La famille Mejidov expulsée vers la Pologne, une mère de famille menacée

Nuit du dimanche 28 au lundi 29 juillet, 2h30 : une vingtaine de militants sont groupés devant les grilles du centre de rétention administrative de Rennes, pour protester contre l’expulsion de la famille Mejidov. Les parents et leurs deux enfants de 3 et 4 ans y sont enfermés depuis le dimanche 21 juillet.

La famille tchétchène avait réussi à s’enfermer dans leur chambre en bloquant la porte. Au bout d’une demi-heure, les policiers ont fini par pénétrer dans la pièce. « Nous avons alors entendu les cris des enfants et de leurs parents qui tentaient de résister à leur expulsion ». Expulsion programmée à 9h45 vers la Pologne, pays par lequel la famille est rentrée dans l’espace européen. Et il est quasiment certain que la Pologne les renverra en Tchétchénie, où c’est leur vie qui est menacée.

Un policier est sorti avec les enfants dans les bras, suivi quelques minutes plus tard des parents menottés.

Les enfants ont été habillés par les policiers, puis toute la famille a été embarquée à 4h15 dans 2 véhicules pour l’aéroport de Roissy.

Leur téléphone est coupé…

 

Toute cette scène s’est déroulée sous les yeux de Hamest C, mère de famille kurde de Géorgie, qui partageait le même bâtiment que la famille Mejidov.

Effondrée par tant de violence morale et physique, elle ne dort plus et refuse de manger, de boire, de suivre son traitement depuis 2 jours.

Elle sait que le même sort l’attend demain mardi, si la cour d’appel ne la libère pas cet après-midi (audience à 15h30 au Parlement de Bretagne). Un vol est prévu dès demain pour la Pologne. Cette mère de famille laisserait derrière elle, son mari, Bella sa fille de 22 ans et Malkhaz un jeune lycéen de 18 ans scolarisé à Rennes.

 

Deux enfants de 2 et 3 ans en rétention au centre de Rennes Saint-Jacques (35)

Programme du vendredi 26 juillet, Rennes.

9h30 : 9 référés logement pour des demandeurs d’asile

10h : Rendez-vous avec le juge des libertés et de la détention pour la famille Mejidov .

14h : recours contre placement en rétention pour Mohamed Y. , demandeur d’asile syrien.

14h30 : recours contre placement en rétention pour Hamest C, mère de famille géorgienne, dont un fils est scolarisé au lycée V.H Bash.

Le cas de la famille Mejidov est particulièrement éloquent. Voici le récit de leur parcours, par le Réseau éducation sans frontière.

La famille Mejidov, un couple tchétchène et ses deux  enfants, Ramyi, 2,5 ans et Riyad 3,5 ans, est arrivée à Nantes en février 2013 pour demander l’asile en France.

Comme de nombreux demandeurs d’asile, cette famille a connu pendant plusieurs semaines l’errance entre la rue et le 115. Un hébergement stable obtenu en avril 2013 dans un hôtel, a permis la scolarisation du fils aîné à l’école maternelle La Fontaine de Saint Sébastien Sur Loire.

Sous le coup d’une réadmission vers la Pologne (les demandeurs d’asile doivent normalement faire leur demande dans le premier pays européens par lequel ils entrent dans l’UE), la famille Mejidov a été convoquée le 2 juillet à la préfecture de Nantes. Un vol leur a été annoncé pour le 11 juillet et une assignation à résidence leur a été notifiée. Craignant un retour forcé en Pologne, la famille ne s’est pas présentée le 11 juillet. La préfecture a alors mis fin à leur hébergement.  

Après avoir fait le recours contre la réadmission, la famille Mejidov a regagné l’hôtel avec l’accord de la préfecture, qui a renouvelé le contrat pour l’hébergement jusqu’au 24 juillet. 

Dimanche 21 juillet à 7h, une vingtaine de policiers ont fait intrusion dans la chambre d’hôtel, alors que la famille dormait encore…Réveil brutal pour le couple et leurs deux jeunes garçons embarqués vers le commissariat de Nantes, puis vers le CRA de Rennes, où ils sont arrivés vers 14h. 

Lundi matin à 4h, nouveau réveil brutal pour cette famille par les policiers du CRA pour les conduire à l’aéroport. Le père a crié pendant 1/4 h son refus de partir. Les policiers ont finalement renoncé, après les menaces habituelles « la prochaine fois, on utilisera la force ».

Le tribunal administratif de Rennes a confirmé le 24 juillet le placement en rétention de la famille Mejidov. Selon la circulaire du 6 juillet 2012, le juge a estimé que l’enfermement de ces 2 jeunes enfants était légal, puisque leurs parents n’avaient pas respecté l’assignation à résidence et avaient fait 2 refus d’embarquement.

Rien ne peut justifier l’enfermement des enfants. Après avoir subi 2 intrusions policières traumatisantes, les 2 jeunes garçons souffrent de cette privation de liberté et présentent des troubles du sommeil et de l’appétit.

RESF 35 demande la libération immédiate de cette famille et que leur demande d’asile soit examinée en France, où plusieurs membres de leur famille vivent depuis plusieurs années après avoir obtenu le statut de réfugié (la sœur de Madame Mejidov a la nationalité française).

Après un bref et approximatif décompte, Riyad et Ramyi ont le triste privilège d’être les 10ème  et 11ème enfants enfermés en rétention depuis la circulaire du 6 juillet 2012. Notre décompte est sans doute très sous-estimé. Mais le cabinet du ministre, lui, tient des comptes rigoureux : qu’il publie le nombre, le nom et l’âge des enfants qu’il a emprisonnés depuis qu’il s’est engagé à ne plus enfermer d’enfants.

Pour mémoire : communiqué du Parti socialiste du 23 septembre 2009

Le Parti socialiste, lors de la réunion de son Secrétariat national du 23 septembre, a décidé de signer l’appel lancé par le Réseau Education Sans Frontières « Pour le respect par l’Etat des droits de l’enfant et de sa famille. » Qu’il s’agisse de démembrement des familles lorsqu’un des deux parents est expulsé, ou de la mise en rétention des enfants avec leurs parents menacés d’expulsion en centre de rétention administrative, les droits des enfants sont mis à mal par la politique actuelle du gouvernement. Pour le Parti socialiste, l’intérêt supérieur de l’enfant doit rester au premier plan. Le maintien de l’unité familiale doit devenir la règle, mais ne doit plus servir de prétexte à l’enfermement d’enfants.

Communiqué qu’on peut retrouver sur le site du parti socialiste à cette adresse :

http://www.parti-socialiste.fr/communiques/le-parti-socialiste-signe-lappel-resf-pour-le-respect-par-letat-des-droits-de-lenfant-et

A noter que la situation est tout aussi grave à Saint-Brieuc, dans les Côtes d’Armor…

Gens du voyage : les lignes vont-elles enfin bouger ?

Hubert Derache, préfet, a présenté son rapport sur les gens du voyage.

Les lignes seraient-elles en train de bouger concernant les « gens du voyage » ?

Quelques indices très positifs peuvent le laisser espérer.

Il y a eu tout d’abord la publication du projet de loi de Dominique Raimbourg, député de Loire-Atlantique, qui, parmi d’autres mesures, aggrave les sanctions financières contre les communes qui ne respectent pas l’obligation d’avoir une aire d’accueil lorsqu’elles ont plus de 5000 habitants, et contre les départements qui ne prévoient pas d’aires de « grands passages », qui ont généralement lieu l’été.

Il y a eu ensuite le rapport de l’ancien préfet de Mayotte, Hubert Derache, intitulé « Appui à la définition d’une stratégie interministérielle renouvelée concernant la situation des gens du voyage », et téléchargeable ici. Dans son introduction, il regrette que les gens du voyage « ont longtemps été considérés comme des Français entièrement à part, et non comme des Français à part entière, en raison de leur style de vie fondée sur la tradition culturelle du voyage ». Ce rapport étudie précisément la situation de cette population, les difficultés qu’elle rencontre, et les discriminations dont elle est victime. Et il fait des propositions précises.

Il y a eu enfin, mercredi 17 juillet, le colloque des députés socialistes sur le thèmes des gens du voyage, au cours duquel Dominique Raimbourg a présenté son travail, et, surtout, au cours duquel le ministre de l’intérieur a déclaré être favorable à l’aggravation des sanctions financières évoquée plus haut. Ça ne semblait pas aussi évident que cela dans les récentes déclarations du ministre.

Enfin, bonne nouvelle : le maire de Nice, Estrosi, qui s’est fait remarquer par ses déclarations aussi stupides que nauséabondes et mensongères, et Le Pen, qui apporte un démenti violent à la prétende évolution positive de son parti en qualifiant la présence de Roms à Marseille d’  « urticante » et « odorante », sont poursuivis par le Forum européen des Roms et des gens du voyage, une ONG soutenue par le Conseil de l’Europe, qui a porté plainte contre ces deux personnages. « De tels propos xénophobes et discriminatoires vont clairement à l’encontre des valeurs républicaines de la France ainsi que des principes directeurs de l’action contre le racisme engagée par la garde des Sceaux », affirme son président, Rudko Kawczynski,

Une pétition de la Ligue des droits de l’Homme pour que la France accueille Edward Snowden

Edward Snowden

Inna Shevchenko, jeune krainienne, chef de file des Femen, a obtenu le statut de réfugiée auprès de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA). Tous les démocrates et les humanistes s’en réjouissent.

Au même moment, Edward Snowden, jeune Américain qui a dévoilé les pratiques douteuses des services de renseignements américaines (NSA et FBI) qui vont puiser leurs informations dans les sereurs de sociétés informatiques travaillant notamment dans le domaine des communications (Internet). Les amoureux de la démocratie lui doivent beaucoup. Et ce jeune homme est aujourd’hui bloqué en Russie. Il en est réduit à sans doute devoir demander l’asile à Poutine qui a déjà prévenu qu’il privéligierait les reltions avec les USA.

Le ministre de l’Intérieur n’a pas tardé, une fois cette affaire connue, à déclarer, sur France Inter, qu’il n’était pas favorable à ce que la France accueille Edward Snowden.  Il a ensuite publié ce court communiqué :

« La France a reçu, comme beaucoup d’autres pays, par l’intermédiaire de son ambassade à Moscou, une demande d’asile de M. Edward Snowden. Compte tenu des éléments d’analyse juridique et de la situation de l’intéressé, il n’y sera pas donné suite. »

Comme le fait remarquer l’avocat Maître Eolas, sur son blog, la demande d’asile de Snowden n’a pas été refusée : ce n’est d’ailleurs pas le rôle du ministre, c’est le travail de l’OFPRA. La France s’est contentée de ne pas « donner suite » à la demande…  L’article de Maître Eolas éclaire parfaitement la situation.

Résultat : la situation s’enkyste, et les perspectives ne sont pas roses pour Edward Snowden.

Le président de la Ligue des droits de l’Homme avait déjà adressé une lettre ouverte au président de la République pour lui demander que la France accuille Edward Snowden. C’était la veille de la parution du communiqué du ministre de l’intérieur. Et la LDH a déposé une plainte contre X, conjointement avec la Fédération internationale ds Ligues des droits de l’Homme, pour « atteinte aux données personnelles ».  Aujourd’hui, constatant le blocage complet de la situation, la Ligue engage une nouvelle action : elle met en ligne une pétition, dont le texte est reproduit ci-dessous, et dont elle souhaite qu’elle soit signée par le plus grand nombre possible de personnes. On peut la signer à cette adresse : http://www.ldh-france.org/Une-petition-pour-que-la-France.html

Grâce au courage d’Edward Snowden, le monde a appris que la NSA et le FBI disposent d’un accès direct aux serveurs de neuf sociétés américaines exerçant dans le domaine de l’Internet, soit Microsoft (depuis 2007), Yahoo (depuis 2008), Google, Paltalk et Facebook (depuis 2009), Youtube et Skype (depuis 2010), AOL (depuis 2011) et, enfin, Apple (depuis 2012).

« C’est grâce à sa détermination que nous avons pris connaissance de l’espionnage systématique dont faisaient les frais les citoyens et les institutions de l’Union européenne, via le programme Prism. Le président de la République a lui-même dénoncé ces pratiques et exigé qu’elles cessent immédiatement. En revanche, de leur côté, les autorités américaines, ainsi d’ailleurs que les grands acteurs privés directement impliqués, ont multiplié des déclarations qui vont du déni à la banalisation pure et simple d’un système d’écoute généralisé initialement présenté comme exclusivement destiné à lutter contre le terrorisme.

Mais corrélativement à ces déclarations, les lanceurs d’alerte tels que M. Snowden sont arrêtés, poursuivis et susceptibles d’être enfermés dans des conditions dégradantes. Juan Ernesto Mendez, rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, a déclaré, concernant le soldat Bradley Manning, soupçonné d’avoir été l’informateur de Wikileaks, qu’il avait subi « un traitement cruel » en étant tenu à l’isolement pendant des mois au cours de sa détention préventive aux Etats-Unis.

Dans ce contexte, M. Snowden est légitime à penser qu’il ne bénéficierait pas d’une justice sereine et équitable sur le territoire des Etats-Unis qu’il a préféré quitter. Il est aujourd’hui demandeur d’asile, comme défenseur des droits et lanceur d’alerte. La France s’honorerait en lui offrant l’accueil qu’il mérite à ce double titre. »

La LDH propose une pétition adressée au président de la République.

Cliquez ici pour signer cette pétition directement en ligne : http://www.ldh-france.org/Une-petition-pour-que-la-France.html

Monsieur le président de la République, je demande qu’Edward Snowden bénéficie du droit d’asile en France

 

 

Un député veut sanctionner le refus des villes d’accueillir les gens du voyage

Dominique Raimbourg

Le député socialiste de Loire-Atlantique, Dominique Raimbourg (qui est par ailleurs le fils de Bourvil), rapporteur d’un projet de loi sur les gens du voyage, souhaite traiter avec davantage de sévérité les communes qui refusent d’appliquer les obligations légales sur l’implantation d’aires d’accueil.

La loi actuelle fait obligation aux communes de plus de 5000 habitants d’aménager des aires d’accueil.  Dominique Raimbourg propose tout simplement de mettre en place un dispositif équivalent à celui qui existe pour le logement social (amendes si le quota n’est pas respecté) : « Ce que je propose, c’est qu’il y ait un mécanisme coercitif, un peu sur le modèle de la loi sur la construction des HLM, qui vise à ce qu’on puisse prendre  l’argent à la commune qui refuse absolument », a-t-il déclaré sur Europe 1. Même proposition concernant les aires de grands passages (généralement des regroupements religieux), en visant cette fois les départements : elles « doivent être prévues dans le schéma départemental », rappelle le député.

L’application stricte de la loi entraînera évidemment une « réciprocité » : dans tous les cas où une aire existe, les campements sauvages ne seront pas tolérés : en cas d’occupation illicite d’un terrain, dès lors que la commune a rempli ses obligations et qu’il existe une aire de stationnement régulier dans un périmètre de 20 km à la ronde, M. Raimbourg propose « qu’on étende cette procédure d’évacuation plus rapide pour des gens qui n’ont pas respecté la loi ». « En cas d’occupation illicite d’un terrain, dès lors que la commune a rempli ses obligations et qu’il existe une aire de stationnement régulier dans un périmètre de 20 km à la ronde, M. Raimbourg propose « qu’on étende cette procédure d’évacuation plus rapide pour des gens qui n’ont pas respecté la loi » », rapporte le journal Le Monde.

Reste à savoir comment cette proposition sera accueillie. Par le ministre de l’intérieur d’abord, qui ne semble pas porter aux gens du voyage une affection excessive, lui qui a récemment soutenu ce maire de Loire-Atlantique qui avait menacé de démissionner après l’occupation dans sa commune d’un terrain de sports. Par les parlementaires ensuite : on imagine mal des gens comme Estrosi changer d’attitude sur ce sujet. La gauche étant majoritaire au parlement, on peut quand-même espérer qu’une majorité pourra se dégager facilement…

Prism : plainte contre X de la Ligue des droits de l’Homme et de la FIDH

Communiqué

Paris, le 11 juillet 2013

La FIDH et la LDH déposent plainte pour atteinte aux données personnelles

La FIDH et la LDH ont saisi ce jour Monsieur le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Paris d’une plainte contre X en raison des faits révélés par Monsieur Edward Snowden.

Agissant tant en raison de leur objet social, qui les conduit à faire sanctionner les atteintes aux libertés individuelles en matière de traitement informatisé, qu’à titre personnel, la FIDH et la LDH ont déposé plainte sur le fondement des articles 323-1, 226-18, 226-1 et 226-2 du Code Pénal.

Ces dispositions concernent l’accès frauduleux à un système informatisé, la collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, l’atteinte volontaire à la vie privée et l’utilisation et la conservation d’enregistrements et de documents obtenus par l’atteinte à la vie privée.

Les révélations faites dans la presse par Monsieur Edward Snowden ont permis de dévoiler l’existence d’un programme américain dénommé PRISM (Planning Tool  for Ressource Intégration Synchronization, and Management) collectant des renseignements sur les serveurs de différentes sociétés exerçant dans le domaine de l’Internet (Microsoft, Yahoo, Google, Paltalk, Facebook, Youtube, Skype, AOL et Apple).

Sous couvert de la lutte contre le terrorisme et de la criminalité organisée, ce système d’interception des données privées, qui concerne tout autant les citoyens américains que les associations et individus étrangers, a permis à la NSA et au FBI de collecter des données matérielles hébergées par les serveurs de ces sociétés incluant notamment les historiques de recherches et de connexions effectuées sur le net, le contenu d’emails, de communications audio et vidéo, des fichiers photos, des transferts de documents ainsi que le contenu de conversations en ligne.

L’essence même de ce système – donnant lieu à la surveillance d’un demi-milliard de communications par mois – est, notamment au travers de mots clés, d’appréhender non seulement l’origine d’un message privé mais aussi son destinataire ainsi que son contenu, quel que soit le moyen technique utilisé pour la transmission de ce message.

Cette intrusion sans contrôle dans la vie de chacun constitue un danger considérable pour les libertés individuelles qui doit être enrayé sous peine de voir disparaître l’Etat de droit.

La FIDH et la LDH saisissent donc aujourd’hui la justice française afin qu’une information judiciaire portant sur ces faits soit ouverte.

Lire également ici :  http://www.ldh-france.org/La-FIDH-et-la-LDH-deposent-plainte.html

Gens du voyage : les maires ont vocation à respecter la loi !

Après les insanités d’Estrosi sur les gens du voyage le maire de Guérande démissionne à cause de l’installation de nombreuses caravanes dans sa commune. Ne voulant sans doute pas être en reste, le maire socialiste de Quimper, Bernard Poignant, s’y met aussi (il s’était déjà fait remarquer par son opposition au mariage ouvert aux personnes de même sexe).

Y aurait-il un problème avec ceux qu’on appelle « les gens du voyage » ?

Il y a un problème. Mais ce n’est pas avec eux qu’il y a problème. Eux, ils demandent l’application de la loi. Et la loi prévoit des aires d’accueil adaptées et équipées. Elle prévoit également des aires destinées aux « grands passages » (regroupements importants généralement liés à des événements religieux).

Dans une interview qu’il a accordée au Nouvel Observateur, Laurent El Ghozi, président de la Fédération nationale des associations d’actions solidaires avec les Tziganes et les gens du voyage (FNASAT) rappelle de façon claire et précise quelles sont les obligations des maires en la matière. Et, prenant l’exemple d’Estrosi, montre que ce donneur de leçons ( !) est hors la loi. Rappelant ce que préconise ce qu’Estrosi appelle la « circulaire Valls », parue l’été 2012, et qui est en fait (et ce détail a une grande importance) une circulaire interministérielle, Laurent El Ghozi indique : « Ceux contre lesquels Christian Estrosi part en guerre sont des citoyens français vivant en caravane et voyageant, comme la Constitution et la loi leur donne parfaitement le droit. Ils ont la liberté d’aller et venir, de circuler, de s’arrêter, et les collectivités et les pouvoirs publics (préfet, conseil général, conseil régional et commune) ont l’obligation de leur assurer des conditions de stationnement. »  Et si ces conditions ne sont pas remplies, dans une commune ou un département, la faute en incombe à la collectivité locale et aux services de l’Etat. »

Rappelant que le MRAP a porté plainte contre Estrosi pour  ses propos, et que la Fnasat envisage de saisir le défenseur des droits, Laurent El Ghozi estime qu’on peut lui reprocher de ne pas avoir aménagé une aire de grand passage : « On peut lui reprocher collectivement, en tant que maire de la plus grande ville du département, parlementaire de surcroît, qui ne peut ignorer la loi. S’il n’est pas seul responsable de l’absence d’aire de « grand passage », il est seul responsable, en revanche, de ses propos. En l’occurrence, la situation à Nice a finalement été réglée en 24 heures. C’est bien la preuve que c’est possible. Il faut simplement de la bonne volonté de la part des collectivités territoriales et des services de l’Etat. Mais s’il n’est pas seul responsable de l’absence d’aire de « grand passage », il est seul responsable, en revanche, de ses propos. »

 

 

Rroms : de plus en plus d’évacuations forcées

Trois ans après le triste « discours de Grenoble » qui marquait une déclaration de guerre du président de la République de l’époque à toute une partie de la population, les Rroms et les gens du voyage, il y a eu changement de majorité. Mais pas de changement politique sur ce sujet. Pour preuve, les statistiques d’évacuations forcées des Rroms au cours du 2ème trimestre 2013 : 5482 personnes évacuées, deux fois plus qu’au premier trimestre. Des résultats à faire pâlir de jalousie les Hortefeux, Besson et Guéant. Et à faire rugir de plaisir M. Estrosi, qui s’est fait remarquer ce week-end par des déclarations qui donnent la nausée

La parution de ces statistiques a été l’occasion pour l’ERRC (European Roma Rights center) et la Ligue des droits de l’Homme de publier un communiqué commun dans lequel les deux associations les commentent. On peut télécharger le dossier statistique complet ici. Lire également l’article paru dans le journal l’Humanité.

Les Roms étrangers évacués de force durant le deuxième trimestre de l’année 2013 ont été plus nombreux que durant le premier trimestre. Ces nouvelles données délivrées par la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et le European Roma Rights Centre (ERRC) viennent d’être publiées dans le recensement des évacuations forcées du deuxième trimestre 2013.

Un total de 5 482 personnes ont été évacuées de force par les autorités durant le deuxième trimestre, comparé à 2 883 durant le premier trimestre de 2013.

La plus forte augmentation du nombre d’évacuations forcées a été observée en Ile-de-France. Dans les autres régions (incluant Paca, Rhône-Alpes et le Nord), les évacuations forcées ont perduré à un rythme stable.

Trois personnes, dont un enfant, sont décédées dans un incendie d’un squat à Lyon, le 13 mai. Ce serait une bougie d’éclairage qui aurait causé l’incendie après que l’électricité a été coupée quelques jours auparavant. En tout, le nombre de personnes forcées d’évacuer leurs lieux de vie à cause d’un incendie, d’une inondation ou d’une agression, a diminué (530 contre 1 007).

Durant le deuxième trimestre 2013, les évacuations forcées ont continué à un rythme élevé et, dans la plupart des cas, sans solution alternative crédible de relogement ni d’accompagnement social. Dans la pratique, la mise en application de la circulaire interministérielle du 26 août 20121 « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites » reste rare, hétérogène ou est généralement très rapide et superficielle. Elle s’apparente souvent plutôt à un recensement des populations qu’à un réel et durable travail social d’insertion. Malgré le fait qu’aucune expulsion du territoire ne soit rapportée durant le deuxième trimestre, le recensement montre qu’il y a eu 8 distributions massives d’obligations de quitter le territoire français (OQTF), attribuées à 424 personnes.

Les autorités françaises continuent dans la réalité à violer impunément les lois européennes et plusieurs traités internationaux, notamment la Charte sociale européenne révisée. Ceci se perpétue tout en développant un discours gouvernemental ambigu, se traduisant dans les faits par la même violence qu’antérieurement. Les traumatismes faisant suite aux évacuations forcées continuent de provoquer une précarité de plus en plus grande : rupture d’accompagnement social, déscolarisation des enfants, rupture de soins, instabilité, pertes de biens personnels… sans évoquer les traumatismes psychologiques.

Ce n’est pas en souhaitant leur retour dans leur pays d’origine que l’on va réussir à insérer, en France, ces populations vivant dans les bidonvilles. Ce n’est pas une solution à long terme durable pour la France.

Nous demandons l’arrêt immédiat de cette politique de rejet : les évacuations forcées ne peuvent se perpétuer au mépris des traités internationaux et européens. Au-delà de l’application concrète de la circulaire du 26 août, nous demandons par ailleurs qu’une véritable politique d’insertion pour ces personnes en grande précarité soit mise en place. Cette politique devra dépasser celle qui « anticipe et accompagne » leurs expulsions ou leurs évacuations forcées.

 

Sale temps pour les droits de l’Homme en France, ces temps-ci

Edward Snowden

Les droits de l’Homme sont malmenés en France, ces temps-ci. Après le pitoyable incident de l’avion du président bolivien interdit de survol de la France parce qu’on soupçonnait la présence d’Edward Snowden à bord, puis le refus par la France de donner suite à sa demande d’asile (lire ici le passionnant article de Maître Eolas à ce sujet), on a appris que la France elle aussi aime bien intercepter et stocker des communications : voici le communiqué publié par la Ligue des droits de l’Homme à ce sujet :

Dans son édition en date du 5 juillet, le quotidien Le Monde affirme que la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) intercepterait et stockerait la totalité des communications en France et procéderait à un stockage de données sans limite de temps. Si ces informations sont exactes, cette collecte systématique couvrirait les signaux électromagnétiques émis par les ordinateurs en France ainsi que les flux entre les Français et l’étranger. Les courriels, SMS, relevés d’appels téléphoniques, Facebook, Twitter seraient concernés.

Cette base de données serait utilisée par d’autres services, tels la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) ou les douanes. Si ces informations devaient s’avérer exactes, nous serions dans une situation de violation flagrante des lois en vigueur.

Dans un contexte marqué par les révélations d’Edward Snowden concernant un système d’écoute global pratiqué par le gouvernement des Etats-Unis, la Ligue des droits de l’Homme estime que les informations du Monde appellent une mise au point convaincante, seule capable de dissiper les inquiétudes et indignations légitimes sur un mésusage d’écoutes systématique violant les libertés et garanties constitutionnelles des citoyens français.

Ensuite, il y a eu le jugement de la cour d’appel de Versailles, le 4 juillet, ordonnant à Mediapart et Le Point de supprimer de leurs sites toute citation des enregistrements effectués par la majordome de Mme Bettencourt. Une décision qui va être totalement inefficace : la mémoire cache de Google permet de retrouver ces enregistrements qui ont par ailleurs été publiés par une multitude de sites et de blogs. Et surtout une décision qui ressemble à s’y méprendre à une censure, au moment où la ministre de la justice dépose un projet de loi qui affirme que « les journalistes doivent pouvoir exercer leur mission sans entraves »…

Sur ce sujet aussi, la Ligue des droits de l’Homme s’est rapidement exprimée, par ce communiqué :

Veut-on revenir aux temps obscurs de la censure ? D’allure baroque, la question doit pourtant être posée après l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, rendu le 4 juillet, qui ordonne à Mediapart et Le Point de supprimer de leurs sites, dans les huit jours, toute citation des enregistrements effectués par le majordome de madame Bettencourt. L’arrêt va jusqu’à interdire qu’ils soient mentionnés.

On se souvient que ce sont ces révélations qui ont été à la source d’une enquête journalistique éclairante sur les rapports entre le monde de l’argent et de la politique. L’arrêt de la cour d’appel, censurant de fait l’information, est un coup porté aux titres de presse Mediapart et Le Point, et à la liberté de la presse d’une façon générale.

Au moment où la ministre de la Justice dépose un projet de loi qui affirme que « les journalistes doivent pouvoir exercer leur mission sans entraves », cette décision est rien moins qu’inquiétante ; au lendemain du refus de la France d’accorder l’asile à Edward Snowden, elle rappelle à quel point la liberté d’informer et d’être informé, en toute liberté, reste fragile.

La Ligue des droits de l’Homme exprime sa solidarité avec Mediapart et Le Point ; elle appelle à une grande vigilance pour défendre la liberté de la presse, facteur incontournable de la démocratie.

Enfin, dans un tout autre domaine, le vieux président « d’honneur » (sic) du front national s’est une nouvelle fois fait remarquer par des propos scandaleux, au sujet des Rroms cette fois-ci. Le MRAP a décidé de le poursuivre en justice ; la Ligue des droits de l’Homme pour sa part « examine le procédure judiciaire la plus appropriée pour faire sanctionner à nouveau Jean-Marie Le Pen. Pendant que le père répand ses idées d’un autre âge, une bonne nouvelle est tombée :  la fille est privée de son immunité parlementaire par le parlement européen, pour, elle aussi, « incitation à la haine raciale » (Article du Monde ici). Voici le communiqué de la LDH concernant le vieux Le Pen :

La Ligue des droits de l’Homme condamne vigoureusement les scandaleux propos tenus à l’encontre des Roms, à Nice, par le président d’honneur du Front national, ayant qualifié leur présence « d’urticante et d’odorante ».

Cette déclaration indigne confirme la réalité de la pensée de ce parti d’extrême droite, qui demeure fondée sur le racisme, la xénophobie et la haine des étrangers.

Un parti qui porte de tels discours doit être combattu avec la plus grande fermeté, sans être dupe des opérations de séduction fallacieuses engagées par ses autres dirigeants.

La Ligue des droits de l’Homme appelle à la plus grande vigilance et à dénoncer les alliances ou convergences envisagées avec ce mouvement anti-républicain, notamment en vue des prochaines élections municipales.

La Ligue des droits de l’Homme examine par ailleurs la procédure judiciaire la plus appropriée pour faire sanctionner à nouveau Jean-Marie Le Pen.

 

La Ligue des droits de l’Homme demande que la France accueille Edward Snowden

Edward Snowden

Edward Snowden, qui a révélé l’immense scandale de l’espionnage exercé par la NSA et le FBI aux dépends des citoyens et des institutions européennes, erre depuis plusieurs jours à la recherche d’un asile le mettant à l’abri de la justice américaine dont il sait qu’elle ne lui assurera pas toutes les garanties d’un procès équitable.

Le président de la République a eu des mots très durs à l’égard des Etats-Unis, lorsque cette information est tombée. Et quelques jours plus tard, on a assisté à ce ridicule épisode de l’avion du président bolivien bloqué parce qu’on supposait qu’E. Snowden était à bord… Et ce matin, jeudi 4 juillet, le ministre de l’intérieur, qui assurément semble se prendre pour le vice-président de la République, indique qu’il n’est pas favorable à ce que la France lui accorde l’asile politique (lire ici l’article du journal Le Monde) !

La Ligue des droits de l’Homme milite depuis longtemps pour que les « lanceurs d’alerte » bénéficient d’une protection juridique. C’est le sens de la lettre ouverte que Pierre Tartakowsky, président de la LDH, vient d’adresser au président de la République. Elle est reproduite ci-dessous.

Paris, le 3 juillet 2013

Monsieur le Président,

La Ligue des droits de l’Homme souhaite attirer votre attention sur la situation de M. Edward Snowden, à qui nous devons les révélations concernant l’existence d’un programme américain collectant des renseignements sur les serveurs de différentes sociétés exerçant dans le domaine de l’Internet.

Grâce au courage de M. Snowden, le monde a appris que la National Security Agency (ci-après « NSA ») et le Federal Bureau of Investigation (ci-après « FBI ») disposent d’un accès direct aux serveurs de neuf sociétés américaines exerçant dans le domaine de l’Internet, soit Microsoft (depuis 2007), Yahoo (depuis 2008), Google, Paltalk et Facebook (depuis 2009), Youtube et Skype (depuis 2010), AOL (depuis 2011) et, enfin, Apple (depuis 2012).

C’est grâce à sa détermination que nous avons appris l’espionnage systématique dont faisaient les frais les citoyens et les institutions de l’Union européenne via le programme Prism.

Vous avez eu à cette occasion des mots forts pour dénoncer ces pratiques et exiger qu’elles cessent immédiatement. De leur côté, les autorités américaines, ainsi d’ailleurs que les grands acteurs privés directement impliqués, ont multiplié des déclarations qui vont du déni à la banalisation pure et simple d’un système d’écoute généralisé initialement présenté comme exclusivement destiné à lutter contre le  terrorisme.

Mais corrélativement à ces déclarations, les lanceurs d’alerte tels que M. Snowden sont incriminés, poursuivis et traités de façon infamante. Juan Ernesto Mendez, rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, a déclaré, concernant le soldat Bradley Manning, soupçonné d’avoir été l’informateur de Wikileaks, qu’il avait subi « un traitement cruel » en étant tenu à l’isolement pendant des mois au cours de sa détention préventive aux Etats-Unis.

Dans ce contexte, M. Snowden est légitime à penser qu’il ne bénéficierait pas d’une justice sereine et équitable sur le territoire des Etats-Unis qu’il a préféré quitter. Il est aujourd’hui demandeur d’asile, comme défenseur des droits et lanceur d’alerte. La France s’honorerait en lui offrant l’accueil qu’il mérite à ce double titre.

C’est pourquoi nous vous demandons, Monsieur le Président, d’agir en ce sens en vous remerciant d’avance de l’attention portée à notre démarche et en vous assurant de l’expression de notre haute considération.

Pierre Tartakowsky

Président de la Ligue des droits de l’Homme