Troublant. C’est le moins qu’on puisse dire.
Jeudi 27 septembre, vers 19h, une cinquantaine d’habitants de la cité des Créneaux, à Saint-Louis, dans le XVème arrondissement de Marseille, se dirigent vers un campement de Rroms, installé là depuis trois ou quatre jours. Ils en chassent les occupants, une quarantaine, qui préfèrent partir sans réagir, avec voitures et caravanes, laissant derrière eux quelques affaires. Le groupe d’habitants du quartier met alors le feu au campement.
La police était là. Elle n’a pas eu besoin d’intervenir : « en l’absence d’agression physique, aucune interpellation (n’a) été effectuée », nous dit Le Monde. Le journal La Provence confirme : « Les forces de l’ordre, intervenues sur place, n’ont même retenu aucune infraction et n’ont pas procédé à des interpellations ».
En clair, cela signifie qu’en France, État de droit, on a le droit d’incendier un campement de Rroms sans être inquiété. On aurait tort de se priver.
Ce coup de force, toujours d’après La Provence, était prémédité, et il semble invraisemblable que les autorités (préfecture, police) n’étaient pas au courant de ce qui allait se passer.
Comme le dit Daniel Schneidermann, « Manuel Valls aussi peut parfois être laxiste » !
Lire aussi dans Rue 89, sur le blog de Yann Savidan, et sur le blog Amaro Drom.
En fin de matinée, la Ligue des droits de l’Homme a publié le communiqué suivant :
Communiqué LDH
Paris, le 28 septembre 2012
Roms de Marseille : faut-il choisir entre la police et la milice ?
Au lendemain de la réhabilitation par un leader de l’UMP de la notion détestable de « racisme anti-blanc », dans la foulée d’expulsions spectaculaires de camps de Roms menées à l’initiative du gouvernement, des habitants du nord de Marseille ont cru devoir accélérer les procédures et passer aux travaux pratiques directs, en organisant une descente sur l’un de ces camps, molestant ses habitants et incendiant leurs habitations de fortune. La raison avancée – une série de cambriolages – quelle qu’en soit la réalité, ne peut en aucune façon justifier ces actes de violence : ils sont insupportables autant qu’illégaux. Leur gravité est extrême et c’est bien tout un groupe de population – vieillards, femmes, enfants – qui se retrouve victime dans une sorte de punition collective totalement hors du droit.
La LDH affirme qu’il serait extrêmement regrettable que les responsables politiques ne prennent pas la mesure de l’événement. La passivité des pouvoirs publics en amont de ce drame, l’absence de solution positive pérenne, les propos, pour le moins très ambigus, d’élus locaux ne peuvent qu’inquiéter toutes celles et tous ceux qui ont à cœur le respect de la loi et des droits attachés aux personnes.
La LDH affirme que la politique de destruction des camps et d’expulsion des personnes est dangereuse et inefficace.
Dangereuse, parce qu’en attisant le rejet, on semble légitimer la violence.
Inefficace, parce que sans la mise en sécurité des personnes, les mêmes causes produisant les mêmes effets, d’autres camps avec les mêmes misérables errants s’organiseront.
La LDH attend des élus et des représentants de l’Etat qu’elles et ils veillent à ce que, dans un Etat de droit, l’exercice de la justice ne puisse appartenir à des personnes privées. La justice, le droit, la loi, les droits, tout le monde y a droit, les Roms aussi.
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