa petite soeur du CADA pour les assigner à résidence dans un hôtel à Rennes pendant 45 jours.
Chassée de Géorgie par les nationalistes, la famille Balasanov n’a plus aucun lien avec ce pays. Leur avenir est dorénavant en France, où M.Balasanov travaillait légalement avant qu’on ne lui retire son titre de séjour.
Nous exigeons la libération d’Eduard et la régularisation de toute la famille.

Rétention : une politique massive d’enfermement et d’expulsion confirmée (CIMADE)

Communiqué de la Cimade, après la publication du nouveau marché public sur l’intervention associative en centres de rétention.

Le nouveau marché public qui régit l’intervention associative dans les centres de rétention vient d’être publié. Il traduit la volonté de poursuivre une politique similaire à celle conduite en 2012.

Ce marché a pour objet de garantir aux personnes enfermées une aide à l’exercice de leurs droits. Présente dans 12 centres de rétention sur les 25 existants, La Cimade assure cette mission, porte un regard vigilant et témoigne au quotidien des atteintes aux droits fondamentaux dont sont victimes les personnes étrangères.

Fin 2012, le nouveau gouvernement annonçait une remise à plat du dispositif d’expulsions au travers d’un marché reconfiguré dans sa globalité. Un marché transitoire a donc été conclu dans l’intervalle.

Pourtant, l’appel d’offres fraichement publié démontre la volonté du gouvernement de faire tourner la machine à expulser à plein régime. 24 des 25 centres de rétention demeurent ouverts et de même taille. La prévision du nombre de personnes qui y seront enfermées est basée sur les chiffres des années 2011-2012, une référence lourde de sens s’agissant d’une période où les expulsions ont été particulièrement massives.

Sur le terrain, la continuité de cette politique se traduit chaque jour par la violation des droits fondamentaux des personnes ou par des pratiques inhumaines. Les exemples récents s’enchaînent : séparation des familles, expulsion d’étrangers malades, charters quasi hebdomadaires.

Enfin, Mayotte, 101ème département, continue à subir un régime d’exception à l’abri des regards. Le marché ne prévoit pas d’aide à l’exercice des droits dans le pire des centres de rétention de France. Ce dernier rassemble à lui seul autant de personnes enfermées chaque année que dans tous ceux de la métropole réunis. Mayotte, où le régime dérogatoire, déterminé par ordonnance, prive les personnes étrangères expulsées de quasiment tout droit.
La Cimade appelle une nouvelle fois le gouvernement à une refonte urgente de sa politique migratoire, notamment pour s’engager vers la fermeture des centres de rétention.

La famille Mejidov expulsée vers la Pologne, une mère de famille menacée

Nuit du dimanche 28 au lundi 29 juillet, 2h30 : une vingtaine de militants sont groupés devant les grilles du centre de rétention administrative de Rennes, pour protester contre l’expulsion de la famille Mejidov. Les parents et leurs deux enfants de 3 et 4 ans y sont enfermés depuis le dimanche 21 juillet.

La famille tchétchène avait réussi à s’enfermer dans leur chambre en bloquant la porte. Au bout d’une demi-heure, les policiers ont fini par pénétrer dans la pièce. « Nous avons alors entendu les cris des enfants et de leurs parents qui tentaient de résister à leur expulsion ». Expulsion programmée à 9h45 vers la Pologne, pays par lequel la famille est rentrée dans l’espace européen. Et il est quasiment certain que la Pologne les renverra en Tchétchénie, où c’est leur vie qui est menacée.

Un policier est sorti avec les enfants dans les bras, suivi quelques minutes plus tard des parents menottés.

Les enfants ont été habillés par les policiers, puis toute la famille a été embarquée à 4h15 dans 2 véhicules pour l’aéroport de Roissy.

Leur téléphone est coupé…

 

Toute cette scène s’est déroulée sous les yeux de Hamest C, mère de famille kurde de Géorgie, qui partageait le même bâtiment que la famille Mejidov.

Effondrée par tant de violence morale et physique, elle ne dort plus et refuse de manger, de boire, de suivre son traitement depuis 2 jours.

Elle sait que le même sort l’attend demain mardi, si la cour d’appel ne la libère pas cet après-midi (audience à 15h30 au Parlement de Bretagne). Un vol est prévu dès demain pour la Pologne. Cette mère de famille laisserait derrière elle, son mari, Bella sa fille de 22 ans et Malkhaz un jeune lycéen de 18 ans scolarisé à Rennes.

 

Deux enfants de 2 et 3 ans en rétention au centre de Rennes Saint-Jacques (35)

Programme du vendredi 26 juillet, Rennes.

9h30 : 9 référés logement pour des demandeurs d’asile

10h : Rendez-vous avec le juge des libertés et de la détention pour la famille Mejidov .

14h : recours contre placement en rétention pour Mohamed Y. , demandeur d’asile syrien.

14h30 : recours contre placement en rétention pour Hamest C, mère de famille géorgienne, dont un fils est scolarisé au lycée V.H Bash.

Le cas de la famille Mejidov est particulièrement éloquent. Voici le récit de leur parcours, par le Réseau éducation sans frontière.

La famille Mejidov, un couple tchétchène et ses deux  enfants, Ramyi, 2,5 ans et Riyad 3,5 ans, est arrivée à Nantes en février 2013 pour demander l’asile en France.

Comme de nombreux demandeurs d’asile, cette famille a connu pendant plusieurs semaines l’errance entre la rue et le 115. Un hébergement stable obtenu en avril 2013 dans un hôtel, a permis la scolarisation du fils aîné à l’école maternelle La Fontaine de Saint Sébastien Sur Loire.

Sous le coup d’une réadmission vers la Pologne (les demandeurs d’asile doivent normalement faire leur demande dans le premier pays européens par lequel ils entrent dans l’UE), la famille Mejidov a été convoquée le 2 juillet à la préfecture de Nantes. Un vol leur a été annoncé pour le 11 juillet et une assignation à résidence leur a été notifiée. Craignant un retour forcé en Pologne, la famille ne s’est pas présentée le 11 juillet. La préfecture a alors mis fin à leur hébergement.  

Après avoir fait le recours contre la réadmission, la famille Mejidov a regagné l’hôtel avec l’accord de la préfecture, qui a renouvelé le contrat pour l’hébergement jusqu’au 24 juillet. 

Dimanche 21 juillet à 7h, une vingtaine de policiers ont fait intrusion dans la chambre d’hôtel, alors que la famille dormait encore…Réveil brutal pour le couple et leurs deux jeunes garçons embarqués vers le commissariat de Nantes, puis vers le CRA de Rennes, où ils sont arrivés vers 14h. 

Lundi matin à 4h, nouveau réveil brutal pour cette famille par les policiers du CRA pour les conduire à l’aéroport. Le père a crié pendant 1/4 h son refus de partir. Les policiers ont finalement renoncé, après les menaces habituelles « la prochaine fois, on utilisera la force ».

Le tribunal administratif de Rennes a confirmé le 24 juillet le placement en rétention de la famille Mejidov. Selon la circulaire du 6 juillet 2012, le juge a estimé que l’enfermement de ces 2 jeunes enfants était légal, puisque leurs parents n’avaient pas respecté l’assignation à résidence et avaient fait 2 refus d’embarquement.

Rien ne peut justifier l’enfermement des enfants. Après avoir subi 2 intrusions policières traumatisantes, les 2 jeunes garçons souffrent de cette privation de liberté et présentent des troubles du sommeil et de l’appétit.

RESF 35 demande la libération immédiate de cette famille et que leur demande d’asile soit examinée en France, où plusieurs membres de leur famille vivent depuis plusieurs années après avoir obtenu le statut de réfugié (la sœur de Madame Mejidov a la nationalité française).

Après un bref et approximatif décompte, Riyad et Ramyi ont le triste privilège d’être les 10ème  et 11ème enfants enfermés en rétention depuis la circulaire du 6 juillet 2012. Notre décompte est sans doute très sous-estimé. Mais le cabinet du ministre, lui, tient des comptes rigoureux : qu’il publie le nombre, le nom et l’âge des enfants qu’il a emprisonnés depuis qu’il s’est engagé à ne plus enfermer d’enfants.

Pour mémoire : communiqué du Parti socialiste du 23 septembre 2009

Le Parti socialiste, lors de la réunion de son Secrétariat national du 23 septembre, a décidé de signer l’appel lancé par le Réseau Education Sans Frontières « Pour le respect par l’Etat des droits de l’enfant et de sa famille. » Qu’il s’agisse de démembrement des familles lorsqu’un des deux parents est expulsé, ou de la mise en rétention des enfants avec leurs parents menacés d’expulsion en centre de rétention administrative, les droits des enfants sont mis à mal par la politique actuelle du gouvernement. Pour le Parti socialiste, l’intérêt supérieur de l’enfant doit rester au premier plan. Le maintien de l’unité familiale doit devenir la règle, mais ne doit plus servir de prétexte à l’enfermement d’enfants.

Communiqué qu’on peut retrouver sur le site du parti socialiste à cette adresse :

http://www.parti-socialiste.fr/communiques/le-parti-socialiste-signe-lappel-resf-pour-le-respect-par-letat-des-droits-de-lenfant-et

A noter que la situation est tout aussi grave à Saint-Brieuc, dans les Côtes d’Armor…

Lettre à Chr. Taubira contre la délocalisations des audiences à Roissy et au Mesnil-Amelot

Huit associations, dont la Ligue des droits de l’Homme, ont écrit à la Garde des sceaux, Christiane Taubira, pour protester contre le projet de délocalisation des audiences concernant les étrangers à l’aéroport Roissy – Charles-de-Gaulle, et au centre de rétention du Mesnil-Amelot. Dans ce deuxième cas, c’est un peu comme si le tribunal siégeait dans la prison…

Par ailleurs, une pétition intitulée « Défendre et juger sur le tarmac : stop à la délocalisation des audiences ! » vient d’être mise en ligne sur le site de pétitions citoyennes, Avaaz, où on peut la signer.

 

Paris, le 18 juillet 2013

Madame la Garde des sceaux, ministre de la justice,

Plusieurs ministres de l’intérieur ont successivement tenté d’obtenir la « délocalisation » dans la zone aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle des audiences des juges des libertés et de la détention du tribunal de Bobigny chargés de statuer sur les demandes de maintien en zone d’attente des étrangers auxquels l’entrée sur notre territoire est refusée.

Il semble que Manuel Valls y soit parvenu puisqu’est annoncée pour décembre l’ouverture d’une salle d’audience construite à grands frais au bord des pistes de cet aéroport et jouxtant la « ZAPI 3 » où ces étrangers sont enfermés.

Est également annoncée l’ouverture, dès septembre, d’une salle d’audience située sur le site du centre de rétention du Mesnil-Amelot où les juges des libertés et de la détention du tribunal de Meaux statueraient sur les demandes de prolongation de la rétention des étrangers que l’administration se dispose à éloigner de notre territoire.

Vous ne pouvez, bien entendu, ignorer ni ces décisions ni les intenses préparatifs, incombant à votre administration, auxquels donne lieu l’organisation de cette justice d’exception applicable à des étrangers tenus pour indésirables.

Vous le pouvez d’autant moins que par un courrier en date du 17 mai –toujours sans réponse à ce jour malgré plusieurs interventions auprès de votre cabinet– nous sollicitions un entretien pour vous dire notre inquiétude de voir aboutir ces projets porteurs de graves dérives pour le fonctionnement de la justice.

Vous le pouvez d’autant moins que, depuis, une pétition demandant la fermeture de la salle d’audience de Roissy, avant même son inauguration, a déjà recueilli près de quatre mille signatures.

Vous le pouvez d’autant moins que le Conseil national des barreaux a adopté à l’unanimité, le 6 juillet, une motion par laquelle il demande lui aussi fermement l’abandon de ce projet, auquel il manifeste sa plus ferme opposition.

Vous le pouvez d’autant moins que par un courrier du 20 juin, dont vous avez été destinataire en copie, madame la présidente de la Commission nationale consultative des droits de l’homme a fait valoir auprès du ministre de l’intérieur que ces projets étaient notamment de nature à porter de graves atteintes au principe du procès équitable et lui a fait connaître son souhait que le gouvernement ne mette pas en place ces salles d’audience.

En dépit de ces alertes et de nos sollicitations vous n’avez jugé utile ni de nous recevoir ni de vous exprimer.

Ministre de la justice, vous êtes garante des conditions dans lesquelles la justice est rendue dans notre pays et de leur conformité aux principes fondamentaux que tous les justiciables –nantis ou précaires, français ou étrangers– peuvent légitimement revendiquer.

C’est donc très solennellement que nous voulons vous redire :

  • que le transfert d’audiences spécialisées au sein d’une « zone d’attente » gérée par le ministère de l’intérieur, dans laquelle ses services retiennent les personnes appelées à comparaître à la demande de cette même administration, ou pour le tribunal de grande instance de Meaux sur le site de rétention du Mesnil-Amelot, sont de nature à porter gravement atteinte à l’indépendance de la justice et à son impartialité ;
  • que la publicité des débats, dont vous savez qu’elle compte au nombre des exigences du procès équitable, ne sera pas assurée, compte tenu notamment de l’éloignement de ces annexes et de leur isolement, particulièrement difficiles d’accès pour les non-initiés et très mal desservies par les transports en commun.
  • enfin que l’exercice des droits de la défense sera également gravement compromis, compte tenu des pertes de temps et des frais de déplacement qui seront imposés aux avocats, dont un grand nombre intervient au titre de l’aide juridictionnelle, avec une rétribution dérisoire.

A l’évidence, il ne serait pas responsable d’éluder plus longtemps ces objections de principe : les préoccupations gestionnaires du ministère de l’intérieur ne permettent évidemment pas de les évacuer et elles ne peuvent être traitées au niveau des comités de pilotage installés à Bobigny et Meaux, exclusivement chargés de décider des conditions matérielles et administratives de fonctionnement de ces annexes judiciaires.

Nous ne pouvons nous résigner à penser que le silence assourdissant du ministre de la justice et les atermoiements de son cabinet seront la seule réponse à l’appel qu’avec d’éminentes autorités et de nombreux citoyens nous vous adressons publiquement.

La décision d’ouvrir ces salles d’audience délocalisées, exclusivement dédiées à l’examen –en catimini et dans un environnement policier– du sort d’étrangers en situation de grande précarité juridique et psychologique, doit être réexaminée et il n’est pas douteux que cet examen conduise à son abandon, tant la justice qui serait ainsi rendue vous apparaîtra indigne au regard des standards européens et internationaux les plus fondamentaux.

Nous ne désespérons donc pas de vous rencontrer ou de vous entendre très rapidement et, dans cette attente, nous vous prions de croire, madame la Garde des sceaux, à l’assurance de notre haute considération.

Organisations signataires :

Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE)

Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé)

Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI)

La Cimade

Ligue des droits de l’homme (LDH)

Syndicat des avocats de France (SAF)

Syndicat de la magistrature (SM)

Union syndicale des magistrats administratifs (USMA)