La Ligue des droits de l’Homme et les Gens du voyage

De gauche à droite, Nadia Doghramadjian, Jean-Yves Varin et Gérard Le Ny.

Tout d’abord, deux précisions sur des choses lues ou entendues ici ou là :

  • Renseignement pris auprès de la mairie de cette ville, il n’y a pas de cimetière pour chiens à Aubervilliers. En revanche, cette ville mène une politique exemplaire pour l’intégration des Rroms (lire ici).
  • Missak Manoukian était Arménien, il a suivi une formation de menuisier, a été tourneur, et aussi poète (plusieurs de ses poèmes ont été publiés en 1960 dans un recueil intitulé « la chanson de ma vie »). Même s’il partageait avec elle un immense amour de la liberté, il n’appartenait pas à la communauté des Gens du voyage. Lire l’article que lui consacrent l’encyclopédie Larousse et Wikipédia.

Les problèmes rencontrés par les Gens du voyage sont depuis toujours une des grandes préoccupations de la Ligue des droits de l’Homme. Nous avions par exemple consacré une table ronde, pendant les Droits en fête à La Motte, une table ronde sur la scolarisation des enfants Rroms et de enfants voyageurs, avec trois spécialistes : Jean-Pierre Dacheux, universitaire, Jean-Yves Varin, cinéaste (tous deux membres de la LDH), et Marie-Claude Garcia – Le Quéault (lire ici).

La délégation du comité régional de la Ligue des droits de l’Homme qui s’est rendue à l’aire d’accueil de Cojean le 17 décembre (photo ci-contre) est allée à la rencontre des voyageurs qui y séjournaient. Plusieurs d’entre eux connaissaient très bien un des membres de la délégation, Jean-Yves Varin (au centre sur la photo). Ce cinéaste, président de la section brestoise de la Ligue des droits de l’Homme, a réalisé plusieurs films sur les Gens du voyage, dont « La Roulotte perdue », que nous avons projeté pendant les Droits en fête à La Motte en mars 2013. Voir ici une interview de Jean-Yves Varin par la chaîne Tébéo, et ci-dessous la vidéo de son intervention pendant les Droits en fête.

Spécialiste de la culture tzigane, il organise durant tout le mois de janvier 2014, avec la section brestoise de la Ligue des droits de l’Homme, à la médiathèque de Plouguerneau (29), un festival consacré aux Gens du voyage.

Au programme :

  • des expositions : Itinérances en Tsiganie, de Marie-José et Claude Carret, photographes voyageurs, et photographies de Jean-Yves Varin, du 7 au 31 janvier.
  • des projections de films :
    • Swing, de Tony Gatlif, le vendredi 17 janvier à 20h30
    • De la roulotte au parking, de Jean-Yves Varin, et Cause commune, de Sophie Averty vendredi 31 à 20h30, suivis d’une rencontre – débat avec Jean-YvesVarin, Marie-José et Claude Carret.
  • Un atelier d’écriture, avec Anne Plihon-Blaise, sur le thème « Roms, tziganes, manouches, apatrides… », samedi 25 janvier de 10h30 à 12h.
  • Un concert :Amari Famili, groupe de jazz manouche qui s’était produit aux Droits en fête à La Motte le 31 mars 2013.

httpv://youtu.be/EyLjjhEBY1k

Gens du voyage à Loudéac : la Ligue condamne les propos du maire

Dans le communiqué qu’il a adressé aux quotidiens Ouest-France et le Télégramme, le comité régional de la Ligue des droits de l’Homme a effectivement dénoncé l’état indigne du bloc sanitaire de l’aire d’accueil des gens du voyage à Loudéac.

Mais il a aussi, et surtout, dénoncé les propos proférés par le maire à l’encontre de la communauté des gens du voyage, lors de la réunion du conseil municipal du 14 novembre dernier. Quand, par exemple, le maire compare les sépultures des gens du voyage avec le cimetière des chiens d’Aubervilliers. Nous n’inventons rien, tout le monde peut le vérifier, ça se trouve dans la séquence n°5 de la captation vidéo de la réunion réalisée par la mairie et postée sur son site Internet, très exactement à 13’10 du début (le passage sur les gens du voyage commence à 6’50 du début de la vidéo n°5, et se poursuit au début de la vidéo n°6).

La Ligue des droits de l’Homme dénonce de la même façon toutes les autres insultes et calomnies proférées par l’élu ce soir-là à l’encontre des gens du voyage qui, faut-il le rappeler, sont des citoyens français à part entière.

La Ligue des droits de l’Homme condamne évidemment les dégradations commises sur l’aire, qui sont réelles et constatées. Elle demande simplement que les accusations ne soient portées que si elles sont étayées par des preuves, ce qui n’est manifestement pas le cas. En outre,  cela ne justifie pas de traiter par le mépris, la dérision et la calomnie l’ensemble de la communauté des gens du voyage. La plupart des municipalités, toutes tendances politiques confondues, entretiennent des relations apaisées et même amicales avec les gens du voyage. Pourquoi cela ne serait-il pas possible à Loudéac ?

Et la Ligue des droits de l’Homme n’est pas la seule à s’émouvoir : http://www.rue89.com/2013/12/17/maire-loudeac-les-gens-voyage-cimetiere-chiens-248398

 

 

Week-end chargé pour la section : deux assemblées générales

 

Assemblée générale de la section vendredi soir à Trévé.

Week-end chargé pour la section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme : vendredi soir, assemblée générale de la section, samedi matin, assemblée générale du comité régional. Deux réunions bien suivies, qui ont permis de faire le bilan de nos actions localement et sur le plan régional, et d’affiner nos projets. Le temps fort en 2014 sera la deuxième édition des Droits en fête, les 25 et 26 février, avec une exposition de posters de l’association Poster4tomorrow, prêtés par Hervé Matines, et le samedi, une conférence gesticulée avec Frank Lepage.

Le thème de la fête sera, cette année, un sujet bien d’actualité: la démocratie…

Le comité régional s’est saisi samedi matin de l’affaire des gens du voyage insultés par le maire de Loudéac. Une délégation s’est rendue sur l’aire d’accueil de Loudéac, et un communiqué transmis à la presse (à lire ici).

 

 

 

 

 

Assemblée générale du comité régionale : les sections sont venues avec leurs Roll'up.

Aire d’accueil des gens du voyage à Loudéac : précisions sur ce qui est paru dans Ouest-France

Le communiqué que nous avons transmis hier samedi 14 décembre au journal Ouest-France est paru tronqué, et, pire, il peut laisser supposer que nous mettons en cause la société Hyacenda, qui a la gestion de l’aire d’accueil des gens du voyage de Loudéac. Nous comprenons qu’un journal ne puisse pas publier in extenso tous les communiqués qu’il reçoit, mais là, le journal n’a conservé de notre communiqué que les reproches sur l’aspect matériel des choses, certes importants, mais en l’occurrence pas essentiels : ce sont les propos du maire qui sont constitutifs d’un délit. Vous trouverez ci-dessous ce qui est paru dans Ouest-France ce matin, et en fin d’article le communiqué original que nous avions transmis.

Contacté, le journaliste qui a traité ce sujet est désolé: il avait transmis le communiqué intégral. Un nouvel article va paraître demain lundi.

Ce qui est paru :

Notre communiqué :

La ligue des droits de l’Homme condamne les propos du maire de Loudéac au sujet de gens du voyage

Le comité régional de la Ligue des droits de l’Homme dénonce les propos scandaleux tenus par le maire de Loudéac au sujet des gens du voyage lors la réunion du conseil municipal du 14 novembre dernier. Pour Gérard Le Ny, délégué régional, Jean-Yves Varin, responsable du groupe de travail sur les gens du voyage, et Nadia Doghramadjian, membre du bureau national de la Ligue  et responsable du groupe de travail sur les discriminations et le racisme, « ces propos sont un véritable appel à la haine » : comparaison indigne des sépultures des gens du voyage avec le cimetière des chiens d’Aubervilliers, accusations de vandalisme et de vol sans aucun fondement… ces propos, indignes d’un élu de la République, visent à dresser une partie de la population contre une autre. Une délégation du comité régional s’est rendue sur place, et a pu constater l’état lamentable dans lequel se trouve cette aire, état qui manifestement ne date pas d’hier. Si les prises électriques ont été changées, l’ampérage de l’installation est toujours insuffisant et les coupures électriques fréquentes ; le bloc sanitaire est une véritable infection. Le comité régional de la LDH rappelle que les gens du voyage sont des citoyens à part entière, qui méritent autant de respect que n’importe quels autres.

 

Gens du voyage à Loudéac : la LDH condamne les propos du maire

De gauche à droite, Nadia Doghramadjian, Jean-Yves Varin et Gérard Le Ny,.

La section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme accueillait, ce samedi 14 décembre, l’assemblée générale du comité régional de la Ligue des droits de l’Homme. L’assemblée générale a été scandalisée par les propos tenus par le maire de Loudéac le 14 novembre dernier en conseil municipal au sujet des gens du voyage. Une délagation s’est rendue sur place, et un communiqué, reproduit ci-dessous,  a été transmis aux quotidiens Ouest-France et Le Télégramme.

La ligue des droits de l’Homme condamne les propos du maire de Loudéac au sujet de gens du voyage

Le comité régional de la Ligue des droits de l’Homme dénonce les propos scandaleux tenus par le maire de Loudéac au sujet des gens du voyage lors la réunion du conseil municipal du 14 novembre dernier. Pour Gérard Le Ny, délégué régional, Jean-Yves Varin, responsable du groupe de travail sur les gens du voyage, et Nadia Doghramadjian, membre du bureau national de la Ligue  et responsable du groupe de travail sur les discriminations et le racisme, « ces propos sont un véritable appel à la haine » : comparaison indigne des sépultures des gens du voyage avec le cimetière des chiens d’Aubervilliers, accusations de vandalisme et de vol sans aucun fondement… ces propos, indignes d’un élu de la République, visent à dresser une partie de la population contre une autre. Une délégation du comité régional s’est rendue sur place, et a pu constater l’état lamentable dans lequel se trouve cette aire, état qui manifestement ne date pas d’hier. Si les prises électriques ont été changées, l’ampérage de l’installation est toujours insuffisant et les coupures électriques fréquentes ; le bloc sanitaire est une véritable infection. Le comité régional de la LDH rappelle que les gens du voyage sont des citoyens à part entière, qui méritent autant de respect que n’importe quels autres.

Une délégation du comité régional de la Ligue des droits de l’Homme s’est rendue sur l’aire d’accueil des gens

Sandalisé par les propos du maire de Loudéac, le délégué général de l’association des Gens du voyage catholiques lui écrit

L’hebdomadaire Le Courrier indépendant a consacré une page de son édition du 22 novembre 2013 à l’aire d’accueil des Gens du voyage, après les propos scandaleux tenus par le maire de Loudéac (22). Propos qu’on peut vérifier sur la captation vidéo du conseil municipal mise en ligne sur le site de la mairie (séquence 5, à partir de 6’50’’ et début de la séquence 7). L’élu n’a en effet notamment pas hésité à faire le parallèle entre le cimetière pour chiens d’Aubervilliers et les monuments funéraires fréquemment érigés par les familles de Voyageurs, pour qui le culte des morts a une grande importance.

Dans l’édition du 29 novembre du Courrier indépendant, un Voyageur a réagi, par un courrier publié par le journal et dans lequel il précise : « je ne suis pas un voleur », rappelant par exemple que lorsque la robinetterie de l’aire de Cojean a été dérobée, les Gens du voyage n’étaient pas là, puisque l’aire était « en fermeture administrative ».

Marc Béziat, délégué général de l’Association catholique des Gens du voyage a, comme beaucoup d’autres, été profondément choqué par ces propos, et a écrit au maire et aux conseillers municipaux pour leur donner son sentiment. Il nous a autorisés à publier sa lettre, qui est par ailleurs publiée dans le Courrier indépendant ce vendredi 6 décembre. Nous la reproduisons ci-dessous.

À l’attention des membres du Conseil municipal

Monsieur le Maire,

Mesdames, Messieurs,

L’hebdomadaire « Le Courrier indépendant » du 22 novembre 2013 relate les débats du dernier Conseil municipal de Loudéac du 14 novembre. Nous en avons été alertés par notre fonction de vigilance, exercée sur les médias via Internet, afin de nous tenir informés des questions qui relèvent de notre objet statutaire. En page 8 de l’édition citée, il est relaté avec maints détails les propos des uns et des autres concernant le projet social à mettre en œuvre sur l’aire d’accueil de la commune. C’est donc avec un certain effarement, et sans angélisme, que nous avons pu lire « qu’il faut qu’ils nous respectent », parlant des Gens du voyage comme une entité une et indivisible, alors que rien dans ce qui nous est donné à lire ne laisse percer la moindre once de respect à qui que ce soit !

Nous entendons bien, sans les cautionner pour autant, les dégradations répétées sur cet équipement public dont les réparations coûtent toujours trop cher aux contribuables. Cela dénote plutôt à notre sens de la gestion déficiente, jamais revisitée au vu de l’expérience, d’un site dont la population est a priori à la fois globalement mal considérée par les édiles de la ville, mais aussi regardé comme un lieu de relégation « hors la ville ». Est-ce finalement un hasard, renseignement pris, si les aides à la gestion de l’aire ont été suspendues par l’autorité publique?

Dans un encadré de cette même page, toujours consacrée au débat de projet social sur l’aire d’accueil du Conseil municipal, une anecdote intemporelle (« l’autre jour ») relate le refus du « on » municipal (qui ?) à un projet de monument funéraire d’une famille dans le cimetière. Moquant le projet dans l’irrespect évident de la famille requérante – une connaissance des valeurs attachées aux morts et à leur mémoire chez les Gens du voyage aurait sans doute évité de digresser sur ce thème – le propos reflète l’aversion ressentie par son auteur tant il ne peut la dissimuler. Consultés par la famille, nous l’aurions sans doute incitée à exercer un recours contre une telle décision si mal motivée que par la « vocation » du cimetière communal qui serait contrariée (sic !).

Et quid du projet social à proprement parlé pour accompagner des familles sur un lieu de vie et d’habitat qui ne vaudrait pas la dépense évoquée par la Préfecture pour une remise aux normes ? Vous savez bien entendu desquelles il est question ? Pour ceux qui ne le sauraient pas, il s’agit des normes de décence dévolues à un lieu d’habitat. L’aveu est implicite que l’aire n’est plus aux normes. Comment imaginer que des sanitaires, collectifs de surcroit et non entretenus au vu des photos publiées, puissent satisfaire aux exigences du respect de l’intimité d’une vie familiale ? Comment attendre alors de quiconque le devoir de respect alors que « rien n’a été fait depuis 25 ans », dit un usager, pour un cadre de vie plus digne ?

Nous pourrions poursuivre et peser les termes et le ton usités pendant cette dernière séance du Conseil… Entre humour douteux, ironie et invectives à ceux qui ne pensent pas comme le maitre de céans, la posture adoptée porte une étiquette : celle du mépris. Et nous ne pensons pas que le mépris fasse partie des valeurs de la République auxquelles un mandat d’élu est attaché.

Bien à vous.

Monsieur Marc BEZIAT, le Délégué Général de l’ANGVC 

Les gens du voyage dénoncent le manque de places en aires d’accueil

Les aires d'accueil des Côtes d'Armor (Itinérance 22, http://itinerance22.canalblog.com/archives/p20-20.html)

Le fait est suffisamment rare pour être remarqué : les gens du voyage ont convoqué la presse pendant le week-end dernier à Nantes, pour dénoncer leurs conditions de vie qui se dégradent.

Les deux problèmes majeurs qu’ils rencontrent sont d’une part le manque de places dans les aires d’accueil, et les problèmes avec les sédentaires. Deux problèmes intimement liés, le premier étant souvent à l’origine du second. Christophe Sauvé, président de l’association nationale des gens du voyage chrétiens explique : « Les gens du voyage ne souhaitent pas être en stationnement illicite: nous comprenons le désarroi des chefs d’entreprise, des riverains, on le comprend, mais nous n’avons pas fait ce choix d’être dans ces situations et on ne nous fait aucune proposition de stationnement licite ».

La loi fait obligation aux communes de plus de 5000 habitants de mettre à la disposition des voyageurs une aire d’accueil aménagée, dont le nombre de places est proportionnelle à l’importance de la commune. Un plan départemental complète et coordonne le dispositif, et doit prévoir des aires de « grand passage », destinés à accueillir les grands regroupements, la plupart du temps religieux.

Tous les départements, loin s’en faut, ne respectent pas cette obligation, et c’est la même chose pour les communes. Les stationnements illicites deviennent alors inévitables, et peuvent être à l’origine de conflits avec les populations sédentaires. Conflits qui sont systématiquement utilisés pour ternir l’image des voyageurs, y compris lorsqu’ils sont dans leurs droits, ce qui est le cas la plupart du temps : on le voit régulièrement avec certains maires, comme Estrosi, par exemple, à Nice.

En Loire-Atlantique par exemple, le déficit est de 168 places, et il est augmenté en ce moment de 42 autres places en raison de travaux de réfection en cours sur une aire.

Autre conséquence, encore plus grave : la situation des voyageurs en dehors des stationnements illicites est encore plus précaire, et la scolarisation des enfants devient encore plus difficile, avec des changements de lieux plus fréquents. Yannick Péron, président de l’association départementale des gens du voyage citoyens de Loire-Atlantique souligne une autre conséquence : « Les situations sont intolérables, on ne peut pas continuer, nos enfants grandissent avec l’idée que la société ne veut pas d’eux ».

Le département des Côtes d’Armor fait figure de bon élève, avec 15 aires d’accueil qui totalisent 204 emplacements familles.

 

 

La France condamnée par la CEDH pour des expulsions de familles du voyage

La cour européenne des droits de l’Homme vient de condamner une nouvelle fois la France, dans un arrêt qu’elle a rendu le 17 octobre dernier, et dans une affaire d’expulsions de familles du voyage : « L’expulsion de gens du voyage des terrains sur lesquels ils étaient établis de longue date a violé leur droit au respect de leur vie privée et familiale et de leur domicile » titre la cour dans la présentation de son arrêt. Elle rappelle les faits : Les requérants sont d’une part vingt-cinq ressortissants français, en leur nom et au nom de leurs enfants mineurs et d’autre part le Mouvement ATD Quart Monde. Pour la plupart issus du monde du voyage, les requérants résident sur la commune d’Herblay (Val d’Oise). Les 95 personnes concernées logeaient sur des terrains appartenant à la commune depuis de nombreuses années, ou y étaient nées. En 2003 et 2005 le maire prit deux arrêtés, interdisant le stationnement de caravanes sur la commune. En 2004, le maire assigna les personnes en référé, mais le juge rejeta la demande, du fait que ces familles habitaient là bien avant le plan d’occupation des sols le leur interdisant. Après de nombreuses péripéties judiciaires, le dossier a enfin été examiné par la cour européenne des droits de l’Homme, dont l’arrêt conclut :

« La Cour conclut qu’il y a eu, pour l’ensemble des requérants, violation de l’article 8 dans la mesure où ils n’ont pas bénéficié dans le cadre de la procédure d’expulsion d’un examen convenable de la proportionnalité de l’ingérence dans leur droit au respect de leur vie privée et familiale et de leur domicile conforme aux exigences de cet article. Il y a eu également violation de l’article 8 pour ceux des requérants qui avaient demandé un relogement sur des terrains familiaux, leurs besoins n’ayant pas été suffisamment pris en compte ». (l’arrêt peut être téléchargé ici).

La Ligue des droits de l’Homme se réjouit bien évidemment de cet arrêt, et l’explique dans une communiqué qu’elle vient de publier :

« Dans un arrêt du 17 octobre 2013, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a condamné la France pour violation de l’article 8 (droit à la vie privée et familiale, et droit à un domicile) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, à propos d’expulsions de familles du voyage. La Ligue des droits de l’Homme se réjouit de pouvoir disposer, dans son action, d’une telle jurisprudence.

Au-delà des faits de l’espèce, la Cour rappelle que la perte d’un logement est une des atteintes les plus graves au droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile, droit fondamental pour garantir à l’individu la jouissance effective des autres droits fondamentaux qui lui sont reconnus. Son importance cruciale pour l’identité de la personne, l’autodétermination de celle-ci, son intégrité physique et morale, le maintien de ses relations sociales ainsi que la stabilité et la sécurité de sa position au sein de la société oblige l’Etat à des actions positives de relogement, lorsque l’expulsion s’avère absolument nécessaire.

Comme le souligne la Cour, des textes internationaux ou adoptés dans le cadre du Conseil de l’Europe insistent sur la nécessité, en cas d’expulsions forcées de Roms et Gens du voyage, de leur fournir un relogement. Leur vulnérabilité implique d’accorder une attention spéciale à leurs besoins et à leur mode de vie propre.

Cet arrêt porte condamnation des pratiques passées et actuelles de l’Etat en la matière. Celles-ci, faites au mépris des engagements internationaux et européens de la France, doivent immédiatement cesser. La LDH saura utiliser, autant que de besoin, un arrêt dont elle espère que le gouvernement français prendra toute la mesure. »

 

 

Une taxe pour les gens du voyage, pas de taxe pour les touristes

Une aired'accueil

Le 8 novembre 2011, la commission des finances de l’Assemblée nationale avait voté à l’unanimité un amendement à la loi de finance 2012, déposé par le député PS Henri Emmanuelli, visant à instaurer une taxe sur les « résidences mobiles terrestres », en clair les mobil homes, utilisés en tant qu’hébergement de loisir.

Henri Emmanuelli justifiait ainsi cette taxe : « Les mobil-homes qui s’entassent dans les zones touristiques, notamment dans les campings, échappent à toutes les règles d’urbanisme et ne sont pas taxés, ce qui pose un vrai problème », déclarait Henri Emmanuelli.

Aussitôt, le lobby de l’hôtellerie de plein air a sorti la grosse artillerie, et ce qui devait arriver arriva : Henri Emmanuelli a retiré son amendement.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là.

Ce qu’il faut savoir, c’est qu’une telle taxe existe déjà. Mais d’une part, elle ne concerne que les caravanes et les camping-cars, et, d’autre part, elle ne s’applique que s’il s’agit de la résidence principale. Par conséquent, les mobil homes et bungalows ne sont pas concernés, ni les touristes qui utilisent caravanes ou camping-cars. Les seules personnes concernées sont donc les « gens du voyage ». Son montant : 150€ pour les RMT de moins de 10 ans, 100€ pour les RMT entre 10 et 15 ans, et gratuit au-delà de 15 ans. La taxe est due pour chacune des résidences mobiles du foyer fiscal : une famille qui aurait deux caravanes devrait payer deux fois la taxe.

Cette taxe discriminatoire s’ajoute évidemment aux « droits de place » que les familles doivent régler pour les aires d’accueil. Le tarif pour l’aire d’accueil de Loudéac :

  • Caution : 100€
  • Droit de place : 2€ / jour (douche + chasse d’eau wc inclus)
  • Eau : 2,70€ / m3
  • Electricité : 0,15€ / kwh

Ces tarifs ne paraissent sans doute pas exagérés. Mais il faut tout de même savoir que la gestion de ces aires est la plupart du temps confiée à des sociétés privées, et dans la majorité des cas il s’agit de la société l’Hacienda, qui est une filiale de la Saur, une grosse compagnie de distribution d’eau (c’est le cas à Loudéac). La gestion de ces aires génère un chiffre d’affaire considérable : il s’agit d’un véritable business. La cour des comptes s’est penchée sur ce problème, et le rapport qu’elle a publié est très critique : au sujet des délégations de gestions, il considère qu’ « il en résulte non seulement un recours inapproprié à la délégation de service public mais aussi un risque que les bénéfices dégagés par certains opérateurs ne soient que partiellement justifiés. Un encadrement de la délégation de la gestion et une implication plus forte de l’État et des collectivités apparaissent en conséquence nécessaires ». Le rapport (téléchargeable ici) préconise enfin « d’encadrer les modalités de gestion :

  • fixer par voie réglementaire des règles communes applicables à l’ensemble des conventions de gestion à travers des clauses-type, pour éviter l’existence de dispositions ou de pratiques de gestion abusives ;
  • harmoniser au niveau départemental les règles applicables en matière de durées de séjour et de tarification ».

Il ne semble pas que les conclusions de ce rapport aient été suivies d’effet.

Les préconisations du rapport du préfet Hubert Derache le seront-elles davantage ? L’anthropologue Marc Bordigoni, spécialiste  des Tziganes, en doute, et il soulève une difficulté qui risque d’interdire toute évolution : les élections municipales auront lieu en 2014, soit avant l’application de la loi interdisant le cumul d’un mandat d’éxécutif local avec un mandat de parlementaire. Or 247 députés et 126 sénateurs sont également maires, et 100 députés et 64 sénateurs également présidents d’EPCI (établissements publics de coopération intercommunale). Le risque est bien entendu que les  « intérêts » de l’élu local dictent leur conduite au parlementaire… (Sources : le site de la section LDH de Toulon, et l’article de Marc Bordigoni dans Libération du 23 juillet dernier).

L’espoir qu’avait fait naître la suppression du carnet de circulation, en octobre 2012, risque de s’évanouir rapidement…

 

France 3, lundi 19 août à 22h55, Liberté, de Tony Gatlif

Le camp de concentration de Tziganes de Montreuil-Bellay (49)

Jacques Sigot s’est battu pendant de longues années pour que le camp d’internement de tziganes de Montreuil-Bellay (49) soit reconnu. C’est aujourd’hui chose faite, et un stèle commémorative y a été érigée. Jacques nous informe que   ce soir, lundi 19 août, France 3 va diffuser le film « Liberté », de Tony Gatlif. Voici ce qu’il en dit :

Ce soir, passe sur France 3, à 22 h 55, un film sur les Tsiganes pendant la Seconde Guerre mondiale. Tony Gatlif, le réalisateur, est parti de 5 lignes d’un témoignage de mon ouvrage sur le camp de Montreuil-Bellay (49) :

Un nomade, chef d’une famille, s’appelait Taloche. C’était un Hongrois, mais il se disait Belge, parce que né en Belgique. Il se procura, lui aussi, un domicile à Cerçay, dans les Deux-Sèvres. Mais il ne s’y installa pas, préférant retourner dans son pays natal. Là, les Allemands l’attrapèrent et l’enfermèrent dans un camp de concentration  où il fut éliminé.

Ça, c’est un témoignage que j’ai recueilli en 1980, publié en 1983 et qu’a utilisé Tony Gatlif. J’ai, par la suite, continué mes recherches et il s’est avéré que le témoignage était assez « fantaisiste », comme souvent les témoignages… J’ai même retrouvé ujne photo de l’homme qui s’appelait en réalité Toloche.

Voici ce que je sais maintenant sur lui après une vingtaine d’années de nouvelles recherches :

http://jacques-sigot.blogspot.fr/2013/06/joseph-toloche-un-interne-du-camp-de.html

Publicité avec extraits du film sur le Net :

http://www.allocine.fr/film/fichefilm-137350/secrets-tournage/

Le film est très très beau !La naissance du projet

Secret de tournage sur Liberté

Tony Gatlif a depuis toujours souhaité évoquer le sort des Roms durant la seconde guerre mondiale : « J’avais envie de faire un film sur l’holocauste des roms depuis que j’ai commencé à faire du cinéma. Mais le sujet me faisait peur. Les Roms que je rencontrais me disaient souvent : « Fais-nous un film sur la déportation des Roms ». Début 2007, participant à un colloque international des Roms à Strasbourg, des jeunes élus roms de la communauté européenne m’ont fait la même demande. Ils me disaient à quel point ils souffraient de ce manque de reconnaissance, de l’ignorance des autres vis-à-vis de leur propre histoire. Je ne voyais pas comment faire ce film, moi qui suis un cinéaste qui aime la liberté de la caméra, comment respecter les règles d’une stricte reconstitution. Et je reculais de peur de mal faire en réalité. Et puis un jour, j’apprends que Jacques Chirac va rendre hommage aux Justes en les réunissant au Panthéon. Je me suis dit : on va enfin savoir si certains Justes ont sauvé des Tsiganes. Malheureusement ils n’étaient pas présents. Je me suis mis à les chercher. J’ai fini par trouver dans un livre de Jacques Sigot, une anecdote de quelques lignes : « Le destin d’un dénommé Tolloche fut particulièrement tragique. Interné à Montreuil-Bellay, il réussit à se faire libérer après avoir acheté, par l’intermédiaire d’un notaire, une petite maison à quelques kilomètres de la ville. Incapable de vivre entre quatre murs, il reprit la route pour retourner dans son pays d’origine, la Belgique. Il fut arrêté dans le Nord et disparut en Pologne avec ses compagnons d’infortune »