Dans la réponse qu’il fait à Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme, et qui est publiée dans le quotidien régional Le Télégramme, le député de la 3ème circonscription des Côtes d’Armor écrit ceci :
« Je dois malheureusement rappeler à la LDH que les Droits de l’Homme ne se réduisent pas à ceux des adultes, mais comprennent aussi les droits de l’enfant, répond le député. Or, parmi ces droits de l’enfant, il existe avant tout celui d’avoir un père et une mère. C’est la raison pour laquelle je m’oppose au projet de loi Taubira. Il constitue en effet une atteinte aux drois de l’enfant, notamment à ceux des enfants adoptés. Aujourd’hui, grâce à l’adoption plénière, la loi leur donne une véritable filiation faite d’un père et d’une mère (…). »
Il se trouve que ce qu’affirme le député et, au choix, une erreur ou/et un mensonge.
La loi autorise en effet, aujourd’hui, l’adoption d’un enfant par un ou une célibataire. À tel point que la France a été condamnée pour discrimination, en 2008, par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), pour avoir rejeté la demande d’agrément d’une femme homosexuelle célibataire, en raison de son homosexualité.
Par ailleurs, le député parle du droit pour un enfant d’avoir un père et une mère. Ce droit n’existe pas, et ne peut tout simplement pas exister. S’il existait, cela supposerait que la loi puisse imposer que l’enfant ait un père et une mère. Alors, on fait comment ? On oblige les veufs et les veuves à se remarier ? On interdit le divorce ? On supprime le droit aux célibataires d’adopter ? On interdit l’accouchement sous X ? Et lorsqu’un des conjoints, après la séparation, vit avec une personne du même sexe, on lui retire la garde des enfants ? On rend adoptables les enfants de familles monoparentales ?
M. Le Fur est député. Il vote les lois. Il peut même en proposer. On est en droit d’attendre de lui qu’il connaisse les lois, y compris celles qui ont été votées avant lui.
M. Le Fur pourrait également utilement relire la convention des droits de l’enfant, adoptée le 20 novembre 1989 par l’Organisation des Nations Unies. Il n’y est fait référence aux père et mère que dans deux articles :
- L’article 21, qui traite de l’adoption, et qui précise : les États « a) Veillent à ce que l’adoption d’un enfant ne soit autorisée que par les autorités compétentes, qui vérifient, conformément à la loi et aux procédures applicables et sur la base de tous les renseignements fiables relatifs au cas considéré, que l’adoption peut avoir lieu eu égard à la situation de l’enfant par rapport à ses père et mère, parents et représentants légaux et que, le cas échéant, les personnes intéressées ont donné leur consentement à l’adoption en connaissance de cause, après s’être entourées des avis nécessaires ».
- L’article 22, qui traite des enfants réfugiés demandeurs d’asile :
« Article 22.
1. Les États parties prennent les mesures appropriées pour qu’un enfant qui cherche à obtenir le statut de réfugié ou qui est considéré comme réfugié en vertu des règles et procédures du droit international ou national applicable, qu’il soit seul ou accompagné de ses père et mère ou de toute autre personne, bénéficie de la protection et de l’assistance humanitaire voulues pour lui permettre de jouir des droits que lui reconnaissent la présente Convention et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ou de caractère humanitaire auxquels lesdits États sont parties.
2. À cette fin, les États parties collaborent, selon qu’ils le jugent nécessaire, à tous les efforts faits par l’Organisation des Nations Unies et les autres organisations intergouvernementales ou non gouvernementales compétentes collaborant avec l’Organisation des Nations Unies pour protéger et aider les enfants qui se trouvent en pareille situation et pour rechercher les père et mère ou autres membres de la famille de tout enfant réfugié en vue d’obtenir les renseignements nécessaires pour le réunir à sa famille. Lorsque ni le père, ni la mère, ni aucun autre membre de la famille ne peut être retrouvé, l’enfant se voit accorder, selon les principes énoncés dans la présente Convention, la même protection que tout autre enfant définitivement ou temporairement privé de son milieu familial pour quelque raison que ce soit. »
Dans deux autres articles, la convention évoque les parents :
L’Article 9 stipule ainsi que « l’enfant a le droit de maintenir des contacts avec ses deux parents s’il est séparé de l’un d’entre eux ou des deux ».
L’article 10 stipule lui que « l’État doit aider les [deux parents] à aider leur responsabilité d’élever l’enfant ».
Il n’est ici question ni de père ni de mère, mais de parents !
Enfin, l’article 1 : il stipule expressément que « Les États parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant , sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant ou de ses parents ». Comme l’explique le site le mariage pour tous : « dans la situation actuelle, les enfants de familles homoparentales ne sont pas protégés des discriminations car leur situation familiale n’est pas reconnue ; par ailleurs, en cas de séparation d’un couple homosexuel, le conjoint n’a aucun droit ni aucune reconnaissance de sa parentalité. Enfin, si tel était le cas, les pays l’ayant déjà établi seraient déjà poursuivis par l’ONU ».
On voit bien que même la convention internationale de droits de l’enfant, texte fondateur de ces droits, ne fait à aucun moment obstacle au mariage de personnes de même sexe, ni à leur droit à adopter un enfant, droit qui, rappelons-le une nouvelle fois, EXISTE, que M. Le Fur et ses amis le veuillent ou non ! Ils peuvent utilement se rendre sur le site « Le mariage pour tous », où toutes les idées reçues, toutes les rumeurs, tous les mensonges qui circulent en ce moment sont analysés et corrigés en détail.
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