Nous poursuivons la publication des lettres ouvertes adressées par la Ligue des droits de l’Homme aux candidats à la présidentielle et aux législatives. Aujourd’hui :
« Un avenir incertain pour les enfants et les jeunes ? »
La Ligue des droits de l’Homme, signataire du Pacte pour les droits et la citoyenneté, s’inquiète de la place faite aux jeunes dans notre société.
Pour la première fois depuis longtemps, « les jeunes », qui ne constituent pas plus une catégorie homogène que les « vieux », connaissent une entrée dans la vie d’adulte plus difficile que celle de leurs parents. Pourtant, leur parole est peu prise en compte ; à peine sont-ils entendus lorsqu’ils se mobilisent. Le plus souvent, ils sont érigés en « classe dangereuse ».
Près de trois millions d’enfants vivent dans des familles en dessous du seuil de pauvreté, et près d’un quart des 18-25 ans connaissent des situations de grande précarité, qu’ils soient étudiants, apprentis ou chômeurs. Pour beaucoup d’entre eux, la survie quotidienne, l’accès à l’éducation, aux soins, au logement, à la culture, relève d’un véritable parcours du combattant, indigne d’un pays comme le nôtre.
En matière d’éducation et de formation, il est inacceptable que le poids des origines sociales détermine la réussite scolaire. Ces inégalités ne sont pas le fruit d’un quelconque déterminisme, comme certains sont prêts à l’avancer, mais le fruit d’une politique qui a délibérément mis à mal le service public d’éducation.
L’égalité d’accès de chaque jeune, quelles que soient son appartenance de genre, ses origines sociales ou géographiques, à une formation et une qualification, reste à construire. Or, les enquêtes sur l’emploi montrent que la détention d’un diplôme est la meilleure protection contre le chômage, et que les cent cinquante mille jeunes qui sortent du système éducatif sans diplôme, ni qualification, connaissent les plus grandes difficultés pour trouver du travail. Et, quand elles et ils en ont, ces nouvelles recrues sont trop souvent les premières à subir les revers de la conjoncture économique et les modifications des normes de l’emploi.
Face à cette situation dégradée qui est celle des jeunes, le gouvernement a fait le choix de la dérive sécuritaire, faisant en sorte que chacune de ses nouvelles lois concerne les mineurs d’une façon ou d’une autre, en alignant toujours davantage le droit des mineurs sur le droit des majeurs, jusqu’à frôler sa disparition, pendant que le travail de tous les acteurs de la prévention de la délinquance est systématiquement dénigré.
Pour rompre avec cette situation, la Ligue des droits de l’Homme soutient un certain nombre de propositions qu’elle entend mettre en débat publiquement ; elle souhaite que les candidates et candidats se déterminent sur ces propositions et rendent publics leurs remarques, critiques ou accords.
Six propositions pour l’avenir des enfants et des jeunes :
- Rendre effectif le droit à l’éducation, par l’accueil de tous les jeunes en âge d’être scolarisés. Programmation accélérée de mesures spécifiques pour les jeunes en situation de handicap, pour les enfants roms, pour les mineurs isolés.
- Rétablissement et renforcement des dispositifs d’aide aux élèves en difficulté au sein du service public d’éducation et à tous les niveaux de la scolarité.
- Assurer la formation et la qualification la plus élevée possible pour qu’aucun jeune ne sorte du système scolaire sans qualification.
- Favoriser le premier emploi pour mettre un terme à la kyrielle de petits boulots, stages et contrats à durée déterminée qui constituent le lot de premières années des jeunes après leur sortie de formation.
- Sortir les familles de la précarité et assurer une aide financière conséquente aux jeunes en formation.
- Rétablir l’esprit de l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs ; considérer l’enfermement comme l’ultime recours et équilibrer prévention et répression.