Boris Le Lay : 8 mois de prison ferme requis en appel

Boris Le Lay va peut-être bénéficier de 8 mois de séjour gratuit dans les geôles de la République Française, dans lesquelles il projette d’enfermer ceux qui ne partagent pas ses idées. Ce qui représente beaucoup de monde puisqu’il est à peu près seul.

L’appel qu’il a déposé après sa condamnation au mois de juillet par le tribunal de Quimper n’était peut-être pas une bonne idée : il n’y avait écopé que de prison avec sursis, mais à Rennes, mardi 19 novembre, l’avocat général a été plus sévère, en demandant un an d’emprisonnement dont quatre mois avec sursis.

Le tribunal de Quimper avait motivé la clémence de son jugement par le fait qu’il ne s’agissait que d’une première condamnation. Il y en a eu d’autres depuis, notamment à Paris et à Brest, et tous les appels n’ont pas été jugés.

Certes, réquisition ne signifie pas condamnation, mais les arguments développés par l’avocat général ont un autre poids que la pauvre défense de Le Lay qui s’est contenté de désavouer son client en reconnaissant qu’il avait tenu des propos « blessants » et, ce qui prouve qu’il connaît parfaitement son client, « peu intelligents »

Monsieur Le Lay était évidemment absent, fidèle à son mépris de la justice, ce que l’avocat général n’a pas manqué de souligner.

Il est particulièrement savoureux de constater, que le jour même où l’idéologue de Cornouaille se dérobe et ne se rend pas au tribunal, il fait, entre deux galettes (il travaille dans une crêperie au Japon), l’éloge sur son site de l’héroïsme du roi Leonidas de Sparte devant les Perses, lors de la bataille des Termophyles au cours de laquelle il trouve la mort !

Le jugement a été mis en délibéré pour le mardi 17 décembre.

Sources : Le Télégramme, Ouest-France.

Lire également :

http://www.ldh-france.org/section/loudeac?s=boris+le+lay&x=-1254&y=-54

http://www.ldh-france.org/section/loudeac/2013/09/27/boris-le-lay-a-nouveau-condamne/

http://www.ldh-france.org/section/loudeac/2013/07/13/boris-le-lay-nouveau-proces-jugement-en-delibere/

http://www.ldh-france.org/section/loudeac/2013/09/20/breizatao-fait-la-manche/

http://www.ldh-france.org/section/loudeac/2013/06/25/breizatao-com-22500e-et-18-mois-de-prison-avec-sursis-pour-boris-le-lay/

 

Et ça continue…

Nouvelle attaque raciste contre Christiane Taubira, et cette fois il ne s’agit ni du front national ni d’une quelconque officine fascisante, mais d’une élue UMP : Claudine Declerckélue municipale de Combs-la-Ville et vice-présidente de la communauté d’agglomération de Sénart, a publié sur son compte facebook une publicité détournée de Banania, avec une caricature de Christiane Taubira, avec en légende : « y’a pas bon Taubira ». Et ceci, publié le 18 septembre, n’est découvert qu’aujourd’hui !

Preuve qu’au risque de se répéter, au risque de lasser, au risque de passer pour des radoteurs, nous devons inlassablement dénoncer ces ingnominies.

Libération publie aujourd’hui une rétrospective qu’il intitule : « racisme : sept ans de dérapages politiques ». Ca commence avec Georges Frêche et l’équipe de France de football, pour en arriver à la gamine d’Anger, en passant par les Sarkozy, Chirac, Hortefeu… affligeant…

Tout ceci justifie le communiqué commun que viennent de publier la Ligue des droits de l’Homme et la Ligue de l’enseignement et qui nous avons publié ici.

Conjurons la bêtise et le cynisme, refusons la haine et le racisme !

Conjurons la bêtise et le cynisme, refusons la haine et le racisme !

Communiqué commun de la Ligue de l’enseignement et de la Ligue des droits de l’Homme

Voici que les mots et les postures qui portent la haine de l’Autre et la violence tendent à devenir l’ordinaire du débat public, relayés et entretenus par une pratique médiatique qui confine à de l’aventurisme.

Qu’une ministre de la République soit traitée de singe ne semble plus émouvoir nombre de citoyens, pas plus qu’ils ne sont émus par les déclarations d’un ministre qui décrète l’incapacité à s’intégrer de telle catégorie de population. Que dire, dès lors, quand un élu local en vient à regretter que ces Roms n’aient pas été suffisamment anéantis pendant la guerre !

Des millions de personnes sont niées dans leur citoyenneté en raison de leurs origines, de leur situation sociale, de leur culture et de leur religion. Une partie des hommes et des femmes politiques de notre pays se taisent ou, pire, exploitent cette situation. De boucs émissaires extérieurs en ennemis de l’intérieur, des doigts se tendent pour les désigner coupables, à l’origine de nos maux, ce seraient eux qui détruiraient notre pays et ruineraient notre avenir.

Ne nous y trompons pas : ces mécanismes sont destructeurs, d’abord pour ceux et celles qui les subissent, et aussi pour la société tout entière. La haine générée grandit, nourrie par une bêtise et une ignorance infiltrant tous les rouages de la vie sociale, avec une explosion numérique nauséeuse, générant conflits et violences, rancœurs et esprit de revanche, assignations à résidence et replis communautaires. Au plus profond de ses ressorts, c’est la démocratie elle-même, avec ses deux siècles de construction, qui est atteinte. C’est la France républicaine, porteuse d’espoir d’un monde solidaire, qui est rabaissée.

Nous assumons et reconnaissons nos différences, elles sont le fondement de notre pacte social. Nous savons aussi ce qui nous réunit par notre pacte politique. Nous ne transigerons pas sur les principes fondamentaux sur lesquels nous avons bâti la République : la liberté, l’égalité, la fraternité comme la laïcité et la solidarité qui sont, à la fois, nos guides et nos objectifs. À la veille de deux échéances électorales que sont les élections municipales et européennes, nous entendons, ici, mettre en garde avec solennité.

Il est de notre responsabilité commune, acteurs dans la société, que nous soyons militants, responsables associatifs, élus locaux et nationaux, habitants, journalistes, en un mot CITOYENS, de ne pas suivre cette route mortifère. Celle-ci est aujourd’hui trop souvent balisée par des flux ininterrompus d’informations répétées en continu par les chaînes télé d’info, relayées sur le web et les réseaux, alors bien peu « sociaux ». Cette répétition absurde est comme un matraquage qui, à la fois, obsède et sidère.

Être CITOYEN, c’est bannir du débat politique tout propos, toute attitude, de nature à engendrer le racisme, l’antisémitisme et tendant à justifier les discriminations. La France, comme bien d’autres pays, doit affronter d’énormes défis économiques et sociaux, avec le chômage et les inégalités. Face à ceux et à celles qui avivent les souffrances sociales, les peurs et les colères, nous nous dressons pour affirmer avec force : la République n’a d’avenir qu’égale, solidaire et fraternelle.

C’est dans ce cadre que le débat public, comme les politiques publiques, doivent s’affirmer.

Paris, le 15 novembre 2013

 

Manifestation de soutien à Ch. Taubira à Angers : « Mettons la haine hors jeu »

Photo Huffpost, http://www.huffingtonpost.fr/2013/11/11/propos-racistes-taubira-manifestation-soutien-angers_n_4255418.html?utm_hp_ref=france

Lundi 11 novembre, à Angers, une manifestation a été organisée pour protester contre l’agresssion raciste dont a été victime Christiane Taubira, ministre de la justice, de la part d’enfants soutenus par leurs parents, le 25 octobre dernier. La manifestation a réuni près de 3000 personnes,

Conduits par la section d’Angers de la Ligue des droits de l’Homme, les manifestants se sont réunis devant le palais de justice où a eu lieu l’agression.

Nadia Doghramadjian, secrétaire générale adjointe de la Ligue des droits de l’Homme, et co-responsable du groupe de travail sur les discriminations, représentait Pierre Tartakowsky, président de la LDH, dont elle a lu l’allocution qu’il avait écrite. A lire ci-dessous.

Allocution de M. Pierre Tartakowsky, Président de la Ligue et des droits de l’Homme, lue par Madame Nadia Doghramadjian, secrétaire générale adjointe, lors du rassemblement qui s’est tenu à Angers le 11 novembre 2013 en présence de plus de 1.500 participants et de nombreux élus.

 

Mettons la haine hors jeu !

Les agressions répétées, ouvertement et pleinement racistes dont la ministre de la Justice Christiane Taubira a été la cible indiquent clairement que nous avons affaire à une offensive assumée, concertée, froidement haineuse. Elles s’inscrivent en effet dans une trop longue liste de « dérapages » détestables.

Il y a eu cette déclaration hallucinante du député-maire de Cholet, à ce jour toujours membre de l’UDI, à propos des Roms : « Hitler n’en a peut-être pas tué assez ». Il y a eu le maire de Croix, dans le Nord, affirmant qu’il serait aux côtés de l’un de ses administrés s’il « commettait l’irréparable » à l’encontre d’un Rom… Il y a eu ce sénateur confiant à la cantonade qu’il avait « vraiment envie » de tirer sur François Hollande et la répartie du maire de Marseille, lui proposant obligeamment une Kalachnikov…

Ces saillies pseudo humoristiques ou soi-disant « maladroites » alimentent une foule de propos et d’actes de violence et toutes, contribuent à la fragmentation de notre société, tout en nous inscrivant collectivement dans une logique de désignation de boucs émissaires.

Cette remontée sidérante de pratiques et de discours qu’on pensait exorcisés n’est pas sans lien avec les consultations à venir. Mais les ramener à une simple poussée de fièvre préélectorale serait s’aveugler à bon compte et sous-estimer le danger.

Au-delà des femmes, des hommes et des populations prises pour cibles, c’est le débat démocratique qu’on vise, et en plaçant ses valeurs hors-jeu c’est la République qu’on veut atteindre.

Cette tentative d’OPA sur le débat public n’est donc pas que malsaine, elle est criminelle ; le racisme est certes odieux, mais c’est surtout un délit. La panacée de l’exclusion est évidemment un mensonge, mais c’est aussi et surtout, une invitation à la violence.

C’est pourquoi nous affirmons notre solidarité militante et civique avec toutes celles et ceux qui en sont la cible. C’est pourquoi nous en appelons à une réaction ferme de la puissance publique mais aussi de la société civile. Il s’agit de mettre hors jeu tous ceux, toutes celles qui propagent la haine tout en se réclamant de la démocratie. Il revient aux citoyens, aux médias et aux élus de la République d’y contribuer, chacun à sa place, en veillant à la qualité des débats publics, en dénonçant sans complaisance ce qui relève de l’infraction à la loi, de l’incitation à la haine, en rejetant ceux qui investissent et spéculent sur le marché de la peur et de la haine.

Face aux démagogues et à ceux qui font preuve de compréhension à leur égard, la Ligue des droits de l’Homme le réaffirme solennellement : la République n’a d’avenir qu’égale, solidaire et fraternelle.

 

Fontgombault, le village dont l’abbaye a caché Paul Touvier, et dont le maire est homophobe

Le nazi Paul Touvier a été caché dans l'abbaye de Fontgombault dans les années 1970.

Le maire de Fontgombault et la majorité de son conseil municipal viennent de se faire remarquer en affirmant que « la loi naturelle est supérieure aux lois humaines ». Et que, par conséquent, c’est la dite loi « naturelle » qui va guider leur action. Ce qui se traduit par le refus du maire et des adjoints de célébrer tout mariage entre personne du même sexe.

Contrairement à ce que cette déclaration pourrait laisser croire, ni le maire, ni le conseil municipal de Fontgombault ne sont des comiques. On peut même à raison supposer que ce sont de tristes sires.

Le problème, c’est qu’ils se sont sentis autorisés à exprimer cette ânerie. A l’UMP, on appelle ça la décomplexitude.

Ne nous trompons pas : ce sont les mêmes, qui ne craignent pas le ridicule qui envoient leurs enfants traiter la ministre de la justice de guenon dans leurs manifestations. Ce sont aussi ceux-là qui dénoncent les prières de rue quand elles sont faites par des musulmans: s’il s’agit de processions catholique, ils deviennent beaucoup plus tolérants. Là encore, décomplexitude.

Le journal Libération rappelle le curriculum-vitae du maire de Fontgombault : Jacques Tissier, régulièrement cité par le très catholique site « Le salon beige », est porte-parole du « collectif des maires pour le droit familial ». Par ailleurs, l’abbaye de Fontgombault a hébergé, et surtout caché le nazi Paul Touvier pendant sa cavale dans les années 1970. Ceci explique cela. L’article se trouve ici.

La section de la Ligue des droits de l’Homme de Chateauroux, dans l’Indre, département où se trouve le village de Fontgombault, a publié le communiqué ci-dessous à la suite de la parution de la délibération de son conseil municipal.

Le conseil municipal de Fontgombault est-il dans la République ?

Le paragraphe 8 du compte rendu mensuel de la dernière réunion du Conseil municipal de Fontgombault, validé par 7 voix sur 10, est proprement accablant : « Considérant qu’il existe une loi naturelle, supérieure aux lois humaines d’après laquelle depuis les origines du monde aucune union n’a été célébrée officiellement entre deux personnes du même sexe au titre d’un « mariage »…  »

La laïcité est pour le moins mise à rude épreuve, et l’on sait ici que ce n’est pas la première fois. C’est aussi un discours homophobe à peine masqué (« quelle que soit leur dignité d’être humain qu’il y a eu lieu de reconnaître par ailleurs [sic] »). Ce sont des élus de la République qui tiennent de tels propos, prétendant en faire une loi générale au mépris de la conscience de leurs concitoyens quels qu’ils soient. Ce discours d’arrière-garde, fondé sur des présupposés discutables, qui n’appartiennent qu’à la conviction de ces élus, est aussi un vecteur de haine.

Ces élus ont-ils oublié la loi fondamentale, alors qu’ils portent les couleurs de la République ? « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances » (article 1 de la Constitution).
Ont-ils oublié qu’un conseil municipal, parce qu’il est élu du peuple, se doit d’appliquer toutes les lois de la République sans exception ? Ont-ils oublié que le Conseil constitutionnel a écarté, le 18 octobre dernier, la clause de conscience des maires ? Savent-ils que le seul mariage légal est l’union civile ? Savent-ils que l’homophobie n’est pas une opinion mais un délit puni par la loi.

La LDH se tient aux côtés des citoyens de Fontgombault outragés par ces propos. Elle interroge les autorités préfectorales sur la légalité de la délibération en question. Elle appelle les citoyennes et citoyens à se mobiliser pour faire échec aux campagnes de haine et d’exclusion.

Le 8 novembre 2013

Ch. Véron, Présidente de la section LDH

 

François Gemenne sur rue 89: casser les idées reçues sur l’immigration

Peu connu du grand public, François Gemenne, spécialiste des flux migratoires, s’est fait rermarquer il y a quelques jours sur le plateau de l’émission « salut les terriens » animée par Thierry Ardison (en ligne ici, avec le texte du débat). À a côté de lui, Edwige Pénel, de Médiapart, et en face, Florian Philippot, dirigeant du front national, comme toujours sûr de son fait.

Mais cette fois, pas très longtemps : François Gemenne a littéralement « coupé la chique » du frontiste qui a fini par renoncé, lançant un « bah, il va dire non » qui a résonné comme un aveu d’incompétence lorsqu’Ardison lui rappelle que le FN veut ramener l’immigration de 200.000 à 10.000. En fait, Gemenne n’a pas dit non, il a seulement rappelé que la France est engagée par des accords internationaux, et qu’il y a aussi des Français qui émigrent…

À la suite de cette émission, le site rue 89 a eu la bonne idée d’inviter François Gemenne a donner son avis de spécialiste sur tous les clichés qui circulent en matière d’immigration. On peut trouver l’article, intitulé « On a soumis les idées reçues sur l’immigration à celui qui a mouché le FN » à cette adresse.

Extraits

Sur les salaires :

Question : Ces travailleurs acceptent des faibles revenus et du coup, les salaires baissent…

Réponse : C’est complètement faux. En particulier, pour les salaires des professions plutôt peu qualifiées. On constate de manière assez nette que les salaires de ces emplois augmentent grâce à l’apport de l’immigration.

Parce que les immigrés prennent les salaires tout en bas de l’échelle et que par conséquent, les Français remontent un peu. C’est comme s’ils gagnaient un échelon. On considère que l’impact moyen est de +0,27%. Aux Etats-Unis, les résultats sont comparables [PDF].

Dans les professions plus qualifiées, l’impact sur les salaires est beaucoup plus faible, quasiment nul.

Sur les motifs de migrations :

En 2012, plus de 33 millions de personnes ont été déplacées à cause de catastrophes naturelles. C’est un chiffre supérieur à celui des personnes déplacées à cause des guerres ou des conflits.

François Gemenne est en effet persuadé que les migrations climatiques seront un dossier essentiel de ce siècle, même si ces migrations se font pour le moment sur de petites distance, la plupart du temps à l’intérieur du pays.

 

 

Insulte contre Ch. Taubira : le silence des politiques, l’indignation des artistes

Les réactions politiques avaient tardé, après l’agression verbale raciste dont a été victime Christiane Taubira à Anger il y a quelques jours. On avait davantage entendu le front national exiger des preuves de cette agression. Il a été gâté : le journal Anger Mag Info a diffusé sur son site une vidéo filmée par un amateur avec son téléphone où on assiste de façon très claire à l’agression. Mais la vidéo révèle autre chose : la complicité des adultes autour de la gamine, ce qui contredit l’affirmation des organisateurs de la « manif pour tous » qui considéraient qu’il s’agissait d’un acte isolé. Cette gamine était en fait manipulée par des adultes (on voit la banane circuler de main en main) soucieux, on le sait, de la protection morale des enfants…

Les politiques muets, ce sont les artistes qui se sont exprimés, et leur voix a sans doute plus d’écho que n’aurait eu celles des utilisateurs de la langue de bois.

Vendredi matin, c’est François Morel qui a commencé, avec une chronique remarquable de sensibilité, d’élégance et d’efficacité, dans laquelle il demande à « la petite conne » : « Pour qui la banane ? » Cette chronique a été relayée tout le week-end sur les réseaux sociaux et on ne se lasse pas de l’écouter.

Le musicien Titi Robin, nominé en 2012 aux Victoires de la musique et qui a une quinzaine d’albums à son actif a choisi pour sa part d’écrire une lettre ouverte qui a été publiée dans la presse locale, et que nous reproduisons ici. Une lettre qui, comme la chronique de François Morel, ne se contente pas de dénoncer le fait divers : il l’analyse.

Lettre ouverte

« Permettez-moi de prendre la parole d’une manière personnelle. Je suis né dans un village angevin où on élevait (comme toujours aujourd’hui) des vignes pour élaborer un vin moelleux, généreux, destiné au partage, à l’accueil des visiteurs, aux célébrations familiales. J’ai reçu dans ce village une éducation traditionnelle, riche, que je porte avec fierté, qui m’a permis de voyager et de rencontrer de par le monde des hommes et des femmes avec leurs propres bagages culturels. Nous avons échangé, et ainsi je me suis construit, j’ai grandi, mariant mes racines à celles rencontrées. Comme je savais d’où je venais, je retrouvais toujours ma route. Durant toutes ces années, je suis toujours resté fidèle à ma région. Je l’aime.

Aujourd’hui, je suis blessé, humilié, et en colère. Les paroles et gestes d’une enfant d’une douzaine d’années et d’un notable expérimenté auraient-ils souillé l’air ? Ou bien est-ce le silence et l’apathie qui ont suivi ces événements qui me troublent ? De France et de l’étranger me parviennent des messages : « Que se passe-t-il chez vous ? Pourquoi les gens sont-ils devenus ainsi, en Anjou ? » Dans les rues d’Angers, des gens évoquent leur gêne ou leur honte à voix basse. Je ne pense pourtant pas que nous ayons changé. La lâcheté ou tout au moins le manque de clairvoyance de nos dirigeants (de gauche) comme de leurs collègues dans l’opposition (de droite) encourage certains intellectuels, certains médias et des gens de pouvoir à développer dans le pays une atmosphère profondément malsaine. Il y a là quelque chose de pathologique, la crise encourageant le repli sur soi.

Du coup, cette minorité dans notre société qui a porté et portera toujours en son sein des idées empoisonnées se sent soudain libre de les exprimer au grand air. Notre pays avait connu ce phénomène il y a longtemps. Il y a aujourd’hui comme un relâchement moral nauséabond. Et puis voilà : Une fillette de douze ans peut traiter comme un animal, en rigolant, en l’insultant, devant le public, la presse, et ses parents ravis, une femme d’une grande culture intellectuelle et morale, représentante du gouvernement, car l’enfant a la peau blanche et la femme la peau noire. Un notable d’une ville de la région ironise autour de l’extermination pendant la deuxième guerre mondiale des ancêtres d’une partie, minoritaire, de sa population (qu’on appellera ici Gens du voyage) et se félicite aujourd’hui de les chasser de son territoire. Ces événements sont mis en lumière car ils concernent des personnages publics. Nous devons savoir qu’ils correspondent à la face émergée du problème. Cela signifie que bien d’autres personnes souffrent en silence. Si notre corps social est endormi, affaibli, il importe de réveiller ses anticorps. Il importe aussi de parler fort. Ayons confiance en nos forces, nous devons pouvoir continuer à être fier de qui nous sommes, de nos racines comme de notre hospitalité, qui vont de pair. »
Thierry ROBIN

Les identitaires veulent développer l’autodéfense

« Tournées de sécurisation », cours d’autodéfense : le mouvement fasciste génération identitaire, qui est la succursale « jeunes » du « bloc identitaire », a annoncé ses projets vendredi, dans une conférence de presse. En clair, ils se préparent à mettre en place des milices, des patrouilles, pour lutter contre la « racaille ». Rien que de très banal en somme (lire dans Libération), d’autant plus que le responsable du mouvement assure « les rondes se feront à mains nues ». Nous voilà rassurés.

Distribution dans les collèges, lycées, facs, transports en commun, de tracts donnant la conduite à tenir en cas d’agression, ouverture d’une salle consacrée à des cours de boxe et d’autodéfense, organisation d’un « séminaire » d’autodéfense : les identitaires entendent pallier « l’incapacité des forces de l’ordre ».

L’extrême droite surfe évidemment sur une prétendue insécurité. Un sentiment qu’elle entretient savamment, avec le concours gracieux de la droite. Cela fait beaucoup penser à ce projet de « voisins vigilants » lancé un temps par l’UMP. À moins qu’il ne s’agisse d’expéditions punitives. Ou, comme le suggère le site Médiapart, de ratonnades ?

Ceci va peut-être permettre de venir à bout des dérives ( ?) racistes auxquelles on assiste à chaque apparition de la « manif pour tous » : nul doute que ces braves garçons auront à cœur de mettre hors d’état de nuire ces racailles pré-adolescentes qui lancent des injures racistes contre Mme Taubira !

 

Jean-François Copé, la main sur le berceau

Ignominie. Ignominieux de ne serait-ce que pouvoir imaginer qu’un enfant qui vient de naître sera apatride.

Incompétence. M. Copé est avocat de profession. On suppose qu’il maîtrise quelques éléments de droit. M. Copé est parlementaire. On suppose qu’il a entendu parler des accords internationaux. Alors que signifie se dernière proposition de supprimer le droit du sol pour les enfants nés en France de parents en situation irrégulière, dont il sait parfaitement qu’elle va à l’encontre des lois françaises, et des conventions internationales signées par la France, et dont la violation mettrait immédiatement la France hors de la communauté internationale.

Mais M. Copé ne va pas jusqu’au bout de son raisonnement. Il n’envisage pas le cas des enfants nés d’un parent étranger en situation irrégulière et d’un parent français : on fait quoi, là ? Il sera à moitié Français ? Les jours pairs ? les jours impairs ?

La Ligue des droits de l’Homme ne pouvait évidemment pas laisser passer ce nouvel appel du pied même pas dissimulé du président de l’UMP au front national. Elle a donc publié le communiqué suivant.

Jean-François Copé, la main sur le berceau

Après l’enrôlement sauvage des petits pains au chocolat, Jean-François Copé lance une OPA sur les berceaux. La Ligue des droits de l’Homme s’oppose avec force à ce retour particulièrement détestable du débat sur l’identité nationale. Lancé par Nicolas Sarkozy pour ne pas laisser au Front national le « monopole » de la nation, rejeté par une opinion publique inquiète de voir ouvrir une boîte de Pandore, ce dont l’extrême droite avait immédiatement fait son miel, le débat ressurgit sous la forme d’une nouvelle provocation qui bénéficie de l’approbation des hiérarques de l’UMP, dont François Fillon, décidément de moins en moins « sectaire ».

Cette sortie a le mérite de clarifier les enjeux : alors que la France se démène dans des difficultés d’ampleur, dans les domaines de l’emploi, de la santé, du logement, alors que l’actualité fait la démonstration de l’inhumanité des lois sarkozystes sur les étrangers et de la stupidité qu’il y a, pour un gouvernement de gauche, à vouloir « bien appliquer » ces mauvaises lois, le premier parti de l’opposition affiche sa priorité : « purifier » le processus de naturalisation, en le débarrassant des enfants nés sur le sol français de parents étrangers en situation illégale. Pour la plus grande joie du Front national, auquel il l’a emprunté.

En inscrivant d’emblée une génération d’enfants dans une situation précaire, en signifiant qu’elles et ils sont aussi indésirables que leurs parents, les propos de Jean-François Copé fabriqueront de futurs apatrides dès le berceau. La LDH rappelle qu’il s’agit d’un extraordinaire mépris de la situation juridique actuelle, et d’une ignorance des conventions internationales ratifiées par la France. Enfin, on ne peut que s’interroger sur l’opportunité de propos qui sont très éloignés des besoins exprimés par les Françaises et les Français, pour peu qu’elles et ils soient interrogés de façon comparative.

L’objectif revendiqué de la « lutte contre le communautarisme » est destiné à engager un processus dont nul ne peut dire à la porte de qui il s’arrêtera. Il vise surtout, encore et toujours, à s’approprier les thématiques de l’extrême droite pour tenter d’en capter l’électorat. Une stratégie dont le Front national n’a eu jusqu’à présent qu’à se féliciter, puisqu’elle n’aboutit qu’à renforcer et ses thèmes, et son enracinement.

La LDH attend de l’opposition parlementaire qu’elle s’honore en désavouant les propos du secrétaire général de l’UMP, tant ils sont éloignés et des valeurs de la République, et des urgences auxquelles se confrontent la plupart de celles et ceux qui vivent et travaillent dans notre pays.

 

La « manif pour tous » montre son véritable visage

La « manif pour tous » n’est pas raciste.

La « manif pour tous » est soucieuse du bien être des enfants.

S’il y a des débordements pendant ses rassemblements, elle ne saurait en être tenue pour responsable : il ne s’agit en réalité que d’actes isolés, qu’elle réprouve.

Il faudrait tout de même que la « manif pour tous » explique comment on confie un porte-voix à une enfant de 12 ans, qu’elle utilise pour traiter la ministre de la justice de « guenon » ( Edifiantes, les photos diffusées mardi soir par Canal +).

Il faudrait qu’elle nous explique comment elle justifie la présence d’enfants dans ses manifestations.

Il faudrait qu’elle nous explique pourquoi, dans ses manifestations, on trouve régulièrement des membres d’officines d’extrême droite, et en l’occurrence, « extrême droite » est un doux euphémisme.

On entend pas beaucoup Mme Barjot nous dire ce qu’elle pense de tout cela.

On entend pas non plus beaucoup le clergé catholique, qui a participé activement, et continue à le faire, à ces manifestations.

On parle depuis quelque temps de droite « décomplexée ». Elle n’a effectivement plus honte de montrer son vrai visage, et de laisser s’exprimer des slogans de haine.

Rappelons-leur que le racisme n’est pas une opinion. C’est un délit.

Au fait, on n’entend pas non plus beaucoup les ministres prendre la défense de Mme Taubira…

A lire aussi ici un excellent billet.