Pierre Tartakowsky : « la démocratie et le pied du mur, selon Marine Le Pen »

Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l'Homme

Tribune de Pierre Tartakowsky, Président de la Ligue des droits de l’Homme

La démocratie et le pied du mur selon Marine Le Pen

Toute à la joie de ses résultats électoraux, Marine le Pen tombe le masque. Un peu… Elle rêve de conquête, d’hégémonie, de pouvoir. Ce vendredi, dans les pages du Monde – miroir, mon beau miroir-, elle s’attarde sur sa stratégie, entre dans les détails, développe sa visions du monde, de la politique et du pouvoir. Ah, le pouvoir ! Elle à ses idées là-dessus, comment elle entend l’exercer, et surtout, contre qui. Les associations, par exemple. Ça la travaille, Marine Le Pen, les associations. Elle en parle. Longuement. Pour reconnaître leur apport, se féliciter de leur rôle, les inscrire dans une perspective de démocratie participative ? Pas du tout ; elle fronce le nez devant les « politisées » ; celles qui se mêlent de ce qui les regarde, en quelque sorte. Et pour les remettre a leur place, la présidente du Front national à un programme : leur refuser toute subvention. Histoire, précise-t-elle de leur apprendre une certaine réserve. Et pour ceux qui auraient du mal à suivre, elle mets les points sur les i: « Quand la Ligue des droits de l’Homme fait un tract pour appeler à voter pour ou contre quelqu’un, c’est une action politisée ». Forte de cette visions large et inclusive du débat démocratique elle en tire une règle que seuls les politisés les plus malintentionnés qualifieront d’autoritaire : « les associations doivent être mises au pied du mur, en leur disant qu’elles ne doivent pas intervenir dans le débat politique » Et, au cas ou le pied du mur ne suffirait pas, elle laisse entendre qu’on pourrait bien les y coller, au mur, par un sobre et viril : « il va falloir rappeler les règles du jeu ». On ne savait pas que c’était un jeu ; mais si c’est le cas, ses propos confirment que nous avions raison de refuser que les règles puissent en être un jour fixées par le Front national.
En tout état de cause, la Ligue continuera évidemment d’appeler citoyennes et citoyens à se mêler de leurs affaires et… à la rejoindre.
Les citations de Marine Le Pen sont du vendredi 28 mars, soit entre les deux tours.
On ne pourra pas dire qu’on n’était pas prévenus…

Réécouter Franck Lepage à Là-bas si j’y suis puis à Plémet !

Photo Daniel Jourdanet

Franck Lepage était, jeudi 27 mars, l’invité de Daniel Mermet dans l’émission « Là-bas si j’y suis », intitulée « Pour une éducation populaire ». Le « conférencier gesticulant », comme il se nomme lui-même, a rappelé l’historique de l’éducation populaire en France, et surtout de son sabordage, qui a fait que, dit-il, « j’ai arrêté de croire ». De croire à la culture, bien entendu ! et plus précisément à la « démocratisation culturelle ».

Vous pouvez retrouver l’émission de D. Mermet ici, et aussitôt après, réserver vos places pour les Droits en fête, à Plémet, le samedi 26 avril à partir de 18h (10/5€) au 02-96-25-62-91, au 06-73-10-27-42, ou par mail, ldhloudeac@orange.fr. Frank Lepage y jouera « Incultures I ».

http://www.franceinter.fr/emission-la-bas-si-jy-suis-pour-une-education-populaire

Droits en fête 2014 avec Franck Lepage : les billets sont en vente

Crédit photo Daniel Jourdanet

Les billets des Droits en fête 2014 sont désormais en vente, 10€ le billet adulte (apéritif compris) et 5€ le billet enfant de moins de 12 ans (jus de fruit inclus), pour la conférence gesticulée de Franck Lepage, « l’éducation populaire, Monsieur, ils n’en ont pas voulu ».

La salle des fêtes de Plémet (22) sera ouverte au public dès 13h30 samedi 26 avril, avec des expositions : des posters de Poster4tomorrow, sur le droit à l’éducation et la démocratie, des travaux d’élèves. Avec aussi des animations, des jeux autour des droits de l’Homme, des vidéos… Tout est gratuit jusque 18h30.

A 18h30, ce sera l’apéritif, en attendant la conférence gesticulée de Franck Lepage, qui commencera à 19h30. Ce sera le moment de se restaurer (galettes, saucisse, frites, gâteaux, boissons) ; une autre pause restaurations est prévue vers 21h.

Il est prudent d’acheter dès maintenant son billet, ou de le réserver (ldhloudeac @orange.fr , ou par téléphone, au 02-96-25-62-91 ou 06-73-10-27-42) : les conférences gesticulées de Franck Lepage sont généralement très courues. On peut également acheter les billets auprès des militants de la section Loudéac centre Bretagne, ou à l’espace culturel du centre Leclerc de Loudéac. Par ailleurs, quatre billets sont à gagner dans le prochain numéro (qui paraît mercredi 26 mars) du Cri de l’Ormeau.

Une conférence gesticulée, c’est quoi ?

Un conférence gesticulée, c’est en quelque sorte une conférence, sur un sujet très sérieux, grave, mais « théâtralisé », mis en scène, avec une bonne dose d’humour.

Voici la présentation que fait Franck Lepage de la conférence qu’il jouera à Plémet le 26 avril.

C’est ce qui m’est arrivé. Et c’est l’histoire que je vais vous raconter. Quand je dis : «  J’ai arrêté de croire à la culture », entendons-nous bien, c’est idiot comme phrase   ! Non, j’ai arrêté de croire, pour être très précis, en cette chose qu’on appelle chez nous « la démocratisation culturelle »… C’est l’idée qu’en balançant du fumier culturel sur la tête des pauvres, ça va les faire pousser et qu’ils vont rattraper les riches   ! Qu’on va les « cultiver » en somme. Voilà, c’est à ça que j’ai arrêté de croire. Je faisais ça dans les banlieues, c’est là qu’ils sont souvent, les pauvres… Et donc, je leur balançais des charrettes d’engrais culturel, essentiellement sous forme d’art contemporain et de «  création ». Il y a beaucoup de fumier dans l’art contemporain. De la danse contemporaine, du théâtre contemporain, de la musique contemporaine… pour les faire pousser. On parle aussi de réduction des inégalités culturelles ou «   d’ascension sociale   » par la culture. Mais j’ai compris bêtement un jour que les riches avaient les moyens de se cultiver toujours plus vite… C’est là que j’ai arrêté de croire. Un philosophe aujourd’hui oublié, Herbert Marcuse, nous mettait en garde : nous ne pourrions bientôt plus critiquer efficacement le capitalisme, parce que nous n’aurions bientôt plus de mots pour le désigner négativement. 30 ans plus tard, le capitalisme s’appelle développement, la domination s’appelle partenariat, l’exploitation s’appelle gestion des ressources humaines et l’aliénation s’appelle projet. Des mots qui ne permettent plus de penser la réalité mais simplement de nous y adapter en l’approuvant à l’infini. Des «   concepts opérationnels   » qui nous font désirer le nouvel esprit du capitalisme même quand nous pensons naïvement le combattre… Georges Orwell ne s’était pas trompé de date   ; nous avons failli avoir en 1984 un « ministère de l’intelligence ». Assignés à la positivité, désormais, comme le prévoyait Guy Debord : « Tout ce qui est bon apparaît, tout ce qui apparaît est bon. »

Vous l’avez compris : un sujet sérieux, grave, traité avec un humour dévastateur.

Les conférences gesticulées de Franck Lepage ? généralement, on en sort plus intelligent qu’en y entrant !

Ligue des droits de l’Homme : Hénin-Beaumont,dix bonnes d’aller voter dès le 1er tour !

La section de la Ligue des droits de l’Homme vient de publier un argumentaire qui démonte en dix points les positions inacceptables du front national.

La question du front national revient à l’ordre du jour à chaque élection, et on peut finir par être excédés devant les appels au vote anti fn, qui aboutissent in fine a nous demander de faire un choix qui ne nous convient pas. Car enfin, voter Bourdouleix ou voter Le Pen, quelle différence ? voter Vanneste ou voter FN ? On pourrait multiplier les exemples.

Mais il arrive que les situations soient particulières. C’est sans doute le cas à Hénin-Beaumont, que le front national a transformé en symbole. Et il ne faut pas oublier que le scrutin de dimanche est un scrutin local : gagner les élections municipales pour un parti tel que le FN, c’est se donner une chance de s’implanter durablement sur un territoire, et d’y progresser. Les municipales ont servi de tremplin à de nombreux membres de ce parti. Bompart, par exemple, qui a il est vrai changé de casaque, mais qui est bien resté le même, et qui s’est fait un nom grâce à ce scrutin.

L’analyse de la section d’Hénin-Carvin est donc particulièrement intéressante, et même s’il s’agit d’un problème local, son exemple peut être utile dans toutes les communes confrontées au même problème. Et aux autres aussi : ce mal est contagieux !

Appel de la section LDH d’Hénin-Carvin

Élections municipales 2014 à Hénin-Beaumont

La LDH s’invite dans la campagne

 Rien n’est joué. Tout reste possible. Cela dépend de vous !

Oui, les vrais démocrates peuvent encore gagner ! 

La Ligue des droits de l’Homme vous donne

10 bonnes raisons d’aller voter dès le premier tour.

  1. C’est un droit : ne pas l’exercer, c’est laisser les autres décider à votre place. Que pourrez-vous dire demain si vous n’êtes pas d’accord ? Vous aurez laissé faire.
  2. Et s’il n’y avait qu’un seul tour ? Le risque est réel au vu des précédents scores du FN : peut-on prendre ce risque ? L’enjeu est trop grave pour rester sur la touche.
  3. Vous êtes déçus par la politique du Gouvernement. OK, la LDH aussi. On peut comprendre mais, ici, il s’agit d’élire une équipe municipale pour gérer la ville pendant 6 ans et pas de changer de gouvernement et de politique nationale.
  4. Vous ne croyez plus en la politique, « droite-gauche, c’est pareil » et « le FN, on ne l’a pas encore essayé, pourquoi ne pas lui donner sa chance ? », disent certains. Détrompez-vous ! D’autres villes, dans le sud de la France, ont été « à l’avant-garde » et elles ont été, un temps, gérées par le FN et l’extrême droite. Elles en ont fait l’amère expérience !  Même Marine Le Pen n’ose plus les citer en exemple : leur gestion s’est vite révélée catastrophique, sans parler de l’orientation donnée à la vie culturelle ou encore le sort réservé à plusieurs associations (il ne faut pas oublier non plus que le FN est toujours hostile à l’aide apportée à celles qui défendent les droits de l’Homme !).
  5. Croyez-vous vraiment qu’Hénin-Beaumont mérite d’être estampillée « FN » ? Hénin-Beaumont n’est pas une cité extrémiste comme le prouvent ses traditions ouvrières, syndicales et associatives. Jusqu’alors, même si le FN a progressé, il est resté minoritaire en nombre de voix, ramené au nombre d’électeurs inscrits. Mais, cette fois, l’abstention pourrait bien le faire gagner.
  6. Vous en avez assez de la division entre les partis démocratiques (et parfois même en interne) : vous pouvez l’exprimer, lors de ce premier tour, en allant voter, conscients de la nécessité de tout faire pour qu’au second tour les conditions permettant de battre le FN puissent être réunies. Tout se joue dès le premier tour !
  7. « Le FN n’est pas si dangereux, après tout », pensent certains. Quelle imprudence ! Attention, il a lissé son image mais c’est pour mieux séduire les hésitants et les déçus : il met en avant des personnes « simples » mais sa doctrine inégalitaire reste inchangée sur le fond : le FN ne se prononce jamais sur les inégalités qui frappent les femmes, il dénigre les associations comme le planning familial accusé d’inciter les femmes à avorter. Le FN s’est positionné contre le mouvement social pour la défense des retraites, il dénonce les organisations syndicales et remet en cause le droit de grève…
  8. Laïque, le FN ? Il conserve des liens très étroits avec les milieux catholiques les plus intégristes. Dresser les citoyens les uns contre les autres, en instaurant la préférence nationale, c’est tourner le dos à la vraie laïcité qui garantit le « vivre ensemble », c’est en opposition totale avec la devise républicaine « Liberté, Égalité, Fraternité ».
  9. Le FN aurait-il honte de l’origine du parti, de son histoire, des propos tenus par Jean-Marie Le Pen, par exemple à propos des camps d’extermination, de la collaboration de l’extrême droite avec l’occupant nazi ? Pour avancer, ce parti est contraint de ruser mais, derrière les sourires de façade, il conserve des liens avec certains groupes encore plus radicaux, voire néonazis. Un certain nombre de mesures qu’il préconise au niveau national ne sont d’ailleurs pas réalisables car contraires aux droits de l’Homme et aux conventions internationales.
  10. Ne vous laissez pas influencer par toutes les rumeurs infondées, les mensonges, les calomnies, les attaques personnelles et les ragots qui circulent, notamment sur le Net. Vous avez une boussole infaillible : les droits de l’Homme ! Ne perdons pas de vue que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen figure dans le Préambule de la Constitution de la République Française. Son respect est donc une obligation !

Les Héninois et les Beaumontois ont besoin pour les six années à venir qu’on puisse leur garantir le calme, la stabilité dans leur quotidien et, enfin, une bonne image à l’extérieur, une image qui ne peut que jouer favorablement pour la prospérité économique de la ville et donc pour garantir de meilleures conditions de vie.

La qualité d’une équipe municipale ne se mesure pas au nombre de sourires distribués tous azimuts, au nombre de pots partagés, aux promesses électoralistes, elle se mesure aux compétences des candidats et à la rigueur qui les caractérise.

La Ligue des droits de l’Homme, quant à elle, n’a jamais varié : elle combat l’extrême-droite sous toutes ses formes, aujourd’hui comme hier, à Hénin-Beaumont, dans le département, dans la région, comme partout en France. Elle s’est toujours engagée pour le rassemblement des forces démocratiques qui sont prêtes à œuvrer pour la défense des droits de l’Homme et du Citoyen. Elle dit « Non à la haine de l’Autre » !

 Les sept exigences de la LDH  dans sa campagne nationale :

Ma ville, ma vie, je la veux…

fraternelle, solidaire,  juste,  libre,  accueillante, ouverte, démocratique

 Votez le 23 mars

pour barrer la route au FN !

 

 

Contrôle au faciès abusifs pour expulser les étrangers à Montreuil-sous-Bois

Photo Meigneux/Sipa, Métronews, http://www.metronews.fr/info/montreuil-seine-saint-denis-des-controles-abusifs-de-sans-papiers-devant-le-tribunal/mncf!oM7ghH0o69fBU/

L’aire Sarkozy nous avait habitués à des arrestations déloyales de personnes sans-papier à la sortie des restos du cœur, du secours populaire… Valls innove, en allant directement à la source : la police contrôle les personnes autour du tribunal administratif de Montreuil-sous-Bois. Mais pas toutes : uniquement celles qui sont de type africain ou maghrébin. Et qui sont la plupart du temps à cet endroit parce qu’ils ont répondu à une convocation à l’audience qui doit statuer sur leur sort. La police n’attend pas la décision du tribunal : si une obligation de quitter le territoire français est en cours, direction le centre de rétention, y compris si le tribunal doit juger un recours contre cette OQTF. C’est la raison pour laquelle la Ligue des droits de l’Homme a écrit aux deux ministres concernés, la garde des sceaux et le ministre de l’intérieur, pour dénoncer ces pratiques. Cette lettre est cossignée par plusieurs associations : SAF, Syndicat de la magistrature, Avocats pour la Défense des Droits des Etrangers, GISTI, et MRAP.

 Paris, le 4 mars 2014

Madame Christiane TAUBIRA

Garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur Manuel VALLS

Ministre de l’intérieur

Madame la ministre,

Monsieur le ministre,

Depuis plusieurs semaines, des contrôles d’identité, fondés sur des réquisitions du procureur de la République selon les fonctionnaires de police, sont opérés aux abords du tribunal administratif de Montreuil-sous-Bois, à la sortie de la station de métro Robespierre. Ces contrôles ont généralement lieu en matinée, aux heures mêmes où se tiennent les audiences du tribunal administratif. Plusieurs témoins ont en outre constaté que seules les personnes de type africain ou maghrébin étaient la cible de ces contrôles.

Ces faits révèlent de graves dysfonctionnements au regard tant des conditions dans lesquelles les réquisitions du procureur de la République sont délivrées que des conditions dans lesquelles elles sont exécutées.

Sur le premier point, le procureur de la République n’ignore évidemment pas que de nombreuses audiences du tribunal administratif de Montreuil sont dédiées au contentieux des obligations de quitter le territoire français (OQTF). Il va de soi que les audiences sont publiques et il est évidemment fortement conseillé aux requérants d’y être présents si bien que de nombreuses personnes, alors en situation irrégulière, s’y présentent quotidiennement, en empruntant notamment le métro. Or, si elles ont fait l’objet d’une OQTF notifiée depuis plus d’un mois, ces personnes peuvent être retenues pour vérification de situation et faire l’objet d’un placement en rétention alors même qu’elles ont formé un recours sur lequel le tribunal doit précisément statuer. Les contrôles aux abords du tribunal les menacent ainsi directement et ne peuvent que les dissuader de se présenter aux audiences où il est pourtant de leur intérêt légitime d’être entendues. Cette pratique constitue une entrave grave et intolérable à l’accès au juge.

En incluant le tribunal administratif et ses abords immédiats dans le champ de ses réquisitions, le procureur de la République fait donc preuve, à tout le moins, d’un manque de discernement particulièrement fâcheux s’agissant d’une autorité chargée de veiller au respect tant des libertés fondamentales que de la loi pénale.

D’autre part, le comportement des fonctionnaires qui exécutent ces réquisitions est également inacceptable et ce à un double titre :

  • d’abord au regard des principes qui gouvernent les contrôles d’identité, lesquels ne sauraient être sélectifs et ciblés sur la base de l’origine réelle ou supposée des personnes (C. const. 13 août 1993, n° 93-325, C. cass. Civ 1re, 38 mars 2012, n° 11-11099) ; alors que le périmètre défini par les réquisitions leur permettrait de les exécuter en tout autre lieu que les abords du tribunal, le choix de cibler ce lieu révèle la volonté de viser spécifiquement les étrangers en situation irrégulière, comme de nombreux témoins l’ont constaté ;
  • ensuite parce que les interpellations auxquelles les services de police cherchent à procéder par le moyen de ces contrôles d’identité ne sont rendues possibles que par un véritable détournement de l’objet de ces réquisitions : alors même, en effet, qu’elles ne sont délivrées qu’aux fins de recherche et de poursuite d’infractions qu’elles précisent, l’interpellation des étrangers dépourvus d’autorisations de séjour ne tend, en pratique, qu’à permettre la mise en œuvre de procédures administratives d’éloignement.

Il est au demeurant pour le moins surprenant que le Procureur de la République ne soit pas, là encore, plus attentif à l’usage qui est fait de ses réquisitions aux fins de recherche d’infractions pénales. Le laxisme dont il fait preuve à cet égard entretient évidemment le soupçon qu’il n’est pas dupe tant du ciblage que des détournements ainsi opérés, à moins qu’il ne les encourage volontairement.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous vous demandons instamment qu’il soit immédiatement mis fin à de telles pratiques.

Nous souhaitons avoir une réponse rapide à ce courrier que, compte tenu de l’importance des enjeux, nous entendons rendre public et, dans cette attente, nous vous prions de croire, Madame la ministre, Monsieur le ministre, à l’assurance de notre parfaite considération.

Pacte de responsabilité : l’analyse de Pierre Tartakowsky, président de la LDH

Les droits économiques et sociaux font partie des droits fondamentaux, et il est donc normal que la Ligue des droits de l’Homme s’en soucie au même titre que tous les autres droits. La récente annonce par le président de la République de la mise en place d’un « pacte de responsabilité », qui consisterait à apporter une aide substantielle aux entreprises, en échange de… rien, ne pouvait pas laisser de marbre la Ligue des droits de l’Homme. Dans son éditorial du numéro de février de LDH Info, l’organe interne de la Ligue des droits de l’Homme, Pierre Tartakowsky revient sur ce pacte, et en fait une analyse critique. Très critique.

Sincérité, absence cruelle. . .

L’éditorial de Pierre TARTAKOWSKY, président de la LDH

Il revient évidemment d’abord aux partenaires sociaux de s’exprimer sur ce que le président de la République a qualifié de Pacte de responsabilité. Évidemment, dis-je, puisqu’il s’agit d’un projet dont l’entreprise est le prétexte, le cœur et le bénéficiaire. Chacun comprend bien pour autant que le projet impacte la vie de toutes celles et ceux qui travaillent et vivent sur le territoire français ainsi que ce que j’appellerai, pour faire vite et simple, leur qualité de droits. J’entends par là le contenu intrinsèque de ces droits, ainsi que la capacité pour tous d’y avoir accès. Il n’est donc pas totalement illégitime de poser deux questions, au vu de l’information disponible et du jeu des acteurs.

La première porte sur le financement de ce Pacte ; quelque cinquante milliards d’économies vont devoir être réalisées par l’État. Ces économies seront de fait prélevées sur des budgets existants. Ce que l’on prépare à donner à certains, on prévoit donc de l’enlever à d’autres. Au vu des sommes en jeu, ces choix de gestion constituent des enjeux politiques majeurs et il n’est pas certain, c’est une litote, qu’ils relèvent d’un débat public documente et éclaire.

La seconde nous amène à douter du sens des mots. « Pacte » renvoie e un accord entre parties, « responsabilité » indique que ces parties entendent assumer la parole donnée. À entendre Pierre Gattaz, on en est loin, le président du Medef expliquant avec une belle franchise que l’idée même de contreparties a de l’argent public lui était éthiquement insupportable. L’éthique a de ces refuges… Comprenons-nous bien : le Medef, les conseils d’administration des grandes entreprises sont parfaitement libres, si cela leur est insupportable, de refuser l’argent public. De fait, ils le font rarement. En revanche, il semble assez naturel que la collectivité se donne les moyens de faire en sorte que cet argent ne soit pas retourne contre elle. Garant de l’intérêt général, c’est ce que le gouvernement, président de la République en tête puisque c’est le jeu pervers des institutions, devrait défendre bec et ongles.

Mais le pouvoir a-t-il encore un bec, a—t-il encore des ongles ? La sincérité — et c’est la vraie question — est-elle bien au rendez-vous du politique ? Les cyniques souriront du caractère naïf de la question. Ils auront tort, comme toujours. Car sans sincérité, le projet devient un prétexte et l’engagement un calcul, juste avant d’être un recul. La défaite est alors annoncée, toujours présentée comme un moindre mal. Cela vaut face au « monde de la finance », pour citer le discours du Bourget, comme face aux adversaires idéologiques, singulièrement ceux qui s’acharnent contre l’idée même d’égalité, qu’il s’agisse de l’apprendre, voire de la penser.

La situation malsaine que nous affrontons dans les débats publics, et qui va se traduire dans les élections à venir — tant municipales qu’européenne —, participe de cette insupportable anomie de la pensée progressiste, face aux agressions dont elle est la cible. Elle s’alimente du désespoir social, de l’absence d’horizon d’attente politique et du doute sur le bien-fondé des valeurs qui fondent la République. En retour, elle nourrit les stratégies d’opposition des uns contre les autres, qui, hélas, ne viennent pas toutes de droite. Elle provoque les tentations de replis communautaires, vécus comme seuls efficaces. Enfin, elle crée l’illusion que la gravite de la période autoriserait à subordonner les luttes pour les droits, et le progrès social a un engagement plus consensuel contre les manifestations de haine, d’où qu’elles viennent.

Dans ce contexte, le courage et l’intelligence ne consistent pas à adopter les tropismes de l’adversaire, mais à porter son propre projet et ses propres valeurs, celles qui répondent à l’intérêt général. Face à l’adversité, une pensée molle ne conduit qu’a une action molle, autrement dit au statu quo, celui-là même qui se tisse d’injustices et qui nourrit l’abstention, signal de désaveu civique.

Pour sa part, la Ligue des droits de l’Homme entend poursuivre à la fois le débat sur les alternatives immédiates, l’engagement contre les résurgences immondes, le rassemblement pour la justice et l’effectivité des droits. C’est sa sincérité, et elle s’y tient.

 

Les Droits en fête 2ème édition : l’affiche et le flyer

L'affiche de la 2ème édition des Droits en fête

Tyeff n’est pas un inconnu pour la section Loudéac centre Bretagne de la Ligue des droits de l’Homme : pendant la première édition des Droits en fête, à La Motte, fin mars 2013, il avait animé un atelier de dessin pour les enfants et les adolescents.

Il collabore à nouveau avec nous pour la deuxième édition : il a accepté avec enthousiasme de créer l’affiche de l’événement. Le fichier vient de partir à l’imprimerie, et elle sera rapidement affichée dans les commerces, salles de spectacles et autres lieux publics du département. L’affiche a été reprise sur le recto du flyer qui donne le programme de la fête.

Thieff mène depuis plusieurs années une carrière de créateur de bandes dessinées. Il en a plusieurs à son actif (il les présente sur son blog). Une de ses oeuvres, « La mémoire des siècles », a commencé à être publiée sous forme de feuilleton par épisodes de huit pages, dans le mensuel MBD, qui, malheureusement, a dû arrêter sa parution pour des problèmes économiques. Il collabore en ce moment avec un graphiste, Nicolas Lebra, à la réalisation d’un nouvel album, « Nô ». Nicolas Lebra est chargé du scénario et de la couleur, Tyeff du dessin et de l’encrage. Et le projet présente une originalité, que Tyeff explique sur son blog : « Au cours de la conception des designs et premières pages, il nous est vite apparu que cette histoire-là était à préserver, chouchouter, faire vivre différemment. Il sera donc édité sans faire appel à un tiers (éditeur classique), contrairement à mes habitudes passées. Impression et distribution seront de notre responsabilité pour cet album ! Et pour pousser ce concept encore plus loin, le financement participatif nous semble une alternative plus qu’intéressante… » Si vous êtes séduit par cette démarche, rendez-vous sur le site Major company, où elle largement expliquée.

 

L’exposition « Question de genre » réalisée par des lycéens dérange des paroissiens

Des élèves du club Unesco du lycée Roz-Glas de Quimperlé (29) ont réalisé une exposition intitulée « question de genre » : il s’agissait de se mettre dans la peau d’une personne de sexe opposé. C’est ainsi que les garçons ont été photographiés habillés en filles, et les filles en garçons. Photographies réalisées par le portraitiste Christian Scaviner, et accompagnées de textes écrits par les lycéens dans le cadre de ce travail suffisamment remarquable pour être exposé au parlement européen à Bruxelles.

Malheureusement pour lui, ce travail a été aussi remarqué par un éclésiastique, Olivier Manaud, curé de Quimperlé, qui, sans avoir vu l’exposition (il le reconnaît lui-même), a, dans un éditorial publié dans le bulletin paroissial de la ville, invité les paroissiens à manifester leur indignation en écrivant à la Cocopaq, la communauté de communes du pays de Quimperlé, qui a installé l’exposition dans les bibliothèques et médiathèques de son réseau. Indignation basée, on s’en doute, sur les âneries que la frange la plus réactionnaire et conservatrice de l’église catholique débite depuis quelques semaines sur une fumeuse théorie du genre qui n’existe que dans ses fantasmes.  Pour aider ses paroissiens qui pourraient avoir des difficultés de rédaction, le curé leur donne l’exemple d’une lettre type présentée par le site VigiGender, naturellement très proche de la « manif pour tous »… Et une vingtaine de courriers sont ainsi arrivés à la Cocopaq, pour dénoncer la « théorie du genre ».

Faisant preuve d’un courage politique suffisamment rare pour être relevé, les responsables de la Cocopaq n’ont pas souhaité étouffer l’affaire : ils l’ont rendu publique, par un communiqué qui a été publié dans la presse locale. Nicolas Morvan, président de la communauté de commune, déclare ainsi : « Oui la Cocopaq est fière de mener une politique publique pour l’égalité femme-homme. Et non, en aucun cas, elle ne fait la promotion d’une idéologie, ni la promotion de quelconques pratiques sexuelles ! »

Dans l’article consacré à l’affaire par le quotidien Le Télégramme, Annie Sow, conseillère principale d’éducation qui a piloté le projet répond de son côté à ces détracteurs : « Nous avons proposé ce projet dans une démarche citoyenne pour faire réfléchir les jeunes sur les relations filles-garçons. C’était un exercice, pas une question d’idéologie. Et les jeunes sont fiers de leur travail. Aujourd’hui, ils mènent des réflexions très pertinentes sur le sujet ». Christian Scaviner, le photographe,  estime lui « que cette exposition « c’est le fondement de la vie en société, le respect de l’autre et de soi, il n’y a que des belles choses dans cette exposition ». « Questions de genre » continuera donc à être présentée. « S’il faut interdire tous les jeux de rôle dans ces cas-là, on ne peut plus rien faire », déplore Jacques Juloux, le vice-président de la Cocopaq en charge de la culture qui martèle que « les communes et les médiathèques sont libres ».

Les amicales laïques de Quimperlé et Concarneau, et la section Françoise-Bosser de la Ligue des droits de l’Homme ont, elles aussi, réagi, en publiant le communiqué suivant :

« Les Amicales laïques de Quimperlé et Concarneau, la section Françoise Bosser de la Ligue des Droits de l’Homme, se félicitent de la position prise par la Cocopaq face aux courriers demandant la suppression de la remarquable exposition «  Questions de genre » ; exposition réalisée par les élèves du club UNESCO du lycée de Roz Glas dans le cadre d’un projet pédagogique visant à les faire réfléchir sur les relations filles-garçons.

Les continuelles tentatives d’immixtion rétrogrades que subit actuellement le système scolaire de la part, notamment, d’activistes religieux, constituent d’inacceptables atteintes aux libertés de conscience, d’expression et de création. Elles sont évidemment à prendre au sérieux et doivent être à chaque fois combattues énergiquement

Dans la droite ligne des objectifs qui lui sont assignés par le Code de l’Éducation, l’école doit, en effet, pouvoir poursuivre son travail, dans la sérénité, pour la compréhension et l’éducation des rapports entre les hommes et les femmes, entre masculin et féminin (voir les travaux  d’E. Roudinesco sur la « théorie du genre »). Et le chemin est encore long vers l’égalité de droit.

En refusant de céder à la pression, la Cocopaq réaffirme avec force ces objectifs et rappelle simplement que l’égalité se construit, s’apprend… tout comme la démocratie. Qu’elle en soit chaleureusement remerciée. »

Quant au curé de Quimperlé, on ne peut que lui conseiller de retourner s’occuper de musique liturgique, domaine dans lequel il a, semble-t-il, une certaine expertise.

 

 

L’observatoire du droit à la santé des étrangers écrit à la ministre de la santé

L’aide médicale d’Etat est régulièrement la cible d’élus de droite, qui dénoncent le « gaspillage » que représente cette aide qui permet aux étrangers, notamment  demandeurs d’asile, de se soigner. Une attaque en règle, souvent basée sur des chiffres fantaisistes et des mensonges éhontés. Et surtout une attaque stupide et dangereuse : l’aide médicale d’Etat permet de contenir certaines épidémies, et d’éviter l’apparition de souches résistantes dans certaines maladies telles que la tuberculose. Ne pas soigner ces malades serait prendre un risque énorme. Il s’agit d’un problème de santé publique.

L’observatoire du droit à la santé des étrangers est un collectif d’associations (on peut en consulter la liste sur son site), qui entendent dénoncer les difficultés rencontrées par les étrangers dans les domaines de l’accès aux soins et du droit au séjour pour raison médicale. Le collectif entend porter des revendications communes.

Il s’adresse aujourd’hui à Mme Marisol Touraine, ministre de la santé, pour manifester son inquiétude devant une pratique totalement illégale mise en œuvre en Seine-Saint-Denis (93) par la caisse primaire d’assurance maladie : consigne a été donnée de « ne pas traiter les demandes d’aide médicale d’Etat (AME) déposées et non encore instruites au 6 décembre 2013. Un moyen pour la caisse primaire de résorber le retard pris dans l’examen des dossiers en raison de la surcharge de travail devant à laquelle elle doit faire face. Une pratique inquiétante, illégale, et qu’il pourrait être tentant de généraliser si on ne la dénonce pas rapidement.

Voici le texte de lettre de l’observatoire.

ODSE – Observatoire du droit à la santé des étrangers

Madame la Ministre,

Nos associations ont constaté une situation inquiétante à laquelle il parait urgent de remédier. En effet, nous avons eu confirmation orale qu’une note interne de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) de Seine Saint Denis (93) demande à ses services de ne pas traiter les demandes d’aide médicale État (AME) déposées et non encore instruites au 6 décembre 2013. En refusant d’examiner les demandes des usagers, qui ne sont ni informés ni mis en position d’exercer des recours, la CPAM de Seine Saint Denis démissionne purement et simplement de son obligation de service public, empêchant les personnes de se soigner, ou les laissant endettées à vie face à des factures hospitalières. Une telle décision aboutit à un déni de droit inacceptable frappant les personnes les plus précaires sur le plan social et administratif. Elle constitue en outre une discrimination grossière, viole le principe d’égalité devant le service public et porte atteinte aux normes garantissant le droit fondamental à la santé :

  • La technique du « déstockage des dossiers », par destruction ou archivage en bloc des demandes en cours, est illégale. L’argutie, consistant à considérer que l’administration a « le droit » de rejeter implicitement toute demande des usagers, est un contre-sens juridique qui retourne contre les citoyens les garanties acquises par les lois successives organisant les relations avec l’administration. [1]
  • Nous sommes inquiets du risque de pérennisation d’une telle pratique, comme mode de gestion de la charge de travail des Caisses, sur le dos des usagers les plus faibles.
  • Cette mesure nuit à l’intérêt général en portant atteinte à la santé publique et à l’accès aux droits de chacun : aujourd’hui la Cpam refuse arbitrairement de traiter les demandes d’AME ? Mais combien de temps avant que cette pratique ne se généralise à l’ensemble des usagers ?

Face à l’urgence de la situation, il appartient à l’État qui est en charge du dispositif AME, d’exercer son pouvoir de contrôle sur la Caisse à qui il en a délégué la gestion. Il vous appartient en tant que Ministre de la santé de faire respecter les principes élémentaires de fonctionnement des services de santé et de protection maladie dans l’intérêt des personnes concernées et de l’ensemble des assurés.

Certains de l’attention que vous porterez à notre interpellation, nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre haute considération.

Vendredi 21 février 2014

L’ODSE

[1] Principalement la loi DCRA (Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations) et ses décrets d’application.

Vous pouvez retrouver ce communiqué sur le site

www.odse.eu.org

 

Trégunc : « La violence des riches », samedi 22 février au Stérenn, à Trégunc (29)

« Qu’est-ce que la violence? Pas seulement celle des coups de poing ou des coups de couteau, des agressions physiques directes, mais aussi celle qui se traduit par la pauvreté des uns et la richesse des autres. Qui permet la distribution des dividendes en même temps que le licenciement de ceux qui les ont produits. Qui autorise les rémunérations pharaoniques en millions d’euros et des revalorisations du SMIC qui se comptent en centimes…

L’accaparement d’une grande partie des richesses produites par le travail dans l’économie réelle, est organisé dans les circuits mafieux de la finance gangrenée. Les riches sont les commanditaires et les bénéficiaires de cette violence aux apparences savantes et impénétrables, qui confisque les fruits du travail… »

Voilà ce que démontrent Monique et Michel Pinçon-Charlot, dans leur dernier ouvrage La violence des riches.

Venez nombreux en débattre le 22 février à Trégunc (Finistère)- MJC Le Sterenn- 20H.

Cette soirée sera précédée d’un colloque animé par le Café économique de Pont-Aven sur « Capitalisme et démocratie », à partir de 14H.