Au moment de sa parution, le 28 novembre 2012, les défenseurs des droits, parmi lesquels la Ligue des droits de l’Homme, avaient vivement critiqué ce qu’il est convenu d’appeler la circulaire Valls. Cette circulaire était notamment sensée, d’après le ministre, harmoniser les décisions des préfectures sur l’ensemble du territoire, et « humaniser » la politique à l’égard des demandeurs d’asile et des sans-papiers. A peine trois mois plus tard, les faits nous donnent raison : alors qu’aujourd’hui la presse annonce un record d’expulsions de migrants pour l’année 2022 (rappelons tout de même que seuls les cinq premiers mois sont imputables à l’administration précédente), on constate autant d’écarts d’une préfecture à l’autre, sans qu’il soit possible d’y remédier puisqu’il ne s’agit que d’une circulaire et qu’elle n’est pas opposable devant le tribunal administratif. Par ailleurs, les associations soulignaient le caractère abusif de certaines conditions, qu’il était matériellement impossible aux migrants de remplir (notamment la présentation de fiches de paye).
La lutte des sans-papiers de Lille est exemplaire de cette déréglementation. Il n’est donc pas surprenant que le collectif d’associations qui les a suivis et aidés s’exprime aujourd’hui dans un communiqué commun qui vient d’être publié, et qui donne un éclairage très précis de la situation actuelle. Ce communiqué réaffirme la nécessité de faire preuve d’un peu de courage politique pour sortir d’une situation qui, par endroits, est dramatique.
Voici ce communiqué.
La lutte des sans-papiers de Lille et la poursuite des expulsions viennent confirmer avec force que la circulaire Valls, publiée le 28 novembre 2012, ne répond pas à la revendication portée par nos organisations « pour une égalité des droits entre Français et étrangers ». Cette revendication avait été réaffirmée durant les campagnes présidentielle et législative par les organisations suivantes : Autremonde, CGT Paris, La Cimade, Droits Devant !!, Fasti, FSU Paris, Gisti, LDH Paris, Mrap, RESF, Union Syndicale Solidaires.
En partant du vécu de milliers de migrants, les organisations signataires proposaient des mesures précises pour sortir d’une logique qui, circulaire après circulaire, loi après loi, avait globalement réduit à peau de chagrin les droits des migrant-e-s.
Elles proposaient d’avoir le courage politique de marquer une véritable rupture avec la politique antérieure et de réformer en profondeur le Ceseda et le Code du travail.
La circulaire Valls ne suffit pas, dans la mesure où elle n’est pas opposable devant un tribunal et reste marquée par une logique de quota de régularisation.
Par sa nature même, elle ne remet pas en cause le pouvoir discrétionnaire des préfets et ne permet en aucun cas d’asseoir une égalité de traitement, les étrangers ne pouvant pas s’appuyer sur ce texte devant les tribunaux.
D’autre part, elle ne remet pas en cause les principes d’exclusion des dispositifs légaux précédents : critères arbitraires, exclusion encore une fois du département de Mayotte, conditions encore restrictives, notamment pour les travailleurs.
La circulaire continue de faire de l’employeur le seul interlocuteur de l’administration en lui laissant le pouvoir exorbitant de donner des suites, ou non, à la démarche de régularisation, elle exclut de fait les travailleurs au noir et impose des périodes de clandestinité préalables à tout titre de séjour.
C’est pourquoi nous, les organisations soussignées, tenons à rappeler notre volonté de défendre l’égalité des droits entre Français et immigrés et de rompre avec cette politique de stigmatisation des migrants.
Nous exhortons le gouvernement à aller vers des choix qui intègrent la mobilité des personnes, qui reconnaissent une place à chacun–e, en mettant au centre la solidarité et l’égalité plutôt que le rejet et la peur.
Nous rappelons notre exigence que soient modifiés le Ceseda et le Code du travail pour des régularisations de plein droit.
Nous revendiquons la création d’un titre de séjour unique, stable, avec droit au travail, renouvelable de plein droit, donnant à tous les étrangers les mêmes droits.
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