Le squat de Pacé a été évacué dans la « dignité ». C’est quoi, au juste, la dignité ?

Photo Philippe Chérel, Ouest-France.

Le squat de Pacé. Le « plus grand squat » de France. Il a été évacué hier. Ce qui a permis aux  » humanistes  » de Novopress de titrer : « Évacués du squat de Pacé, les 250 clandestins seront relogés aux frais des contribuables ».

Les premiers articles de presse ont fait état du calme dans lequel s’est déroulée l’évacuation. Le préfet a indiqué, après l’opération : «Tout s’est passé sans incident, dans le respect des personnes et dans le calme » (Libération). Dans un reportage diffusé par FR3, une femme venant d’être évacuée déclarait : « On s’attendait au pire, ça s’est bien passé ». Le maire de Pacé confirme : « Cette évacuation s’est faite avec humanité et respect des personnes et des biens ».
Heureusement, M., une militante de Droit au logement, qui a soutenu avec beaucoup d’autres les migrants depuis leur arrivée au mois de mai dans l’ancienne maison de retraite de Pacé, vient nous remettre les idées en place. Parce qu’il n’y a pas eu de violences physiques, pas de blessés, pas de coups, on en arriverait à considérer que ça s’est bien passé, que ça a été digne… Nous serions-nous laissés contaminer par l’idéologie ambiante de chasse à l’étranger ?
Merci, M., d’autoriser la publication de votre beau texte.
« Alors, il faut toujours essayer d’être objectif, hein? Donc oui il y a sûrement des choses bien quand même dans ce qui s’est passé ce matin. Vous savez, l’expulsion de 250 personnes qui allait se régler avec dignité…
Alors il y a déjà  le côté froid et silencieux de l’expulsion du matin : les familles sont invitées à aller à la préfecture avec un petit papier attestant qu’elles viennent du squat de Pacé. Elles sont dehors dès 6h15 pour les premières, une cinquantaine de voitures de policiers, mais pas l’idée d’avoir fait venir une navette qui emmènerait tout le monde à la préfecture… C’est sûrement tellement plus digne de laisser les familles, les bébés dans les bras des mamans et les gamins dans les poussettes dans le froid et la nuit noire à 6h30 dehors. À attendre le bus 52 qui arrive déjà quasi plein de gens du coin qui partent au boulot… Et puis tous les gens qui portent des sacs, des matelas tout ça tout ça. Le petit crachin du matin a rajouté un peu à la dignité ambiante, c’était super. Mais attention, ça s’est fait dans le calme, donc hein, vous voyez bien qu’on traite bien les gens !
Arrivée des familles à la préfecture : ils rentrent au compte-goutte, les autres attendent dehors. C’est vrai, c’est tellement digne de voir 12 policiers regarder les femmes enceintes et les bébés, les personnes inquiètes et fatiguées, là, dehors debout devant la porte. Par contre à l’intérieur apparemment c’est le monde des bisounours : chocolat chaud, croissants offerts à tout le monde, les gens attendent sereinement, le personnel se met en 4 pour s’occuper de tout le monde, même le préfet nous dit-on met la main à la pâte. Et puis après on leur dit où ils vont et on les met dans un taxi qui les accompagne jusqu’au lieu. Jusque-là, ça va, c’est chouette, le préfet a fait ce qu’il a dit, vous voyez bien!
Sauf que sauf que, les gens dans les taxis passent par l’arrière de la préfecture, pas de possibilité de voir les soutiens qui étaient là à les accompagner, devant la pref’ car eux n’avaient pas le droit de les suivre dans la pref’. Et puis quand les soutiens commencent à arrêter les taxis pour demander aux gens où ils allaient, pour combien de temps, voire s’ils souhaitaient récupérer leurs affaires qui étaient dans les coffres de voiture sur le parking, les chauffeurs au début s’arrêtaient. Mais l’autre douzaine de policiers, en faction eux devant la grille de sortie des taxis, ont  commencé à grogner par contre. Et puis finalement ils ont interdit qu’on arrête les taxis. C’est vrai, c’est tellement plus digne de partir dans un taxi qui ne s’arrête pas, sûrement pour qu’ils puissent s’imaginer stars de cinéma en voyage incognito? Oui sûrement, car ça ne peut pas être pour couper complètement les migrants de leurs soutiens divers, non, ça se serait vraiment être mauvaise langue.
Et puis après on commence à voir que certains n’ont pas de notion de durée de leur séjour à Petaouchnok, euh pardon, dans le gîte rural machin de la baie du Mont-Saint-Michel, mais bon c’est tellement digne d’être emmenés vers la campagne du bord de mer. Donc on ne sait pas si c’est pour 1, 2 3 nuits ou plus. Pour d’autres c’est plus clair : 5 jours à Vern-sur-Seiche, 3 jours au foyer bidule. Et pour d’autres vraiment plus clair: rendez-vous à l’Hôtel-Dieu à 18h. Et jusqu’à 18h? Ben euh, j’sais pas moi, c’est pas digne de rester dans la rue avec tous vos sacs?
Ah et puis on commence à recevoir des coups de fil intéressants, comme celle qui accompagnait une famille au Rheu, un couple avec 2 bébés. Le lieu d’hébergement qui refuse d’ouvrir avant 17h… C’est bien, c’est très digne d’attendre 5 heures de suite debout devant une porte fermée avec ses 2 bébés sous le bras. Alors certains invitent les personnes chez elles jusqu’à 17h…
Ah et puis ces migrants sans papiers qui n’ont pas osé rester la nuit dernière à Pacé, peur de la PAF (Police de l’air et des frontières) du petit matin, difficile de leur en vouloir. Alors on les accompagne jusqu’à la porte de la préfecture et on dit aux policiers qui bloquent l’accès « la dame enceinte là et sa petite fille étaient au squat de Pacé, mais n’ont pas le papier distribué ce matin, par contre ils ont bien été recensés par la préfecture la semaine passée, pourraient-ils rentrer s’il vous plaît, car on va quand même pas laisser une femme enceinte à ce point dehors, hein ? » On reprendrait presque espoir quand un des messieurs devant la porte (Renseignements généraux ?) finit par accepter d’aller se renseigner.
Puis on commence à être remis très vite dans la réalité quand on entend les policiers ricaner en disant « sympas les Pacéens, ils en récoltent dans la rue et ils nous les amènent maintenant ». On explique au policier que c’est mal de se moquer ainsi des gens qui sont en plus devant lui et qui l’entendent. Et puis de toute façon on laisse tomber, car la personne ne revient et confirme que les migrants qui n’ont pas le papier distribué le matin à Pacé ne seront pas reçus. Même pas les femmes enceintes, et ça c’est vraiment décidément de plus en plus digne.
Bon allez, stop, excusez-moi de ce long message, c’est fou comme la dignité m’en met gros sur la patate aujourd’hui… »
M.

Cinq associations présentes dans les centres de rétention dressent un constat alarmant

L’ASSFAM (association service social familial migrants), France terre d’asile, le Forum réfugiés-Cosi, la Cimade et l’Ordre de Malte sont cinq associations habilitées à être présentes dans les centres de rétention administratives, où elles apportent aux personnes « retenues » (c’est mieux de dire « retenu » que « enfermé »…) un soutien psychologique, et juridique, en leur disant leurs droits. Elles viennent de publier un rapport très complet et très précis sur la situation dans les centres, qu’ils ont analysés un par un. Elles résument dans le communiqué ci-dessous leurs observations, et font part de leurs inquiétudes. Intitulé « Centres et locaux de rétention administrative, rapport 2011 », il analyse aussi bien les conditions matérielles que les conditions psychologique de la rétention.

Le rapport complet est téléchargeable ici.

Rapport 2011 sur les centres et locaux de rétention administrative

UN BILAN CRITIQUE QUI APPELLE UNE REFORME URGENTE

En métropole, un quart des personnes étrangères placées en rétention à compter de juillet 2011 ont été éloignées avant le cinquième jour d’enfermement, c’est-à-dire avant d’avoir pu voir le juge judiciaire. En Outre-mer, le contrôle des juges relève de l’exception. C’est l’un des constats alarmants que dressent les cinq associations présentes en rétention dans leur rapport 2011
Ce deuxième rapport commun apporte, chiffres et témoignages à l’appui, une analyse inédite de l’application de la loi Besson, entrée en vigueur en juillet 2011. Il met en évidence le contournement voire la mise à l’écart des juges au profit du pouvoir de l’administration, des situations de droits bafoués, d’éloignements expéditifs, d’interpellations abusives, d’enfermement inutile qui en devient parfois punitif. Ce constat, sans appel, est plus grave encore en Outre-mer. Durant cette même année 2011, ces pratiques ont été à plusieurs reprises sanctionnées par les plus hautes juridictions françaises et européennes. Pour les personnes enfermées qui ont malgré tout pu exercer des recours, les juridictions nationales ont fréquemment sanctionné des procédures illégales.

Les Roumains et les Tunisiens ont particulièrement été ciblés en 2011, quand bien même les premiers sont des ressortissants de l’Union européenne et les seconds disposaient souvent des documents légalisant leur accès au territoire français. Le rapport révèle que l’éloignement de ces ressortissants permet à l’administration de faire du chiffre beaucoup plus facilement en s’affranchissant largement, une fois encore, du contrôle des juges.

La dernière loi sur l’immigration a donc sophistiqué un peu plus la machine à expulser, réglée pour répondre essentiellement aux objectifs de la politique du chiffre. Or, ce rapport sur les centres et les locaux de rétention administrative démontre les violations des droits toujours plus graves que produit ce dispositif.

Le document s’attache enfin à décrire l’impact sur les personnes enfermées de cette poursuite à tout prix d’objectifs quantitatifs.

Le rapport ne se contente pas de décortiquer un système : il permet de souligner l’urgence d’une réforme profonde des procédures d’éloignement. Selon les promesses de François Hollande et en conformité avec les engagements européens de la France, la rétention administrative doit devenir une exception.

 

ASSFAM
France terre d’asile
Forum réfugiés-Cosi
La Cimade
Ordre de Malte 

Mariage pour tous : la déclaration de François Hollande inquiète

Photo AFP - Sud-Ouest.

La déclaration du président de la République devant le congrès de l’Association des maires de France au sujet de la « clause de conscience » qui pourrait amener un maire à refuser de célébrer lui-même un mariage entre personnes du même sexe a suscité beaucoup d’émois, dans les associations comme dans les partis politiques (lire ici l’interview de Noël Mamère dans Libération), y compris au parti socialiste.

Voici tout d’abord le texte exact de cette déclaration : « Les maires sont des représentants de l’Etat. Ils auront, si la loi est votée, à la faire appliquer. Mais, je le dis aussi, vous entendant, des possibilités de délégation existent, elles peuvent être élargies, et il y a, toujours, la liberté de conscience. Ma conception de la République vaut pour tous les domaines. Et d’une certaine façon, c’est la laïcité, c’est l’égalité, c’est-à-dire, la loi s’applique pour tous, dans le respect, néanmoins, de la liberté de conscience ».
Cette déclaration est en effet étrange : un maire a déjà la possibilité de refuser de célébrer lui-même un mariage. Et certains ne s’en privent pas. Il a même la possibilité de déléguer, non seulement à un adjoint, mais également à un conseiller municipal. Alors, pourquoi cette déclaration ? Espérons que ce ne sont pas les gesticulations de quelques agités du goupillon qui font frémir le président…
La Ligue des droits de l’Homme est elle aussi inquiète, et vient de publier ce communiqué :
« La Ligue des droits de l’Homme exprime sa consternation après les propos du président de la République sur le mariage pour tous, devant le congrès de l’Association des maires de France (AMF). En avançant l’idée que « le respect des consciences des maires » pourrait justifier un refus de procéder en personne à un mariage, François Hollande apparaît comme faisant une concession aux manifestants de l’ordre moral opposés au projet de loi. A-t-il pris la mesure que, ce faisant, il armait une machine redoutable contre l’égalité des droits ? Dans un État de droit, un maire est au service de la loi et dans notre république laïque, le mariage est un acte civil depuis 1792. L’oublier, ce serait oublier qu’un maire ne marie pas en son nom propre, mais en vertu du mandat qui lui a été confié dans le cadre républicain. Ce serait aussi ouvrir largement la porte à toutes les discriminations. Qui peut prétendre aujourd’hui que des maires ne refuseront pas, au nom de la liberté de conscience, un mariage entre divorcés, un mariage jugé trop « mixte », ou trop « bizarre » ? Ce serait, enfin, instituer une inégalité territoriale devant un acte civil. Pour la Ligue des droits de l’Homme, attachée au principe d’égalité et au projet de loi de mariage pour tous, le changement a besoin de conviction, d’échange public. Il paraît que le courage politique c’est dire ce qu’on va faire et faire ce qu’on dit. Mais le courage n’est pas de le dire, il consiste à le faire ».

Ligue des droits de l’Homme : une campagne sur les droits des enfants dans le sport

Le groupe de travail, « Sport, droits et libertés » a été créé par le Comité central du 12 avril 2012, à la suite d’une orientation du congrès de la Ligue des droits de l’Homme à Reims, en juin 2011.
Après avoir publié une lettre électronique au moment des Jeux olympiques de Londres en juillet (http://www.ldh-france.org/Lettre-electronique-Droits-de-l,4298.html), l’équipe qui s’est constituée autour de Pascal Nicolle, l’animateur de ce groupe, et l’équipe du secrétariat général, Dominique Guibert et Nadia Doghramadjian, a souhaité mettre à son programme de travail une campagne de sensibilisation aux droits des enfants dans le monde sportif.
Cette campagne prend la forme de deux documents qui doivent permettre à la Ligue d’ouvrir un nouveau champ d’action en direction d’un public trop souvent bercé par le soi-disant « apolitisme » du sport :
• une plaquette 3 volets qui sera disponible à la fin du mois de novembre : il s’agit d’une plaquette, financée avec l’aide du ministère des Sports, de la Jeunesse, de l’Éducation populaire et de la Vie associative, à destination des adolescents. Cette plaquette porte sur les trois formes majeures de discriminations identifiées dans le mode sportif : le sexisme, le racisme et l’homophobie. Cette plaquette rappelle les termes de la Convention internationale des droits de l’enfant, les orientations de la LDH en la matière, et donne des conseils pratiques aux victimes de discriminations ;
• un tract de format A5 recto verso, disponible dès maintenant reproduit ci-dessous, et téléchargeable. Ce tract traite d’un dossier que la Ligue des droits de l’Homme porte depuis trois ans : celui des conditions discriminatoires qu’impose la Fédération française de football (FFF) aux mineurs étrangers pour l’obtention de leurs licences. Après trois ans de batailles juridiques (Défenseur des droits, Cnil…) et de discussions avec la ministre nouvellement nommée et les responsables de cette fédération, seule la mobilisation des amateurs de football peut faire bouger la FFF, véritable État dans l’État, qui se refuse à appliquer les lois françaises et les directives européennes.

Ce tract est doublement d’actualité :
• nous sommes en pleine période de prise en compte des licences dans les clubs et plusieurs centaines de licences de mineurs étrangers sont d’ores et déjà bloquées ;
• la FFF renouvelle ses instances le 15 décembre prochain, et il est important d’indiquer que cette fédération est la dernière à maintenir des dispositions discriminatoires.

Le sport occupe une place essentielle dans la vie associative et constitue pour beaucoup de jeunes un moyen d’entrer dans la citoyenneté et pour tous ses pratiquants un lien social essentiel, un moyen d’intégration et d’épanouissement.

Notre place est donc pleinement sur les terrains de sport !

Un récent sondage TNS SOFRES* vient de rappeler que 82% des sondés s’intéressent au sport et que 7 Français sur 10 sont des sportifs réguliers ou occasionnels.
Les valeurs positives du sport sont avant tout portées par le sport amateur, auquel les Français donnent une place fédératrice dans la société via notamment l’éducation des plus jeunes (51% des Français l’associent particulièrement au sport amateur contre 5% au sport professionnel).
Ainsi, 83% des Français sont d’accord pour dire que le sport participe à la diffusion des valeurs de respect et de partage à l’échelle d’un pays.

*Les détails de ce sondage :
http://www.tns-sofres.com/points-de-vue/66F27168EF7645AB99DB4A47A44B0C80.aspx

Le tract, téléchargeable ici.

La discrim’ hors jeu

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) se mobilise contre toutes les discriminations et pour le respect des droits de tous les humains.
Le sport n’est pas à l’abri : sexisme, racisme, homophobie… sont hors la loi, ils doivent être hors-jeu !

Des centaines de licences de footballeurs mineurs et étrangers sont bloquées…

Depuis 2009, la Fédération française de football (FFF) s’obstine à appliquer, de manière erronée, les dispositions de l’article 19 du Règlement de la Fédération internationale de football association (Fifa), qui porte sur le statut et le transfert des joueurs, afin de lutter contre le trafic des jeunes joueurs dans le monde.

La FFF adapte cet article à la réglementation française de manière discriminatoire. Elle exige de tout enfant non français qu’il justifie de l’identité et de la nationalité de ses parents, de ses liens de filiation avec ceux-ci et de leur résidence en France, ainsi qu’une attestation de sa présence continuelle en France lors des cinq années précédentes.

Cette règle absurde bloque des centaines de licences. Elle est discriminatoire !

Un enfant sans papiers n’existe pas. Il y a simplement des enfants : la Convention internationale des droits de l’enfant rappelle que l’intérêt supérieur de l’enfant prime sur toute autre considération.La Ligue des droits de l’Homme et ses partenaire.

La Ligue de droits de l’Homme et ses partenaires mobilisés contre les discriminations…

Depuis 2009, la Ligue des droits de l’Homme a saisi la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) et le Défenseur des droits. Elle a saisi le procureur de la République du tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan, suite à un dossier de refus de délivrance de licence amateur. Elle a créé un groupe de travail spécialisé. Elle a rencontré le président de la FFF et même la ministre des Sports… sans aucune suite.

D’autres fédérations sportives ont retiré les mentions discriminatoires de leurs règlements. C’est le cas notamment de la Fédération française d’athlétisme, qui a rapidement agi en ce sens.

La Fédération française de football est la dernière fédération sportive qui met en œuvre des mesures discriminatoires. Il est temps que le gouvernement fasse pression pour qu’elle respecte la loi française et les directives européennes.
Parce que nous aimons le sport, parce que nous aimons le football, les droits des enfants doivent être respectés !

Avec la Ligue des droits de l’Homme, défendons l’accès de tous, mineurs, majeurs, Français ou étrangers, à une licence sportive.

Pour défendre le sport pour tous, mobilisons-nous avec la Ligue des droits de l’Homme !

Affaire Natacha Aussibal : le rapporteur public accable le président de la Cidéral

Jeudi 15 novembre, le tribunal administratif jugeait la suppression du poste de Natacha Aussibal à la pépinière d’entreprise de la Cidéral (communauté de communes de la région de Loudéac). Le jugement, mis en délibéré, sera rendu le 13 décembre. Mais les conclusions du rapporteur public ont été accablantes pour le président de la Cidéral. À tel point que l’avocat de Natacha Aussibal n’a eu que peu de choses à ajouter lorsqu’il est intervenu.

« Obstination », « persistance d’une irrégularité fautive et obstinée », « motif économique (pour justifier la suppression du poste, ndlr) dérisoire », « triste affaire » : le rapporteur public n’a pas mâché ses mots pour donner son avis sur cette affaire.

Au départ, en juillet 2010, le président de la Cidéral révoque Natacha Aussibal, déléguée syndicale CGT, pour manquement à son devoir de réserve par la diffusion d’un tract. Saisi en référé, le tribunal administratif annule la révocation. Le président de la Cidéral réintègre alors Natacha, et la convoque pour un entretien préalable à sa suspension, et saisit le conseil de discipline. Le conseil de discipline conteste la suspension, mais son avis n’est que consultatif. Le président confirme la suspension pour un an. Quelques jours avant l’échéance, il propose au conseil communautaire la suppression du poste de Natacha, pour des raisons « économiques », et place Natacha « hors poste » : elle continuera à percevoir son salaire, mais ne travaillera pas. Une situation qu’elle vit naturellement très mal.

Le tribunal administratif était donc saisi sur cette suppression de poste, dont tout le monde a bien compris qu’il s’agissait d’une manœuvre pour écarter une déléguée syndicale.

Le rapporteur public a souligné le caractère « dérisoire » du motif invoqué pour supprimer le poste, et rappelé que deux conseillers communautaires s’étaient étonnés d’entendre ce motif « tomber du ciel » alors qu’aucune alerte n’avait été lancée auparavant.

Le défenseur des droits a jugé qu’il y avait eu « discrimination syndicale » et « harcèlement »

Il a également rappelé l’avis donné par le Défenseur des droits. Le remplaçant de la Halde (haute autorité de lutte contre les dicriminations et pour l’égalité) avait en effet été saisi, et avait considéré que, suspendue, Natacha Aussibal avait été victime d’une « discrimination suyndicale», et de « harcèlement ». Et il préconisait la réintégration de la fonctionnaire. Comme il l’avait fait après le jugement du Tribunal administratif, et l’avis du conseil de discipline, le président n’a tenu aucun compte de l’avis du défenseur des droits.

Le rapporteur public a également longuement insisté sur le harcèlement dont a été victime Natacha Aussibal, allant jusqu’à qualifier les agissements du président de la Cidéral de « persistance fautive et obstinée ».

Sa conclusion est sévère : il demande que le tribunal réintègre Natacha Aussibal à compter de décembre 2010 (avec astreinte financière), et lui accorde 10000€ d’indemnité pour le préjudice moral qu’elle a subi. Il ne s’agit bien entendu que des conclusions du rapporteur public, dont le tribunal tiendra compte ou pas.

L’avocat de Natacha Aussibal n’a eu qu’à confirmer tout ce qu’a dit le rapporteur public, et a lui aussi demandé sa réintégration et son indemnisation au titre du préjudice moral.

Le président a donc mis le jugement en délibéré : il sera rendu le 13 décembre.

Situation inquiétante pour les migrants en Ille-et-Vilaine

Mardi 13 novembre, une trentaine de Roumains ont été expulsés de maisons appartenant à la ville de Rennes (Photo Ouest-France).

La situation des demandeurs d’asile est catastrophique en Ile-et-Vilaine, et elle risque de s’aggraver rapidement, avec la menace d’expulsion qui vise les quelque 240 personnes qui logent dans la maison de retraite de Pacé, que la justice leur demande d’évacuer aujourd’hui. Il y aurait en ce moment 400 personnes dans les locaux réquisitionnés par Droit au logement dans le département d’Ile-et-Vilaine. L’association rappelle que « Les réquisitions du DAL 35 ont débuté en 2009 face au désengagement de l’État qui ne respecte plus ses obligations légales vis à vis des demandeurs d’asile. Ce sont les pouvoirs publics qui ont eux-mêmes créé cette pénurie en concentrant les migrants dans les villes où se trouvent les préfectures de région, comme à Rennes, sans adapter les conditions d’accueil. »

Aujourd’hui, le 115 (numéro d’appel pour les personnes sans abri) est déjà saturé, alors que nous sommes encore à un mois de l’hiver. Pour le DAL, « Derrière cette pénurie organisée se cache la volonté de l’État ne pas voir s’installer durablement ces migrants en France. Comme partout en France, la Préfecture d’Ille et Vilaine préfère favoriser l’hébergement précaire en enrichissant des marchands de sommeil, plutôt que de trouver des solutions pérennes moins onéreuses ».

Hier, mercredi 14 novembre, les associations de défense des migrants (Droit au logement, Réseau éducation sans frontière notamment) ont occupé symboliquement cinq lieux publics à Rennes : la Préfecture, d’où ils ont été refoulés, le Conseil régional, le Service départemental d’action sociale Kléber, l’Hôtel de Rennes Métropole, et la Mairie du Blosne. « Au lendemain de la triple expulsion laissant des mineurs roumains à la rue, et à la veille de la date décidée par la justice pour l’expulsion du « plus grand squat de France », notre colère et notre inquiétude montent ! Nous ne voulons pas attendre un drame humain dans la rue cet hiver pour que les élus expriment poliment leur indignation. Nous avons donc décidé d’occuper simultanément plusieurs lieux publics, afin de mettre l’État et les élus face à leurs responsabilités, pour faire face à l’urgence sociale sur leur territoire. Nous leur demandons de sortir de leur silence coupable afin de trouver des solutions de relogement humainement acceptables pour tous. »

De son côté, le préfet, Michel Cadot, qui est aussi préfet de région, annonce qu’il tiendra une conférence de presse vendredi 16. Il précise qu’une rencontre est prévue « à l’issue de la réunion avec les différentes associations du dispositif d’accueil d’hébergement et d’insertion, ainsi que l’Office français de l’immigration et de l’intégration, le Conseil général et la mairie de Rennes. L’objectif de cette rencontre sera de faire un point sur l’ensemble des différents dispositifs d’hébergement d’urgence mis en place dans le département et les capacités supplémentaires pendant la période hivernale. »

 

Halte au racket des demandeurs d’asile !

Les demandeurs d’asile sont victimes depuis plusieurs mois d’un véritable racket d’Etat. On leur impose en effet des taxes aux montants exhorbitants pour le moindre papier, et certaines de ces taxes sont dues y compris en cas d’échec de la procédure. Un collectif d’associations s’élève contre ce racket dans un communiqué de presse.

Communiqué de presse

Projet de loi de finances pour 2013 : il faut mettre fin aux taxes injustes et déraisonnables dues par les personnes étrangères

 

Dans quelques jours au Sénat va se jouer une bataille décisive pour mettre fin aux taxes injustes qui frappent des milliers de personnes étrangères.
Aujourd’hui, la délivrance d’un premier titre de séjour peut coûter plus de 700 euros. Ce montant est exorbitant, surtout pour des personnes en situation de grande précarité et qui ne souhaitent qu’une chose : régulariser leur situation administrative pour ne pas enfreindre la loi. Il représente un handicap et un frein puissant à l’insertion, en faisant peser sur les personnes les plus précaires, car tout juste régularisées, une somme démesurée par rapport à leurs revenus.
Dans nos permanences, il est devenu très fréquent de rencontrer des gens qui ne peuvent pas payer ces sommes. Ces personnes n’ont souvent d’autre solution que d’emprunter de l’argent auprès de leurs proches, ou de faire appel aux associations caritatives ou aux centres communaux d’action sociale ; il est anormal, injuste et contre-productif que ce soit les étrangers nouvellement arrivés, en situation sociale précaire ou fragile, les associations ou les services sociaux qui soient ainsi chargés de financer la politique d’intégration.
Cette situation résulte de la loi de finances pour 2012 qui, en plus d’augmenter le montant des taxes dues par les personnes étrangères vivant en France, a introduit le principe du paiement de 110 euros au moment de la demande de titre de séjour, non remboursable en cas de rejet de la demande. Il s’agit d’un véritable droit d’entrée dans la procédure, inédit jusqu’alors.
Des sénateurs ont tenté de mettre fin à ces injustices lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2012 en juillet dernier mais le ministre du Budget leur a demandé de retirer leurs amendements, s’engageant à ce que la question soit réglée par la loi de finances pour 2013.
Ce moment est venu.
Or, le projet de loi de finances pour 2013 voté par l’Assemblée nationale est largement insuffisant :
• il propose de baisser de 105 euros le montant de la taxe OFII due au moment de la première délivrance d’un titre de séjour ;
• et un amendement voté par les députés diminue de 60 euros la part du droit de visa de régularisation à acquitter au moment de la demande de titre de séjour. Mais le montant global de cette taxe, de 340 euros, reste inchangé, son paiement n’ayant été que décalé dans le temps.
Le ministre du Budget a affirmé devant l’Assemblée nationale que le gouvernement diminuait d’un tiers les taxes dues par les étrangers au moment de la première demande. Pourtant, au final, la délivrance d’un premier titre de séjour peut coûter aujourd’hui plus de 700 euros, et l’actuelle rédaction du projet de loi de finances 2013 ne conduit qu’à une réduction de 105 euros.
C’est pourquoi nos associations demandent au gouvernement et aux sénateurs :
• La suppression définitive du principe du paiement d’une taxe au moment de la demande de titre de séjour ;
• Une baisse significative des taxes ni raisonnables, ni justes, exigées des personnes étrangères vivant en France.
Le 13 novembre 2012
 Premiers signataires : ACORT, Act Up-Paris, l’AFVS, AIDES, AMF, ARCAT, L’association démocratique des Tunisiens en France, ATD Quart Monde, ATMF, ATTAC, le CATRED, la Cimade, le Comede, le COVIAM, Créteil Solidarité, la FASTI, la Fédération de l’Entraide Protestante, la Fédération SUD Education, Femmes Egalité, la FTCR, le GISTI, la LDH, le MRAP, le RAJFIRE, le Réseau chrétien – Immigrés, RESF, Solidarité Sida, le Syndicat de la Médecine Générale, l’Union syndicale Solidaires
Avec le soutien des partis : les Alternatifs, la FASE, la Gauche anticapitaliste, le NPA, le Parti de Gauche, le PCOF

« Contrôles au faciès » : le ministre recevra des membres du collectif

La situation serait-elle en train d’évoluer, concernant les « contrôles au faciès » ? C’est en tout cas l’espoir que nourrit le collectif « Stop les contrôles au faciès », après la petite phrase que le ministre de l’intérieur a prononcée à l’ambassade des Etats-Unis, le 7 novembre dernier, à l’occasion de la réélection du président Obama. Alors qu’un des invités, s’adressant à Manuel Valls, lui rappelle que Barack Obama est très engagé dans la lutte contre le contrôle au faciès, le ministre de l’intéreur a répondu : « Oui, je le sais, c’est aussi une priorité pour nous ». Et il s’est ensuite engagé à recevoir personnellement des membres du collectif, qui mène son combat en lien étroit avec la Ligue des droits de l’Homme. Le collectif a aussitôt publié un communiqué, pour prendre publiquement le ministre au mot :
« Vous savez, Barack Obama est très engagé dans la lutte contre le contrôle au faciès M. Valls ». « Oui, je le sais, c’est une priorité pour nous aussi ». C’est à la résidence de l’Ambassadeur des Etats-Unis, le 7 novembre, à l’occasion du petit déjeuner célébrant la réélection de Barack Obama, que Manuel Valls s’est engagé à recevoir personnellement les membres du Collectif contre le contrôle au faciès, déjà entendus par le cabinet du Ministre en juillet dernier, auprès de Franco Lollia, porte parole du Collectif.
Après la Ministre à l’Egalité des Territoires, qui a affirmé sur le Grand Journal le 31 octobre son soutien à l’expérimentation de la politique du reçu, et le Défenseur des Droits Dauminique Baudis qui l’a défendue le 6 novembre au Sénat, c’est donc certain : cette fois-ci, Manuel Valls est enfin prêt à enclencher une réelle discussion sur le contrôle au faciès et les mesures qui peuvent y remédier. Il y a plusieurs semaines, le Ministre avait préconisé le retour du matricule sur les uniformes, considérant qu’une politique de reçu contrôle d’identité représentait une « tracasserie supplémentaire ». « Mais cela ne répond pas à la proposition 30, qui est de lutter contre le contrôle au faciès » lui a rappelé Sihame Assbague porte parole du Collectif. C’est pour y répondre que Manuel Valls a proposé une rencontre de fond avec les parties prenantes du dossier.
Alors qu’une proposition de loi en faveur d’une politique de reçu du contrôle d’identité a été déposée en octobre par un sénateur de la nouvelle formation politique du Centre, l’UDI et que le Front de Gauche, par le biais de la sénatrice Eliane Assassi, travaille minutieusement sur ce sujet, une audition du collectif par le groupe EELV se prépare à l’Assemblée Nationale. Malgré le soutien de nombreux parlementaires et l’intérêt de ministres socialistes – Stéphane Le Foll et Arnaud de Montebourg, présents au petit déjeuner, ont également accepté de rencontrer le Collectif dans les prochaines semaines – le Parti Socialiste pourtant à l’origine de la reprise de la proposition du reçu reste à la traîne. À droite, des échanges constructifs ont permis d’éclaircir un certain nombre d’incompréhensions et de balayer les idées reçues. Jean-Pierre Raffarin a ainsi souligné « la responsabilisation » que permettrait un tel outil…et invité le collectif à le contacter au Sénat. Ce qu’il ne manquera pas de faire.

Sur les origines de la Ligue des droits de l’Homme, par André Hélard

Victor Basch, un des fondateurs de la Ligue des droits de l'Homme, a créé et présidé la section de Rennes.

La section rennaise de la Ligue des droits de l’Homme présente deux originalités : elle a été la première section créée en province, et elle a été présidée par un de ses créateurs, Victor Basch, qui a été assassiné par la milice de Vichy, le 10 janvier 1944, dans l’Ain, avec son épouse.

Dans le dernier numéro du bulletin de cette section,  André Hélard, qui en est membre, revient sur les origines de cette association, créée en 1898, pendant le procès en appel d’Alfred Dreyfus à Rennes.

« Il y a dans cette affaire Dreyfus, et il y aura longtemps en elle, et peut-être éternellement, une vertu singulière. […] Plus cette affaire est finie, plus il est évident qu’elle ne finira jamais. Plus elle est finie, plus elle prouve. » (Péguy, Notre jeunesse)

Revenir aux origines d’un mouvement, que ce soit un parti politique ou une association, n’est pas forcément du simple ressort de l’archéologie. Cela permet aussi d’éclairer sa raison d’être première, les valeurs au nom desquelles il s’est constitué et les principes selon lesquels il s’est organisé.

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer un peu rapidement, la Ligue des droits de l’homme n’est pas née du rassemblement d’hommes partageant sur tout et unanimement une même vision. Ceux qui la fondèrent ne se souciaient «  que » d’être d’accord sur ce qui leur semblait être l’essentiel dans la France d’alors, la France de 1898 et de l’affaire Dreyfus.

Quelques explications, les plus simples possibles, permettent de comprendre ce qui lui conféra ce caractère exemplaire. Fin 1894, un conseil de guerre a condamné le capitaine Dreyfus au bagne à perpétuité pour trahison. Or il est bientôt apparu que Dreyfus a été condamné à la fois illégalement (un dossier contenant de prétendues preuves de sa culpabilité été communiqué a ses juges sans que l’accusé et ses défenseurs en aient eu connaissance, ce qui constitue évidemment une violation majeure du droit), et injustement (puisque il a été établi par le colonel Picquart que le traître n’était pas Dreyfus mais un autre officier, Esterhazy). La simple reconnaissance de la vérité, mais aussi le respect du droit, et la plus élémentaire justice voudraient que le procès de 1894 fût révisé, mais les gouvernements successifs s’y refusent, répétant qu’« il n’y a pas d’affaire Dreyfus ». Parce qu’il leur paraît impossible de reconnaitre que l’Armée ait pu se tromper ou, bien pire, tramer une machination contre un officier innocent, qui n’aurait eu que le tort d’être juif. Et aussi parce qu’ils n’osent s’opposer a une opinion travaillée depuis le début de l’Affaire, au cri souvent répété de « La France aux Français », par une presse d’un antisémitisme exacerbé. C’est au lendemain de l’acquittement d’Esterhazy, le coupable évident, par un autre conseil de guerre, que Zola lance son fameux J’accuse qui amène le gouvernement à l’assigner en justice pour diffamation envers l’Armée.

Et c’est précisément pendant le procès de Zola que s’ébauche la Ligue des droits de l’Homme, en février 1898.

L’ancien garde des sceaux, Ludovic Trarieux, effaré de la manière dont se passe ce procès, en est venu à penser qu’il est nécessaire « de former un groupe, une association, ou une ligue, quelque chose qui serait la sauvegarde des droits individuels, la liberté des citoyens et leur égalité devant la loi. (1) » Le 17 (ou 18) février, pendant une suspension d’audience, il en fait part à quelques hommes qui sont là, comme lui, en tant que témoins de la défense (2).

C’est là le noyau initial, quelques hommes qui, au nom des principes du droit ou de l’idée qu’ils se font de la recherche de la vérité, partagent le même refus du dévoiement de la justice sous prétexte de raison d’État.

Constatant que « tout est sapé, les droits de l’homme, le respect de la justice, enfin tout ce qui fait une société policée, et que nous appelons civilisation », ils se demandent: « Allons-nous rester isolés dans ce désordre qui gagne de proche en proche ? Non! il faut au contraire segrouper […] pour rappeler sans cesse les grands principes démocratiques (3). »

Telle est l’association originelle. Les premiers statuts de ce qui va s’appeler Ligue des droits de l’homme et du citoyen, sont bientôt rédiges. L’article 1er  stipule qu’il s’agit d’une « association destinée à défendre les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de justice énoncés dans la Déclaration des droits de l’Homme de 1789 », affirmant avec force la volonté de s’inscrire dans la perspective universaliste de la Révolution française. Mais le plus important, quant à l’esprit, est certainement l’article 3 :

« Elle fait appel à tous ceux qui, sans distinction de croyance religieuse ou d’opinion politique, […] sont convaincus que toutes les formes d’arbitraire et d’intolérance sont une menace à la civilisation et au progrès. » Comme l’a écrit Madeleine Rebérioux, la Ligue est ici clairement définie comme « un creuset ou des énergies d’origines fort diverses purent, sinon fusionner, du moins agir en commun, si fortes étaient en France la référence de l’universalisme de la Révolution française et l’aspiration à maintenir et à renouveler les pratiques citoyennes. »

Sur ces bases, ces précurseurs contactent leurs collegues, leurs relations, à Paris, puis en province, obtenant rapidement nombre d’adhésions individuelles. Début avril, on en compte près de 300. Le 4 juin 1898 peut se tenir l’assemblée générale constitutive de la LDH. Et le 23 décembre la première assemblée générale ordinaire réunit 2000 personnes à Paris, avec sept sections de province «  constituées ou en cours de constitution », dont celle de Rennes (4), représentée par Basch.

Parmi ces premiers ligueurs il y a des intellectuels, savants, universitaires, écrivains, des fonctionnaires, des membres de professions libérales, médecins, avocats, bon nombre de journalistes, et de rares hommes politiques. Des parcours, des statuts sensiblement différents donc. Mais aussi des engagements parfois nettement divergents. À côté de républicains modérés, voire même conservateurs, et libéraux, comme Trarieux ou Reinach, des gens bien plus à gauche et même franchement socialistes et jaurésiens, tels Lucien Herr ou Francis de Pressensé, ou anarchistes comme le fondateur du journal Le Libertaire, Sébastien Faure. Ces caractéristiques de la naissance et des premiers pas de la Ligue au plan national, on les retrouve dans l’histoire de la section de Rennes.

Ici aussi, tout est parti d’une toute petite poignée d’hommes. Cinq professeurs de l’Université, qui dès fin 1897, ont commencé a s’interroger sur le déni de justice dont le capitaine Dreyfus pourrait avoir été victime. Ce sont Jules Andrade, Jules Aubry, Victor Basch, Georges Dottin, Henri Sée, et ils enseignent les mathématiques, le droit, l’allemand, la philologie, l’histoire. Afin de se forger une opinion par eux-mêmes, ils se sont mis, dit Basch, à « suivre de près et à étudier tous les documents qui seraient publiés avec le sévère scrupule que nous apportions à nos recherches scientifiques. » Attitude typique des intellectuels dreyfusards, esprits libres et rationnels pour qui l’esprit d’examen et la raison scientifique fondent la liberté d’opinion contre les prétendues vérités imposées par la raison d’État.

Après J’accuse, ils ont été parmi les signataires des « protestations » plus connues aujourd’hui sous le nom de pétition des intellectuels. Ce qui a fait d’eux la cible d’attaques particulièrement violentes.

Rien d’étonnant donc à ce que, dans les semaines qui suivent la fondation de la Ligue, au printemps 1898, ils y adhèrent à titre individuel, bientôt rejoints par deux nouveaux collègues (pas un de plus…), le chimiste Cavalier et le physicien Weiss. Ce sont eux « les sept » dont Basch dira : « nous étions sept contre soixante-dix mille. » Ce sont eux aussi (5) qui seront à l’origine de la section de Rennes, à moment où la Ligue prend sa dimension nationale. Mais à un moment aussi ou l’antidreyfusisme se fait de plus en plus virulent en dépit ou à cause du naufrage de plus en plus évident de l’accusation, après (entre autres) le démontage complet par Jaurès, dans Les Preuves, de la machination dont Dreyfus a été victime, et surtout après la saisie de la Cour de cassation, qui aboutira à la révision du procès de 1894, et au renvoi de Dreyfus devant le Conseil de guerre de Rennes.

C’est donc dans un climat très tendu que Basch et ses amis se posent cette question, si semblable à celle que se posait Trarieux en février 98 : « Sur qui appuyer notre action ? Comment recruter? » Et c`est en réponse à cette question qu’ils vont effectuer un travail à la fois militant et politique tout à fait remarquable de la part de gens qui n’avaient aucune expérience de l’action militante ou de l’action politique. En témoigne la liste des premiers membres de la section, fondée le 21 janvier 1899 : comme chez les « inventeurs » de la Ligue en 1898, on a là « un creuset d’énergies d’origines fort diverses ». Parmi les universitaires, se côtoyaient sans problème les modérés Aubry, qui a une vision très juridique de l’Affaire, ou Dottin, qui est catholique, et les juifs Basch et Sée qui ne tarderont pas  devenir socialistes. Désormais se sont joints à eux deux francs-maçons, forcément très anticléricaux à l’époque, les deux derniers Vénérables de la Loge La Parfaite Union; le pasteur protestant et deux membres de son conseil presbytéral, deux fonctionnaires que Basch qualifie de « vieux républicains » et cinq ouvriers, dont l’un est le secrétaire de la Bourse du travail, et les autres des leaders du Cercle d’études sociales, la fraction la plus révolutionnaire du modeste mouvement ouvrier rennais.

Ils sont tous représentatifs de courants ou de mouvements que bien des choses peuvent séparer, voire opposer. Mais ce qui les unit en ce moment précis leur a paru plus important que ce qui les sépare. Et lorsque Rennes se verra désignée pour être le théâtre du second procès Dreyfus, en 1899, la section sera bien présente pour jouer, en coulisse mais avec beaucoup d’efficacité, son rôle d’accueil et parfois de protection de quelques-uns des plus célèbres dreyfusards présents à Rennes.

Pour en savoir plus, cf. le numéro spécial (97/98) de Hommes & Libertés, « 1898-1998, Une mémoire pour l’avenir», les nombreux articles dans diverses revues d’E. Naquet, et sa thèse, La Ligue des droits de l’Homme, une association en politique, accessible sur le site spiresciences-po.fr ; sur la section de Rennes, cf. André Hélard, L’honneur d’une ville, La naissance de la section rennaise de la Ligue des droits de l’Homme, éditions Apogée, Rennes.

1. Selon Jean Psichari, qui raconte avec un peu de recul ce moment crucial, Cité par Emmanuel Naquet.

2. Ce sont surtout des « savants », qui ont témoigné pour dire comme Émile Duclaux, directeur de l’Institut Pasteur : « si, dans les questions scientifiques que nous avons à résoudre, nous dirigions notre instruction comme elle semble l’avoir été en cette affaire, ce serait bien par hasard que nous arriverions à la vérité. »

3. Toujours d’après Psichari

4. Elle se constituera un mois plus tard. Les autres sont celles de Marseille, Lyon, Le Havre, Rouen, Nancy et Orléans.

5. Avec le philosophe Paul Lapie, qui vient d’être nommé à Rennes à la place d’Andrade, mute à Montpellier par mesure disciplinaire.

 

 

Pour la réhabilitation des soldats « Fusillés pour l’exemple » pendant la première guerre mondiale

La fiche militaire de François Laurent, après sa réhabiltation.

Le 11 novembre prochain, la commune de Mellionnec rendra hommage, comme toutes les communes de France, aux victimes et aux soldats de la première guerre mondiale.

Mais elle ne se contentera pas de cela. Comme en 2011, Marie-José Fercoq, maire de Mellionnec, rendra aussi hommage à François Laurent. Un hommage particulier, puisque François Laurent a fait partie de ceux qu’on a appelés les « fusillés pour l’exemple », la plupart du temps victimes de l’arbitraire d’un Etat major incompétent. La Ligue des droits de l’Homme participera à cet hommage, aux côtés de la Libre pensée, l’Association des Anciens Combattants de la Résistance (ANACR), l’ Association Républicaine des Anciens Combattants (ARAC). Les associations se réuniront devant la mairie de Méllionnec à 11 heures ce 11 novembre 2012, pour descendre en cortège jusqu’au monument aux morts. Les prises de parole au nom de la Réhabilitation devraient se faire à partir de 11h20/11h25.

Il se trouve que le combat pour la réhabilitation des « fusillés pour l’exemple » est un des grands combats de la Ligue des droits de l’Homme, à tel point que, Gilles Manceron, historien spécialiste de la « grande guerre » et de la LDH, n’hésite pas à dire qu’il s’agit, avec l’affaire Dreyfus, de « son second grand combat fondateur ». Un combat qui a débuté dès après la guerre, et qui n’est pas terminé, puisque la réhabilitation officielle par la République de ces hommes n’a toujours pas eu lieu.

Yves Tréguer, de la section de la Ligue des droits de l’Homme de Rennes, s’est penché sur l’histoire de ces soldats, et plus précisément celle de deux soldats bretons, Lucien Lechat, et, justement, François Laurent. Voici le résultat de ses recherches, qui a également été publié dans le bulletin de la section de Rennes (novembre 2012).

Fusillés pour l’exemple, par Yves Tréguer, de la section LDH de Rennes.

Déjà la pierre pense, où votre nom s’inscrit
Déjà le souvenir de votre nom s’efface
Déjà vous n’êtes plus qu’un mot d’or sur nos places
Déjà vous n’êtes plus que pour avoir péri

Louis Aragon – « Tu n’en reviendras pas »

 

La proche célébration de l’armistice du 11 novembre 1918, le centième anniversaire à venir en 2014 du déclenchement de la première guerre mondiale vont faire ressurgir la cause des fusillés pour l’exemple, à laquelle la Ligue des droits de l’Homme est liée, à travers ses campagnes contre l’iniquité des décisions des tribunaux militaires et pour la réhabilitation des victimes.

La défense de cette cause a été, on le sait, un des engagements majeurs de la Ligue et même, selon l’expression de Gilles Manceron, « après l’affaire Dreyfus, son second grand combat fondateur ».

Un long travail, avec des victoires sur le plan législatif et judiciaire, qui a permis de rendre justice à quelques dizaines de soldats : c’est le cas, intéressant la Bretagne, de deux soldats, François Laurent, de Mellionnec, exécuté en1914 et celui, plus connu, de Lucien Lechat, l‘un des caporaux de Souain, exécuté en 1915 dont nous allons évoquer la mémoire.

Pour autant, depuis les années 1930, le cas d’autres fusillés ou de victimes d’exécutions sommaires, reste à examiner, et le combat n‘est pas fini aujourd’hui…

Un bref rappel s’impose, pour comprendre le contexte des années 14-15 .C’est en effet dans ces années qu‘ont eu lieu la plupart des 600 exécutions de la Grande Guerre (430 environ), alors que la postérité a surtout retenu la répression des mutineries de 17.

Au début des opérations l’État-major se place dans la perspective d’une guerre courte et elle recherche avant tout une justice sévère et expéditive. Il s‘en donne les moyens en obtenant par les décrets du 2 aout et du 6 septembre 1914 les « conseils de guerre spéciaux» qui permettent de punir de façon exemplaire à l’aide d’une procédure simplifiée, avec des droits de la défense réduits. Pas de possibilité de grâce ou de révision, sentence de mort applicable dans les 24 heures.

On fusillera donc pour l’exemple c’est à dire qu’un soldat pourra être exécuté pour avoir commis un délit précis mais aussi « pour faire un exemple » susceptible de maintenir une obéissance stricte, qui est, on le sait, la force principale des armées.

Le souvenir de 1870 et de la débandade des armées françaises reste un souvenir cuisant. Un certain nombre de cas de peines de mort est prévu dans la réglementation : nous en retiendrons deux qui seront la cause de la condamnation de François Laurent et de Lucien Lechat, la mutilation volontaire et le refus d’obéissance. La condamnation est d’autant plus aisée que selon un historien, cité dans une thèse récente « il existe un décalage entre les théories du soldat-citoyen et les représentations communes des chefs militaires, cette conception des troupiers comme matériau obéissant, silencieux et consommable »(1).

François Laurent.

L’histoire du soldat de Mellionnec n’est pas très connue et n’a pas fait l’objet d’un culte mémoriel, comme celui des caporaux de Souain, que nous aurons l’occasion d’évoquer.

Elle a, en revanche, fourni le sujet d’un texte remarquable de Louis Guilloux, paru dans Vendredi, le 5 juin 1936, en plein triomphe électoral du Front populaire, et moins de 3 ans après la réhabilitation du soldat breton, le 6 décembre 1933. Le texte s’appelle « Douze balles montées en breloque ».On pourrait l‘appeler un texte de fiction documentée, tant, dans sa première partie, il reste proche des faits. Laissons-lui la parole : « Le Bihan était né dans un hameau où on ne  parlait que le breton. Il ne savait pas le français du tout. Le peu qu’il avait appris à l’école, il l’avait oublié entièrement. Il était aussi ignorant qu’on puisse l’être, ce qui ne fût pas arrivé si on l’avait instruit dans sa langue. Il le disait, et ne comprenait pas pourquoi on ne l’avait pas fait, puisque l’institutrice, bretonne comme lui, savait naturellement le breton. Mais il était interdit à l’institutrice de parler le breton à l’école…

Il partit dès le premier jour…

Un matin, le soldat Le Bihan tiraillait derrière un bosquet, quand vint l’ordre de se porter en avant. Comme il s’élançait, une balle lui traversa la main droite de part en part. Il n’en continua pas moins de courir. Mais quand, de nouveau couché par terre, il voulut recommencer à tirer, il ne le put, et le capitaine lui donna l’ordre de rejoindre le poste de secours le plus proche. Il se mit en route et après quelque temps arriva au poste ou il montra sa blessure à un major, qui parut extrêmement intéressé…

Le major lui posa diverses questions, auxquelles Le Bihan ne répondit pas, ne les ayant pas comprises. Le major n’insista pas. D‘une part, il n’avait pas de temps à perdre, et, d’autre part, il avait ses idées arrêtées sur la discipline aux armées, et la manière de la faire observer. Il griffonna quelque chose sur un bout de papier, qu’il remit à Le Bihan, et donna l‘ordre a un planton de le conduire plus loin à l’arrière, ce qui fut fait …. Le Bihan se laissa conduire où l’on voulut …. Or, aussitôt « remis aux autorités » et le billet du major déchiffré, le soldat Le Bihan fut conduit au poteau et fusillé. Accusation : « blessure volontaire à la main droite. »

Le fameux billet du major, qui conduisit à la mort François Laurent, nous l’avons à disposition (2). Il est disponible aux archives des services historiques de l‘armée de Terre (Dossier Laurent, série J, SHAT): il s’agit des célèbres certificats du Dr Buy ,en grande partie pré-rédigés, qui firent exécuter deux autres soldats, réhabilités en1925 et en 1934,ce qui fait dire à Nicolas Offenstadt (3) que « (ces certificats) ne contribuent pas à améliorer cette image de la médecinecmilitaire dans l‘entre-deux-guerres ».

A la suite de l’action d’anciens combattants, le conscrit de Mellionnec est réhabilité, sa famille reçoit la somme de 10.000 francs et la mairie de sa commune refait faire une plaque où le nom de François Laurent figure parmi les noms des morts au champ d’honneur.

Sa fiche consultable sur le site SGA, Mémoire des Hommes, mentionne : mort pour la France le 19 octobre 1914. Genre de mort: fusillé, puis : réhabilité par jugement le 3 décembre 1933.

Les nationalistes bretons font de François Laurent, mort de ne pas avoir pu se défendre en français « la victime de la domination française en Bretagne », et, en 1934 Breiz Atao proteste contre la présence du préfet à la cérémonie de réhabilitation. En 1982, un film bilingue sur « Frances Laorans »est tourné à Clohars-Carnoët que la famille du soldat désavoue.

Fiche militaire de Lucien Lechat.

Lucien Lechat.

Le cas de Lucien Lechat, né dans la commune de Le Ferré, Ille et Vilaine, est beaucoup plus connu, car il fait partie d’une affaire restée célèbre, celle des caporaux de Souain. Cette affaire a donné lieu à une médiatisation et à un culte mémoriel exceptionnels. (4)

Les faits sont bien connus. Le 10 mars 1915, les soldats de la 21ème compagnie du 336ème régiment d’infanterie reçoivent l’ordre de sortir des tranchées et d‘attaquer à la baïonnette. Les précédentes attaques avaient été des échecs sanglants.

La préparation d‘artillerie atteint (volontairement  ?) les tranchées françaises. Épuisés, démoralisés, les soldats refusent de quitter leurs abris.

Le général Réveilhac veut des sanctions pour refus d’obéissance: elles visent 6 caporaux et 18 soldats.

Finalement, le 16 mars, après un procès expéditif, sont condamnés à mort, d‘une façon arbitraire qui fait penser aux anciennes décimations en usage dans les légions romaines, 4 caporaux, dont le plus jeune est Lucien Lechat. Le 17 mars, ils sont fusillés, deux heures avant que les peines n’aient été commuées en travaux forcés. Le général Réveilhac ne sera pas inquiété. Une loi d’amnistie, votée en 1919 empêche même les sanctions contre les chefs responsables d`exécutions sommaires. Qui plus est, il sera fait plus tard grand officier de la Légion d’honneur.

La réhabilitation : le combat admirable de Blanche Maupas (à Sartilly, dans la Manche) pour la réhabilitation de son mari, l’un des 4 caporaux, est bien connu (5). Elle fut aidée par des groupes d’anciens combattants et par la Ligue des droits de l’Homme dont l’action en faveur des fusillés pour l’exemple fut l‘une des grandes causes dès la fin de la guerre.

Moins connus sont les efforts d’Eulalie Lechat, la sœur de Lucien, qui soutenue par la Ligue, obtint en mars 1934 que son frère soit réhabilité.

Le souvenir de l‘enfant du pays ne s’est jamais éteint.

Le 24 novembre 2004, a l’initiative du maire de Le Ferré, Monsieur Pautrel, a eu lieu une cérémonie religieuse et civile d‘une très grande ferveur. Une délégation venue de Sartilly associait une fois encore les deux noms de Lechat et de Maupas et ceux de Girard et Lefoulon dans un souvenir commun.

Notre section, à la demande de la mairie, était présente en la personne de son président. Le chant de Craonne et le chant des partisans résonnèrent au cimetière pour l’inauguration de la plaque du souvenir.

La journée se termina avec uneremarquable conférence de Nicolas Offenstadt, qui suivait l’hommage au cimetière.

Et maintenant ?

Comme le rappelle à juste titre Gilles Manceron, dans un article paru en 2008 dans « Hommes et Libertés», intitulé « La mémoire des fusillés de la Grande Guerre », des questions très importantes restent en suspens.

Chacun se souvient de la déclaration, faite le 5 novembre1998, de Lionel Jospin, premier ministre, à Craonne, haut lieu des souffrances des poilus : «  Certains des soldats, épuisés par des attaques condamnées a l’avance, glissant dans une boue trempée de sang plongés dans un désespoir sans fond, refusèrent d‘être des sacrifiés. Que ces soldats « fusillés pour l’exemple », au nom d‘une discipline dont la rigueur n’avait d’égale que la dureté des combats, réintègrent aujourd’hui, pleinement, notre mémoire collective nationale ».

Depuis, rien. Or il reste des cas graves, que recense l‘article d’« Hommes et Libertés », notamment dans les troupes coloniales.

Le combat des ligueurs pour défendre la mémoire des fusillés de 14-18, va revenir en force, en 2014, pour le centième anniversaire du début de la guerre pour lequel il faut nous mobiliser dès à présent. Ce combat n’est pas terminé.

(1) in André Loez: 14-18, Gallimard, Folio histoire. Les refus de la guerre 2010, p 61.

(2) Une photo de ce certificat du Dr Buy, figure à la page 41 du livre de Nicolas Offenstadt :Les fusillés de la grande guerre et la mémoire collective (1914-2009), Éditions Odile Jacob 2009.

(3) Offenstadt, op cité p 40.

(4)Essentiellement, le film de Stanley Kubrick, Les sentiers de la gloire, sorti en 1957 …. et  projeté en France en 1975,18 ans plus tard.

(5) Un film de Patrick Jarnain, Blanche Maupas, a été donné, en 2009, à la télévision.

Un détour par le cimetière permet de voir une plaque de commémoration des caporaux morts pour l’exemple à Souain pendant la 1ère Guerre mondiale. Parmi ces caporaux, le Caporal Lechat, originaire de Le Ferré, a été fusillé pour l'exemple le 17 mars 1915. En 1924, le Caporal Lechat est réinhumé a Le Ferré devant une grande affluence. Il fut réhabilité, ainsi que ses trois autres compagnons d'infortune, en 1934. En novembre 2004, la commune de le Ferré a organisé une cérémonie du souvenir pour les caporaux de Souain. Plus d`un millier de personnes ont participé à cette cérémonie, la même foule que lors des cérémonies de 1924 et 1934 !