Centres de rétention : pas de droits pour les personnes, pas de liberté pour les associations ?

La Ligue des droits de l’Homme prend à son tour position contre l’appel d’offre que vient de lancer le ministère de l’intérieur aux associations qui interviennent dans les centres de rétention administrative. Dans un communiqué, elle dénonce les mesures qu’elle estime inacceptables, et demande le retrait pur et simple de cet appel d’offre et l’arrêt de l’enfermement des étrangers sans papiers.

La Ligue des droits de l’Homme a eu connaissance des nouvelles dispositions que le gouvernement a prises en ce qui concerne les centres de rétention administrative. Les conditions dans lesquelles les associations concernées vont devoir répondre au nouvel appel  d’offre sont inacceptables : liberté d’action limitée, droit à investigation dénié, limitation du droit des personnes à bénéficier d’une aide. Au lieu d’une amélioration des conditions de fonctionnement et du respect des personnes, le gouvernement accentue les mesures restrictives.

Alors qu’aucune diminution du nombre de personnes retenues dans les centres de rétention n’est attendue, compte tenu du chiffrage du nombre d’expulsés d’ores et déjà annoncé par le ministère de l’Intérieur,  l’intervention des associations contractantes est rendue plus difficile, en recourant à un contrôle étroit de leurs activités.

Ainsi, elles devront par exemple prévenir les chefs des centres de rétention, dès qu’une des personnes enfermées qu’elles accompagnent osera déposer un recours, et les personnes étrangères enfermées ne pourront plus s’entretenir avec les associations accompagnées d’un co-retenu de leur choix, ce qu’elles souhaitent pourtant très fréquemment.

Enfin, en matière de liberté d’information, les associations seront soumises à un « devoir de réserve » et une « obligation de discrétion », et devront exprimer « de manière mesurée, des opinions dans le domaine des politiques publiques relatives à l’immigration ».

L’empilement de ces mesures de restriction signifie que le regard critique et de dénonciation que portaient les associations est largement mis en cause. Ainsi, tout affichage dans leurs bureaux est soumis à l’autorisation préalable du chef du centre de rétention. De même, le prêt de moyens de communication vers l’extérieur est interdit, mettant ainsi en cause le droit de correspondre pour se  défendre. 

Enfin le texte de l’appel prévoit des sanctions, des pénalités financières, l’interdiction définitive pour les salariés d’accéder au centre de rétention, voire la résiliation des contrats des associations. Ces sanctions seront prononcées par la police ou le ministère de l’Intérieur, sans moyen de recours compte tenu de la liberté d’appréciation qui leur est laissée.

En matière de rétention des étrangers, l’orientation va donc dans le sens de la répression : expulsions collectives, absence d’amélioration du traitement des étrangers malades, création, après l’arrêt du conseil d’État sur la garde à vue, d’une nouvelle disposition de retenue, au mépris du droit commun, poursuite de l’enfermement d’enfants dans le centre de rétention de Pamandzi à Mayotte, mise à l’écart des Cra de Mayotte et de Martinique du marché public. Ce faisant, les mesures d’assouplissement de la politique antérieure sont noyées dans un ensemble défavorable.

La Ligue des droits de l’Homme se prononce pour la fin de la politique d’enfermement des étrangers sans papiers, et pour le retrait de l’appel d’offre du marché  public de la rétention, tel qu’il est proposé  aux associations intervenant dans les centres de rétention.

 

Circulaire « régularisations » : tout ça pour ça !

La publication hier de la tant attendue circulaire sur la « régularisation des sans-papiers » suscite, comme on pouvait le supposer, de nombreuses réactions. Et la plupart sont au minimum très réservées quand ce n’est pas carrément hostile. Laissons évidemment de côté les âneries des commentaires de droite et d’extrême droite qui recyclent des arguments usés jusqu’à la corde et pour la plupart fondés sur des statistiques fausses ou manipulée. Les critiques portent sur l’espoir suscité que la circulaire ne satisfait pas, sur la timidité des mesures, sur la continuité de la politique de l’immigration par rapport aux précédents gouvernements, sur la sévérité et l’irréalisme des conditions posées (demander des fiches de paye à un travailleur sans papiers !).

La Ligue des droits de l’Homme a pour sa part publié un communiqué, reproduit ci-dessous, dès hier après-midi. Et elle l’a accompagné du texte intégral de la circulaire qu’on peut télécharger ici. Chacun pourra donc se faire son opinion à partir du document original.

Circulaire régularisation : tout ça pour ça !

Le ministre de l’Intérieur vient de présenter, au Conseil des ministres, le projet de circulaire dite de « régularisation ». La Ligue des droits de l’Homme condamne à la fois la méthode employée et le contenu des critères retenus envers l’ensemble des catégories d’étrangers qui auraient pu en être bénéficiaires.

La méthode choisie renvoie malheureusement les associations et les syndicats à une place de dupes. Alors qu’un temps long avait été donné avant la publication de ce texte, parce qu’il semblait nécessaire à la discussion et à la confrontation tant avec les organisations associatives que syndicales, il n’a guère été tenu compte des propositions alternatives qu’elles opposaient à celles défendues dès le départ par le ministère.

Sur le fond, la logique des critères pour obtenir un titre de séjour est particulièrement restrictive. En fixant des chiffres très élevés de présence constatée, la circulaire apporte certes des améliorations par rapport à la situation précédente et ouvre la possibilité d’un nombre notable d’issues positives, mais pas dans les catégories les plus difficiles. Que ce soit pour les enfants et les jeunes majeurs en cours d’études, pour leurs familles, que ce soit pour les salarié(e)s, les durées demandées sont incompatibles avec la réalité des demandes déposées ou exprimées. De plus, les autres conditions demandées ajoutent une très rigoureuse limitation des situations éligibles à la régularisation, telle l’exigence de bulletins de salaire sur toute la durée de référence.

Le ministère dit avoir voulu fixer des critères stables et pérennes applicables par toutes les préfectures. On ne peut qu’apprécier cette orientation. Mais compte tenu des critères retenus, rien ne garantit que l’arbitraire des préfectures ne puisse perdurer, sachant que l’éloignement du territoire demeure la règle. Il est de la responsabilité du ministère de l’Intérieur de s’assurer que les dérives de ces dernières années cessent.

Pourtant, l’attente d’une politique différente de celle du gouvernement précédent était forte. Cette circulaire avait suscité un grand espoir, notamment pour les familles, les jeunes et les travailleurs sans papiers. Cet espoir est largement déçu.

Alors qu’elle a été reçue à plusieurs reprises au ministère de l’Intérieur, soit en son nom propre, soit au sein des collectifs qui luttent pour les droits des étrangers, la LDH entend réaffirmer la nécessité d’un débat sur l’immigration, et d’une réforme législative du droit au séjour, du droit d’asile et du contentieux de l’éloignement respectueuse des droits fondamentaux.

 

Le squat de Pacé a été évacué dans la « dignité ». C’est quoi, au juste, la dignité ?

Photo Philippe Chérel, Ouest-France.

Le squat de Pacé. Le « plus grand squat » de France. Il a été évacué hier. Ce qui a permis aux  » humanistes  » de Novopress de titrer : « Évacués du squat de Pacé, les 250 clandestins seront relogés aux frais des contribuables ».

Les premiers articles de presse ont fait état du calme dans lequel s’est déroulée l’évacuation. Le préfet a indiqué, après l’opération : «Tout s’est passé sans incident, dans le respect des personnes et dans le calme » (Libération). Dans un reportage diffusé par FR3, une femme venant d’être évacuée déclarait : « On s’attendait au pire, ça s’est bien passé ». Le maire de Pacé confirme : « Cette évacuation s’est faite avec humanité et respect des personnes et des biens ».
Heureusement, M., une militante de Droit au logement, qui a soutenu avec beaucoup d’autres les migrants depuis leur arrivée au mois de mai dans l’ancienne maison de retraite de Pacé, vient nous remettre les idées en place. Parce qu’il n’y a pas eu de violences physiques, pas de blessés, pas de coups, on en arriverait à considérer que ça s’est bien passé, que ça a été digne… Nous serions-nous laissés contaminer par l’idéologie ambiante de chasse à l’étranger ?
Merci, M., d’autoriser la publication de votre beau texte.
« Alors, il faut toujours essayer d’être objectif, hein? Donc oui il y a sûrement des choses bien quand même dans ce qui s’est passé ce matin. Vous savez, l’expulsion de 250 personnes qui allait se régler avec dignité…
Alors il y a déjà  le côté froid et silencieux de l’expulsion du matin : les familles sont invitées à aller à la préfecture avec un petit papier attestant qu’elles viennent du squat de Pacé. Elles sont dehors dès 6h15 pour les premières, une cinquantaine de voitures de policiers, mais pas l’idée d’avoir fait venir une navette qui emmènerait tout le monde à la préfecture… C’est sûrement tellement plus digne de laisser les familles, les bébés dans les bras des mamans et les gamins dans les poussettes dans le froid et la nuit noire à 6h30 dehors. À attendre le bus 52 qui arrive déjà quasi plein de gens du coin qui partent au boulot… Et puis tous les gens qui portent des sacs, des matelas tout ça tout ça. Le petit crachin du matin a rajouté un peu à la dignité ambiante, c’était super. Mais attention, ça s’est fait dans le calme, donc hein, vous voyez bien qu’on traite bien les gens !
Arrivée des familles à la préfecture : ils rentrent au compte-goutte, les autres attendent dehors. C’est vrai, c’est tellement digne de voir 12 policiers regarder les femmes enceintes et les bébés, les personnes inquiètes et fatiguées, là, dehors debout devant la porte. Par contre à l’intérieur apparemment c’est le monde des bisounours : chocolat chaud, croissants offerts à tout le monde, les gens attendent sereinement, le personnel se met en 4 pour s’occuper de tout le monde, même le préfet nous dit-on met la main à la pâte. Et puis après on leur dit où ils vont et on les met dans un taxi qui les accompagne jusqu’au lieu. Jusque-là, ça va, c’est chouette, le préfet a fait ce qu’il a dit, vous voyez bien!
Sauf que sauf que, les gens dans les taxis passent par l’arrière de la préfecture, pas de possibilité de voir les soutiens qui étaient là à les accompagner, devant la pref’ car eux n’avaient pas le droit de les suivre dans la pref’. Et puis quand les soutiens commencent à arrêter les taxis pour demander aux gens où ils allaient, pour combien de temps, voire s’ils souhaitaient récupérer leurs affaires qui étaient dans les coffres de voiture sur le parking, les chauffeurs au début s’arrêtaient. Mais l’autre douzaine de policiers, en faction eux devant la grille de sortie des taxis, ont  commencé à grogner par contre. Et puis finalement ils ont interdit qu’on arrête les taxis. C’est vrai, c’est tellement plus digne de partir dans un taxi qui ne s’arrête pas, sûrement pour qu’ils puissent s’imaginer stars de cinéma en voyage incognito? Oui sûrement, car ça ne peut pas être pour couper complètement les migrants de leurs soutiens divers, non, ça se serait vraiment être mauvaise langue.
Et puis après on commence à voir que certains n’ont pas de notion de durée de leur séjour à Petaouchnok, euh pardon, dans le gîte rural machin de la baie du Mont-Saint-Michel, mais bon c’est tellement digne d’être emmenés vers la campagne du bord de mer. Donc on ne sait pas si c’est pour 1, 2 3 nuits ou plus. Pour d’autres c’est plus clair : 5 jours à Vern-sur-Seiche, 3 jours au foyer bidule. Et pour d’autres vraiment plus clair: rendez-vous à l’Hôtel-Dieu à 18h. Et jusqu’à 18h? Ben euh, j’sais pas moi, c’est pas digne de rester dans la rue avec tous vos sacs?
Ah et puis on commence à recevoir des coups de fil intéressants, comme celle qui accompagnait une famille au Rheu, un couple avec 2 bébés. Le lieu d’hébergement qui refuse d’ouvrir avant 17h… C’est bien, c’est très digne d’attendre 5 heures de suite debout devant une porte fermée avec ses 2 bébés sous le bras. Alors certains invitent les personnes chez elles jusqu’à 17h…
Ah et puis ces migrants sans papiers qui n’ont pas osé rester la nuit dernière à Pacé, peur de la PAF (Police de l’air et des frontières) du petit matin, difficile de leur en vouloir. Alors on les accompagne jusqu’à la porte de la préfecture et on dit aux policiers qui bloquent l’accès « la dame enceinte là et sa petite fille étaient au squat de Pacé, mais n’ont pas le papier distribué ce matin, par contre ils ont bien été recensés par la préfecture la semaine passée, pourraient-ils rentrer s’il vous plaît, car on va quand même pas laisser une femme enceinte à ce point dehors, hein ? » On reprendrait presque espoir quand un des messieurs devant la porte (Renseignements généraux ?) finit par accepter d’aller se renseigner.
Puis on commence à être remis très vite dans la réalité quand on entend les policiers ricaner en disant « sympas les Pacéens, ils en récoltent dans la rue et ils nous les amènent maintenant ». On explique au policier que c’est mal de se moquer ainsi des gens qui sont en plus devant lui et qui l’entendent. Et puis de toute façon on laisse tomber, car la personne ne revient et confirme que les migrants qui n’ont pas le papier distribué le matin à Pacé ne seront pas reçus. Même pas les femmes enceintes, et ça c’est vraiment décidément de plus en plus digne.
Bon allez, stop, excusez-moi de ce long message, c’est fou comme la dignité m’en met gros sur la patate aujourd’hui… »
M.

Le squatt de Pacé (35) a été évacué ce matin

Photo Philippe Chérel, Ouest-France.

Les forces de l’ordre sont arrivées très tôt sur le site du squat de Pacé, cette ancienne maison de retraite réquisitionnée depuis plusieurs mois par Droit au logement, et où ont trouvé refuge quelque 200 migrants : dès trois heures ce matin, mardi 27 novembre, elles ont isolé le bâtiment, empêchant militants et journalistes de s’en approcher et naturellement d’y pénétrer. A 6h, elles ont demandé aux occupants de quitter les lieux, après leur avoir distribué des tickets de bus leur permettant de se rendre à la préfecture, où ils étaient convoqués pour connaître leur destination.

Le préfet d’Ille-et-Vilaine, Michel Cadot, assure que tout s’est passé « en toute humanité ». Il a précisé : « Aucune mise à la rue ne résultera évidemment de l’application de la décision de justice ainsi effectuée conformément à la loi ».
De fait, un reportage réalisé par France 3 et mis ligne sur son site confirme les dires du préfet : les migrants interrogés reconnaissent que tout s’est passé dans le calme, mais s’inquiète pour l’avenir : où seront-ils logés, les familles ne seront-elles pas séparées… Les militants de Droit au logement et du Réseau éducation sans frontière regrettent que l’évacuation ait été fait en novembre, alors que le début des travaux prévus par la société HLM propriétaire du bâtiment ne doivent débuter qu’au mois de janvier prochain.
On peut lire le récit de l’évacuation et les craintes de l’association sur le site de Droit au logement.

La section LDH de Rennes inquiète au sujet de six familles de migrants menacées d’expulsion

La section de la Ligue des droits de l’Homme de Rennes a publié hier mardi 26 novembre, un communiqué dans lequel elle exprime son inquiétude au sujet de plusieurs familles de migrants menacées d’expulsion. Voici ce communiqué :
6 familles avec enfants scolarisés sont en instance de se voir expulsées vers leur pays d’origine. Ces pays, (Géorgie, Kosovo, Arménie, Mongolie, Daghestan) se sont signalés par des atteintes graves aux libertés fondamentales et il est notoire que les droits humains y sont quotidiennement bafoués. Revenir dans ces pays qu’on ose parfois appeler des « pays de renvoi sûrs », expose à des situations dramatiques, à des risques graves, à des parcours qui mettent des vies en danger.
Face aux périls qui attendent ces familles, la Ligue des droits de l’Homme (Section de Rennes) attire l’attention des citoyens et des pouvoirs publics sur les drames prévisibles que de telles expulsions vont provoquer. Elle demande instamment que cessent ces expulsions massives à l’échelon national, et qui visent des familles qui avaient cru trouver un refuge en France.
La seconde partie du communiqué concernait le « squat de Pacé », et l’inquiétude que manifestait la section de Rennes était malheureusement justifiée : les migrants ont été expulsés de l’ancienne maison de retraite cette nuit. Les forces de l’ordre ont commencé leur opération vers trois heures du matin. Nous publierons des informations dès que possible. Voici ce que disait donc hier la section rennaise à ce sujet :
L’inquiétude de la Ligue des droits de l’Homme (Section de Rennes) est aussi particulièrement vive concernant les menaces d’expulsion du squat de Pacé. Suite à la déclaration du Préfet de Région (16 novembre 2012) d’avoir « recours à la force publique » pour expulser ces 250 personnes « dans les prochains jours ». S’agit il d’une réponse digne du pays des droits de l’homme que de mettre à la rue des familles avec enfants, des femmes enceintes, à l’entrée de l’hiver, sous prétexte que, confrontés à des difficultés dramatiques de logement, ces demandeurs d’asile n’ont d’autres recours que de se réfugier dans des locaux « squattés » de façon illégale, alors qu’ils sont en situation régulière sur le plan administratif, que les lois européennes et françaises leur donnent un accès, malheureusement théorique, à un hébergement décent, et que la Ministre du Logement Cécile Duflot n’a pas exclu la possibilité de réquisition de logements vacants.

En visite à Rennes, D. Bertinotti a reçu des représentants d’associations de soutien aux demandeurs d’asile

Photo Rennes Métropole

La ministre déléguée à la famille, Dominique Bertinotti, était en visite à Rennes, jeudi 15 novembre. Elle a reçu une délégation de représentants des associations qui soutiennes les demandeurs d’asile qui lui ont fait part des difficultés et des inquiétudes. Par ailleurs, des habitants de Pacé, commune où 250 migrants occupent un squat et sont menacés d’expulsions, se sont constitués en collectif, et viennent de mettre en ligne une pétition de soutien aux demandeurs d’asile (à lire en fin d’article, pétition à signer ici).

En Ille-et-Vilaine, 5 familles avec enfants scolarisés sont actuellement assignées à résidence. Après les avoir expulsés de leur logement en Centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA), la préfecture d’Ille et Vilaine a décidé de placer ces familles sous ce régime de contrainte pendant 45 jours, le temps d’effectuer les démarches auprès des consulats, pour les expulser vers leur pays d’origine. Les familles doivent se présenter 2 fois par semaine à la Police Aux Frontières pour signer, sinon elles risquent un placement en rétention. En voici la liste :
  • Famille B. (Géorgie) : couple avec 2 enfants, E., 20 ans, et Elina, 3,5 ans, scolarisée à l’école maternelle du Clos-Joury au Rheu.
  • Famille S. (Kosovo/Serbie) : couple avec 2 enfants, M., 7 ans, et A., 4 ans, scolarisés à l’école Joseph-Lotte.
  • Famille M. (Arménie) : couple avec 2 enfants, R. et L., 3,5 ans, scolarisée à l’école maternelle de Bain-de-Bretagne.
  • Famille M. (Daghestan) : femme seule avec  2 fils, A., 21 ans et N., 20 ans scolarisé au lycée Jean-Macé de Rennes.
  • Famille B. (Mongolie) : femme seule avec 3 enfants, S., 3 mois, A., 2 ans, et B., 8 ans, scolarisé à l’école de l’Ille.
Un rassemblement de soutien à ces familles est prévu mercredi 21 novembre à partir de 12h à la préfecture de Beauregard.
Par ailleurs une délégation de représentants des associations qui soutiennent les familles a pu rencontrer Dominique Bertinotti, ministre de la famille, qui été en visite à l’école maternelle Chalais-Prévert de Rennes. Voici le récit qu’en fait une des participantes :
« Nous étions 8 à aller à la rencontre cet après-midi de Dominique Bertinotti, Ministre de la famille, en visite à l’école Chalais-Prévert. 
Après une courte négociation avec les fonctionnaires de la Direction centrale du renseignement intérieur (ex renseignements généraux), nous avons obtenu qu’elle nous accorde quelques minutes à l’issue de sa visite. Nous avons accepté de ranger nos banderoles et d’être polis et gentils avec Madame la Ministre…
Bonus !  Dominique Bertinotti était entourée notamment du Préfet, Michel Cadot, de Daniel Delaveau, maire de Rennes, Marie-Anne Chapdelaine, députée, Gwénaëlle Hamon, adjointe au maire de Rennes à l’éducation, et Yannick Nadesan, conseiller municipal, et de l’Inspecteur d’académie d’Ille-et-Vilaine.
Nous lui avons remis un tract (ci-dessous) rédigé dans l’urgence, et lui avons fait part de nos inquiétudes face à l’expulsion imminente des migrants de Pacé.  
C’est le préfet qui nous a répondu. Il s’exprimera demain sur les solutions de relogement suite à une réunion avec les associations. Nous avons demandé à y participer : « Non, les associations qui pratiquent des actions illégales ne sont pas conviées et vous avez déjà été reçus plusieurs fois par M.Fleutiaux », a répondu le préfet. ».

Le tract

Bienvenue à Rennes, Madame la Ministre !
Les sourires satisfaits des édiles locaux vous accueillent. Ils ont, n’en doutons pas, de belles réalisations à vous présenter. Pour la touche réaliste du discours, ils vont signaleront, de-ci de-là, quelques difficultés non encore surmontées.
Bonne visite Madame la Ministre !
Ce que vous ne verrez pas :
  • Les familles du Squat de Pacé qui vivent dans l’angoisse de cette expulsion programmée aujourd’hui : 64 enfants , scolarisés pour ceux qui sont en âge de l’être.
  • Les enfants Rroms (scolarisés eux-aussi)  et leurs familles  qui occupaient des maisons vides,  jetés à la rue avec une brutalité dont les élus locaux ne peuvent tirer fierté : matelas, jouets, vélos jetés à la benne et voués à la destruction.
Ministre déléguée à la famille, il ne convient pas que vous ignoriez cette partie sombre de la réalité.
Ici rien n’est résolu,  « le 115 » est saturé, et chaque jour des dizaines de personnes, malades, familles, dorment à la rue.
Sans l’action des militants associatifs, principalement le DAL35 avec le soutien du MRAP et de RESF, aidés par des organisations  caritatives,  des drames humains n’auraient pu être évités.
Les Autorités, que nous sollicitons sans cesse, paraissent se satisfaire de la situation. Nous mettons en garde une fois encore. Si les  militants et les bénévoles associatifs cessent de compenser les carences de l’État, personne ne pourra contrôler la situation.
Vous le savez, Madame la Ministre, la misère engendre la colère.
Enfin, des habitants de Pacé, commune où 250 migrants occupent un squat et sont menacés d’expulsion, viennent de se constituer en collectif et ont mis en ligne une pétition de soutien aux migrants. Vous pouvez la signer ici. En voici le texte :

Avec le Collectif de Citoyens Pacéens, contre les expulsions sans relogement

Nous sommes des citoyens de Pacé, commune d’Ille-Et-Vilaine. Environ 250 personnes occupent depuis début mai 2012 sans trouble à l’ordre public la Résidence du Parc, une ancienne maison de retraite, présentée depuis par la presse comme « le plus grand squat de France ».

Une décision de justice a autorisé leur expulsion à compter du 15 novembre 2012. Désormais, les forces de police peuvent intervenir à tout moment alors qu’aucune solution de relogement durable n’a été proposée par la Préfecture.

Notre Collectif de Citoyens Pacéens ne veut pas que sa commune soit le théâtre d’une expulsion massive, car nous n’acceptons pas que des femmes, des hommes mais aussi des enfants puissent se retrouver à la rue, de surcroît en début de période hivernale.

Devant l’urgence et la gravité de la situation, nous demandons instamment à M. Le Président de la République, à M. Le Premier Ministre, à Monsieur le Ministre de l’Intérieur, à Madame la Ministre du Logement, à Madame la Ministre de la Justice, à Monsieur le Préfet d’Ille-Et-Vilaine d’intervenir pour que soit proposées à toutes les personnes de la Résidence du Parc des conditions de vie décente, à commencer par un logement durable. Dans l’attente que des solutions pérennes soient trouvées, nous refusons qu’ait lieu leur expulsion.

Mineurs étrangers : la France est dans l’illégalité

Le site Rue 89 vient de publier une lettre ouverte écrite par soixante professeurs de droit (liste en fin d’article). L’objet de cette lettre est de rappeler au président de la République et au premier ministre que la France, plusieurs fois condamnée pour ce motif, est dans l’illégalité lorsqu’elle place des mineurs étrangers en rétention : « Un des fondements de la condamnation internationale est simple et facilement compréhensible : les enfants ont été privés de liberté sans qu’aucune décision de justice n’ait été rendue à leur encontre ; ils n’ont ainsi pas bénéficié de leur droit à saisir un juge qui puisse garantir le respect de leurs droits et libertés fondamentaux lors de cette privation de liberté ».

Et les juristes de rappeler que l’enfermement des mineurs est contraire à l’article 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, convention que la France a ratifiée : « Cette Convention, ratifiée par la France en 1974, a été intégrée dans notre système juridique interne en tant que convention internationale. Elle occupe dès lors dans la hiérarchie des normes un rang supérieur à celui des lois, règlements et circulaires. Ses dispositions s’imposent par conséquent au législateur comme aux agents de l’Etat dans l’exercice de leur mission ».

Il ne s’agit donc pas de demander au président de la République et au gouvernement de changer de politique en matière de mineurs étrangers, mais simplement de respecter la convention internationale signée par la France : « Dans ces conditions, au lendemain de l’arrêt susmentionné de la Cour européenne, toute rétention d’étrangers mineurs aurait dû cesser sur le territoire français, comme dans les territoires d’outre-mer soumis à la juridiction de la République française ».

Or ça n’est pas le cas : « Récemment encore deux jeunes Afghans de 2 mois et demi et 3 ans ont été enfermés avec leurs parents dans le centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne) sur le fondement d’une circulaire ministérielle du 6 juillet 2012 ».

La lettre se conclut ainsi : « Si l’Etat français, au travers de ses ministres, ses préfets et ses policiers, refuse délibérément de respecter les droits fondamentaux d’une catégorie d’individus, c’est bien l’ensemble des droits fondamentaux qui pourraient être violés. Le respect du droit et de la hiérarchie des normes par les organes de l’Etat n’est pas négociable.

Nous vous appelons donc instamment à garantir la conformité des pratiques administratives et des textes réglementaires à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, condition sine qua non de l’Etat de droit ».

Voici donc un nouvel élément à charge contre la politique menée par le ministre de l’Intérieur, dont il n’est évidemment pas envisageable qu’il la mène sans l’accord du président de la République et du premier ministre !

Retrouvez l’intégralité de cette lettre et la liste de ses signataires sur le site de Rue 89.

Saint-Brieuc : situation critique pour les demandeurs d’asile

Situation critique à Saint-Brieuc, où une famille kosovar avec 6 enfants a été mise à la rue, en même temps qu’une maman géorgienne et son enfant de 6 ans, alors qu’une famille Tchétchenne est déjà à la rue depuis plusieurs semaines.

Communiqué du Collectif contre le racisme et pour la solidarité de Saint-Brieuc :

Communiqué de presse du 29 septembre 2012

 

RESF 22 appelle à un rassemblement lundi 1er octobre 2012 à 18h devant la préfecture afin de protester contre la mise à la rue des demandeurs d’’asile.

 

Vendredi 28 septembre une famille du Kosovo (6 enfants) et une géorgienne avec 1 enfant de 6 ans ont été brutalement jetés à la rue, une famille Tchétchène est à la rue depuis plusieurs semaines.

 

Comme sous l’’ancien gouvernement la France ne respecte aucune législation.

 

Nous demandons à Monsieur le Préfet de faire respecter le droit dans le département. Nous demandons à être reçus afin de lui faire part de notre indignation.

 

Pour le respect de l’être humain.

Ploufragan(22) : une famille Rroms de 8 personnes expulsée d’un hôtel

Une famille de Rroms, un couple et six enfants, est arrivée à Saint-Brieuc cette semaine. Les huit personnes ont été logées à l’hôtel Beaucemaine, à Ploufragan pendant trois jours. Ils ont alors été expulsés, vendredi soir, par les services de l’Etat, semble-t-il, sans qu’on en soit certains. La ville de Ploufragan les a pris en charge : « la famille est complètement à l’abandon », a déclaré Marie-Françoise Duplenne, adjointe au maire, au quotidien Ouest-France. Elle poursuit : « Nous n’allons pas résoudre les choses, mais nous les prenons en charge pour les trois prochaines nuits. Nous allons leur fournir de la nourriture dans l’urgence ». Les services sociaux de la ville vont chercher une solution à cette situation dramatique avec les associations.

La ville de Ploufragan est toujours très attentive au sort des demandeurs d’asile. Elle avait ainsi organisé, au début de l’année, au parrainnage civil de quatre enfants originaires du Daghastan et de Géorgie.

Demandeurs d’asile : un arrêt de la cour de justice de l’Union européenne

La Cimade et le Gisti avaient saisi le Conseil d’État sur les conditions d’attribution de l’Allocation temporaire d’attente (ATA) aux demandeurs d’asile dépendant de la réglementation « Dublin II », (personnes étant entrées en France en passant par un autre pays européen, le pays d’entrée étant responsable du demandeur d’asile). La cour de justice de l’Union européenne, saisie par le Conseil d’État, vient de donner sa réponse, qui confirme ce que disaient les deux associations, à savoir que la France doit verser l’ATA aussi aux personnes relevant du règlement « Dublin II ». Voici le texte de l’arrêt, téléchargeable ici.

Cour de justice de l’Union européenne

COMMUNIQUE DE PRESSE n° 119/12

Luxembourg, le 27 septembre 2012

Presse et Information

Arrêt dans l’affaire C-179/11 CIMADE et GISTI / Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration

Les conditions minimales d’accueil du demandeur d’asile doivent être octroyées par l’État membre saisi d’une demande d’asile même s’il requiert un autre État membre qu’il estime responsable de l’examen de la demande.

Cette obligation s’impose, en principe, dès l’introduction de la demande d’asile jusqu’au transfert effectif du demandeur d’asile vers l’État membre responsable.

La directive 2003/9/CE(1) fixe des normes minimales sur les conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile (notamment le logement, la nourriture et l’habillement, fournis en nature ou sous forme d’allocation financière). Ces normes permettent de leur garantir un niveau de vie digne et des conditions de vie comparables dans tous les États membres. La directive s’applique à tous les ressortissants des États tiers ainsi qu’aux apatrides ayant présenté une demande d’asile dans les conditions du règlement dit « Dublin II »(2). Ce règlement fixe les critères permettant de déterminer l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile, qui n’est donc pas nécessairement celui où a été déposée cette demande.

Si un État membre auprès duquel une demande d’asile a été introduite (État requérant) considère qu’un autre État membre est responsable (État requis), il peut demander à ce second État de prendre en charge le demandeur d’asile.

Le Conseil d’État (France) a été saisi, le 26 janvier 2010, par deux associations françaises, la CIMADE et le GISTI d’un recours visant à annuler la circulaire ministérielle du 3 novembre 2009 relative à l’ATA (allocation temporaire d’attente). En tant que revenu de subsistance, cette allocation est versée mensuellement aux demandeurs d’asile pendant toute la durée de la procédure d’instruction de leur demande. Ces deux associations soutiennent que ladite circulaire est contraire aux objectifs de la directive 2003/9 en ce qu’elle exclut du bénéfice de l’ATA, les demandeurs d’asile lorsque, en application du règlement Dublin II, la France requiert un autre État membre, qu’elle estime responsable de l’examen de la demande des intéressés.
Le Conseil d’État a décidé d’interroger la Cour de justice sur l’interprétation des dispositions pertinentes du droit de l’Union.

La Cour répond, en premier lieu, qu’un État membre, saisi d’une demande d’asile, est tenu d’octroyer les conditions minimales d’accueil des demandeurs d’asile, même à un demandeur d’asile pour lequel il décide de requérir un autre État membre pour le prendre en charge ou le reprendre en charge en tant qu’État membre responsable de la demande.

La Cour précise que l’obligation pour l’État membre saisi d’une demande d’asile d’octroyer ces conditions minimales d’accueil débute lorsque les demandeurs « introduisent leur demande d’asile » même si cet État n’est pas l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile selon les critères énoncés par le règlement Dublin II. La directive 2003/9 ne
prévoit en effet qu’une catégorie de demandeurs d’asile comprenant tous les ressortissants des pays tiers et apatrides qui déposent une demande d’asile. Par conséquent, ces conditions minimales d’accueil doivent être octroyées non seulement aux demandeurs d’asile se trouvant sur le territoire de l’État membre responsable mais également à ceux qui restent dans l’attente de la détermination de l’État membre responsable, ce processus de détermination pouvant durer plusieurs mois.

La Cour précise en outre que l’obligation pour l’État membre saisi d’une demande d’asile d’octroyer les conditions minimales d’accueil ne concerne que les demandeurs d’asile qui sont autorisés à demeurer sur le territoire de l’État membre concerné en qualité de demandeurs d’asile.

À cet égard, la Cour considère que le droit de l’Union3 autorise les demandeurs d’asile à demeurer non seulement sur le territoire de l’État dans lequel leur demande est examinée, mais aussi, jusqu’au transfert effectif des intéressés, sur le territoire de l’État membre dans lequel cette demande a été déposée.

La Cour considère, en second lieu, que l’obligation de garantir les conditions minimales d’accueil du demandeur d’asile s’impose dès l’introduction de la demande et pendant toute la durée du processus de détermination de l’État membre responsable jusqu’au transfert effectif du demandeur par l’État requérant.

La Cour précise à cet égard que, seul le transfert effectif du demandeur d’asile par l’État requérant met fin à la procédure devant lui ainsi qu’à sa responsabilité quant à la charge financière des conditions d’accueil. La Cour rappelle que les conditions minimales d’accueil peuvent être limitées ou retirées dans les situations, énumérées par la directive, où le demandeur d’asile ne respecte pas le régime d’accueil établi par l’État membre concerné (par exemple, lorsque l’intéressé ne se rend pas aux entretiens personnels prévus pour instruire la demande).

1 Directive 2003/9/CE du Conseil, du 27 janvier 2003, relative à des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les États membres (JO L 31, p. 18).

2 Règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil, du 18 février 2003, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers (JO L 50, p. 1). Des propositions font actuellement l’objet de négociations pour remplacer la directive et le règlement (voir respectivement COM (2008) 820 final et COM (2011) 320 final.)